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autres; & eonfeillons-liu toujours de n’avoîr recours
à la juftice rigoureufe , qu’après avoir épuifé prudemment
tous les autres moyens que l’humanité
prefcrit. Si la févérité d'Alphonfe en impofa fou vent
aux féditieux ; il éprouva aufli plus d’une fois, que
la crainte du châtiment n’eft pas toujours un remede
infaillible.
Alphonse I , roi d’Aragon, furnommé le batail
leur, parce qu’il fe trouva à vingt-neuf batailles rangées.
Nous avons parlé ci-devant de fes démêlés avec
la reine Urraquè Ion époufe, au fujet des royaumes
de Caftille & de Léon. Lorfqu’après bien des troubles
& du fang répandu , il prit le parti de fe borner
à fes états héréditaires, ou plutôt lorfqu’il chercha
à faire fur les Maures des conquêtes, qu’il ne pou-
voit pas efpérer de faire dans l’Efpagne chrétienne ,
il remporta yi&oires fur viâpires ; & la fortune ne
l’abandonna , que lorfqu’il eut conquis tout le pays
de la partie méridionale de l’Ebre, & augmenté
de plus des deux tiers la monarchie Aragonnoife.
En 1 534 , il s’opiniâtra mal-à-propos au fiege de
Fraga. Cette ville fut fecourue par un renfort con-
lidérable de Maures qui lui livrèrent bataille : il fut
vaincu, pour la première fois de fa vie , par les Sar-
rafins ; il n’échappa à la fureur de l’ennemi, qu’en fe
retirant dans lèmonaftere de S. Jean de la Pegna,
«h il mourut peu de jours après, épuifé par les
efforts de valeur qu’il fit dans cette derniere aâion,
pour arracher la viôoire aux Maures , & peut-être
aufli par le dépit que lui caufa fa défaite. Mariana
prétend que ce prince, qui n’âvoit point d’enfans ,
mftitua pour héritiers de fes états les chevaliers du
Temple , & ceux de S. Jean de Jérufalem : mais ce
prétendu t e f tam e n t eft contefté par tous les autres
hiftoriens ; & il eft fur que, luppôfé qu’il ait exifté,
les Aragonois n’y eurent aucun égard.
Alphonse I I , roi d’Arragon. Il eft dur pour un
hiftorien, ami de l’humanité, de n’avoir que des
exploits militaires à raconter. Il femble que tous lès
ro is , qui régnèrent fur les différentes contrées de
l’Efpagne , pendant plufieurs fiecles , ne mo.ntaffent
-fur le trône que pour,faire la guerre aux rois leurs
voifins & .aux Maures. Et quel bien pouvoient-ils faire
à leurs fujets , ces princes toujours occupés de projets
de conquêtes , dans un tems où la vertu guer-
rieré étoit prefque la feule qu’on admirât? Alphonfe
II. monta fur le trône en 1162., âgé de dix ans ; il
en régna trente-quatre, étant mort en 1196.
Alphonse III, roi d’Aragon, ayant pris ce titre
en 12.85 » à îa mort de fon pere Pierre III , fans
s’être fait couronner folemnellement dans l’affem-
blee des: états, les grands du royaume lui en témoignèrent.
leur furprife &c leur mécontentement,
& lui firent fentir que les rois d’Aragon ne l’étoient
pas avec fureté, avant d’avoir juré de maintenir les
privilèges des grands & du peuple. Alphonfe fe rendit
tl leurs remontrances, fe fit couronner folemnelle-
ment, avec les cérémonies accoutumées, & porta
même la déférence jufqu’à permettre que lés états
lui çhôïfijTènt fes miniftres, & les principaux officiers
de fa maifon. Mais, après la conquête de Minorque
& d’Ivica, çe prince convoqua les états, & y fit
recevoir plufieurs réglemens qui, en diminuant la
puiflance des grands, augmentoient celle du monarque.
Le roi fon p e re , lui avoit laifle une guerre à
foutènir contre la France ; il ne la termina qu’en
12 9 1 , peu de tems avant fa mort. Il prit part aux
troubles qui divifoient la Caftille ; fut excommunié
par. le Pape Nicolas IV ; fe raccommoda enfuite
avec, lui , & alloit former une alliance avantageufe ,
en époufant Eléonore d’A n g le t e r r e , lorfqu’il m o u ru t
âgé feulement de . vingt-fix. ans, dans la fixieme
année de fon régné.
Alphonse IV , furnommé le débonnaire, à caufe
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.des a&es multipliés d’une bonté qui dégénéra quelquefois
en imprudence & en foiblefle, avôit juré
aux états , lors de fon couronnement , de n’aliéner
aucun des domaines de la couronne : ferment qu’ils
avoient cru devoir exiger de ce prince, pour mettre
des bornes à fa générofité exceflive. Il fit la guerre
avec fuccës aux Maures & aux Génois. Mais les
chagrins domeftiques qu’il éprouva , mêlèrent bien
de l ’amertume à la douceur de ces fuccès. Alphonfe
avoit apanagé Dom Ferdinand, fon fécond fils,
du marquifat de Tortofe», & de la feigneurie d’Al-
barracin, n’ayant pas prétendu par le lerment qu’il
avoit fait aux états, fe priver du précieux droit de
la puiflance paternelle, celui d’aflùrer à fes enfans
un fort convenable. Il avoit aufli donné à la reine
Eléonore de Caftille fon époufe, Xativa & quelques
autres places. Don P edre, fils aîné d'Alphonfe ,
& héritier du trône, mécontent de ces arrange-
mens, ofa accufer hautement fon pere d’avoir v iolé
fon ferment. Alphonfe allégua pour fa juftification,
les fentimens de tendreffe paternelle & conjugale,
qui l’avoient porté à faire ces difpofitions. Don
Pedre étoit excité par l’archevêque de Sarragoffe ,
prélat ambitieux. La reine découvrit cette intrigue ,
& l’archevêque fut banni de la cour. Il avoit pris
un tel afcendant fur l’efprit de l’infant, qu’il le
porta à fe venger de fa mere, en s’emparant de
Xativa. Eléonore n’ofa point folliciter fon époux à
prendre fa défenfe contre fon propre fils ; mais la
fenfibilité d'Alphonfe , attaqué alors d’hydropifie ,
accrut tellement fon m a l, qu’il mourut le . 24 janvier
1336.
Alphonse V , furnommé le magnanime, fils de
Ferdinand le jufle ,.ro i d’Aragon , lui fuccéda en
1416. Franc, généreux, bienfaifant, guerrier intrépide
, habile p®Inique, ami des arts, protefteur des
Sciences, fa vant lui-même, galant à l’excès, Alphonfe
fut allier toutes ces qualités ; & c’eft de leur affem-
blage, qu’il fe forma ce cara&ere de grandeur, qui
lui mérita le furnom de magnanime. La jaloufie de
la reine Marie, fon époufe, éloigna Alphonfe de
fes états d’Aragon. Ce prince, regardé comme un
des plus beaux hommes de l’Europe , aimoit une
dame de la cou r, dont il avoit eu un fils. La reine,
d’autant plus piquée., qu’aux agrémens de la figure ,
elle joignoit de l’efprit, des talens & d’excellentes
qualités, trouva le moyen de faire empoifonner fa
rivale. Alphonfe, trop grand pour fe venger d’une
femme, quelque fenfible qu’il fut à. cette perte, prit
le parti d’aller diftraire fa douleur hors de fon
royaume, par des voyages & des opérations militaires.
On conjura contre lui : un des confpirateurs,
touché de remords, vint fe jetter à fes pieds, lui
découvrit la confpiration , & lui donna la lifte
des coupables. Alphonfe la déchira fans la lire , &
dit : Je vous pardonne , afin que vous allies^ dire aux
conjurés que j e prends plus de foin de leur vie, qu’ils
rien prennent eux-mêmes. Il montra la même grandeur
d’ame en plufieurs autres occafions; & lorfqu’ii
fe vit. dans la néceflité de punir , le fang d’un
feu! verfp à regret, lui parut fuffifant pour expier
le crime de tous. Jeanne, reine de Naples, fe joüa
deux fois de fa bonne-foi, après avoir tiré de puif-
fans fecours de fa générofité. La conquête de Naples
le vengea. Reconnu roi de Sicile en 1442 , il fixa
fon fejour en Italie, malgré les inftançes des Ara-
gonnois. Il aimoit à aller à pied & fans fuite dans
les rues de fa capitale. Lorfqu’on lui repréfentoit
que c’étoit expofer fa perfpnne, il répondoit : Que
peut craindre un pere qui fe promene au milieu de fes
enfans ? L’étude & l’amour le délafioient agréablement
des fatigues de la guerre, & des foins pénibles
du gouvernement. Il avoit coutume de dire qu’un
prince ignorant n étoit guère an - dejfus . d’un ans
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'couronné. Si fa folle paflion pour Lucrèce Aiariia,,
jetta quelque ridicule fur les derniers jpurs de fa vie,
au moins on ne lui reprochera point d’avoir facrifié
fes fujets , fes devoirs , ni la majefté de fon rang,
aux caprices & à l’avidité de fes maîtrefles. Il mourut
en 1458.
Alphonse I ( Hifi. de Portugal. ) fils de Henri,
comte de Portugal, & de Thérefe, fille.naturelle
d ’Alphonfe V I , roi de Caftille, avoit à peine trois
ans, lorfque la mort de fon pere le laifla fous la
tutelle de fa mere, femme ambitieufe & peu dé^-
cente dans fes moeurs, qui ne céda l’autorité fuprême
à Alphonfe, que lorfque celui-ci l’y contraignit à
force ouverte. Ce prince ayant recouvré fes droits,
tourna fes armes contre les Maures ; & les victoires
multipliées qu’il remporta fuir eu x, le firent proclamer
roi de Portugal, par fes troupes en 1130. Le
râpe Eugene III. lui confirma ce titre par un bref ;
mais fon couronnement ne fut célébré que quelques
années après, à Lamego , où le trône fut déclaré
héréditaire par une loi conftitutive de l’état, & les
étrangers exclus de la couronne, mais non pas les
princes naturels.. Aflifté des prélats & des principaux
citoyens des villes, il fit des loix pour la tranquillité
& la bonne police du royaume ; de forte qu’il
fut à la fois un guerrier habile & heureux, un roi
doué de grandes qualités, le fondateur de la monarchie
Portugaife, & le légiflateur de fa nation. Il
mourut en 1185 , laiflant pour fuccêfleur fon fils
Don Sanche I , qui fe montra digne d’un fi grand
prince.
A l ph o n s e II, furnommé le gros. Sanche I. ne
voulant pas que les cadets de fes enfans fuffent dans
la dépendance de l’aîné, avoit apanagé non-feulement
fes deux fils, Don Ferdinand & Don Pedre,
mais encore'fes deux filles , Donna Thérefe &
Donna Sanche. Alphonfe II, monté fur le trônre, eut
de violens démêlés avec fes foeurs : il prétendoit
que leur pere n’avoit pu démembrer de la couronne
, les places dont il leur avoit donné la fou-
veraineté. Cette querelle fut fuivie d’une guerre
civile : le Pape s’en mêla à la follicitation des prin-
ceffes. Alphonfe fut excommunié ; & fon royaume
niis en interdit. Ainfi Donna Thérefe & Donna
Sanche forcèrent leur frere à fouferire à- la ceflïon
des places que Sanche I. leur avoit données. Le roi
de Portugal fit enfuite la guerre aux Maures : guerre
fi glorieufe pour lui, fi toutefois il peut y avoir de
la gloire à répandre le fang, mais en même tems fi
funefte par les nouvelles querelles qu’elle lui occa-
fionna avec le Pape , & tout le clergé de fon
royaume. Il jugea qu’il n’étoit pas jufte que fes fujets
laïques fupportaffent feure les frais d’une guerre en-
treprife en faveur de la religion ; en çonféquence
il crut pouvoir taxer les eccléfiaftiques , les plus
riches de fes fujets. L’archevêque de Prague en jugea
autrement : il excommunia les officiers chargés par
le roi de lever les taxes impofées. Alphonfe faifit
les1 revenus de l’archevêque, &c fe Gontenta de le
faire fortir de fes états. Le Pape, irrité de ce procédé,
envoya en Portugal des commiffaires qui excommunièrent
le r o i , & jetterent un interdit fur le
royaume. Alphonfe entra en négociation ayec le
clergé, mais il ne vit pas la fin de cette affaire, étant
mort excommunié, le 25 de mars 1223.
Alphon.se III. arracha le feeptre des mains de
fon frere aîné Sanche II ; mais lorfqu’il fut aflïs fur
le trône en 1248 , il tâcha d’effacer la honte de fon
ufurpation, par une adminiftration jufte & modérée,
& témoigna en plufieurs circonftances , tant par fes
paroles , que par des bienfaits répandus fur ceux
qui étoient reftés fideles à fon frere , qu’il défap-
prouvoit un crime dont il recueilloit les fruits. Il
fut remédier à plufieurs abus qui s’étoient intro-
Tome I,
À L P 3*3
duits à la faveur des troubles d°nt le foyàume
avoit été agité : mais , lorfqu’il voulut réformer le
clergé,, il trouva tant de réfiftance de la,part des
eccléfiaftiques de Portugal, & fiir-.tout de la part
du Pape , qu’il échoua dans ce projet, peut-être
faute d’y avoir procédé avec allez de prudence. II
mourut en 1279.
Alphonse IV ,.furnommé le brave, eut qtleiques
bonnes qualités avec beaucoup de vices. Fils dénaturé
, il s’arma plufieurs fois pour détrôner le roi
Denis fon pere , & fut caufe deTa mort, par l’atrocité
de fes procédés envers lui. Frere injufte, il
perfécuta cruellement Don Sanche, prince digne
d’un meilleur fort, par l’honnêteté de fon ame, &t
fon mérite fupérieur. Il eft vrai qu’Alphonfe, après
avoir été fon tyran, parut devenir fon ami ; mais
cette'amifié tardive, & peut-être forcée, effaça-t-
elle l’injufte & barbare perfécution qui la précéda ?
Il fit douze ans de guerre au roi de Caftille fon gen*
dre ; le fang des Portugais tk des Caftillans ne cefla
de couler pendant tout ce tems, pour les querelles
domeftiques de leurs fouverains. Alphonfe , le barbare
& crédule Alphonfe, cédant trop facilement
aux fuggeftions de quelques favoris jaloux. & médians
, fit affalfiner tous fes yeux Inès ou Agnès de
Caftro , que fon fils Don Pedre avoit époufée fecré-
tement, & alluma ainfi le feu d’une nouvelle guerre.
11 femble que la cruauté d’Alphonfe fut entièrement
tournée contre fa famille ; ca r , à l’exception de
l’afîaflïnat de l’évêque d’Evora, qu’il commit de fang
froid, fon régné fut aflèz modéré ; il fe montra attentif
à ne point charger fes fujets de nouveaux impôts
, a faire fleurir l’induftrie , à favorifer le commerce
; mais fon animofité continuelle contre les
fiens , troubla fans celle l’état, & lui fit infiniment
plus de mal, qu’il ne pouvoit d’ailleurs lui faire de
bien. Alphonfe mourut en 13 57.
Alphonse V , furnommé CAfricain , mérita Ce
titre par fes exploits & fes conquêtes en Afrique*
Ce fut fous fon régné que les Portugais découvrirent
la Guinée , d’où ils rapportèrent beaucoup d’or»
Ce prince, époux fidelè, pere tendre , habile négociateur
, roi jufte, eût mérité d’être mis au rang
tles plus grands monarques , fi l’ambition des conquêtes
n’eut pas été fa paflion dominante. Plus occupé
du -defir d’agrandir fes états, que du foin d’y
faire fleurir l’abondance & la paix, il régna prefqué
toujours fous la tente. Ses armes furent heureufes ;
mais un guerrier illuftre , un habile général eft fou-
vent le fléau de l’humanité ; & les rois ne devroient
s?illuftrer que par leur, bienfaifance & l’amour de la
juftice. Il abdiqua deux fois. Après avoir réfigné fa
couronne à Don Juan fon fils dans .le deffein d’aller
à Jérufalem, pour y vivre dans lafolitude ; il fe repentit
de cette démarche indiferete, & Dom Juan
lui rendit le feeptre. Alphonfe, quelques années après,
fe dégoûta une fécondé fois du trône ; & après y
avoir fait monter fon fils à fa place , il étoit en chemin
pour aller fe retirer au couveht de S* Antoine
de Varatojô , lorfqu’il fut attaqué de la pefte qui
ravageoit alors le Portugal. Il en mourut en 1481.
Alphonse V I , également incapable de remplir
les devoirs d’un roi & ceux de mari , fe vit enlever
fa couronne & fa femme, par fon frere Dom Pedre,
Cette révolution fut revêtue de la forme d’une abdication
volontaire en apparence, mais réellement
forcée.
§ ALPUAARR A S, ( Géogr. ) hautes montagnes
d’JEfpagne , dans.le royaume de Grenade , au bord
de la Méditerranée. Elles s’étendent depuis la rade
d ’Almerie jufqu’à Settenil, frontières de l’Andalou-
fie. Ce canton eft le plus peuplé & le mieux cultivé
de toute l’Efpagne* Ses habitans font Maures d’origine
: on les diftingue des autres Efpagnols par la