le cap près du Tfchukotfchia, mais le grand cap fl
ne pourroit-on pas en conclure, qiie“ c’eft autant,
comme s’il d-ifoit, il n’y a que deux caps, confiée-
rables par ces côtes , l’un celui du Tfchukofehia,
l ’autre le grand près de l’Anadyr ; alors ce cap Scha-
taginskoi difparoîtroit de foirmême. Ce Defchnew,
témoin de la plus grande authenticité, puifqu’il a fait
ce voyage de l’aveu de tout le monde, & a demeure
plufieurs années dans ce pays,-y a fait des voyages ,
s’eft informé de tout, & en a rendu compte à la cour
ou au gouvernement général du Jakontsk. Ce
Defchnew donc, dis-je, décrit le grand cap d’une
maniéré à ne pouvoir s’y méprendre. Les îles vis-
à-vis reconnues fi fouvent pour être entre le Serdze-
kamen & l’Amérique ; les habitans avec les joues
& le-vres percées ; le peu de diftance entre l’extrémité
de ce.cap &c l’embouchure de l’Anadyr; la
forme des côtes en demi-cercle vers cette riyiere.
J’avois déjà parlé de ces deux derniers articles
dans mes Mémoires, M. Adelon en convenant parfaitement
de la eontradition manifefte entre la relation
& les-cartes, ne veut pas voir que par cette
raifon on puifle conclure contre celles-ci;.qu’on en
juge., - /■ - ; .
La kotfche d’Ankoudmow fit naufrage ; l’equipage
fut fauvé par les deux autres ; peu après.elles furent
réparées & toutes deux jettées fur les côtes vers
le fud loin de l’Anadir: elle a donc.fait. naufrage à
l’extrémité à l’eft ou fud-eft de ce cap, fans quoi
ces kotfches reliantes n’auroient pas ofé hazarder
de le paffer étant en effet auffi dangereux qu’on le
dit de celui qu’on met toujours à la place de celui-
c i , le prétendu cap Tabin.
7° . Pour revenir vers l’Anadyr depuis le fud,
Defchnew erra pendant un an, y étant arrive, il
établit l’Oftrog qui dès-lors refta la feule poffeffion
des Ruffes dans ce pays, c’eft de là qu’on eut quelques
connoiffances de cette côte & où Atlaffon en-
fuite prit les fiennes. Defchnew remarqua le banc
de fable à l’embouchure de l’Anadyr, le.long de
ce promontoire, qui étoit pour ainfi dire le rendez-
vous de tous ces amphibies qui pouvoient enrichir
ceux qui s’appliquoient à en prendre.
Il voulut donc envoyer le tribut annuel confidérable
par mer à Jakontski, fentant bien qu’en paf-
fant avec, précaution ce double cap Serdzekamen,
il n’avoit rien à craindre d’un autre, mais feulement
des glaces qui font fréquentes au nord & nord-oueft
de ce cap ; ce qui n’eft pas étonnant, la pointe en
étant tournée un peu vers le nord-eft & formant à
caufe que ce promontoire a une longueur confidéra-
blevers l’eft dans la mer,'une efpece de baie; les
glaces qui viennent du nord-oueft & nord-eft comme
dans un entonnoir, s’y arrêtent & n’en .font pas li
promptement chaffées que dans une mer plus libre,
d’autant moins qu’elles peuvent s’arrêter entre les
îles' vers l’eft ; c’eft fur-tout le défaut des matériaux
qui lui firent abandonner fon entreprife.
8°. Il arriva cette, difpute mentionnée, qui prouva
clairement la fituationde ce grand cap des îles voi-
fines & du banc de fable.
' 90. Il découvrit dans fa courfe vers le fud , le
fort d’Ankoudinow & d’Alexiew ; à l’arrivée d’Atlaf-
fo w , les habitans pouvoient lui en donner encore des
indices.
io°. Atlaflbw fit les expéditions dont on a parlé.
n ° . Il déclara encore plus pofitivement qu’entre
le Kolyma & l’Anadyr, il fe trouvoit un double cap
nommé cap Tfchalas-Koy & Anadirs-Koy; peut-on
voir quelque chofe de plus convaincant ? Il parle d'un
feul mais double cap, non de deux ou plufieurs. Il n’y
eft point nulle part que celui - ci ; par-tout les noms
deTchuzchi & Tfchatazkifont pris pour desfyno-
nymes , & avec raifon ; nous verrons que ceux qui
parlent des habitans de tout le nord, les nomment
Tchouski, les habitans de. ce. promontoire & des
environs de même ; peut-être que comme les Koria-
ques du Kamtchatka fe diftinguent de ceux de l’île
Karagaf, quelques-uns donnent le nom de Tfchalatki
à ceux de ce promontoire.’
Enfin toujours n’y a-t-il qu’un feul mais double
cap, dont la partie auftrale eft nommée cap Anadir-
K o i, comme ayant l’embouchure de cette riviere
tout près de fa côte méridionale.
Atlaffow , qui n’a rien vu par mer , affaire qu’on
ne peut le dépaffer par eau , à caufe des glaces
vers le nord ou l’oueft, qu’il n’y en a jamais au ■
fud; voilà ce qu’on a encore défiguré & appliqué
à ce cap Tabin, repréfenté tournant au nord; au
lieu que nous venons de voir la raifon pourquoi
il, y a fouvent des glaces au nord de Serdzekamen;
on n’ofera nier qu’il ne s’agiffe ici par-tout d’un cap ,
des îles , de peuple proche d’Anadir, vers le 66
ou 67= dégré , & non d’autre vers le 72 à 74e
dégré, & que n’y ayant qu’un cap confidérable entre
cette riviere & le Kolyma, ce cap Tabin ne
doive difparoître.
1 z°. L’article de Popow eft très - remarquable ;
j’adopte à-peu-près toutes les relations, pourvu
qu’elles ne s’oppofent pas au bon fens comme celle-
ci : Une grande terre vis-à-vis du Kolyma & de VA-
nadyr, la même terre vis-à-vis du Kolyma, félon
les nouvelles cartes, à 71 dégrés de latitude, 177
dégrés de longitude fur la côte feptentrionale , &
de l’Ànadyr, 65 dégrés de latitude, 193' dégrés
de longitude , fur la mer orientale; n’eft-ce pas
une contradiftion palpable ? Ne faut-il pas-ou effacer
I.e -nom de Kolyma , ou placer fon embouchure
dans la mer orientale, comme on l’a fait
autrefois? S’il en étoit, comme les anciennes cartes
le marquent , le Kolyma feroit plus au fud que
le prétendu cap Schataginskoi , peu éloigné aut
nord-oueft, fur une côte inclinée vers le fud-eft
du grand cap; alors, en effet, la grande île ou
terre feroit à-peu-près vis-à-vis des deux ; cès ri-,
vieres feroient de la même mer, comme Gmelin le
dit, & cet article de la relation de Popon feroit
exaft. .
On voit que c’eft par le préjugé en faveur de
ce cap Tabin, qu’on vouloit confondre tout ce
qui eft prouvé encore, parce que, malgré toutes
les recherches, on n’a point trouvé d’île, ni d’îles
habitées vers le Kolyma, & que la defcription des
habitans , de même que la diftance , les animaux,
les pelleteries, les bois, dont il n’en croît point à
cette latitude de 70 à 74 dégrés & plus loin , tout
enfin indique fans équivoque les îles à l’oppofite du
Sërdzkamen & de l’Anadyr, ainfi que le nombre
des habitans , le même que les autres ont rapporté
de ceux de Serdzkamen, de fes environs & des in-
fulaires ; puis donc que le détail authentique qu’on
a de ceux-ci ne peut pas être douteux, il faut que
l’autre fo.it faux , & provenant de ce qu’on veut
toujours confondre les deux caps & appliquer à un
cap Tabin. imaginaire ce qui appartient au Serdzkamen
feul.
130. Stadouchin devoit fe rendre’dépùis le Tfchir
ketfchoihofs à ces îles , pays du côté oppofé ; c’eft
donc depuis le Serdzkamen auquel ils le font; pour
le cap Tabin il faudroit chercher des îles & pays
oppofés auffi imaginaires que le cap, puifqu’on n’en
a jamais eu la moindre notion ni idee.
Le refte de la relation des Tfchutski des environs
d’Anadirskoy , confirme fi complètement ce
que nous venons de dire, qu’il n’eft pas néceffaire
d’y infifter. Us difoient à Defchnew , à Atlaffow, à
Beering même tout ce qu’ils favoient de ces contrées
; que lçifc nation habitent ce grand cap ver?
fAnadytï ce,s.côtes, tous ces environs; ils décri-
voient le mieux qu’il leur étoit poffible, les îles
& pays voifins & leurs habitans., parloient du continent
tant de l’oppofé que de celui à l’oueft d’Anadirskoy
& du Kolyma ; ils connoiffoient tout
ceci ; mais pour ce cap au 7 2, 74 dégrés fi confidérable
, fi formidable , qui comme on le dit , eft
habité par eux, parce qu’on le confirme avec le
Serdzkamen , aucun n’en difoit un mot à perfonne
de ceux-ci qui les virent en diverfes fois dans l’ef-
pace dé 8 5 ans ; il eft donc évident qu’ils igftoroient
l ’exiftènee d’un pareil cap & qu’il n’y en a point.
On pourroit vouloir prendre avantage de ce
qu’ils difoient,' qu’il leur falloit près de trois femai-
nes pour fe. rendre à l’extrémité du cap ; mais fi
l’on fait attention à toutes circonftances, on verra
que. ceci ne tire point à conféquence.
C ’eft avec leurs miférables baidares de cuir, qu’il
leur faut tant de tems.
D u fond de la baie de t Anadyr, qui fur la carte
de M. Miller a 5 dégfés de profondeur.
Par deflus le banc de fable $ ou tout près, ce qui
doit les arrêter fouvent, & même doit les y jetter
& les y faire demeurer quelque teins*
Côtoyant ce long promontoire, où ils trouvent
encore deux baies, & qu’il faut du tems pour les
paffer.
L’extrémité du Serdzkamen eft à fon nord-eft à
deux ou deux dégrés & demi, ou 40 à 50 lieues de
largeur & pleine de rochers ; inais de bons vàiffeaux
qui prennent le large & cinglent dire&ement, peuvent
bien en trois fois 24 heures, comme l’autre
relation l ’âffure, par un fort vent favorable depuis
l’extrémité du cap , arriver non au fond de la baie,
mais à l’embouchure de l'Anadyr. Il n’y a rien la
qui fe contredife.
140. On voit ici feulement qu’il s’ ën faut de
beaucoup que la cour ait publié toutes les découvertes.
# , x
150. Le grand monarque choififfant lu i- même
Beering, cela forme un grand préjugé en faveur dé
celui-ci, non que j’adopte en entier fa relation ou
plutôt fa carte ; il faut toujours aller, pour ainfi
dire, la fonde à la main, fi on Veut former une
bonne critique.
160. Son voyage fut en tout de 55 jours pour
aller & revenir. Je veux croire que fa carte ait été
dreffée auffi exactement qu’il l’a pu; eft-ce affez pour
qu’elle foit exempte d’erreurs ? Il a perdu rarement
de vue les côtes ; mais pourtant cela eft arrivé ,
l’officier Ruffe qui l’a accompagné dans fon voyage
en Amérique, & qui curieux comme il l’étoit, aura
eu mainte converfation avec lui fur fon précédent
voyage , affure qu’il a pu voir rarement les côtes,
à caufe des brouillards fréquens. On ne peut donc
fe fier à fa carte à cet égard, ni par conféquent
placer l’extrémité du Serdzkamen à près de 205 dégrés
( ou félon d’autres 108 ) de longitude., tandis
que le point de fon départ, l’embouchure du Kamt-
hat, l’eft environ 177, & qu’un auteur affure que
le giffement des côtes depuis le Lopatka, vers la
mer Glaciale eft affez en ligne direfte , excepté les
caps , c’eft-à-dire ces caps de Kamtchat, Kronof-
k o i, Ilpinskoi & autres pareils ; car de comprendre
dans cette exception ces grands caps ou plutôt
jftys & contrées qui s’éloignent de la ligne dire&e
d’environ 30 dégrés , feroit une exception très-ri-
dicüle. §1
Les Tfchuktfchi, au 64 dégré & demi, l’avertirent
que la côte plus haut alloit fe tourner
vers l’oueft à 67 dégrés 18 ' ou 28 1 , ils en ont ap-
perçu la vérité, & ont cru avoir, affez de preu-
"yes pour affurer que les deux continens n’étoient
Tome I,
pas joints j voyant courir la côte , à l’ouéft, fans
reritrer ni vers le nord ni vers l’eft.
M. Muller traite ceci d’erreur j parce qu’il fou-
tenoit .l’exifténee du cap Tabin, & le rédacteur ;
( pour abréger , je cite fous ce nom la fuite de Yhif-
toire générale des voyages ) le taxe de timidité qui lui
faifoit peu d’honneur, n’ofant pas aller plus vers
le nord, pour achever fes découvertes. Ce dernier
agit dire&ement contre fon axiome fi incon-
teftable , qu’un temoinvaut plus que cent non-témoins à
ou qui n’ont rien vu ; Beering étoit;-.un bon marinier,
reeohnu & choifi comme tel par l’empereur 5
il a vu. ce qu’il a dit, & n’a pas vu ce cap Tabin,
ni aucun indice, qui pût le lui faire foup-
çonner;il n’a point entendu parler des Tfchoutski^'
qu’on dit habiter ce cap ; ces meilleurs ne l’ont pas
vu non plus, mais en foutiennent l’exiftence par,
prévention V en y appliquant ce qui n’eft mani-
feftement applicable qu’au Serdzkamen , & fans
preuve ; ceci doit être préférable à un témoignage
auffi authentique que celui , dé Beering.
Il faut encore faire réflexion que ce n’eft pas
en particulier, en voyageur, qui fouvent découvre
au hazard des pays,, fur quoi il eft croyable j
que Beering a agi ; mais par ordre d’un grand monarque
, ce qui n’empêche pas qu’il puiffe n’êtrô
pas .cru dans fa relation, & fur-tout ce qui concerne
le principal but de cet ordre & de ce voyage.
Il eft donc naturel de diftinguer dans fa relation
ce qu’il a vu j & le giffement des côtes dont il
n’a v u . qu’une petite partie j & fans ' obfervation
aftfonomique* Si dans fa carte il a également marqué
le cap Tabin, c’eft ce que .j’ignore ; ceci peut
être une addition du géographe: fuppofons que ce
foit de Beering même, il a pu le marquer de crainte
de révolter le préjugé reçu j tout comme je l’ai fait
■ dans ma carte nç II, Suppl, quoique j’aie dreffé la troi;
fieme félon ce que j’en penfe réellement f même
en accordant encore au-delà*
17?. Cet article eft encore remarquable : Gwof-
dens a été vers la terré * dont' il eft fait mention
plufieurs fois çi-deffus, entre 65 & 66 dégrés ,
pas loin du pays des Tfchouktfdi. C’eft encore une
nouvelle preuve que tout ceci regarde le Serdze-
kameri, & non ce cap imaginaire ; l’officier dit
fans équivoque , que c’eft depuis le premier, que
Gwofdens fut jette fur la côte de l'Amérique:
Mais la relation de Pavduzki eft telle, qu’on eft
en droit d’en, rejetter tout ce qu’on veut; rivière
confidérable , inconnue vers la mer glaciale ; de-là
un voyage de 16 jours vers Vefi: cette riviere eft
donc encore à l’eft du Kolyma ; eft-ce Pogitfcha ,
que fes prédécèffeurs n’ont pu trouver après des
voyages de quatre & de fept fois vingt-quatre
heures ? a-t-il été fous la proteftion du roi des
aigues marines, qui devroit entrer dans un pareil
conte borgne, où une petite armée de 445 guerriers
j voyagent pendant quinze jours , prefque
toujours fur les glaces ! Son grand prote&eur a-t-
il créé une île de glace flottante, & fait avan-,
cer fi loin vers l ’eft, commeôn devroit le croire
parce que fouvent elle étoit fi éloignée des côtes,
que même on ne pouvoit appercevoir les embouchures
des rivières ? & cette île devoit être d’une
nature particulière, le génie avoit le pouvoir d’empêcher
que jamais la glace ne fe brisât, comme il
eft arrivé à tous les autres qui ont fait l’expérience ,
que d’une heure à l’autre on n’étoit pas sûr que cela
n’arrivât?Non, ici les 445 hommes é.toient toujours
qpfemble à leur aife ; ou eft-ce un pont, foit glace
ferme, d’une telle étendue, qu’ils pouvoiént y
voyager pendant quinze jours au moins ; chacun
comprendra qu’aucuns ^hommes peuvent avoir la
forcé, le génie, la dextérité de voyager fur une,
MM mm ii