
de 1 air froid et humide sur ces plaies, l’irritation déterminée par la présence de
corps étrangers, et le reflux de matières purulentes, causes ordinaires du tétanos,
sur-tout dans les climats chauds. •
On pourra parvenir à ce b u t, en tenant le blessé dans une température assez
chaude et toujours égale autant que possible, en ayant le soin d’extraire promptement
tous les corps étrangers, de panser la plaie avec douceur, de la couvrir
immédiatement de linge fin fenêtré, et de ne panser les plaies récentes que lorsque
la suppuration est bien établie; enfin on lait observer au malade le régime et le
plus grand repos. Lorsque le tétanos est causé par le reflux de matières purulentes,
les vésicatoires appliqués le plus près possible de la plaie, ou sur la plaie
même, rappellent la suppuration et font cesser les effets du tétanos. Je vais citer
quelques exemples de ce succès.
Bonnet (Pierre), de la 85.' demi-brigade, âgé de vingt ans, d’un tempérament
bilieux et irritable, languissoit dans les hôpitaux du Kaire depuis la campagne de
Syrie, pour un ulcère fistuleux, avec carie des os qui forment l’articulation du pied
droit avec la jambe. Il fut décidé dans une conférence clinique, que, vu la désorganisation
du pied et l’état de marasme auquel étoit réduit ce militaire, l’amputation
étoit le seul moyen de lui sauver la vie ; elle fut faite le cinquième jour
complémentaire [22 septembre] par M. Valet, chirurgien de première classe,
chargé particulièrement de ce blessé.
Le succès de l’opération ne fut dérangé par aucun accident ; la suppuration
s’établit à l'époque ordinaire, la plaie devint belle. Dix jours après, la cicatrice
commença à se former dans la circonférence de la plaie, et s’étendit graduellement
vers le centre.
Au moment où le blessé touchoit à sa guérison, c’étoit le vingt-quatrième jour
de l’opération, il fût frappé tout-à-coup des symptômes du tétanos, que détermina
sans doute le reflux des matières purulentes qui suintoient encore de la
plaie.
La transpiration s’étoit également supprimée par l’imprudence qu’eut le malade
de se promener pendant la nuit. Les diaphorétiques, les opiacées à forte dose et
les frictions sèches sur toute l’habitude du corps, furent mis en usage d’après mon
conseil ; néanmoins les accidens marchèrent avec la célérité accoutumée.
Le blessé éprouvait des douleurs inouies dans l’épigastre, des tiraillemens insupportables
dans le membre amputé ; la respiration étoit laborieuse, la déglutition
difficile, les mâchoires serrées, la. tête fléchie sur la poitrine, le tronc courbé, et
l’emprosthptonos étoit à son plus haut degré.
Les opiacées ne pouvant plus passer, on donna au malade, à la faveur d’une
échancrure que laissoit la perte de deux dents incisives, les émulsions anodines et
antispasmodiques, qui calmèrent d’abord les douleurs d’estomac. Un large vésica-
toire appliqué sur toute la circonférence du moignon ramena dans les vingt-
quatre heures la suppuration, et détermina une éruption milliaire, qui se forma
à la face et à la poitrine. Dès ce moment, le malade fut beaucoup mieux; tous
les accidens du tétanos diminuèrent par degrés, les fonctions se rétablirent, et,
le cinquantième jour de l’opération, ce militaire sortir de l’hôpital, parfaitement
guéri,
Grangié (Pierre), carabinier dans la 21,' demi-brigade d’infanterie légère, reçut
au siège du Kaire un boulet au bras, qui nécessita l’amputation sur-le-champ. Rien
ne dérangea le travail de la nature pendant les premiers jours ; la suppuration
s’étoit établie et la plaie étoit en fort bon état, lorsque, le neuvième jour de l’opération,
après s’être exposé à l’air humide de la nuit, ce blessé fut pris de tous les
symptômes du tétanos. M. Lachôme, chirurgien de deuxième classe, chargé du
traitement de ce blessé, ayant reconnu que le reflux de la matière purulente étoit
la principale cause du tétanos, se hâta d’appliquer sur la plaie , d’après l’exemple
d’un premier succès que j’avois eu dans un cas semblable à celui de cette seconde
observation , les mouches cantharides mêlées au basilicon. Le malade fut mis à
l’usage d’une tisane diaphorétique, et on lui fit prendre une forte dose d’opium
et de camphre dissous dans un verre d’émulsion. Les accidens se soutinrent encore
pendant vingt-quatre heures : cependant les vésicatoires ramenèrent la suppuration
; la transpiration cutanée se rétablit, les mâchoires se relâchèrent, le danger
disparut totalement, et le malade fut conduit à la guérison par la continuation
des moyens indiqués.
Le succès aussi inattendu que complet, obtenu de l’amputation du membre
blessé, dans la personne d’un officier attaqué d’un tétanos chronique, me porte
à mettre en question si, dans cette maladie déterminée par une blessure qui lèse,
une partie des extrémités, il ne vaudroit pas mieux emporter le membre blessé,
par l’amputation, au moment où les accidens du tétanos se déclarent, que d’attendre
des ressources de la nature et de remèdes très-incertains la guérison qui
a lieu si rarement.
Si le tétanos est chronique, comme cela se remarque quelquefois, l’amputation
peut être faite dans tous les temps de la maladie, pourvu que l’on choisisse
le moment d’intermission que laissent les accidens. Elle ne réussiroit pas également
dans le tétanos aigu, s’il étoit avancé et que les muscles du membre qu’on
doit couper fussent fortement contractés et roides, comme je l’ai observé, au siège
d’Acre, chez un militaire attaqué du tétanos par suite d’un coup de feu qu’il avoit
* reçu à l’articulation du coude gauche.
Lorsque je vis le blessé qui fait le sujet de cette dernière observation, les
accidens étoient déjà avancés ; cependant je fis tenter l’amputation du bras : elle
fut suivie d’un calme assez grand pour me donner quelque espérance de succès ;
mais, n’ayant pu garantir le malade de la fraîcheur des nuits, et le tétanos étant
trop avancé et très - aigu, les accidens se renouvelèrent peu d’heures après, et le
malade mourut le troisième jour de l’opération.
Qu’il me soit permis, sans prétendre résoudre la question importante que je
viens de présenter, d’essayer de produire quelques raisons qui me paroissent militer
en faveur de l’amputation.
Lorsqu’il est bien reconnu que le tétanos est déterminé par la blessure, il ne faut
pas hésiter de faire l’amputation dès l’apparition des accidens. On peut s’assurer