
 
        
         
		fenfible  qu’il  n’auroit  pu  .le  faire  fans,  allégorie. 
 ALLÉGORIE,  relativement  aux  arts  de  la  parole. 
 Nous nous propofons ici de faire trois recherches.  
 ï° .  Sur la  nature  &  l’effet  de  Vallégorie, en  général.  
 x°.  Sur  fes  divers  genres,  leurs  carafleres .particuliers  
 8c  leur pa ge .  30.  Sur les  fources  d’ôii  l’on  
 doit  les  tiré r,  _  r 
 Toute  allégorie,  en  général,  doit  renfermer  une  
 image, qui détermine la chofe qu’on veut exprimer,  
 &  qui  la  faffe  connaître  fous  une  face  plus  ayan-  
 tagëufe.  \J allégorie  doit  déterminer  fon  ,o bjet,  &   
 le  déterminer ave.c  précifion,  fans  cela elle deÿient  
 énigme. Elle doit le préfenrer plus avantageufement,  
 fans  quoi  elle .devient inutile.  De-là refultent deux  
 .qualités  effentiellès  à  Y allégorie,  un  rapport  exa&  
 entre  l’image & l’objet ; afin  que celui-ci le prefente  
 d’abord à  i’efprit ; &  une beauté énergique dans l’image  
 pour que l’objet gagne à être préfënté figurément.  
 ’  Outre  ces deux qualités  effentielles, Y allégorie  en  
 doit  encore  avoir  deux  autres ;  l’une ,  c’eft qu’elle  
 ne foit  pas pouffée trop  loin ;  Sc la fécondé ,  qu’on  
 n’y   ajoute  rien  qui  retombe  dans  le  fens  propre ;  
 deux  défauts qui  répandent fur  Y allégorie une  teinte  
 d’abfurdifé.  Les  anciens ont défigné le corps humain  
 par le terme de microcofme, o,u de monde en abrégé.  
 Vallégorie  eft  jufte  ,  mais  fi  l’on  entreprenoit  de  
 l ’étendre, d’en détailler les principaux rapports, d’af-  
 ligner  à  ce. petit monde  fes planètes ,  fes habitans,  
 fes  montagnes,  &  fes  vallées,  onppu fier oit Y allégorie  
 jufqu’aii  ridicule.. On  ppurroit  ainfi  gâter  la  
 belle  allégorie  de  Platon  qui  repréfente les paflionç  
 fous l’image  de  courfiers  attelés  à un  char ,  que  la  
 raifon guide ; qu’on y  ajoute le timon 8c les roues, il  
 n’y  aura rien dans l’ame  qui réponde à ces nouvelles  
 images.  Il faut  donc éviter  foigneufement  de^  faire  
 entrer  dans Y allégorie  des  détails  qui  n’ont point de  
 parties  corréfpondantes  dans  l’objet défigné; ou  du  
 moins  ces . détails  ne  doivent être  énoncés que  bien  
 foiblement,  fi  l’on ne peut  fe difpenfer  abfolument  
 d’en faire  mention.  ; 
 11 eft pareillement abfiirde d’entamer une allégorie,  
 &   de  finir par  l’exprejfion propre.  Pope a  admirablement  
 bien dit : 
 D'rinck deep, or tajle not  the  Pierian fpring ; 
 There  shallow  draughtsintoxicates the  brain, 
 And drincking Largely fober  us  again. 
 ( Effay on  Criticifm. v.  218. ) 
 Buvei  à  longs  traits  a  la fontaine  des Mufes,  ou  
 ne  goîtte£ point  de fes eaux j  de petits  traits enivrent j  
 ce riejiquaforce  de  boire qu on  dijfipe Civreffe.  N’auroit 
 il  pas  été  ridicule  de  terminer  ainfi  Y allégorie:  
 de petits  traits  enivrent, mais  plus  on y  puife ,  plus  
 on  acquiert  de  connoiffances folides ? 
 Enfin  l’image  doit  être  unique  fans^  confufion  ,  
 fans  mélange  d’autres  objets.  Une  idée  peut  fans  
 doute  être  rendue  fenfible 8c parfaitement représentée  
 fous  plus  d’une  image.  Mais  l’accumulation  de  
 ces  images  dans  une  feule  figure  l’obfcurçiroit.  Ne  
 commencez pas,  dit  Quintilien,  par  une  tempête  
 pour  finir  par  des  flammes  (  Injl.  Or.  L  F 1II.  G ,  
 So.).  Voilà  les qualités qu’on peut exiger d’une  allégorie  
 ;  en  voici  l’effet. 
 L’effet de Y allégorie,  eft en général, celui de toute  
 image ; c’eft  de  préfenter  des  idées abftraites,  fous  
 une  forme  fenfible  à  notre  efprit,  8c  de  nous  en  
 donner  par  ce  moyen  une  connoiffance  intuitive.  
 Mais  YaÛégo/ie  l’emporte  à  cet  égard fur tous  les  
 autres genres d’images ; comme elle fupprime  l’objet  
 même,  fa  brièveté  lui donne  plus  de  vivacité ; &   
 comme,  par  la  même  raifon,  toute  l’attention  eft  
 d’abord  fixée  fur l’exa&e  représentation  de l’image ,  
 l’objet  s’y  préfente  enfuite  avec  plus  de rapidité 8c  
 d’exa&itude, dans toute fa clarté. Quand B0dîner fait 
 dire à Jacob dans fon poème : ontnepréfenta une coupe  
 remplie d'abfynte / à peine en  avoit-on emmiele le bord,  
 il donne à fon récit  une vivacité qu’il n’eût point eue ?  
 s’il  avoit  fait  de  gette belle  allégorie une  comparaison. 
   L’allégorie  eft  de toutes  les images la plus énergique  
 ;  8c  après  elle ,  c’eft la  comparaison  qui  a  le  
 plus  de  vivacité.  Foye^ Comparaison , Suppl. 
 Quant à l’ufage de Yallégorie ,  il  faut  obferver en  
 général, que  l’excès  feroit un défaut ; c’ eft  un fim-  
 ple  affaifonnement qu’on ne  doit  emplqyer qu’avec  
 modération.  Des allégories  trop  fréquentes  feroient  
 perdre  le goût de  la belle fimplicité.  D ’ailleurs l’accumulation  
 des  images.,  jette la  confufion dans l’ef-  
 prit ; bien loin d’y  répandre  une  plus  grande clarté,  
 elle  n’y   laiffe  qu’un  cahos  d’objets fenfible.  Young,  
 cet auteur d’ailleurs fi excellent, n’a que trop fouvent  
 donné  dans  ce  défaut  en compofant  fes  Nuits. 
 A la fuite de ces remarques générales, nous allons  
 examiner  les  diverfes  efpeces $  allégorie,  qui réful-  
 tent  ou de  la  différence  du  but  qu’on s’y  propofe ,   
 ou  de  fes  différens  effets. 
 Il  eft  très-probable  que  c’ eft  la  né.ceflité  qui  a  
 introduit Y allégorie dans le  difcours. Aufli long-tems  
 que  la  langue manquoit de  termes propres à  exprir  
 mer des notions  générales  ,  on  étoit  réduit,  pour  
 défigner  un  homme  emporté  8c  vindicatif,  à  lui  
 donner  le  nom  de  chien  ,  ou  de  quelque  autre  
 animal  ,  auquel  on  avoit  reconnu  lès  memes  ca?  
 ra&eres.  Le  but  de  Y allégorie fe  bornoit alors  tout  
 Amplement à  lever l’impoflibilité d’exprimer la chbr  
 fe.  Les  langues  ont  retenu  un  très-grand  nombre  
 d'allégories de  cette efpeee, qui, par le lqng ufage, ont  
 pleinement acquis le caraâere d’exprefliqns propres. 
 Après  cet ufage  de  première  néceflite ,  Yallègç,<-  
 fie  en  a  un  fécond,  qui  çonfifte  ,  non pas  encore  
 à  donner  une  beauté  d’énergie  à  la  chofe  qu’on  
 yeiit  repréfenter ,  mais à  lui  donner  un  tour  plus  
 délicat,  qui s’élqigne de  l’expreflion  vulgaire  ;  c’eft  
 en quelque  maniéré faire  un  compliment obligeant  
 aux  perfonnes  auxquelles  on  adreffe  le  difcours.  
 Virgile  a eu ce but  dans  quelques-unes de fes églo-  
 gues.  Ce poète pouvoit témoigner fa reconnoiffance  
 envers  Àugufte,  8c  tous les fentimens qu’il exprime  
 dans  fes  églogues,  avec  autant  8c  plus  d’énergie ,   
 en  termes  directs.  Mais Y allégorie  donne, à fes  peu?  
 fées  un  tour  plus  fin 8c  plus  fpirituel.  Un  homme  
 d’efprit emploiera toujours  la  tournure  allégorique  
 lorfqu’Ù fera  queftion  de  louer ou  de blâmer.  Des  
 éloges  ou  des  reproches  direfts  ont  une  dureté  
 qui  tient  trop  du  vulgaire. 
 Mais l’ufage de Y allégorie acquiert un nouveau dér  
 gré d’importance,  lorfqu’à  la  tournure  délicate  on  
 réunit  encore  le  but  de  voiler  l’objet  ou  le  fens  
 propre  ,  jufqu’à ce  que  le jugement  foit à l’abri de  
 toute  prévention.  C ’eft  lé même  avantage  qu’on  
 retire  de  l’apologue  ,  8c par le même moyem  T e l  
 eft le célébré difcours  du  conful Ménenius  Agrippa,  
 q u i,  par  cet  artifice  ,  fut  appaifer la  révolte  dès  
 Plébéiens. {Tit. Liv.  ƒ / ,  32. ) 
 Ces  deux  efpeces  YYallégorie n’exigent nullement  
 une  analogie  parfaite,  &   qui  s’étende  à  toutes les  
 circonftances.  L’allégorie  dégénéré  en  puérilité dès  
 au’on  veut  appuyer  fu r . chaque  partie  de. détail.  
 Il  fuffit pour  le  but  qu’on  fe propofe ,  que  la  pror  
 pofition  principale  qu’on  vent  établir  le^ retrouve  
 dépeinte  dans  l’image  d’une  maniéré intuitive. 
 On  emploie  quelquefois  Yallégorie  uniquement  
 dans  la  yue  de  donner *à  une  idée  plus  de  clarté  ,  
 &  de  la  rendre affez  fenfible pour  qu’elle s’imprime  
 dans  l’efprit  ,  &  qu’elle  n’en puiffe être  trop facile^  
 ment  effacée.  La  penlée  que  Haller  a  exprimée  
 avec  une  précifion  philofophique  :  les  jouiffances  
 accroiffent  les  defirs,  Horace  l’a  rendue  fous  cette  
 allégorie ;   ,  .  >t. ^  .. 
 Crefcit  indulgens fibi  diras  hydrops , 
 Nec fitirn pellit,  niji  caufa  morbi  
 Fugerit  venis  & aquofus  albq. 
 Corpore  langor. f  Öd. L.  II.  2, ) 
 La première maniéré  eft  pour  les  philofophes  ;  
 Celle-ci eft  pour tout  le monde.  Ce  que  Tune  dit  à  
 l’entehdemènt,  l’autre  le  peint à l’imagination.  Des  
 allégories  de cette  efpete fônt tfès-néeeffaires ; 'lorf-  
 qu’il s’agit d’inculquer d’une maniéré  ineffaçable des  
 vérités générales &  importantes.  C’eft Ce^qui-a produit  
 tant  de  proverbes  âllé'goriquês,  qui-foiis  appartiennent  
 à  l’efpeée  dont nous  parlons.  Lés conditions  
 efferitielles  font que  l’image  -foit  bien  dif-  
 finfté ;  que  pour  être  ttiiëux  faifie  ,  elle foit prife  
 d’objets1 connus  ;  &  qu’on n’y  emploie fuie1 très-peu  
 de  traits',  mais des  traits bien  caraâérilés.  Horace  
 à rempli  toutes  ces  conditions  dans l’exemple' fui-  
 vant-: 
 Sapiûs  ventis  agitatur  ingms. 
 P  inus ,  &  celfa graviore  cafit  ‘ 
 JDèçidunt  turres , feriuntque Jumfnôi 
 Fulmina montes. ( Öd.  L.  II.  10.') 
 Ces  allégories,  au  rèfte  ,  ne  fervent  qu’à graver  
 dans  la  mémoire  des  vérités  connues  ;  mais  ces  
 vérités ont d’autant plus befoin  d’être  rendues intuitives, 
  qu’étant des notions communes, qu’on peut fai-  
 fir fans  le moindre effort, c’e ft ,  pour  me  fervir de  
 l’ingénieufé expreffion de Winckelmàn , un  vaiffeau  
 qui  ne  trace fur  la  mer  que  des  filions  momentanés. 
   Au lieu que  ce  qui  coûte  quelques  efforts  à  
 l ’efprit-,  s’imprime  plus  fûrement  dans la mémoire. 
 Ùallégorie peut encore  avoir un  but plus  relevé >  
 c’eft  d’eiioncer  les  chofes d’une  maniéré plus forte  
 &   plus  exprefiive,   &   de  les  préfenter  en  même  
 tems  dans  un  plus grand jour. C’eft  ainfi que Haller  
 emploie  Yallégorie  de  Y état  de  chenille,  dont nous  
 avons parlé ,  &  que  Young  a  dit : 
 Mine  dy,d  with  thèe  Philander  !  Thy  laß figh •  
 Dißolv’d  the  charm ;  the difenchanted  earth  Lofi ail  
 her Ittßre. 
 Ma jo li  a  difparu  avec  toi,  cher  Philandre i   ton  
 dernier foupir a dißipl le charme,  & la terre défenchan-  
 léè  a perdu fes  attraits. 
 Plus  on examine ces images de près, plus on leur  
 trouve  de  vie  &   d’énergie  ;  le  nombre  des  idées  
 qui  fe  rapportent  à  l’objet  repréfenté,  augmente  
 à  mefure  qu’on  y  réfléchit.  Cette  efpeee  G allégorie  
 a  la  plus grande  énergie ,  car  elle réunit l’effet  des  
 fenfations ,  de  la  brièveté ,  de  la  clarté,  de  la ri-  
 cheffe  &   de  la  force ;  aufli  fait-elle  une  des  grandes  
 .beautés de  la poëfie.  Elle tient même quelquefois  
 lieu de  preuve. Il y  a en  effet certaines vérités,  
 dont on  peut moins s’aflurer par une  démonftration  
 . diftinfte, que pan un coup-d’oeil rapide qui embraffe  
 plufieurs  circonftances particulières ;  Yallégorie  fert  
 de  preuves  aux vérités de ce genre  ;  &  c’eft ici que  
 des  reffemblanèes éloignées  ont  une  grande  force,  
 .&  rendent Yallégorie  plus  vive. 
 L’allégorie qui n’a  principalement pour but que de  
 rendre une penfée  avec plus  de brièveté,  n’eft  pas  
 îout-à-fait aufli  importante que  celle  dont nous venons  
 de  parler.  Telle e f t ,  par  exemple,  cette allégorie  
 d’Horace : 
 Contrahes  vento  nimium fecundo  
 Turgida  vêla. 
 Enfin  il y   a  çncore  une  efpeee  d’allégorie  qu’on  
 pourroit  nommer  Yallégorie myférieufe,  ou prophé-,  
 tique y  parce  qu’en  effet  plufieurs  prophéties  font  
 écrites  dans  ce  ftylè.  Elle  tient  le  milieu  entre  
 Yallégorie  claire  &   l’énigme,  &   elle  fert  à  donner  
 plus .de  folemnité  de  de  gravité  au  difcours,  Elle  
 *•=  Tome  h 
 ne  nous  laiffe  entrevoir  qu’une  partie  de  la  çhofé  
 repréfentée,  &   couvre  le  refte  d’un  voile  facréi  
 Cette  efpeee  eft propre  dans les  allions grandes  ÔC  
 folemnelles,  auxquelles  on  intéreffe  des  êtres fu-  
 périeurs.  Elle  produit. fur - tout  un  très-bon  effet  
 dans.  le  haut  tragique. 
 Nous  avons  rapporté  jufqu’ici  les diverfes  eipe-  
 ces 8allégories ;  il  en  eft  encore une  , celle qui per-.  
 Tonifie lésaiotions  abftraites; mais nous en parlerons  
 dans  un autre  article,  ‘ 
 Quant  aux  fources  d’oii l’on  puife  les allégories 1  
 çe  font  la  nature,  le S  moeurs  &   ufages  des  peuples  
 , les fciences &   les  arts ;  mais  c’eft  l’efprit feul  
 qui  fait  y   puifer.  De  même  que  le  corps humain  
 eft  l’image  de  l’ame,  de  même  aufli  le  monde vi-  
 fible.eft  l’image  du. monde  des  efprits  ;  il  n’y  a rien  
 dans l’un qui  n’ait  quelque  chofe  d’analogue  dans  
 l’autré.  Un  efprit  pénétrant ,  qui'/en  oblervantla  
 nature,  ne  s’arrêtera  pas à  l’écorce,  mais  qui percera  
 jufqii’aùx parties invifibles du monde phyfique,  
 y   trouvera  des  allégories  de  l’efpece  la  plus  parfaite. 
   C’eft  une  étude  qii’on nefauroit  trop recommander  
 aux  poètes.  Les  modernes,  qui  ont  écrit  
 fur  , l’hiftoire  de  là  nature *  nous  ont  préfënté  cet  
 immenfe  théâtre  dans  un  ordre  &   avec, une  clarté  
 dont les  anciens  n’approchent  point.  Mais  il  n’y   a  
 que  des  poètes  philofophes  qui  puiffent  moiffon-  
 ner  dans  ce  vafte  champ  ;  &   furpaffer  aifément  
 les  anciens  dans  cette, partie.  Nos.  faifeurs  d’odes  
 n’ont  encore  guere  profité  de  cetté fôurcè. 
 Les’  moeurs  8c  les  ufages  de  la  nation  fönt  la  
 fource la  plus  commune,  d’où  l’on  peut  tirer l’efpece  
 G allégorie qui  fe  borne  à  la  brièveté  8c  à  la  
 clarté.  G’eft  de-là  principalement qu’Horace a puifé  
 fes  nombreufes  allégories.  Les  ufages  d’un  peuple  
 encore  groflîer  ont  fur-tout quelque chofe de très-  
 fignificatif,  qui  peut  fournir  de  bonnes  allégories  
 C ’étoit,  par  exemple,  l’ufage  des  anciens  Celtes  
 quand  ils  entroient  dans  un  pays  étranger,  de  
 porter  la  pointe  de  leur" pique  eh  avant  s’ils  v e -   
 noient comme ennemis  ,  8c en arriéré s’ils n’avoient  
 que  des  fentimens  pacifiques.  XIallégorie  eft  aifée  à  
 faifir.  Le poète Efchyle-en a  tiré une  très-belle de  
 la  coutume  qu’avoient  les  anciens  navigateurs  de  
 placer  les  images  de  leurs  dieux  tutélaires  fur  la  
 poupe du vaiffeaih  , 
 Enfin  les  fciences y  8c fur-tôut  les  arts, qui s’occupent  
 d’objets matériels ,  renferment un très-grand  
 nombre de fujets propres  à  Yallégorie.  Plus  ces  fu-  
 jets  font connus,. 8c faciles à  concevoir,  plus leur  
 choix  eft heureux... Celui  qui  èxâmineroit  avec foin  
 les Opérations  des artiftes*  8c les ouvrages  de l’art,  
 dans  la vue d’obferver ce qu’ils contiennent de  fignificatif, 
   rendroit un  grand fervice aux poètes 8c aux  
 orateurs.  Entre  les poètes  allemands  ,  c’ëft Hagendorn  
 8c  Bodmer  qui  fe  font le  plus appliqués à puifer  
 dans  cette  fource.  Leurs  ouvrages  font  parfe-  
 més d’allufions,-  d’images ,  de  comparaifons 8c d’al~  
 légories,qu’ils ont empruntées des arts 8c des  fciences. 
 Concluons de  toutes  ces  remarques  que  l’étude  
 de  la  nature ,  des  moeurs 8c des  ufages  des  divers  
 peuples,  des fciences 8c des arts,  eft non-fèulement  
 ttès-néceflaire  dans le  choix 8c l’invention du  fujet,  
 mais  encore  dans  la  maniéré  de  le  traiter  avec  
 fùc'cès..  . 
 .  II nous  refte  encore , à  parler des  perfonnés  allégoriques  
 qui  reviennent  fi  fouvent  dans  les  écrits  
 des poètes ,  8c qui  forment  une  efpeee  toute particulière  
 G allégorie.  Elle fe  diftingue des  autres,  en ce  
 quelle  transforme  de  Amples  noms  ou  de Amples  
 notions  défignées  par ces noms $ en pérfonnages qui  
 agiffent.  Des  vertus ,  des  qualités  abftraites,  l’amour, 
   la  haine ,  la  difeorde ,  la  fageffe  ,  font me*  
 .  tamorphofées  en  des  êtres  vivans  ;  8c cela  de  di^