
 
        
         
		nous  enchaîner par une  forte  de  plaifir  aux devoirs'  
 les  plus  pénibles ;  eux  feuls  pofledent  le  fecret,  
 quoique  diverfement,  &  chacun à  fa  maniéré,  de  
 prélenter avec  tous  les  appas que  l ’on  peut  imaginer  
 , les  vertus , les fentimens  d’un  coeur  honnête ,  
 &  les aélgs de bienfaifance que  la circonftance exige.  
 Quelle  arhe  un peu  fenfible, pourrait  leur  réfifter  
 alors? Et quand ils déploient toute leur magie, pour  
 bien  rendre  la laideur du  crime,  de la méchanceté,  
 des  aétions  vicieufes,  &   pour  expofer  toutes  les  
 horreurs  de  leur  fuite,  qui  oferoit  fe  permettre  
 d’en  entretenir  la  moindre  penfée  au  fond  de  fon  
 coeur ? 
 Certainement  fi  Fon  fait  fe  fervir  à  propos  du  
 miniftere  des beaux-arts, pour remplir l’imagination  
 d’un homme, de l’idée du beau, &  pour  rendre fon  
 coeur fenfible au  bon, on pourra faire enfuite de cet  
 homme, tout ce  que  fa  capacité  naturelle lui  permet  
 de devenir.  Il fuffit.pour y  réufîïr,  que  le  phi-  
 lofofophe ; le légiflateur , l’ami des  hommes livrent  
 à  l’artifte,  l’un  lès  maximes,  l’autrefes loix,  &   le  
 troifieme  fes-projets.  Qu’un  bon  prince  lui  confie  
 fes  plans  dans la  vue de porter  fes peuples à aimer  
 leurs véritables intérêts;  l’artifle favorifé des Mufes  
 faura, comme un autre Orphée,  entraîner les hommes  
 même  contre  leur  gré,  mais  par une  violence  
 toujours  aimable,  &   les  obliger  à  s’acquitter  avec  
 zele de  tout ce que leur bonheur  exige. 
 Nous devons donc confidérer les beaux-arts comme  
 des  troupes  auxiliaires,  dont ne  fauroit fe  paffer  la  
 fagefle  qui veille  au  bien  des hommes.  Elle  voit  ce  
 que l’homme doit être ;  elle  trace  la route qui  conduit  
 à la perfection,  &   par  conféquent à la  félicité ;  
 mais  cette  fagefle ne fait  pas nous donner les  forces  
 néceffaires pour vaincre les difficultés de ce chemin,  
 fouvent rude &  efearpé. Ici viennent les beaux-arts ; ils  
 applaniffent la route, &   la parfement de fleurs  dont  
 le parfum agréable  attire  le voyageur , &  le ranime  
 à  chaque pas. 
 Qu’on ne penfe  pas que ce foient ici  de ces exagérations  
 de  rhéteur,  qui  pour  un  moment  peuvent  
 faire illufion,  mais  qui  fe  diflipent  enfuite  Comme  
 un  léger  brouillard,  dès  que  la  raifon  les  éclaire.  
 Ce  que  nous  avons dit,  eft  fondé fur  la  nature  de  
 l’homme. L ’entendement ne produit que la connoif-  
 fance , &   la  fimple  connoiflance  ne  donne point la-  
 force  d’agir.  Pour  que  la  vérité  devienne  aélive  ,  
 il ne fuffit pas de la connoître même fous la forme  du  
 bien ;  il  faut  ne  plus  la  fentir  fous  cette  forme  :  
 c’eft  alors,  &   alors  feulement  qu’elle  excite  les  
 forces, de la volonté. 
 .  C’eft  ce  que  les  Stoïciens  euxmêmes  avqient  
 apperçu ,  quoique  leur principe  fut  de  bannir tout  
 fentiment,  &   de  faire  de  l’ame  un  être  purement  
 raifonnable.  Leur phyfiologie étoit parfemée d’images  
 &  de  fi étions,  dont le  but  ne pouyoit  être  que  
 de réveiller le  fentiment  par  la force  de  l’imagination  
 :  aucune feéte n’a eu plus  de  foin  d’animer les  
 oracles  de  la raifon , par tous les  charmes  de  l’éloquence. 
 L’homme  de la nature  n’eft  qu’un  être  grofliére-  
 ment  fenfuel,  qui  n’a  d’autre  but  que  la  vie  animale': 
   l’homme  des  Stoïciens  ,  tel  qu’ils  l’imagû  
 noient,  fans pouvoir  jamais le  réalifer,  eût  été  la  
 raifon  toute  pure, un  être toujours occupé  à .connoître  
 &   ri’agiflant  jamais ; l’homme  formé  par  les  
 beaux-arts tient  exaétement le milieu  entre  cesdeux  
 extrêmes ; il eft en même tems intelligent &  fenfuel ;  
 mais fa fenfualité  provient  d’une fenfibilité épurée,  
 qui  en fait un  être  moral &   aftif. 
 Ne  diffimulons  cependant  rien  :  les  beaux-arts  
 peuvent  aifément  devenir  pernicieux  à  l’homme  ,  
 femblables à l’arbre  du jardin  d’Eden, ils portent les  
 fruits  du bien &  du mal  ;  ils  perdront  l’homme qui 
 ,en  ferâ un ufage  indiferet. Une  fenfualité  rafinée  a  
 des fuites  funeftes ,  dès  qu’elle  n’eft  pas  conftam-  
 piént  dirigée  par  la  railôn :■  les  extravagances  des  
 ,entho.u fiaft es ,  foit qu’ils  aient  pour  objet  la  politique  
 ,  l’amour  ou  la religion ;  les  écarts  d’imagination  
 oii  donnent  les  fe.a.es ■ fanatiques ,  &   quelquefois  
 des  nations  entières  ,  qu’eft-ce autre  chofe  
 que  l’eflbr  d’une  fenfualité  rafinée , exaltée, &   de*  
 ftituée  du  frein  de  la  rajfon ? De  la  même  fource  
 vient  encore  cette  môllefle  de  Sybarite  ,  qui  fait  
 de l’homme une  créature  foible ,  dégradée  &  mé-  
 prifable. Au’  fond  ,  c’eft  une  feule  &   même  fenfibilité  
 qui  crée les héros  &  les  fous ;  les  faints &C  
 ^les.fcélérats^ 
 Quand  l’énergie  des  beaux-arts  tombe  entre  des  
 mains perfides, le plus excellent desremedes devient  
 un poifon mortel : car alors le vice  reçoit  l’aimable  
 empreinte  de  la  vertu;  &  l’homme  attiré  par  ces  
 dehors trompeurs,  va  dans  l’étourdiffement  de  l’i-  
 yrelfe  fe jetter &  fe  perdre dans les bras  de la fédu-  
 élrice.  11  eft donc  indifpenfable  de  foumettre  l’emploi  
 &   l’ufage  des  beaux-arts  à  la  direction  de  la  
 raifon. 
 Vu  leur  extrême  utilité ,  les  arts  méritent  quel  
 la  faine  politique  les  encourage  efficacement,  les  
 foiitienne  puiflamment  ,  &   les  répande  parmi  les  
 divers ordres de  citoyens ;  mais  à  caufe  du  dangereux  
 abus  qu’on  en  peut  faire ,  cette  même  politique  
 doit  en  reflerrer  l’emploi  dans  les  bornes  
 indiquées  par leur utilité même. 
 En  premier  lieu, à ne confidérer  que  les  fimpîes  
 avantages  du bon, &  les maux qu’entraîne néceflai-  
 rement  un  goût  dépravé,  une  légiflation  vraiment  
 fage  ne  devrait  permettre  à. aucun  particulier  de  
 gâter le  goût de.  fes concitoyens, ni par conféquent  
 de bâtir des  maifons  , ou  de  tracer  des jardins  allez  
 magnifiques  au-dehors  &   au-dedans  pour  attirer  
 l ’attention,  fi d’ailleurs  il  y   régné  en  même  tems  
 quelque défaut fenfible de jugement ; fi l’on y.apper-  
 çoit, par  exemple,  des parties  ridicules,  baroques  
 ou ëxtrayagantes. 
 ïl devroit être défendu à tout artifte d’exercer fon  
 art,  avant d’avoir  donné  outre les  preuves  de  fon  
 habileté,  des  preuves  toutes  particulières  de  fon  
 jugement ,  &  même  de la droiture de fes intentions. 
 Le  légiflateur  doit, être  convaincu  qu’il  eft très-  
 important,  non-feulement que  les  édifices  &   les  
 monumens  publics, mais aum qite tout  objet  vifible  
 travaillé par les arts même mécaniques  porte  l’empreinte  
 du  bon  goût, de la même maniéré que l’on  
 veille à  ce  que,  non-feulenient  l’argent  monnoié ,   
 mais  encore la  vaiffelle  ait  la  marque  de  fon  vraï  
 titre. Un  magiftrat  fage  ne' fe  contente  pas de profiter  
 de Finfluence  des  beaux-arts pour  rendre  plus  
 énergiques  &   plus  avantageufes  aux  citoyens  les  
 réjouiflances,  les  fêtes  publiques,  &   les  cérémonies  
 folemnelles ;  il  a  foin même  que  chaque  fête  
 domeftique,  chaque  ufage  privé conduife au même  
 but  &   par  la même voie. 
 Mais, ce qui mérite une  attention  plus  diftinguée  
 de  la part de  ceux  aux foins de  qui  le  bonheur des  
 citoyens  eft  confié,  c’eft la langue,  cet  infiniment  
 le  plus  important,  &   le.plus  univerfel, dans  nos  
 principales  opérations.  Rien  ne  préjudicie  plus  à  
 toute  une  nation, qu’un  langage  barbare  ,  du r,  
 incapable  de  bien  rendre  la  délicateffe  des  fentimens  
 ,  &   la  fineffe  ,des  penfées.  La  raifon  &   le  
 goût  fe  forment  &   s’étendent  dans  la même  proportion  
 dans  'laquelle  la  langue  fe  perfectionne,   
 puifqu^au  fond  le  langage  n’eft  autre  chofé  que 1^  
 raifon  .&  le  goût  transformés  en  lignes  fenfibles..  
 Cela  étant  ainfi,  comment  peut-on . abandonner an  
 hafârd  une  chofe  de  cette  importance ;  commènt.  
 peut-on,  ce qui  eft  pire  encore,  l’abandonner aux. 
 caprices  de  chaque  particulier I   même  à  ceux  
 des  cervelles  les  plus  extravagantes? 
 Il  y  a.des.contrées  oh  la  négligence  du  gouvernement  
 fur  ce  chapitre  eft  incroyable.  Le  moyen  
 le  plus  efficace  pour  élever  l’homme  au-deflus  
 des animaux, fe trouve précifément être  celui dont  
 on  fait  le  moins  de  cas.  L’homme  lé;  plus  inepte  
 peut,  à  fa  volonté  ,  &   félon  fes  caprices,  parler  
 à  toute  une  nation  un  langage  abfurde &   barbare  
 dans  des  gazettes  ,  des  almanachs  ,  des  feuilles  
 périodiques, des livres &  des lèrmons, même dans les  
 édits  &   dans  lès  ordonnances  oh  la  majefté  des  
 fouverains  ,annonce  fa  volonté  à  des.  peuples  
 entiers  dont  ils  font  les peres &   les conduéleurs,  
 on  fait  fouvent  tenir  à.'ees  princes  un  langage  
 rempli  d’incongruités,  &   dans  lequel  on  cherche-  
 roit  vainement  le  plus  petit  veftige  de  goût &  de  
 réflexion. 
 S’il  eft  vraï  que  l’établiffèment  de  la  célébré  
 académie  des  quarante  à Paris ,  n’ait eu  pour  objet  
 que  d’étendre  la  renommée  de  la  France ,  en perfectionnant 
 là  langue  de  cette  nation,  on  peut dire  
 que  le  fondateur  de  cette  académie  n’a  vu  que  le  
 côté  le  moins  intéreflant  de  cette  inftitution.  Il  y  
 avoit  plus  à! en  recueillir que  de  la renommée ;  &   
 l’on  devoit  s’y   propofer,  non  d’obtenir  un  éclat  
 paflager  ,  mais  d’étendre  &   de  fortifier  la ^raifon  
 &   le  goût  parmi  tous  les  ordres  de  citoyens. 
 Prefque  tous  les  arts réunifient leurs  effets  dans  
 les  fpeétacles,  qui  feuls  fourniffent  le  plus  excellent  
 de  tous ' les. moyèns  que  l’on  peut  imaginer  
 pour  donner  de  l’élévation  aux  fentimens,  &  qui  
 néanmoins,  par  un  abus  déplorable  ,  contribuent  
 fouVent  le  plus  à  la  corruption  du  goût  &   des  
 bonnes  moeurs. Ne devrait-il donc pas  y   avoir  des  
 loix  pénalés  contre  ceux  qui'altèrent  les  arts  ,  
 comme  on  en  a. promulgué  contre  ceux- qui  altèrent  
 les monnoies?  Et comment les beaux-arts pourront 
 ils  parvenir  à  leur  véritable  deftination  ,  s’il  
 eft  permis  à toute  tête  folle  de  les  proftituer ? 
 Enfuite ,  puifque  les  beaux-arts  doivent,  félon  
 leur  eflènee  &   leur  nature  ,  fervir  de  moyens  
 pour accroître  &  aflurer  le  bonheur  des  hommes,  
 il e ft, en fécond  lieu, néceflaire  qu’ils  pénètrent juf-  
 qu’à l’humble cabane du moindre des citoyen s ; il faut  
 que  le  foin  d’en  diriger  Fufagè  &   d’en  déterminer  
 l’emploi  entre  dans  le  fyftême  politique ,  &   foit  
 un des objets  effentiels de l’adminiftration  de l’état :  
 il  faut  donc  aufli  que  Fon  confacre  à  cet  objet  
 une  partie  des  tréfors  que  l’induftrie  &   l’épargne  
 d’un,  peuple  laborieux  fournit  chaque'  année  au  
 fouverain  pour  fubvenir  aux  dépenfes  publiques. 
 Ce  que  nous  venons  de  dire  ne  paroîtra  fans  
 doute  pas  fort évident  à  plus  d’un  prétendu  politique  
 ;  &   même  bien  des  philofophes  ne  regarderont  
 les  projets  que  nous  propofons,  que  comme  
 ■ autant  de  chimères.  Ces  projets  ne  font  en  effet  
 autre  chofe ,  nous en  convenons  les premiers ,  tant  
 qu’on  regardera  comme  fondé  fur  des  principes  
 invariables  &   facrés,  l’efprit de  la plupart des  infti*  
 tions  politiques qu’on fuit  aujourd’hui.  Par-tout oh  
 l’on  corifiderera comme  l’affaire  capitale  de  l’état,  
 les  richefles  pécuniaires  au-dedans  ,  &   la  puiffance  
 au-dehors,  avec  tout  ce  qui  contribue  à  augmenter  
 ces  deux  objets,  nous  fommes  d’avis  qu’on  
 banniffe  les beaux-arts, &  nous joignons notre voix  
 à  celle du  poète  Romain,  pour  crier  aux  admini-  
 ftrateurs  publics : 
 O  cives, cives J quarenda pecunia primurn ejl ; 
 Virtüs pojî  nurnmos. 
 Hijloire des beaux-arts. Il ne fera pas inutile de tracer  
 ici une légère éfquiflê des divers forts que les beaux-  
 arts  ont fübis,  &   de leur état aû u e l,  afin  de  comparer  
 ce  dernier  au  tableau  que  nous  avons  fait  
 de  ce  qu’ils  pourroient  être  d’après  leur  notion  
 idéale. 
 On  fe  tromperoit  fo r t ,  fi  l’on  penfoit  que  les  
 beaux-arts  ont  été  découverts  comme' la  plupart  
 des  inventions  mecaniqu.es.. C.elles-'ci  doivent  leur  
 origine  ou à  quelque heureux  hafard ,  ou  à  la  méditation  
 fuiviey &   foutenue  de  quelques  hommes  
 de  génie  ,  & q n t   paffé  enfuite du lieu  de  leurnaif-  
 fance  dans  d’autres  contrées.  Mais  les  beaux-arts  
 font  des plantes  indigènes,  qui  fans  exiger  aucune  
 culture  pénible ,  croiffent  dans  tous  les lieux  oh  la  
 raifon  a  acquis  quelque  développement.  Semblables  
 cependant  aux  fruits  de  la  terre  ,  ils  prennent  
 des  formes  différentes  félon  le  climat  qui  les  
 voit; éclore,  &   en  raifon  des  foins  qu’on  donne à  
 leur  culture.  Dans des. contrées fàuvages, ils crou-  
 piffent fans  prix &  fans  éclat.  . 
 Nous  voyons  aujourd’hui  encore, que chez tous  
 les  peuples  de  la  terre  qui  ont  eu  aflèz  d’intelligence  
 pour  fortir de  leur  première  barbarie  ,  on  
 connoît  la  mufique  ,f;la  danfe  l’éloquence  ,  &c  
 même  la  poëfie.  11  en  a  fans  doute  été  de  même  
 dans  tous;  les  fiecles  antérieures,  dès  le  moment  
 que  les  hommes  ont  commencé  à  réfléchir.  Pour  
 voir  les  beaux-arts  dans  leur  berceau,  &   fous  
 leur  forme la  plus  grofîiere,il n’eft donc pas nécef-  
 faire  de  remonter  dans  lliiftoire  jufqu’à  l’antiquité  
 la  plus  obfcure.  Ils  auront  été  d’abord  chez  les  
 Egyptiens  &  dans  la Grece ancienne,  ce  qu’ils  font  
 encore  chez  lès  Hurons.  Quiconque  a  un  peu  
 obfervé  le caraétere  de  l’efprit  humain ,  connoît  le  
 penchant  général de l’homme  à polir &  à orner tous  
 les objets fenfibles qui font à fa portée &  à fon ufage.  
 On conçoit fans peine comment le  génie de l’homme  
 a pu  être amené par des conjonctures,  ou naturelles  
 ou accidentelles, à  produire  de  premiers  eflais  foi-  
 bles &  groflîers dans  chaque  branche des beaux-arts :  
 ce n’eft pas ici le lieu de defeendre dans le détail. » 
 Non  feulement on  retrouve  les principales branches  
 des  beaux-arts  chez  des  nations  qui  n’ont  eu  
 aucune  communication  ni  direéte , ni  indirefte  en-  
 tr’elles, on y  retrouve encore des  rameaux particuliers  
 qui dérivent de  ces branches capitales.  Chacun  
 fait que les Chinois ont des comédies &  des tragédies ;  
 même les  anciens Péruviens connoifloienr  ces  deux  
 efpeces de  drame, puifqu’au  rapport de  GarcÜaflb  
 de  la Vega , ils èmployoient l’une  à  repréfenter les  
 a étions de  leurs  yncas,  &   l’autre  à  mettre  fur  la  
 feene  les  événemens  de  la  vie  commune  ( Hijloire  
 des Yncas, liv.  / / , chap.  uy. ). Les  Grecs .que  l’orgueil  
 national  portoit  à  exagérer  leurs  avantages,  
 eux dont Macrobe a dit : Grceci omnia fua  in immen-  
 fum  tollunt  (  Saturnal.  lib.  I  ,  cap.  24. )   ,  s’attri-  
 buoient à la vérité l’invention de  tous les  arts :  mais  
 Strabon,  l’un  des plus judicieux  d’entr’eux, nous a  
 averti de  nous défier  de  leurs relations  fur les  faits  
 d’une haute antiquité; il obfervetrès-judicieufement  
 que les anciens  rédaéleurs  des relations  ont  été entraînés  
 dans  un  grand nombre  d’ erreurs  par  la mythologie  
 des Grecs ( Geog.  lib. V III. ).  Il eft aifé  de  
 juger que les Grecs  qui,  dans le  tems que  d’autres  
 nations  étoient  déjà  floriflantes,  fe  nourriffoient  
 encore de glands, n’ont pu être  les premiers à cultiver  
 les  beaux-arts. 
 Mais  quoique  nous foyons  perfuadés que le premier  
 germe  des  beaux-arts a  exifté  chez  tous  les  
 peuples,  il  y   a  encore  fi  loin -des  premiers  eflais  
 jufqu’aii  terme  feulement  oh  la  culture  des  beaux-  
 arts  prit une  forme méthodique,  oh l’on commença  
 à  les  exercer  comme  des  arts  qui  pouvoient  être  
 enfeignés  ,  qu’on  eft  encore  toujours  fondé  à demander  
 chez quel  peuple  de là  terre ce  pas difficile  
 a été  le premier franchi.