être ; que les mamelles puffent balancer Paôivité
décroiflànte de la matrice , & leur réaftion fuffire
pour entretenir, le je u de l’uterus, jufqu’à ce que
l’évacuation des lochies finie , la matrice rentrât
dans fon état primitif, & ne produisît que des évolutions
périodiques. 11 eft vrai que cela paroît ainfi ;
mais les mamelles ayant reçu, à force de réagir,
une difpofition extrême à l’a&ion, elles deviennent,
dès l’accouchement achevé le centre d’a&ion, &
par leur prépondérance, elles fécondent la contraction
de la matrice 3 l’évacuation des lochies , & le
rétabliffement des forces de ce vifcere. Elles fe
font mifes en-poffeffion de l’aftivité, & tournent
fur elles l’a&ion des autres organes, au point que
l’habitude établie dans les organes, de contribuer
d’un commun accord aux fondions de ces parties ;
les uns’ ceffent- tout-à-fait les leurs, 8t les autres
n’agiffent qu’après que l’a&ion a reflué des mamelles
fur eux. L’uterus interrompt fes fondions lunaires
(il n’eft pas queftionici des cas particuliers &aifés
à expliquer , dans lefquels les évacuations menf-
truelles fe rétabliflènt & continuent^ quoique la
femme allaite); l’organe de la nutrition , le tiffu
cellulaire ne fait plus que réagir ; les organes de la
fangiiification attendent que les mamelles inertes
ou ma&iyes, aient récupéré les forces néceffaires
pour relever le ton de tous les organes, .& qu’ils
aient rétabli l’attivité de toute la machine, ou que
l’excédant de l’aftivité reflue d’elle , commé du
centre, fur toutes les autres parties du Corps.
C’eft une chofe remarquable, que toutes, les fois
qu’il s’établit dans le corps humain un nouvel ordre
d’a&ion & de réaûion, il y a friffon(rigo/)& un malêtre
général. Hippocrate nous l’apprend à l’égard de
la matrice de la femme qui a conçu : millier ubi conce-
perit, dit-il, Jlatim inhorrefcit & inca.le.fcit ac dentibus,
Jlridet & articulum reliquumque corpus convuLji&proe-
hendit & uternm torpor (de carnibus). Les inflammations,
les fievres, les crifes, &c. fuivent prefque toutes
la même marche. Ce n’eft pas ici le lieu d’examiner
les caufes & le méchanifme de ce phénomène;
j’en conclus feulement que le friffon, & les autres
fymptômes fiévreux, nous faifant juger de l’établif-
fement d’un nouvel ordre d’action & de réaction ;
on peut décider que la fievre de lait eft un ligne
univoque de quelque révolution décidée & com-
paffée dans le corps de la femme; & e n effet, dès
que la matrice a eu le tems de perdre l’excès de fon
activité, qu’elle commence à ne plus engloutir la
réaétion de tous les autres organes , & que les
mamelles, par l’habitude de leur réattion, ont concentré
en elle la dire&ion des forces que la matrice
n’emploie plus exclufivement, il fe fait une révolution
nouvelle qui inftalle les feins comme principal
arc-boutant, & les met en poffeffion de la
plus puiffante vertu attra&ive. La fievre de lait a
lieu avec toutes les fuites , . & fi la femme allaite,
l’évacuation du lait fait qu’il ne fe raffemble jamais
dans les mamelles, une activité excceflive qu’il faudrait
.contrebalancer par la réaction d’un vifcere
particulier , ou.par celle de plufiéurs organes réunis;
le nouvel Ordre établi régné paifiblement, & la
nourrice -jouit des avantages d’une bonne fanté. Mais
fi la femme refufe de donner le fein à l’enfant,
les mamelles amaffent trop d’activité , & révolution
génératrice devant être finie à l’allaitement, il
n’eft pas pourvu , dans l’ordre naturel, à une nouvelle
révolution ordonnée pour rétablir l’équilibre
général. Il n’y a aucun organe particulier deftiné,
dès la conformation de la femme, à âbforber, à
attirer fur lui une partie de l’activité dirigée vers
les mamelles. De-là , ces diftraâions, ces dévoie-
mens de,forces qui font fi fréquemment fuheftes ,
êc le feraient encore bien plus fouvent, f i , dans
ce moment, l’uterus n’étoit pas dans la plupart d e s ..
femmes, l’organe le mieux difpofé à expier les
fautes de l’individu , & à' remédier aux effets de
cette interruption violente de la marche naturelle
des évolutions organiques!
‘ Cette eritrêprife fur l’ordre naturel dans un moment
où l’uterus devoit avoir le tems de fe remettre,
rie peut donc que déranger l’harmonie qui fe feroit
établie peu-à-peû & à la longue , pendant le tems
de Xallaitement jufqu’au fevrage. L’évacuation réitérée
des feins, & leur gonflement alternatif n’exigent
pas , lorfque la femme allaite, une réaôion
auffi foutenue que lorfqu’elle n’allaite, pas ; & l’a c -'
cord de tous les organes pour partager cette réaction
, rétablit la matrice dans ce degré d’influence
qui eft proportionnée à celle de tous les autres
vifceres. L’utérus porte fa réaftiqn aux mamelles ,
& fe'trouvant, pendant tout le tems de Xallaitement
, dans une fituation analogue à celle où il eft
pendant l’appareil de l’évacuation menftruelle , il
contribue à la prépondérance de l’aâiôri de ces
organes. Mais la femme qui trouble ce mechanifme ,
‘ expofe la matrice à céder à l’aélivite prépondérante
des feins ; l’abord des humeurs y^ eft dirigé , elle
fe trouve accablée par la prépondérance outrée S t
l’irritation des mamelles ;• elle ne confèrve d’aftivïté
qu’autant qu’il faut pour folliciter cette affluence
d’humeurs, en les détournant des. autres vifceres,
& pour les évacuer. Heureufe la femme chez qui
aucune difpofition vicieufe, aucune caufe étrangère
n’excite une aâivité exceffive, une réfiftancé trop
forte dans la matrice, ou un dévoiement quelconque
dans la dire&ion des forces : les pertes, les
inflammations de la matrice, -les engorgemens des
feins, les épanchemens de lait, &c. feroientles fuites
effentielles de .ces accidens , félon que la caufe agi-
roit fur tel ou fur tel autre'organe. La conftitution,
les écarts, dans le régime, &c. occafionnent chez la
femme qui n’allaite pas , des maladies auffi graves
que difficiles ^ guérir.
Le fuccès', même le plus complet de la fuppref-
fion du lait, n’eft pas fans inconvéniens : la matrice
- acquiert par cette pratique'une certaine atonie qui
^oblige, pour être, à Funiffon avec les autres organes,
à folliciter leur influence , OU àrécevbir le
réfuftat de leur aâivité. .Cette influence .eonfifte
prefque toujours dans l’abondance-des humeurs qui
abordent vers la partie foible : les engorgemens,
les gonflemens qui en proviennent, donnent une
efpece de force négative qui fupplée à celle qui
manque, & rétablit l’équilibre dans la machiné, jufqu’à
ce que les autres organes, s’étant habitués à
verfer toujours -leur attiori fur celui qui eft affe&é,
tombent dans l’épuifement, ou que la refiftance de
ce dernier, ou l’incapacité de recevoir davantage
cette» aftion, jette un trouble general dans
l’ équilibre de tous les organes ( le s cautères, les
anciens ulcérés, les évacuations habituelles peuvent
fervir à éclaircir ce qui doit arriver à la matrice).
Dès que l’activité des feins a furpaffe la reaétion de
la matrice, & que ce vifcere a encore-affez de
force pour ne pas y fuccomber, le lait y aborde ;
& l’évacuation qui en eft une fuite , dure tant que
l’uterus fe reffent de fa foibleffe. C’eft pendant ce
tems que les autres organes fe concertent, s’il eft
permis de s’exprimer ainfi, fur l’etabliffement d’un
ton général; & , fi la matrice n’y entre pas pour
la part qui lui eft originairement alignée , la femme
devient fujette à tous les inconvéniens qui réfultent
de la foibleffe , de l’accablement d’une partie dii
corps animal. Tant que l ’ordre n’eft que foiblement
troublé, & que l’uterus ne fait que fe prêter à la
prépondérance des autres organes, la femme ne
fera fujette qu’aux fleurs blanches, à quelques
accidens
accidens hyitériques, &c, mais s’il y a irritation, s’il
y a refiftance forte , s’il y a accablement, il naîtra
des pertes, des endurciffemens, des fquirrhes, des
ulcérés, des cancers, &c.
Il eft donc de' l’avantage de la femme qu’elle
nourriffe ; c’eft une loi phyfique à laquelle elle ne
peut défobéir fans expofer fa fanté, fans déranger
l’ordre de Foeconomie animale; & il ne feroit pas
difficile de prouver que les vapeurs, les fleurs blanches
, les pertes, les fuppreffions des réglés, les
' accidens plus ou moins fâcheux lors de la ceffation
de l’évacuation menftruelie , les fquirrhes, les cancers
aux feins & à la matrice, les avortemens, les
couches pénibles, & un très-grand nombre d’autres
infirmités dont les femmes font accablées, ne dépendent
.en partie que du dérangement de l’oeconomie
animale , caufé par le refus des meres d’allaiter
leurs enfans.
Le mal qui réfulte de cette infra&ion des loix
phyfiques, ne fe borne pas à la mere : il ne feroit
que jufte qu’elle fubît la peine qu’elle s’eft attirée
elle-même. L’enfant en fouffire également : ce fruit
fi précieux , & quelquefois fi defiré par tendreffe
on par un vil intérêt, étoit accoutumé non pas à
une nourriture quelconque , mais à celle qui eft
préparée dans le corps de fa m ere, de cette femme
dont tous les organes dans l’acte de la génération,
ont contribué à lui donner l’être, dont le chyle, le
fan g , la lymphe nourricière ont été préparés par
le concours de toutes les parties de cet enfemble,
dont les humeurs ont une confiftance, un mouve-
jnent propre, dont le dégré de chaleur eft fixé ,
dont l’ame agit d’une façon détérminée-, &c.. , ce
nouveau né, dis-je, qui a étéconftitué de maniéré
à ne pafl’er que d’une nuance à .l’autre, à prendre,
-à digérer & à affimiler un aliment analogue à celui
qui le nourriffoit dans le fein de la mere , une
nourriture diftérenciée pour le contentement de
fes béfôins aétuels , fe trouve to.ut-à-coup privé
de ce qui eft conforme à fa conftitution, à tout
Ton être , & n’obtient qu’une nourriture que les
qualités extérieures feules font regarder comme
également appropriée- à fa fituation.
Onaffure, d’après l’obfervation, que les nourrif-
fons prennent fouvent le caraftere moral & les
difpofitions morbifiques de leurs nourrices. J’avoue
que je ne comprends rien aux principes des caractères
; mais il me femble que fi les différens dépar-
îemens qui compofent notre être, ne font pas dans
une identité parfaite, nous devons fentir, vouloir,
penfer & agir les uns différemment des autres. Me
ieroit-il permis après cela de hazarder une conjefture?
l’organifation de ces départemens dépend fans contredit,
i ° . du ton général & primitif; 20. de l’analogie
des élémens ou principes nutritifs avec des
organes. Il femble donc que les organes qui influent
le moins fur la digeftiori de la nourrice, doivent
être, chez le nourriffon , ceux qui acquièrent le
moins de vigueur ; & s’il eft vrai que les maladies
organiques fe communiquent de la nourrice au nourriffon
, il pourroit bien être que celui-ci prît également
fes paffions. Il me femble. qu’il y a parité
de Angularité entre les dérangemens phyfiques auxquels
eft fujet le nourriffon qui tire le lait d’une
femme enceinte, & entre la méchanceté qu’hérite
un enfant allaité par une femme colere ; entre la
vigueur d’un enfant nourri par une bonne, forte &
groffe payfanne , & entre la gaieté du nourriffon
d une femme viye & réjouie; Quoi qu’il en foit de
ces problèmes , il n’en eft pas moins vrai que le
corps d’un enfant nouveau-né demande le lait d’une
femme nouvellement accouchée; on fçait que cette
liqueur n’eft les premiers jours qu’une elpece de
petit la it , dégagé prefque de toutes )es parties
lomc /.
caféeufes & butireufes. Le nouveau-né rie peut digérer
ni beurre, ni fromage ; fes inteftins remplis
du méconium n’ont pas befoin d’être leftés , mais
bien d’être évacués. Le colloftrum fért à cette fin,
au l i eque levait proprement dit, fait l’effet d’une
croûte de pâte dans un corps qui a befoin d’être
purgé à caufe de plénitude. Il eft vrai qu’on fait
prelque toujours jeûner les ,nouveaux-nés plus ou
moins long-tems avant de leur préfenter le fein.
Mais cela peut-il parer les inconvéniens qui réfui--
tent du refus de la mere de fe conformer au voeu
de la nature? E ft- il probable qu’un enfant puiffe
jeûner fans détriment pour fa fanté,* pendant 1 2 ,
24 ou 36 heures ? je ne le crois pas. Des corps
qui ont un befoin fi preffant de fe nourrir, doivent
certainement fouffrir des inconvéniens plus ou moins
fâcheux d’un jeûne fi prolongé. Le nouveau-né fe
trouve^ d’ailleurs dans une fituation fi différente de
celle ou il étoit, que tout ce qui augmente le trouble
dans fa petite machine doit lui nuire extrêmement i
o r , le refus d’un aliment convenable ne peut manquer
d’exciter un nouveau trouble. Il eft difficile
de fe perfuader qu’un enfant ne doive pas fe ref-
fentir, pendant très-long-temS , peut - être même
pendant tout le refte de fes jours, de la cruauté
avec laquelle on l’a traité en venant au monde.
Il eft même probable que la nature , demandant la
nourriture qu’on ne lui donne pas, cherche à exercer
fes forces digeftrices fur le méconium : je ne dis
pas qu’elle puiffe en extraire une fubftance alimen-
.taire,-ni que les vaiffeaux abforbans des inteftins
pompent l’âcreté de ces excrémens ; mais il me paroît
poffible que'la lymphe verfée dans le canal intef-
tinal, fe charge de principes impurs, lefquels étant
ainfi enveloppés , paffent dans les vaiffeaux lactées
& enfuite dans la maffe des humeurs; je dis encore
que le méconium peut contrarier un dégré de putré-
faétion, à caufe de l’air admis dans le canal in-
teftinal, d’où il étoit exclu avant la naiffance, Sc
gu’en conféquence de cette corruption il peut en
réfulter des accidens très-fâcheux. Je dis enfin que
le premier travail de la digeftion portant à faux,
doit caufer dans la conftitution du nouveaumé un
étonnement, un dévoiement de forces qui lui eft
néceffairement préjudiciable. L’irritation que le
froid & l’élafticité de l’air çaiifent fur la peau de
cette petite machine, jointes au jeu de la refpira-
tion, doivent rendre les nouveaux-nés très affamés ,
c’eft - à t dire , que l’organe externe doit vivement
folliciter l’aêtion du ballon inteftinal ; il eft vrai
que tant qu’il eft lefté par le méconium , il peut
correfpondre, jufqu’à un certain point, à cette fol-
licitation ; mais on purge l’enfant, & on détruit
par-là ce contrepoids : il n’y a donc que l ’irritation
de la médecine qui fupplée au reffort qu’auroit
dû donner l’aliment préparé conformément au befoin
naturel. Les forces du. canal inteftinal étant diminuées
par l’évacuation du méconium , les fuites de
la médecine & le jeûne ; on les accable enfuite
tout-à-coup par une no'urriture trop fubftantielle,
trop pefante ; ce qui doit néceffairement conduire
au tombèau ou à un état valétudinaire, les enfans
qui n’ont pas une conftitution d’athletes.
Ces notions préliminaires, fur les avantages qui
réfultent de Xallaitement pour la mere & pour l’en-»
fant, & fur les défavantages qu’entraîne le refus
dè cette aâion ,- nous conduifent naturellement à
rechercher la théorie de l’excrétion du la it , les
obftacles phyfiques qui s’oppofent à Xallaitement,
& à expoier la conduite qu’il faut obferver pour y
réuffir.
Tout le monde convient aujourd’hu i, dit M.
de Bordeu, dont nous copierons la théorie de l’excrétion
du lait, que les conduits excrétoires de la
O o.