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Artàxerxe menaçoitla G tece, & c’étoitfur Sparte
qu’il de voit frapper les .premiers coups. Agéjîlas re-
çréfenta qu’il feroit plus avantageux de .porter la
guerre en Afie que de-la foutenir en Europe. Il fut
■ chargé de cette expéditon, ôc il arriva dans des
.provinces -de la Perfe avant qu’on foupçonnât ’
qu’il eût quitté la -Grece. Quoiqu’il n’eût qu’une
■ très-foible armée , il dicta des loix à Tifapherne qui
confentit à laiffer la liberté, à toutes les villes grecques
de 4’Ailé , à condition qu’il n’exerceroit aucune
hoftilité dans -fe province. Ce n’étoit que pour
Te préparer à la guerre que Tifapherne faifôit un
£ grand facrifice. Dès qu’il eut raffemblé fés forces
il prit le ton de vainqueur, & fit dire à Agé-
Jilas qu’il eut à s’éloigner de l’Afie , s’il ne vouloit
.pas éprouver fes vengeances. Le Spartiate indigné
4e cette .pe-rfîdig, fit femblant de tourner fes armes
■ contre ia Cane où le fatrape avoit d e -, grandes
.poffeffions. Thifapherne pour les conferver , ' y
-porta toutes fes forces ; alors Agéjîlas fe jetta dans
laPhrygie, qu’il trouva fans défenfeurs. Il y fit un
Lutin immenfe qu’il abandonna à fon armée. S’étant
-retiré à Ephefe , il inftitua des j e u x & propofa
des prix pour animer l’émulation du foldat & pour
entretenir la difeipline militaire.
Agéjîlas qui -avoit trompé le-fatrape par un faux
bruit, le trompa par une vérité la campagne fui-
vante. Il fit publier qu’il marchoit en Lidie, &
comme il déclaroit hautement fon deffein , on crut
qu’il en vouloit réellement à la Carie. Tifapherne
y envoya l’élite de fes troupes , & Agéjîlas profita
de fon erreur pour marçher à Sardes dont.il forma
le fiege. Tifapherne tente de délivrer cette place,
al engage un combat où il eft vaincu. Ce latrape
malheureux fut traité en coupable. Il fut arrêté
dans le bain, on lui coupa la tête qui fut envoyée
à la cour de Perfe. Son fucceffeur fit des propos
io n s de paix , mais Agéjîlas répondit qu’il ne pourvoit
rien conclure fans y être autorifé par un ordre
de Sparte. Il fortit de l’Afie mineure pour fe jetter
dans la Phrygie , où il fe rendit maître de plufieurs
villes. Mais tandis qu’il étendôit fes conquêtes,
Sparte fut attaquée par Thebes, Argos & Corinthe.
Agéjîlas rappellé au fecours de fa patrie, fe plaignit
d’être arraché de l’Afie par trente mille archers,
faifant allufion aux dariques, pièces d’or où la figure
d’un archer étoit repréfentée , & qu’on avoit
employées à corrompre les Grecs : mais il crut que
l ’obéilfance aux ordres de la patrie lui feroit plus
glorieufe que la -conquête de toute l’Afie. Il ufa
de tant de célérité qu’il traverfa en trente jours l’étendue
de pays que Xerxès avoit été un an à parcourir.
Les Athéniens joints aux Béotiens oferent l’attaquer
dans fa marche, ils en vinrent aux mains dans les
plaines de Coronée. Il en fit un horrible carnage.
Ceux qui furvécurent à cette défaite , fe réfugièrent
dans un temple de Minerve ; & quoiqu’une bleffure
reçue dans le combat dût lui infpirer du reffenti-
mens, il défendit de Touiller le fanriuaire de la divinité
, & cet afyle fauva la vie à une multitude
d’infortunés. Il fut chargé de marcher contre les
Corinthiens, & les ayant vaincus , il lui étoit facile
de fe rendre maître de leur ville ; mais attendri
fur le fort de la Grece déchirée par fes propres en-
fans , il dit à ceux qui lui propofoient de détruire
cette v ille , qu’il vouloit lailfer aux habitans le tems
du repentir, & qu’il lui feroit honteux de priver
la Grece de fes remparts, en détruifant les villes
qui fervoient de barrières aux barbares. Il ne fe
trouva point à la bataille de Leurires qui éclipfa pour
jamais la fplendeur de fa patrie. Il lembla qu’il en
préfageoit le funefte événement. L ’armée viriorieufe
le prefenta devant Sparte fans murailles , mais Agéjîla
s fut fon rempart. Le$ riçheffes qu’il avoit enle-
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vëe's de la Perfe , avoientété verfées dans le tréfor
public, & il s’étoit fait un fcrupule d’en réferver
rien pour lui. Ce fut la reffource de Sparte dans fes
revers. Quoiqu’il eût fait une guerre heureufe dans
un pays où le faite 6c la molleffe en impofoient à la
multitude, il ne renonça jamais.à l’auftérité de la
difeipline de Lycurgue. Sobre & frugal , les mets
qu’on lui fervoit étoient fans apprêt , & l’appétit
excité par les exercices du corps , leur tenoit lieu,
d’affaifonnement. Il cônferva l’antique fimplicité dans
fes habits, & ce fut par l’innocence.de fes moeurs
qu’il ambitionna la fupériorité fur le refte des hommes;
Quelqu’un donnant en fa préfence le nom de:
grand roi au monarque-Perfan, il n’efl pas, dit-il,
plus grand que moi, s’il n’efl pas plus vertueux.
Quoiqu’il eût pu choiiir un fuperbe palais, il préféra
une antique chaumière qui avoit été habitée
par Euriftene , l’un de fes ancêtres. On n’y remar-
quoît aucun dé ces ornemens inventés par le luxe
& la molleflé. Tout y retraçoit la pauvreté & le
dédain des commodités. On l’eût plutôt prife pour
la cabane d’un Ilote, que pour la demeure d’un
grand roi.
La nature en l’enrichiffant de toutes les vertus ,
avoit été pour lui une mere bienfaifante ; mais aufli
elle fembloit n’être qu’une marâtre impitoyable en
renfermant fon ame dans une corps aufli difforme-'
Son extérieur rébutant lui attirpit le mépris des
étrangers. Il en fit l’expérience en Egypte: où il commanda
une armée de Grecs mercénaires pour fou-
tenir Tachos attaqué par les Perfes. Il parut à la
cour d’Alexandrie paré de Tes feules vertus. La
pauvreté de fes habits, fa fuite & fon équipage
ne laifferent appercevoir dans le héros de la Grece,
qu’un vieillard pauvre & décrépit. Les courtifans
énervés par le luxe , ne virent qu’un çenfeur importun
de leur molleffe; & le roi lui-même choqué
d’un extérieur qui n’annonçpit qu’un homme vulgaire
, lui ôta le commandement pour le déférer,
à l’Athénien Chabrias, qui avoit toute la foûpleffe,
d’un courtifan délicat. Les yeux fafeinés par le luxe
ne pouvoient appercevoir l’homme fupérieur dans'
celui qui n’avoit d’autre lit que la paille ou un peu
de gazon, qui fe nourriffoit de mets dédaignés ,
qui rejettoit les couronnes & les parfums. Le monarque
Perfan lui envoya des provifions abondantes
&: chôifies, il lui fit préfènt d’étoffes précieufes
pour le diftinguer de fes foldats ; le Spartiate dédaigneux
fit diflribuer le tout à fes efclaves. Tachos
porta la guerre dans la Phénicie ; ' en vain Agéjîlas
réduit à commander un corps de mercénaires, lui
repréfenta le danger de quitter fes états ; un con-
feil aufli fage ne fut point écouté. Dès que Tachos
fut éloigné, fes fujets remuans & féditieuxlevèrent
l’étendard de la rébellion, & fon parent Nerianebe
fut proclamé roi. Agéfilas pour fe venger des dédains
qu’il avoit effuyés, fut le premier à le recon-
noître. L’ufurpateur eut bientôt un coricurrent dans
Mutus, citoyen de Mendès , .qui lui difputa l’empire.
Agéjîlas lui eonfeilla de marcher contre ce
rébelle pour ne pas lui laiffer le tems de raffem-
bler fes forces. Nerianebe eut lieu de fe repentir
d’avoir dédaigné ce confeil. Mutus, ariif & vigilant
le contraignit de fe retirer dans une ville dont il
forma le fiege. Agéjîlas fut follicite de fondre fur
lesafliégeans, mais il attendit que leurs forces fuffent
divifées pour faire une Tortie qui eut un plein fuc-
ces. Agéjîlas, couvert de gloire , fut élevé au.com-
mandement général de l’armee. Mutus battu dans
plufieurs rencontres, tomba au pouvoir du vainqueur.
L’Egypte paifible reconnut Agéjîlas pour
fon libérateur. Il mourut chargé de gloire & d’années
dans la ville de Ménelas, fituée entre la
Cyrcanique & l’Egypte. Son corps embaumé fut
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tranfporté a Sparte, glorieufe de pofféder fes cendres.
( T - n .)
Agésilas , éphore de Sparte , fut un des principaux
inftrumens dont le troifieme Agis fe.fervit
pour faire revivre la difeipline de Lycurgue. Sa
vie jufqu’à ce moment, n’avoit été qu’un tiflu de débauche
, &C il ne favorifa le projet de la réformation
que pour s’affranchir du fardeau accablant des
dettes , contrariées pour affouvir fes;paflions. L’hif-
toire le peint comme un homme artificieux, doué
de cette éloquence naturelle qui domine fur les
efprits ; fans frein dans fes penchans , audacieux
dans fes projets, téméraire dans l’exécution; parti-
fan hypocrite d’une réforme qui faifoit la cenfure
du fcàridale de fa vie. Ce fut ce citoyen corrompu
qui propofa ait peuple de rendre aux loix leur
vigueur , & aux moeurs leur première innocence.
11 fe rend à l ’affemblée où il conjure. les Spartiates
de né plus fouffrir que la majefté de la patrie fût
violée par les avares exactions de quelques citoyens
avides, tandis que fes vrais enfans, rampant dans
la mifere, éprouvoient une exiftence douloureufe.
Il fait enfuite parler la religion qui commande l’é-,
galité ; il cite d’anciens oracles & fait valoir la ré-
ponfe récente du prêtre de Païiphaé | qui leur af-
lurôit que, s’ils faifoient revivre leurs anciennes infti-
tutions , ils feroient triomphans & refpeétés comme
autrefois. Son éloquence fut appuyee par le facri-
fice qu’Agis & fa famille firent de tous leurs biens.
Le peuple , faifi d’admiration , applaudit à un fi
généreux défintéreffement ; on procéda à l’abolition
des dettes, toutes les obligations pécuniaires furent
apportées dans le forum, où elles furent brûlées
aux yeux du, créancier dépouillé de fon titre. Agéfilas
, témoin de cet incendie, s’écria qu’il n’avoit
jamais vu de flamme plus pure & plus agréable.
Après cette opération il travailla fourdement à détruire
l’édifice qu’il venoit d’élever. II étoit le plus
confidérable de l’état par l’étendue de fes poffeffions;
mais épuifé par fes débauches & fes profùfions il
avoit contrarié plus de dettes qu’il n’avoit de fond.
L ’abolition des dettes le débarraffa de l’importunité
de fes créanciers, & le remit dans la jouifl’ance
de fes domaines. Il étoit trop intéreffé au partage
des terres, pourconfentir à une égalité qui le met-
toit au-deffous de fes befoins. Il en retarda l’exécution
fous prétexte de ne point entreprendre deux
chofes à la fois , de peur d’ébranler l’état par des
fecouffes trop violentes. La guerre occupa Agis
d’autres foins , & pendant fon abfenee Agéfilas
devint le tyran d’un peuple dont il fe difoitlepro-
terieur. Ses vexations devinrent les crimes de deux
rois. Agis fut arraché du temple qui lui fervoit d’a-
f y le , pour être conduit à la mort. Agéjîlas, feul
coupable, fe fauva par la fuite; il revint quelque
tems après dans fa patrie, o ù , revêtu de la charge
d’éphore , il exerça une domination tyrannique.
Voye.^ AGIS III. dans ce Supplément. ( T— jv. )
AGESIPOLIS, ( hïijl. de Lacédémoneî) fils de Pau-
fanias , roi de Lacédémone, perdit fon père dans
un âge trop foible encore pour gouverner lui-même
les renes de l’état. Les Corinthiens fe flattèrent que
le tems de fa minorité leur feroit favorable pour
abaiffer l’orgueil altier de Sparte qui, depuis long-
tems , infultoit à la foibleffe du refte de la Grece ;
ils en furent punis par une fanglante défaite, & leur
humiliation contint tous les peuples jaloux de la
piuffance des Lacédémoniens. Agejipolis parvenu à
l’âge où la loi le mettoit dans l’exercice de fa dignité,
voulut Te montrer digne de commander à une
nation belliqueufe. Il tourna fes armes contre l’Ar-
golide qui étoit la contrée de tout le Péloponefe,
dont Sparte avoit le plus fujet de fe plaindre. Les
Argiens abandonnés de leurs alliés, fç fçntirent trop
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îoibles pour lui réfifter. Leur fierté s’abaiffa à demander
la paix ; leurs députés n’effuyerent que des
mépris , & par toute réponfe Agefipolis porta la déf
la t io n dans tout leur territoire. Tout lui en préfageoit
la conquête ; lorfque des tremblemens de
terre , qui fembloient annoncer la diffolution du
globe, répandirent la confternation dans fon armée.
Les Spartiates étoient trop ignorans & trop groffiers
pour n’être point fuperftitieux , & lorfque quelque
phénomène extraordinaire frappoit leurs fens, ils le
regardoient comme un avertiffement du ciel qui con-
damnoit leur entreprife. Alors le peuple le plus
intrépide devenoit le plus pufillanime, il méconnoif-
foit la voix de fes chefs pour aller interroger fes
prêtres &c fes devins. Plufieurs foldats devinrent
lourds par le bruit des tonnerres , & d’autres furent
aveuglés par le feu des éclairs. Si quelque miniftre
de l’autel un peu ambitieux favoit profiter de ces
momens de terreur, il lui feroit facile de caufer
une révolution. Ageßpolis s’élévant au-deffus des
terreurs populaires, n’en fut pas moins ardent à
preffer le liege ; mais il fut mal fécondé par des
foldats dont la fuperftition avoit glacé le courage.
Il fallut céder à rimportunité de leurs murmures ,
pour éviter l’éclat d’une révolte. La prife de- Man-
tinée le eonfola de cette difgrace. Il s’en rendit le
maître en détournant le cours du fleuve Ophis, dont
les eaux baignoient les murs de cette ville ; & cette
opération fimple & facile , lui mérita la réputation
d’un grand capitaine. Les Olinthiens éprouvèrent
enfuite l’effort de fes armes. Plufieurs de leurs villes
furent prifes d’affaut, èc la févérité dont il ufâ détermina
les autres à- prévenir leur ruine par une
prompte foumiffion. Olinthe fut la feule qui ofa lui
oppofer de la réfiftance. Les fatigues qu’il effuya
devant cette place, l’enleverent au milieu de fa carrier
e, & comme.il ne laiffa pointde poftérité, Cléom-
brote , fon frere , fut fon fucceffeur. (T— n .J
A G E Ÿ , Ageium, ( Géogr. ) village de Bourgogne l
bailliage d’Arnai-le-Duc, diocefë de D ijon , à une
lieue-de Sombernon , à trois quarts de lieue de la
grande route de Dijon à Paris ; la comteffe -de Ro-
.chechouart, qui en eft dame, diftinguée par fon goût
pour la phyfique & fon amour pour les beaux arts, y
a formé un cabinet d’hiftoire naturelle, le plus riche 6c
le plus complet de la province : le beau cabinet des
coraux & pétrifications , eft tout pavé de marbre de
Bourgogne; il y en a trente-cinq fortes ; elle a auffi un
cabinet curieux d’inftrumens de phyfique & de mufi-
que. Mém. pris fiur les lieux par îauteur. (C.)
AG G É E , ( Hiß- Sainte.1) le dixième des douze
petits prophètes, naquit pendant la captivité des
Juifs à Babylone ; & après leur retour il exhorta
vivement Zorobabel, prince de Juda , le Grand-
Prêtre Jefus , fils de Jofédech & tout le peuple au
rétabliffement du temple , leur reprochant leur négligence
à cet égard, & leur promettant que Dieu
rendroit ce fécond temple plus illuftre & plus glorieux
que le premier , non par l’abondance de l’or
& de l’argent, mais par la préfence du Meffie.
*AGGLEST ONJHifi. Antiq. Cérém.fiuperfiitieufies.)
c’eft-à-dire pierre l'acrée, ou idole de pierre, monument
fingulier de la fuperftition des anciens Bretons
, eft une pierre monftrueufe telle qu’on la voit
repréfentée fur une de nos planches dé antiquités dans
ce Suppl. Elle fe voit dans -l’ifle ou plutôt dans la
prefqu’ifle de Purbeck, en la province Dorcefter,
en Angleterre. Elle.eft fur une élévation, ou efpece
de dune d’un fable rouge. Sa forme eft celle d’un
cône renverfé, tel que la figure le fait voir. Sa circonférence
eft de foixante pieds en bas, de quatre-
vingts au milieu , & de quatre-vingt-dix à la furface
fupérieure. Sa plus grande largeur en haut eft de
trente-fix pieds fur dix-huit, & en bas de dix-huit fvuî