
 
        
         
		familier,  occupé,  embarraffé , qui a beaucoup d affaires. 
  I l   ejl toujours affairé. 
 *  AFFAISSAGE  ou  Affaitage ,  f. m. {terme  de  
 Fauconnerie.')  c’eft le foin que l’on prend de  l’oifeau  
 pour le  rendre  de bonne  affaire,  c’eft-à-dire, pour  
 l’apprivoifer, le dreffer. 
 *  AFFAISSER,  ( terme  £  Architecture. )  Un  batiment  
 s'affaiffe , lorfque manquait par les fondemens  
 il  s’abaiffe par fon propre poids ;  un mur  s'affaifft,  
 lorfqu’il fort d’à-plomb ; un plancher s'affaifft y quand  
 il perd fon  niveau, foit  par une trop grande charge  
 ou autrement. 
 *  AFFAITER, v . a. (terme de Fauconnerie.) lignifie  
 la même chofe qu'affaiffer. V>yt£  te mot dans le Dict.  
 des  Science s, &c. 
 Affaiter, (terme de Tanneur.) Affaiter des peaux,  
 c’eft les  façonner  à la tannerie. 
 Affaiter ,   (   terme  £  Architecture.  )   Affaiter  un  
 bâtiment, c’eft en réparer le  faîte. 
 AFFALÉ , adj. &  part. paf. (Marine.)  Voy.  Affaler  
 ,  qui fuit. 
 § AFFALER, v . a. (termede Marine.)c’eft pefer ou  
 généralement faire effort fur une chofe pour vaincre  
 le  frottement qui  la  retient.  C’eft  en  ce  fens que fe  
 fervant  de  ce verbe  à  l’impératif on dit :  affale  telle  
 manoeuvre. 
 On eft prefque toujours obligé £  affaler Xts  cargue-.  
 fonds des voiles, lorfqu’elles font carguées, &  qu’on  
 veut  les  orienter  ;  parce  que  le  poids  de  la  voile  
 n’eft pas fuffifant pour vaincre la réfiftance qu’éprou-  
 vènt  ces  cargue-fonds  à  gliffer  dans  leurs  poulies,  
 &  dans le  frottement  des différentes chofes  qu’elles  
 rencontrent  &   qu’elles  touchent.  Pour  les  affaler,  
 il  faut donc que des matelots paffent fur les  vergues  
 ou  aux  endroits  convenables, &  faffent effort  avec  
 les  mains  fur  ces  manoeuvres,  afin  de  les  obliger  
 de  céder.  On  affale  de  même  ,  &   pour  les  mêmes  
 raifons  les  caliornes ,  &c.  &   généralement  tout  ce.  
 qui eft  retenu par  le  frottement qu’il  a  à vaincre. 
 On dit d’un matelot qui,  au lieu de pefer  fur une  
 manoeuvre  avec les  feules  mains  pour  Vaffaler,  la  
 faifit  &  fé  laiffe  defeendre  avec  elle  ,  qu’il  s'affale  
 avec cette manoeuvre, &  par extenfion  ; on dit  aufli  
 qu’il  s'affale  le  long  d’une  manoeuvre  ,  lorfqu’il  fe  
 laiffe gliffer  le  long  d’une manoeuvre  fixe. 
 Affaler  ( s ’ ) , V. a.  (terme de Marine.)  c’eft s’approcher  
 trop  d’une  cô te,  dont  on  court  rifque  de  
 ne pouvoir enfuite s’éloigner. Ce vaiffeau va s'affaler,  
 s’il  continue  à  courir  encore quelque  tems  comme  
 1 fait. J’avois  bien prévu  que  ce vaiffeau  alloit être  
 affalé. 
 Être  affalé,  eft une  fituation dangereufe  ou tout  
 au moins  fort inquiétante  ; &  que conféquemment il  
 faut avoir  le plus grand foin de juger &  de  prévenir.  
 On  peut  donner  comme  une  réglé  générale  de  ne  
 jamais  s’approcher  d’une  côte  s’il  n’y   a  de  l’utilité  à le  faire,  &   encore  doit-on  combiner  l’avantage  
 fur  le  tems &   fur  les  rifques. La force du vent, ou  
 celle  des  courans  ou  même  le  calme  ,  font  affaler  
 un vaiffeau malgré  lui : alors  on doit  avoir  recours  
 à  ce  que  l’expérience  &   les  connoiffances  doivent  
 avoir  appris. ; &  employer  les manoeuvres  qu’elles  
 dictent pour fe tirer de cette pofition. Les ancres font  
 une  reffource  ,  fur-tout  quand  ce  n’eft  point  un  
 coup  de vent qui charge  ainfi  en côte : en mouillant  
 on  peut  attendre  que  le  tems  change  &   permette  
 de  s’éloigner.  C ’eft-là  cependant  le  dernier  moyen  
 à  employer ;  &   on  n’en  doit  faire  ufage  qu’au  cas  
 feulement où toute autre manoeuvre feroit inutile, &   
 qu’en reftant  fous voile  on s’approcheroit  toujours  
 de  la  côte  :  car mouiller,  n’apporte point un changement  
 réel  à  la fituation  du  vaiffeau. 
 11  femble  qu'être  affalé  s’emploie  plus  particuliérement  
 pour défigner que  c’eft: le vent qui charge 
 en  côte :  lorfque le vaiffeau y  eft porté par les cou-  
 rans  ou  par  le  calme,  on  emploie  plus  ordinairement  
 d’autres  termes  :  on  dit  être  porté  à  terre ;  
 être  jetté  ;  être  droffé ;  terme«  tou s,  à  la  vérité ,  
 fynonymes. 
 Des  vaifl'eaux  affalés  ont  quelquefois  été forcés  
 de  fe  jetter  à  la  côte ,  choififfant  un  endroit  commode  
 ,  d’où l’équipage pût  gagner la terre.  On fent  
 bien qu’un  parti pareil ne peut être  autorifé que par  
 l’impoflibilité  totale  de  fe  relever  ;  &  la  certitude  
 de  périr corps &   biens,  fi l’on s’échouoit dans  tout  
 autre inftant (M . le Chevalier DE LA  Co u d r a y e .) 
 *  AFFAMÉ , ÉE ,  adj. &  part, paflif;  ( Gramm. )   
 preffé par la faim. Un loup affamé. Prov. ventre affamé  
 n'a point  d'oreilles  ;  c’eft-à-dire  celui que  la  faim  
 preffe  n’écoute  guere  ce  qu’ on  lui dit :  l’éloquence  
 a  peu  de  force  pour  appaifer  les  murmures  d’un  
 peuple  qui fouffre  de  la  famine. 
 * AFFAMER,  v. a. faire l'ouffrir la faim, en ôtant  
 ou  coupant  les  vivres.  On  affame une  province par  
 l’exportation  des bleds ;  on affame une  armée en lui  
 coupant  les  vivres. 
 AFFECTATION,  f. f.  (Belles-Lettres.)  maniéré  
 trop  étudiée  ,  trop-recherchée  de  s’exprimer. 
 L’affectation eft  dans la penfée,  dans l’expreflion,’  
 dans  le  choix  des mots,  des  tours,  ou  des images.  
 Quand on a l’idée de l'affectation dans la contenance ,   
 dans  la  démarche,  dans  la  parure,  on a l’idée  de  
 l’affectation  dans le  ftyle. 
 L'affectation  eft  quelquefois  jufques  dans  le  foin  
 trop marqué d’être naturel,  dans la familiarité, dans  
 la  négligence. 
 L'affectation de  Pline ,  de Voiture , de Balzac,  de  
 le Maitre, de Fontenelle, de la M otte, de Marivaux,  
 n’eft  pas  la  même. 
 Voiture,  en  parlant  d’une expreflion  recherchée  
 de Pline  le  jeune ,  « ne  m’avouerez-vous pas,  dit-  
 » il  ,  que  cela  eft  d’un  petit  efprit,  de  refufer  un  
 » mot qui  fe  préfente,  &  qui eft le meilleur, pour  
 » en  aller chercher  ,  avec  loin ,   un moins  b on ,  6c  
 » plus éloigné ? 
 Cette critique femble annoncer l’homme du monde  
 le  plus  naturel  dans  fa  façon  de  penfer  &  d’écrire.  
 C ’eft  pourtant  ce  même  Voiture  q u i,  écrivant  à  
 mademoifelle  Paulet,  qu’il  s’eft  'embarqué  fur  un  
 navire  chargé  de  fucre,  lui  dit que  s’il vient à bon  
 port  il  arrivera  confit,  &   que  fi  d’aventure  il  fait  
 naufrage, il  aura du moins  la confolation de mourir  
 en eau douce.  Le  maréchal  de  Vivonne  difoit  à  fon  
 cheval, au paffage du Rhin, Jean le  Blanc,  ne fouf*  
 frez  pas  qu’un  général  des  Galeres  foit  noyé  dans  
 l’eau  douce ;  mai?  ceci  eft de  meilleur goût. 
 C’eft  ce  même  Voiture  qui écrit  à  une femme,'  
 je  crois que vous favez  la fource  du  Nil ; 6* celle £oit  
 vous tirez  toutes les chofes que vous  dites,  eft beaucoup  
 plus  cachée & plus inconnue. 
 C ’eft lui  qui  dit  de  Balzac, il a  inventé un potage  
 que j'tjlime plus que le panégyrique de  Pline,  &  que la  
 plus longue harangue d'Ifocrate. 
 C ’eft lui  qui, félicitant Godeau des fleurs qui naif-  
 fent  dans  fon efprit,  lui  dit qu’il  en  a  reçu un bouquet  
 fur des  bords  ou  il ne  croît pas  un  brin  d'herbe.  
 Et  il  ajoute  :  P Afrique ne  nia  rien fait voir  de plus  
 nouveau  que  vos  ouvrages :  en les  lifant a  L'ombre  de  
 fes palmes, je  vous les ai toutes fouhaitées ; & en même  
 tems que je  me  confidérois "avoir été plus  avant qu Hercule  
 , je  me fuis vu bien loin derrière vous. 
 C’eft  ce  même  Voiture  qui  écrivoit  à  Coftard,  
 qu’il  vouloit s’abftenir de  recevoir  de  fes lettres,  à  
 caufe  qu’on étoit en carême,  &  que, pour un tems  
 de  pénitence ,  d étaient  de  trop  grands feflins.  Pour  
 vous,  vous pouve^  fans fcrupule recevoir ce que je  vous  
 envoie,  ajoutoit-t-il,  a peine  ai-je de quoi  vous faire  
 une  légère  cotation.....  Je  ne  vous  fervirai  que  des 
 légumes ;  &   dans  le même  fens  figuré ,  vous faites  
 des fauces  avec  lefquelles on mangtroit  des cailloux. 
 Comment  le même  homme  qui,  dans  fon  fty le ,  
 emploie  des  tours  fi  recherchés,  des  jeux de mots  
 fi étudiés,  des rapports fi finguliers &   fi  faux  entre  
 les  idées  ,  en un  mot  une  plaifanterie  fi peu  naturelle  
 6c  fi  froide  ,  comment  p eu t - il  être  bleffé  
 de  l'affectation  de  Pline  le  jeune  ,  mille  fois moins  
 affe&é que lui ? en voici la  raifon. 
 L’affectation  de Voiture  n’étoit  pas  celle  qu’il reprochoit  
 à  Pline.  Il né  voyoit dans  celui-ci que  la  
 recherche de l’expreflion,  fans même être  bleffé du  
 tour  antithétique  &   artificiellement  compaffé  que  
 Pline  avoit  dans  fon  éloquence.  Mais  fi Pline avoit  
 lu  Voiture  ,  il  eût été  bleffé  de même  du  rapport  
 forcé  des idées  &„des  images qu’il emploie , &  fur-  
 tout de  la  peine  qu’il  fe  donne,  pour  traiter  familièrement  
 les grands fujets, &  plaifamment les chofes  
 les plus graves, 
 Balzac ,  dont Vaffectation  eft encore  d’une  autre  
 forte,  car elle confifte  dans  la  recherche d’un  ftyle  
 périodique 6c foutenu avec dignité, o u , comme il l’a  
 dit de  lui-même ,  dans une gravité tendue & compofée,  
 o u ,  comme  Boileau  en  a  ju g é,  à  ne f  avoir  dire  
 fimplement  les chofes, ni defeendre de fa hauteur; Balzac  
 ne  laiffe  pas  de  donner  aufli  quelquefois  dans  le  
 faux bel  efprit  de Voiture. 
 Il écrit  à  un  homme  affligé ,  votre  éloquence  rend  
 votre douleur vraiment  contugieufe ; & quelle glace ,  je   
 ne dis pas de Lorraine,  mais de. Norvège & de Mof co-  
 vie ,  ne f  endroit à la chaleur de vos belles larmes ?  Cë  
 n’eft'point-là  de  la  froide  plaifanterie  comme  dans  
 Voiture ,  mais un férieux du plus mauvais goût. 
 Lorfque Balzac veut être plaifant, il eft encore plus  
 forcé que Voiture. Il écrit à madame  de Rambouillet  
 qui lui a  envoyé  des  gants  «  quoique  la grêle  &   la  
 » gelée  aient vendangé nos vignes  au mois de mai ; 
 » quoique les  bleds  n’aient  pas  tenu  ce  qu’ils  pro-  
 » mettoient,  &  que  la belle efpérance  des moiffons  
 »  fe  trouve  fauffe dans la  récolte  ; quoique les ave-  
 >> nues  de  l’ëpargne^fe  foient  rendues  extrêmement  
 » difficiles,  &c.  toiis  ces malheurs  ne me touchent  
 » point ;  6c  vous  êtes  caufe  que je ne me  plains,  ni  
 » de l’inclémence du ciel, ni de la ftérilité de la terre, 
 » ni de l’avarice de l’état. Par votre m oyen, madame, 
 » jamais  année  ne me  fut meilleure ,  ni  plus  heu-  
 » reufe que celle-ci. »  C ’eft dire avec bien  de  l’em-  
 phafe  qu’on  eft  flatté d’avoir  reçu  des  gants ;  &   il  
 faut  avouer que le ftyle  de Charleval,  d’Hamilton,  
 de M. de Voltaire, dans le  genre léger, eft de meilleur  
 goût que tout cela. 
 Le faux  bel  efprit  n’étôit  naturel  ni  à Balzac ni à  
 Voiture. Balzac en prenoit le ton par  complaifance,  
 Voiture  par  contagion,  par  vanité,  par  habitude.  
 L ’hôtel  de Rambpuillet  l’avoit  gâté.  On dit  qu’une  
 lettre leur  çoûtoit  fouvent  quinze  jours de  travail ;  
 ils  auroient  mieux  fait  en  un  quart-d’heure ,  s’ils  
 avoient bien  voulu, s’abandonner  à  leur  génie. 
 Balzac, ftoïcien par humeur 6c par principes, avoit  
 de l’élévation dans  l’efprit 6c dans  l’ame. On trouve  
 dans fes lettres des mots  dignes de Montagne. 
 V jus m'avouerez,  dit-il  à madame des Loges,  que  
 tabfence  qui fépare  ceux  qui  vivent  de  ceux  qui  ne  
 vivent plus ,  eft trop  courte  pour  mériter  une  longue  
 plainte. 
 Cela  peut être  mis  à  côté  de  ce  grand mot  cité  
 par lui-même :  i l n y  a que la première mort,  non plus  !  
 que la première  nuit,  qui  ait mérité de létonnement &  
 de la  trifleffe. 
 Il  ne manquoit  à  Voiture  qu’une  fociété  moins  
 eâtee du côté du goût,  pour faire de lui un  excellent  
 écrivain. Voyez  fa  lettre fur  la prife  de Corbie,  où  
 d’un  ftyle  véhément  6c fimple ,  en  donnant  au  cardinal  
 de Richelieu de grandes louanges,  il lui donne 
 encore  de  plus grandes  leçons.  Quelle  diffance  de  
 cette  lettre  à ce  qu’on  admirait de lui dans le cercle  
 de  Rambouillet ! 
 C eil le  mauvais  goût  de  ce tems-là  que Moliere  
 a  tourné  en ridicule  dam  les  Pricuufcs &   dans  les  
 Femmes  Savantes,  &  dont  -il  a  dit  dans  le  Mifan-  
 trope:  J 
 Ce  n’efi que jeu x  de  mots,  qu'affeélation pure;  
 E t ce n efi point ainfi que parle la nature. 
 .   -------------------—  c . . i V u » ,x a v u t . (u icm d n r e 
 OC des  orateurs  de  fon tems,  confiftoit à aller chercher  
 ,  le plus  loin  qu’il  étoit poflible  de  leur furet,  
 desfigures  &   des  exemples.  Le  Maitre ,  dans  fon  
 plaidoyer, pour une fille défiavouée,  dit que fon pere  
 a ete pour  elle un ciel £  airain ,  & fa  mere une terre de  
 fer. Prendra-1-on,  dit-il  encore ,  en  parlant  de  la  
 jaloüfie  du  pere ,  pour  un  afire  du  ciel  cette fuhefle  
 comete de Pair, f i  féconde  en maux & en défiordres? Il  
 dit, en parlant des larmes que la mere làifla échapper  
 en defavouant fa fille,  cette partie f i  tendre ( le coeur )  
 étant Jleffee,  pouffe  des  larmes  comme  le fang  de fa   
 plaie.  Il  dit de  la  jeune fille ,  que  le foleil de-la providence  
 s efi lève fu r   elle  ;  que fes  rayons,  qûi font  
 comme  les  mains  de D ieu ,  l'ont  conduite ;  il  d it ,  à  
 propos des moyens qu’avoit employés un clerc pour  
 féduire  une  fer vante,  qui ne fait  que l'amour  efi  le  
 pere  des  inventions ;  qu'il  anime  dans  L'Iliade  toutes  
 les délions merveilleufes dés héros; que Sapho l'appelloit  
 le grand architecte des paroles,  &  le premier maître de  
 rhétorique;  qu'Agathon  le furnommoit  le plus f  avant  
 des dieux, & foutenoit qu'il nétoit pas feulement poète ,  
 mais  qu'il  rendoit  les  amoureux  capables  de faire  des  
 vers  ;  que  Platon  .a  remarqué qu'Apollon  n'a montré  
 aux hommes à  tirer  de l'arc qu'à  caufe q£il étoit bleffé  
 de làjleçhe de P amour, ni enfeigné la médecine qu!étant  
 agité de cette viofente maladie,  ni inventé là  divination  
 que  dans P excès du même tranfport ? (Voy. Barreau  
 Suppl.) 
 XJ affectation de Marivaux ne reffemble ni à celle de  
 Pline ,*,ni à c e l le  de Voiture, ni à celle de Balzac  ni à  
 celle de le Maitre. Elle confifte, du côté de la penfée,  
 dans des efforts continuels de difeernementpourfaifir  
 des traits fugitifs ,  ou des A n g u la r ité s   imperceptibles  
 de  la nature  ;  & ' du  côté  de  l’expreflîon ,  dans  une  
 attention  curieufe  à  donner  aux  termes  les  plus  
 communs  une  place  nouvelle  &  un  fens  imprévu ,  
 fouvent  aufli  dans  une  continuité  de  métaphores  
 familières  &   recherchées  oîi  tout  eft  perfônnifié,,  
 jufqu’à  un oui qui a  la pkyfionomie  d’uri  non.  C ’eft  
 un  abus  continuel  dé  la  fineffe  &  de  là fagacité  de  
 l’efprit. 
 On a été trop févere lorfqu’on a dit de Marivaux,  
 qu’i/  s'occupait  à  pefer des  riens dans  des b'alàhçes de  
 toile d’araignée; mais lorfqu’on.a dit de liii qu'enobfer-  
 vùnt la nature  avec  un microfcope ,  ilfaîfoit voir dès  
 écailles fur la  peau ,  on  n’a  dit que  la vérité,  &  on  
 l’a  dite  de  la maniéré  la'plus ingénieufe.  Pour bien  
 peindre  la nature aux  yeux des  autres  ,  il faut ne la  
 voir  qu’avec  fes yeux ,  ni de  trop  p rès, ni de  trop  
 loin, C ’eft avoir beaucoup d’efprit, fans doute,  que  
 d’en  avoir  trop  ,  mais  c’eft n’en pas  avoir  affez. 
 XJaffectation de  Fontenelle ,  là plus  féduifante  de  
 toutes ,  confifte à rechercher  des  tours  ingénieux  6c  
 finguliers,  qui donnent à la penfée un air de fauffeté,  
 afin qu’elle  ait  plus  de  fineffe.  Ce mot  de  lui,  pour  
 exprimer  la  reffemblance  du  portrait ~d?un  homme  
 taciturne ,  on  diroit qu'il fe tait,  6c Cèlui-ci a u  cardinal  
 Dubois  :  vous avez  travaillé  dix  ans  à  vous  
 rendre  inutile  ; &   celui-ci,  en  louant  la  Fontaine,  
 i l  étoit f i   bête  qu'il  ne f  avoit pas  qu'il  valoit  mieux  
 qu'Efope  &  Phedre,  font fentir  ce que jé veux dire.  
 Le  mot de  Charillus  à  un  Ilote, f i  je   n'étois pas en