ffavâns, qui feroient le felde la terre, cèttè terre eft
"couverte de légions innombrables de demi-fçavans
xjui ne font pas feulement dignes d’en être appelles
le fumier; matière certainement bien plus precieufe
•que tous leurs écrits. Tout regorge d’effais, d’exa-
'mens, de recherches, de differtations & de traités;
les preffes gémiffent, le papier enchérit, & le fça-
voir diminue en raifon de ces progrès : il eft relé-
•gué dans les cabinets de quelques adeptes., qui ne
s’empreffent pas à le proauire au grand jour, con-
ïioiffant & méprifant la frivolité du fiecle. '
•Je ne puis taire ici une chofe trop vraie, ce me
femble, pour -que perfonne de ceux qui penfent
•fagement, puiffent la défavouer, ou me blâmer de
l’aVoir dite. Il eft fâcheux que des hommes de la
plus grande célébrité, & qui ont à bien des égards
illuftré les temps & les lieux oh ils ont v é cu , prêtèrent
au tonde la décence celui d’une plaifanterie
dont on eft à la fin excédé, & qui donne le plus
îouvenï dans le bas, dans le trivial. Se jouant egalement
de tous les fujets, ne mettant aucune différence
entre les plus importans & les plus légers ,
ou plutôt fe plaifant à noyer par préférence les
premiers dans des flots de ridicule, ils introduifent
un genre de burlefque, qui, à ce que j’efpere , fera
une fin aufîi ignominieufe que celui du fiecle paffé.
On diftinguera les' chefs-d’oeuvre de ces écrivains
de leurs productions manquées ; ou bien, au lieu
■ que de femblables écarts etoient autrefois fuppor-
t é s , quand on pouvoit les intituler Juvtnilia , on
fondera l’indulgence pour eux fur le titre de Se~
7iilia.
Mais, en attendant, voici le mal défolant qui en
■ réfulte. C’eft qu’il y a une foule de fubalternes,
d e véritables goujats, qui , voulant fe mettre au
ton de ceux qu’ils prennent pour leurs chefs & leurs
modèles, barbouillent, faliffent, infeétent le papier
d’inutilités, d’indécences, d’horreurs. A la vue de
ce bouleverfement des loix , de cette dépravation
des moeurs, qui déshonorent la république des lettres
, ne feroit-ce point le cas de dire comme l’un
d e ceux qui y ont figuré avec le plus d’éclat : vive
i ’ignorance ! qu’elle revienne : ou allons la retrouver
parmi les fauvages. Point du tout : ne nous jet-
tons pas d’une extrémité dans line autre. Vive feulement,
vive le' bon efprit & la faine philofophie !
Mais oit les rencontrer ? Qui nous, les procurera ?
Je pourrois faire ici plus d’une réponfe ; mais je fuis
•borné par l’énoncé de mon fujet à charger les académies
de cette fonâion. Il ne refte qu’à faire voir
qu’elles doivent s’en acquitter, & comment elles
peuvent le faire.
Elles doivent s’en acquitter. Les plus fages d’entre
les anciens philofophes ont été appellés les apôtres
de la raifon. Cela eft fort bien dit : c’eft un titre
que les vrais philofophes font en droit de revendiquer
dans tous les temps. Il n’en fâudroit qu’un
feul dans un fiecle , ou du moins dans un état,
pour y répandre les clartés les plus falutaires, fi
la fageffe qui a toujours fon prix en elle - même ,
l’avoit toujours aux yeux des hommes. Mais on l’a
prefque continuellement vue la vi&ime, tantôt de
l’ignorance & de la barbarie, tantôt du faux zele
& de la fuperftition, jufqu’à ce qu’enfin la voilà devenue
le jouet de la frivolité & de la malignité.
Quand un feul homme voudroit réfifter à un pareil
torrent, il ne fieroit que troubler le: repos de Tes
jours, fans contribuer au bonheur de fes contemporains;
s’il évitoit la ciguë, au moins boiroit-il
Fabfynthe à longs traits. Si la chofe eft faifable, ce
n’eft qu’à des corps, à des compagnies qu’elle eft
réfervée. L’union des forces les augmente. Quand
de femblables corps jouiffent de la confidération qui
le u r eft d û e i ls peuvent être le foutien de la bonne
taufe dans l’étendue de leur fphere & de leur vocation.
L’églife veille au dépôt facré de la religion,
les tribunaux au maintien des loix ; c’eft aux académies
à faire régner un fa voir épuré, folide, fécond
en fruits précieux, qui donne, pour ainfi dire,
la chaffe .au demi - favoir, comme on l’a donnée
précédemment au faux favoir. Il faut précipiter
dans l’abîme de l’opprobre & de l’oubli toutes les
vaines productions de notre âg é, comme on y a
précipité les productions maufiades, d’abord de la
îcholaftique, & enfuite de la pédanterie, quiétoient
révérées dans les âges précédens. Les académies
n’ont point de devoir plus effentiel à remplir,^de
tâche plus glorieufe à exécuter. Qu’ont-elles à faire
pour y réuffir ?
D ’abord, & j’avoue que ce premier article ne
dépend pas entièrement d’elles, il convient qu’elles
foient compofées d’hommes également éclairés Se
bien intentionnés, qui n’aient d’autre but que la v érité
& le bien public. Quelle que foit d’ailleurs la
fcience particuliere à laquelle ils s’attachent, le
concours & le concert d’académiciens de cet ordre
produira l’effet defiré. On admirera, on aimera, on
refpeCtera, on imitera des hommes dévoués par
état à étendre les limites des connoiffances humaines;
lorfqu’on verra qu’exempts de partialité, de
paffion, de vues ambitieufes & intéreffées, de ja-
loufies & de difeordes, chacun d’eux reffemble à la
diligente abeille, qui porte fidèlement à la ruche
un miel qu’elle a recueilli fur les plantes les plus
falutaires. Pourroit - on nier que , fi les académies
étoient, & avoient toujours été telles , on verroit
revivre dans chacune d’elles l’aréopage le plus im-
pofant• & le plus efficace ? Que font-elles effectivement
? L’éloge ni la fatyre ne feroient ici à leur
place. Je les crois cependant, en les prenant telles
qu’elles font, en état d’influer beaucoup fur l’extirpation
du demi - favoir ; & c’eft à quoi je les invite.
Pour ne pas multiplier les moyens dont elles
peuvent fe fervir dans cêtte v u e , je me reftreins à
en indiquer deux ; le goût qui doit régner dans leurs
propres productions & l’approbation qu’elles donnent
à celles des autres. Au premier égard, les académiciens
peuvent compofer deux fortes d’ouvrages,
les mémoires qu’ils font entrer dans les recueils
académiques, & les livres qu’ils publient fé-
parément. Il eft de leur dignité, & de celle du corps
auquel ils ont l’honneur d’appartenir, que ces écrits
foient d’abord confacrés à la v érité, & enfuite fournis
aux loix de la décence, verum ac decens ; deux
conditions qu’a déjà exigées un des plus beaux génies
& des plus judicieux Ariftarques de l’antiquité.
Il ne s’agit pas de proferire le goût & de négliger
les ornemens qui rehauffent un fujet fans l’altérer
ni le dégrader. On peut être un écrivain folide &
profond, fans être froid, f e c , pefant. Des hommes
célébrés ont fuivi très - heureufement ce jufte milieu.
S’il n’exiftoit pas , cela feroit fâcheux; mais;
dans le cas d’opter, un académicien ne devroit-il
pas être tout décidé?
Quand les membres d’une académie fe feront
preferits de femblables lo ix , ils n’en difpenferont
affurément pas les autres ; ils ne donneront leur
attache qu’à des écrits marqués au même coin de
la vérité & ‘ de la décence. Le public littéraire eft
naturellement difpofé à confultef lés compagnies
favantes, & à regarder leurs réponfes comme des
décifions, des oracles. Voilà une grande avance :
il ne s’agit que de réalifer l’attente publique, & de
rendre effeâivement des oracles, autant que cela
convient à des bouches mortelles. Il s’agit d’encourager
& de diriger ceux en qui fe trouvent réunies
les lumières & les bonnes intentions, de diffuader
& de détourner avec douceur ceux à qui. les tâ-
îens manquent, de réprimer, d’écrafer, s’il le faut,
ceux qui affocient l’incapacité à l’infolence & à la
turpitude. Un demi-fiecle d’une femblable dictature
Tagement exercée par une académie \ produiroit les
changemens.les plus avantageux dans, l’étendue des
contrées fur lefquelles fon exemple a une influence
immédiate, &. ne pourroit qu’être utile à tout le
refte du genre humain ».■ (+)
§ ACADIE ou Nouvelle Ecosse, ( Géogr. )
Cette péninfule a environ cent vingt lieues de
long fur quarante dans fa plus grande largeur. Placée
entre l’ifle- de Terre-Neuve , 1a Nouvelle Angleterre,
& le Canada proprement dit , fa fitua-
îion eft très-avantageufe pour le commerce. Outre
les richeffes qui lui font propres, elle raffemble
encore aifément celles des contrées voifines. Le terroir
eft fertile en bled & en légumes. La pêche eft
abondante fur les côtes. La chaffe des caftors & des
autres amphibies y eft auffi facile & auffi abondante
que dans le refte de l’Amérique feptentrionale. An-
napolis, autrefois port royal , en eft la capitale.
Les Acadiens ont toutes les qualités eftimables
des Sauvages de l’Amérique feptentrionale & peu
de leurs défauts. Ils aiment la guerre & non pas le
carnage. Le but de leurs expéditions eft là paix après
la viâoire. Ils traitent leurs, prifonniers avec noblef-
f e , & ne les mangent pas. Dociles aux leçons de l’équitév
à l’épreuve des exemples du v ic e , ils ..ont
adopté notre morale fans adopter nos moeurs. Lorfqu’on
les découvrit, chaque, bourgade étoit gouvernée:
par un fagamo ou chef, dignité éle&Lve dont
On honoroit prefque toujours le chef dé la plus
nombreufe famille. Chaque pere comptoit fes enfans
avec autant de fierté, qu’un héros compte fes victoires
: c’étoit autant de titres pour mériter des fuffrages
dans une élection. La polygamie étoit tolérée en
faveur des plus robuftes. Le fagamo jouiffoit de la
pêche & de la chaffe des jeunes gens qui n’étoient
pas mariés ; & , même après leur mariage, il levoit
un tribut fur eux. Il les conduifoit à la guerre ; &
ces foldats, avant de partir, s’éxerçoient en luttant
contre leurs femmes : fi celles-:ci triomphoient, l’ait-
gu-re étoit favorable pour le fuccès de l’expédition :
fi elles étoient battues, on défefpéroit de la victoire,
mais on partoit toujours. Après la mort d’un pere
de famille , on mettoit le feu à fa cabane , .& Ton
ornoit fon tombeau de chofes qu’il avoit le plus
aimées. La naiffance d’un mâle, l ’apparition de fa
première dent , fon premier coup d’effai à la chaffe,
étoient marqués par autant de fêtes. Les femmes y
étoient traitées avec autant de dureté que de mépris,
chofe étonnante chez des hommes qui travailloient
■ avec tant de zèle à la propagation de l’efpece. Quant
à leur religion , à leurs mariages, à leur maniéré dè
vivre & de combattre, ils reflèmbloient aux autres
Sauvages du Canada, Voye^ Canada , Suppl,
Ce fut en 1 598 que le marquis de la Roche, que
Henri IV. avoit choifi pour continuer les découvertes
de Jacques Cartier , aborda fur les côtes
d'Acadie. En 1604, Pierre de Guaft, fieur de Monts,
& Samuel Champlain pénétrèrent jufqu’à' Tifthme
qui joint cette péninfule au continent. Les François
ne demeurèrent pas tranquilles dans leur établiffe-
ment : les Anglois leur enlevèrent leur conquête ;
mais elle fut Bientôt reftituée, foit que le cônfeil
britannique ignorât les richeffes de cette contrée
foit qu’il fut effrayé par l’impoflibilité d’ouvrir une
communication par terre entre Y Acadie & la Nouvelle
Angleterre. Les François rentrèrent donc dans
cette peninfule, & renouvelèrent leur alliance avec
les Saunages, qui, charmés de leur douceur; les
careffoient malgré les oracles de leurs jongleurs.
Ceu x -c i ne ceffoient de leur prédire que leur
Tome J, "
deftril&ion eritiere feroit l’ouvrage des François: il
étoit.plus à craindre que les François & les Anglois
ne fe détruififfent les uns les autres dans cette contrée.
La Tour y commandait au nom du roi de
France» Son pere , qui avoit paffé au fer vice du roi
d Angleterre, promit à ce prince de lui livrer VAcadie
, & crut que le jeune homme , féduit par l’efpé-
rance d une haute fortune, ne réfifteroit pas aux
follicitations d’un pere qu’il aimoit tendrement. U
s’embarqua donc chargé de riches promeffes & de
magnifiques préfents que S. M. B. prodiguoit au
gouverheun Trois fois il tenta de corrompre fon
fils, & trois fois le. jeune homme lui répondit avec
autant de nobleffe que de fermeté. Le pere, devenu
furieux, l’afliégea dans fon fort. Ses armes ne réuf-
firent pas mieux que fa politique. Enfin, craignant
de trouver en Angleterre une mort ignominieufe
poûr.prix d’une tentative inutile, il rentra dans fon
devoir, demeura en Acadie, & renvoya les Anglois.
Le gouvernement dè La Tour auroit fait le bonheur
de la'colonie, fi on ne lui avoit pas donné des collègues
avides, qui ennemis Tun de l’autre, le furent
bientôt auffi de cet officier. Le partage des terres,
les limites de leur jurifdicHon cauferent des débats
très-vifs ; la querelle s’échauffa de plus.en plus, &c
devint une guerre civile. Tandis qu’on étoit aux
mains,, les Anglois,, toujours attentifs à profiter de
nos fautes, firent une nouvelle irruption dans VA-
çadie. Les places évacuées leur offroient des conquêtes
faciles. Le feul Montorgueil, à la tête de
quatorze foldats, ofa leur réfifter dans le fort de
Chedabouftou. Il reçut cinq fommations confécu-
tivés-, & répondit toujours qu’il étoit François,
qu’il favoit combattre & mourir, mais qu’il n’avoit
point appris à capituler. Phibs livre plufieursaffauts ,
& n’eft pas plus heureux en guerre qu’en négociation.
Enfin, craignant de perdre, devant une mafure
défendue par quatorze malheureux, une réputation
acquife par des viâoires navales & des conquêtes
importantes , il fit mettre le feu à la place. Montorgueil,
fur le point d’être confumé avec fes compagnons
, dit qu’il capituleroit, fi on le laiffoit maître
des conditions ; & il le fut. Enfin l’Acadie reftituée à
la France en 1680, reconquife par les Anglois dans la
même année, reprife enfuite par les François, retombée
en 1690 fous la domination britannique ,
partagée enfuite entre lès deux nations, puis entièrement
fubjuguée par nos rivaux, vainement attaquée
par nos flottes, a été pendant löng-tems un
théâtre de révolutions, & , dans l’efpace d’un demi-
fiecle , a changé fept ou huit fois de maîtres & de cultivateurs.
Le traité d’Utrecht en a depuis affuré aux
Anglois la tranquille poffeffion. Les Sauvages, affez
indifferens fur le choix de leurs vôifins , avoient été
paifibles fpeétateurs de nos débats avec les Anglois :
ces change me ns fréquens fembloient moins les allar-
mçr que les récréer. Ils careffoient tour-à-tour les
vainqueurs , fans infulter les vaincus. Enfin , les
Anglois, par une libéralité politique, étoient parvenus
à les refroidir à nôtre égard, & à leur infpirer
une amitié durable; Pendant toutes ces guerres;
1 agriculture languiffoit en Acadie ; & cette province ;
peu féconde- en objets de lu x e, mais qui produit
avec abondance les denrées de première néceffité,
n’a fleuri que depuis la paix d’Utreçht. Les Anglois
l’ont appellée Nouvelle Ecoffe. (M. d e S â c y .')
ACAFRAN, ( Géogr. ) rivière confidérable dans
le royaume de Tremecen en Afrique. Elle prend fa
fource du mont Atlas , & fe jette dans la mer près
de Tenès. On la riommoit. autrefois Celef ou Quina-
la f , & aujourd’hui Vetxilef. (C . A . )
ACAMACU ,f. m. (Hiß. nat. Ornitholog.) efpece
de gobemouehe huppé du Bréfil, figuré par Séba,
vol, II.page$3 , planche S y , n°, 2 , lous le nom de
N ij