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* ALEZONNE , v'oye^ Alessonnè dans le Dicl.
raif. des Sciences, &c.
ALFAJATES, (Géogr.) jolie petite ville de Portugal,
dans la province de Beira; elle eft aux frontières
de la Caftille, fur la riviere de Coa au fud-
fud-eft de iVila-Mayor , 8c non loin des montagnes
de l’Abadia. Long, i z , i5. lat. 40, 20. (C.A .)
A LF A Q U E S , (G éog r .) Petites îles de la
Méditerannée, appartenantes à l’Efpagne ; elles font
prefque à l’embouchure de.l’Ebre, 8c vis-à-vis les
côtes de Catalogne , à très - peu de diftance des
terres. Long. 18, zo . lat. 40, 30. (C .A .)
ALFAS, (Géogr.) Petites îles de la mer Rouge,
vis-à-vis, la côte occidentale de l’Arabie Heureufe ;
elles ne font habitées que pendant quelques mois
de l’année par des Mores qui viennent de plufieurs
autres îles à la pêche des Perles ; elles font aunord-
eft des îles de Da & L a ç a . Long. 6 3 , 30, lat. j.y,
jo . (C. A .)
ALFON , (Hiß. Mythol. du nord.) était fils de
Sigard, roi de Danemarck. Son pere aimoit la paix
dans un fiecle o ù là manie des combats étoit prefque
la feule vertu. On ne peut lui faire un mérite de
fon éloignement pour la guerre; cette qualité pré-
cieufe & fi rare étoit un effet de fon indolence,
bien plus que de fon amour pour l’humanité. A
peine fu t-il monté fur le trône de Danemarck,
qu’il abandonna fes droits fur la Suede que Srwald
fon pere avoit conquife. Ce prince pufillanime ne
jouit pas cependant de la tranquillité qu’il croyoit
s’être aflurée par ce honteux facrifice. Ses trois fils
la troublèrent bientôt par leur humeur turbulente
8c leur goût pour la guerre. Alfon, fur le récit qu’on
lui fit de la beauté d’Alvide , fille du roi.de Goth-
land, en devint amoureux. Dès-lors, il jura de ne
prendre de repos que cette princeffe ne fût en fa
puiflance : ce ne fiit qu’après avoir couru dès aventures
trop fingulîeres pour être vraies, qu’il parvint
à voir fa flamme couronnée.
Les grâces de fa nouvelle époufe ne purent retenir
long -tems ce jeune prince dans l’oifiveté ; la
mer avoit été le théâtre de fes exploits, il y reparut
avec Alger fon frere. La fortune ne tarda pas
à leur offrir une occafion de fignaler leur courage :
ils rencontrèrent la flotte des trois fils d’Hamund,
roi d’un canton de la Suede. On fe battit de part 8c
d’autre avec acharnement : la nuit fépara les combat-
tans fans qu’on eût pu décider de quel côté avoit penché
la victoire. Le lendemain, chaque chefs’apperçut
que le combat de la veille avoit fi fort diminué
le nombre de fes troupes, qu’il lu i r e f lo i t à peine
affez de monde pour ramener la flotte dans les
ports. On ne parla plus de fe battre ; & l’impuif-
fance de faire la guerre fit à l’inftmt ligner la paix
aux deux partis. Alfon retourna en Danemarck,
aufli indigné de n’avoir pas gagné la bataille qu’un
autre l’eût été de l’avoir perdue. Il équippa une
nouvelle flotte, & vint attaquer les princes Suédois
q u i, fe fiant trop fur la foi des traités , n’étoient
point préparés à le recevoir. H e lw in & Hamund
qu’il rencontra les premiers , furent les viftimes de
leur fécurité ; mais Hagbert ayant appris la défaite
de fes freres , vint fondre à fon tour fur les Danois
à l ’in ftant où , chargés de butin , ils remontoient fur
leurs vaiffeaux. Alfon 8c Alger furent faits prifon-
niers dans cette occafion, 8c le vainqueur les immola
fans pitié aux mânes de fes freres. ( M. d e
S a c y . )
ALFRED le grand , ( Hiß. (TAngleterre.) L’ancien
Minos vivoit encore, quand la reconnoiflance
publique lui décerna les honneurs de l’apothéofe : il
mérita fans doute l’eftime & la vénération dès Créa
i s qu’il rendit heureux par fes lois & par fes bienfaits.
Mais alors n’y avoit-il donc qu’un fils de Ju-
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pitèr qui pût conftruire des ville s , les peupler, en
ecarter l’oifiveté, les vices, la volupté, le crime,
le'kixe & les plaifirs ? Car ce fut à oes feules infti-
tutions que Minos, qui ne fut ni guerrier ni conquérant,
dut le titre fublime & ridiculement faftueux
de fils du fouverain des dieux. Ainfi, dans des tems
pofterieurs, l’oracle d’Apollon rendit publiquement
hommage aux vertus de Lycurgue , qu’il déclara
dieu plutôt qu homme , pour avoir à quelques loix
fages, mais impraticables ailleurs' que dans la
trifte & févere Lacédémone, mêlé des lois évidemment
contraires à la pudeur, à la décence, des lois
également défavouées par l’humanité qu’elles'outra-
geoient, par la nature qu’elles offenfoient, & par
la probité la plus commune qu’elles avilifloient.
Lycurgue cependant, qui ne fut ni le plus éclairé
des légiflateurs, ni le meilleur des citoyens, fut
jugé digne du refpeét de la Grece 8c des éloges
de la. poftérité. Toutefois cet homme célébré me
paroît fort au-deflbus de Numa ; de Numa qui fut
un grand ro i, quoiqu’il n’eût de la royauté- que les
vertus politiques, dans un tems où Rome naiflante ,
environnée de nations jaloufes , avoit befoin d’un
roi guerrier ; mais il fut infpirer aux Romains encore
indociles, barbares, l’amour de la juftice & la crainte
des dieux. Il eft vrai que, pour réuflïr,il eut recours
à l’impofture , & ce moyen, quelque fuccès qu’il
eû t, dégrade un peu le çaraftere de ce-iégiflateur,
q u i, par fes fréquens entretiens avec la nymphe
Egérie , me paroît n’avoit cherché qu’à couvrir du
merveilleux l’infiiffifance de fes lois. Si l’on trouvoit
peu de juftefle dans ces réflexions,8 c que l’on me
demandât quel a donc été à mon avis le plus illu-
ftre & le plus grand des rois ? quel a été le plus fage
& le plus éclairé d’entre les légiflateurs ? Je nommerais
Alfred, raconterais fa vie-, 8c croirois n’avoir
rien à dire de plus fur ces deux queftions, qui
à.la vérité’, s’il n’eût point exifté, me paroîtroient de
te plus épineufe. difficulté. Vainement j’ai confulté
l’hiltoire des peuples de i’antiquité ; j’ai fouillé vainement
aufli dans les annales des nations modernes ;
je n’ai vu nulle part de fouverain qui puifle entrer
en parallèle àvec Alfred, foit relativement à fes vertus
guerrières , foit relativement à la profonde fa-
gefle de fa légiflation, foit enfin que l’on ne confidere
en lui que l’étendue de fon érudition, la variété de
fes talens, fon goût pour la littérature , ou la foli-
dité de fa philofophie , dans un fiecle qui ne fut
néanmoins, ni celui des fciences, ni celui des belles-
lettres , 8c beaucoup.moins encore-celui de la philofophie.
Ce qui ajoute encore à la gloire d’Alfred, c’eff:
qu’il ne dut qu’à lui-même, à fa valeur, à fon génie ,
l’éclat de fes viâo ires , l’illuftration de fon régné , le
bonheur de fes peuples & les droits qu’il acquit à
l ’immortalité. Quelques préfages en effet, qu’il donnât
dans fon enfance, des grandes chofes qu’il pour-
roi* faire un jo u r , Ethelwolf, fon pere, ne fongea
point à dévëloper fes talens par une éducation foi-
gnee. Dans ces tems d’ignorance , les princes n’étoient
ni plus ni mieux inflruits que les particuliers ; 8c
ceux-ci faifoient confifter toutes leurs connoiflances
à combattre , à s’abandonner à leurs pallions, &c
fur-tout à refpeâer les préjugés ftupides qui gou-
vernoientla multitude. Le feul moyen qu’Ethelwolf
employa pour inftruire & former fon fils, fut de
l’envoyer àR om e ,fu iv i d’un cortege nombreux :
car Rome étoit alors la feule ville où la lueur des
lettres fe laiflât apperçevoir à travers le ' voile épais
de l’ignorance qui couvroit le refte de l’Europe.
Alfred ri eut ni le tems , ni la liberté de s’inftruire
dans cette capitale. A peine il y fut arrivé, que le
bruit de la mort d’Ethelwolf l’obligea d’en fortir ;
mais avant fon départ, il fut contraint, par déférence,
de fouffrir que le pape Léon III. le facrât roi
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d’Angleterre, toit que par la folemnité de cette cérémonie
, Léon III. voulût donner au jeune prince
des marques diftinguées de fon affe&ion, foit, comme
il eft plus vraifemblable, qu’il voulût lui faire
fentir que c’étoit exclufivement au fouverain pontife
qu’appartenoit le droit de conférer les couronnes.
A lfr e d fe laifla facrer, fortit de Rome , fe hâta
de revenir en Angleterre, trouva fori pere fur le
trône, continua à-raire les délices, de la cour , 8c à
vivre dans l’ignorance, jufqu’à ce qu’un événement
qu’il ne prévoyoit pas, le fit rougir des jeux qui
l’occupoient & de fon incapacité. Ecoutant un jou r,
la leâiure qu’on faifoit à la reine fa mere d’un po.ëme
Saxon, la grandeur d’ame des héros*qui agifîbient
dans ce poëme , l’élévation de leurs fentimens, &
leurs belles a étions le frappèrent, fon génie s’exalta ;
& fentant tout-à-coup fe développer en lui les fen-
ti’mens généreux 8c fublimes qu’il avoit reçus de la
nature, il promit d’égaler 8c de furpaflèr même lès
grands hommes que le poëte avoit propofés pour modèles.
Fidele à fes promefles 8c encouragé par la
reine, il apprit à lire,- dévora ce même poeme dont
la leéture avoit fait tant'd’impreflion fur fon ame,
étudia le latin, 8c ne cefla de cônfulter & de méditer
les auteurs les plus célébrés de l’antiquité, jufqu’à
ce que la mort d’Ethelwolf fît pafler dans fes mains
le fceptre britannique : digne de' parcourir la brillante
carrière quis’ouvroit devant lui, Alfred ne méritait
point les malheurs 8c les défaftres qu’il avoit
çà effuyer dans les premières années de fon régné ;
mais à peine il fut monté fur le trône, qu’il fe vit
obligé* d’aller délivrer fes provinces du brigandage
des Danois qui les avoient envahies 8c qui les rava-
geoient; il remporta fur eux d’éclatantes victoires':
mais l’inépuifable nord vomiffant continuellement
des eflaims de barbares, qui fe joignoient au refle
des Danois échappés à la valeur des Saxons, il vit
bientôt fon royaume hors d’état de réfifter à cette
foule de brigands qui l’attaquerent de tous côtés.
Alfred, d’autant plus grand, d’autant plus intrépide
que le danger étoit plus preflant , raflembla
toutes fes forces, 8c redoublant d’aéiivité, livra-huit
batailles en une année, triompha toutes les fois qu’il
combattit, 8c réduifit fes ennemis à une telle extrémité,
qu’ils lui demandèrent la paix, & promirent
d’accepter toutes les conditions qu’il voudrait leur
impofer. Mais pendant op? Alfred prenoit les plus
fages mefures pour mettre fin à ces hoftilités, il apprit
qu’une nouvelle armée de Danois plus nom-
breufe que toutes celles qui jufqu’alors avoient dé-
folé l’Angleterre, venoit de débarquer, & qu’elle
portait le ravage, la terreur & la mort dans toutes
les provinces. Ce malheureux événement abattit le
courage des Saxons; la plupart prirent la fuite devant
ce torrent deftrutteur, & coururent fe cacher
dans le pays de Galles : quelques-uns plus effrayés
encore, paflerent au-delà des mers, & plufieurs
efpérant de trouver leur falut dans une prompte
obéiflance, allèrent au-devant des chaînes que ces
brigands leur préfentoient. Ainfi, l’armée ri Alfred
difperfée & fon royaume en proie aux fureurs des
Danois , il ne lui reftaplus, pour dérober fa tête à la
férocité de ces ufurpateurs, que la trifte reffource de
chercher dans fes états envahis un afyle impénétrable
à la pourfuite de fes ennemis. U renvoya le peu de
domeftiques qui lui étoient reftés fideles, fe dépouilla
des marques de la royauté ; fe traveftit afin de n’être
point connu, & pafla, vêtu en payfan, dans la province
d’Athelney, chez un pâtre qui le reçut dans fa
cabane, & où il demeura fix mois.
Cependant les Danois, poflefleurs du royau-
me, fuppofantle roi Alfred enveloppé dans le nombre
des Saxons qu’ils avoient maflacrés, & ne fe
doutant point qu’on ofât les troubler dans leur con-
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^ueten’ gardèrent plus ni ordre, ni difcipline*
Entraînés par leur goût effréné pour la débauche , ils
fe répandirent dans la campagne, perfuadés qu’il ne
leur reftoit plus d’ennemis à combattre , ni précautions
d’aucune efpece à obferver. Le bruit de leur
licence , de leur débauche , 6c fur-tout de leur fécu-
n te , pénétra jufques dans la cabane d'Alfred qui, ne
voulant s’en rapporter qu’à lui-même, prit le moyen
le plus hafardeux, mais aufli le plus fur, pour juger
fainement de l’état des chofes. Il s’introduifit, dé-
guifé en joueur de harpe , dans le camp des Danois ;
amufa les foldats par fes chants & par fa gaieté, vit
tout, examina tout, ofa pénétrer même jufques dans
la' tenté de Guthrum, leur prince & leur général, s’y
fit retenir quelques jours par les charmes de fa mu-
fique & la vivacité de fa converfation ; s’éloigna fans
qbftàcles, revint dans la cabane de fon hôte, fit avertir
ceux de fes officiers qui s’ëtoient le plus diftingués
par leur valeur &leu r fidélité, les harangua, & leur
fit voir combien les circonftances étoient favorables,
& combien il leur feroit facile de fe venger & de
délivrer le royaume des brigands qui l’opprimoient.
La harangue ri Alfredranime fes guerriers, ils jurent
de rafîembler les fqldats que la frayeur a difperfés,
& fixent à’ieur roi le jour où ils viendront fe ranger
fous feS ordres. Fideles à leurs promefles, ils reviennent
au tems marqué, fuivis d’une armée formidable,
finon pairie nombre, du moins par le defir de fe
venger des outrages qu’ils ont reçus, par l’efpérance
de relever le trône, & fur-tout par cette audace qui
dans les mom,ens décififs annonce l’héroïfme & pré-
fage le fuccès. Alfred n’a plus befoin d’exciter leur
courage ; il fe met à leur tête, & par des routes
détournées marche vers le camp, des Danois : ceux-
ci avoient paflë la nuit dans la débauche, & dor-
moient afloupis par les vapeurs de la fatiété. Alfred
& fon armée s’élancent dans le camp, & fans avoir
fo tems defe reconnoître, les Danois attaqués de tous
cotes , fe laifîent égorger, hors d’état d’oppofer la
plus légère réfiftance, 6c leur camp eft couvert de
cadavres. Les Saxons ne- perdirent prefque aucun
foldat, exterminèrent cette foute de brigands, &
firent un butin immenfe : ceux d’entre les Danois qui
avoient pu fe dérober par la fuite au fer des vainqueurs,
s’étaient réfugiés dans tes forêts; ils y furent
pourfuivis , & dans la crainte d’être maflacrés ,
s’ils ofoient réfifter , ils implorèrent la clémence
d’Afred qui, peu content de leur accorder la vie
& la liberté, n’exigea d’eux & de Guthrum, leur
chef, d’autre condition , s’ils vouloient refter dans
1e pays, que celte d’embrafler le catholicifme & de
fe faire baptifer. Les Danois acceptèrent cette pro-
pofition avec reconnoiflance , 6c 1e vainqueur leur
donna à repeupler tes royaumes d’Eftanglie & de
Northumberland, dévaftés 8c prefque deferts par
tes fréquentes incurfions des barbares.
Les Danois établis dans d’autres provinces britanniques
, étonnés de la générofité ri Alfred, fe hâtèrent
de lui rendre hommage, 8c de fe déclarer fes
vaflaux 8c fes tributaires. Ainfi, dans une feule
journée , & par une feule victoire, Alfred fit cefler
l’oppreflion, la tyrannie 8c tes crimes qui ravâgeoient
fes états; reprit fon fceptre, vengea fes fujetSj 8c
brifa tes fers dè l’efclavage qui tes avoient fi long-
tems enchaînés. Mais tes travaux d'Alfred n’étoient
point finis encore ; fon royaume reconquis, fon trône
raffermi fuffifoient pour l’élever au rang des plus
piagnanimes héros ; une carrière plus épineufe s’ou*
vroit devant lui, celte qui n’appartient qu’aux grands
hommes , aux rois équitables, aux génies fublimes,
de parcourir avec fuccès. Il régnoit à la vérité, mais
fur un royaume épuifé, défolé dans toutes fes parties
, 8c qui ne préfentoit à fes yeux étonnés que des
ruines, des débris, tes déplorables reftç.s de la