
quelque tems l’efpérance de fe releverde leur chuté.
Trogrudbek, petit-fils du fondateur de ladynaftie
de Selgicucides , fe déclara leur protefteur. Ce
Prince, qui avoit rangé fous fon obéiflànce l’Irax, la
Syrie, la Méfopotamie, la Natolie & plufieurs riches
provinces, ambitionna le titre d émir al-omra, afin
de jouir de la prérogative d’être nommé dans les
prières publiques , & d’être aflocie aux fonctions du
facerdoce;ilétoit trop puiffant pour efluyer un refus.
Dès qu’il fut revêtu de cette dignité, il fe déclara le
protedeur des Abbaffides. Le calife Kaïem, qui avoit
été dépofé, fut rappellé à Bagdad, oit il fit une entrée
qui avoit la pompe d’un triomphe. L’émir modefte
par politique , tint les rênes de fa mule pendant
toute fa marche, & par cet abaiffement extérieur,
il rendoit fapuiffance plus facrée : quoiqu’il lui déférât
tous les honneurs de la cérémonie, il fe réfervoit
la réalité du pouvoir ; & quand il retourna dans l’Irax,
il s’établit à Bagdad, qui ne reçut des ordres que de
lui. Depuis le rétabliffement du calife Kaïem , onze
califes Abbaffides languirent fans pouvoir à Bagdad,
oh ils ne fe mêlèrent que des affaires de la religion.
Cette ville fut prife & faccagée par le petit-fils de
Gengis, l’an de l’hégire 656. Les Abbaffides furent
enveloppés dans fa ruine, & depuis ce défaftre il
n’y eut plus de calife à Bagdad; mais lorfque Saladin
eut détruit les califes Fatimites en Egypte, le Sultan
Bibar, un de fes fuccefleurs, y appella une branche
des Abbaffides, qui exerça le califat en Egypte juf-
qu’en l’an 923 , que Selim en fit la conquête. (T—n .)
§ ABBEVILLE, ( Géogr.) ville capitale du comté
de Ponthieu en Picardie, fut d’abord line maifon
de campagne de l’abbé de Saint-Riquier, ou de Cen-
tule, Abbatis villa, comme nous l’apprend A riulfe,
moine de cette abbaye, dans fa chronique, compofée
en 1088 ,& c’eft de là qu’elle tire fon nom. Sonheu-
reufe fituation en fit enfuite un bourg qui fe peupla
infenfiblement, & devint enfin une v ille , lorfque
Hugues Capet y,bâtit un château en 992 bu 993, &
en fit une place forte pour arrêter les courfes des
Normands , que l’embouchure de la riviere de
Somme, qui coule au milieu de cette ville & la coupe
en deux, fembloit inviter aux irruptions. Hugues ,
■ gendre de Capet, & fes defeendans, qui prirent le
titrede Comtes de Ponthieu,la pofïederent enfuite.
C ’eft une grande ville, riche , marchande, bien peuplée
, où il y a une collégiale de S. Vulfran, fondée
en ‘1 1 1 , dont les douze prébendes font à la nomination
du Roi : on y trouve un Prieuré de Cluniftes,
une Chartreufe, douze Paroifles, deux Abbayes,
deux Hôpitaux, un College, un Préfidial, une Amirauté,
& cinq groffes manufactures, dont la plus renommée
eft celle que, fous les' aufpices du grand
Colbert, le Hollandois Van-Robais y établit en 166 5,
& qui ne celle depuis ce tems de fournir à la France
& aux étrangers des draps fins de la meilleure qualité
; on les nomme ordinairement draps d’Abbeville.
Cette ville fituée à cinq lieues de la mer, dans une
vallée fertile & agréable, au diocèfe d’Amiens, eft
à 2 lieues de l’abbaye de S. Riquier, 4 de S. Valéry,
& 3 5 nord de Paris. C ’eft la patrie de quatre fameux
géographes, les deux Samfon »Nicolas & Guillaume,
Pierre Duval & Phil. Briet, jéfuite r elie a auffi donné
naiflànce au cardinal Jean Alegrin ; le médecin He-
quet, connu par plufieurs ouvrages, étoit originaire
d’Abbeville. Cette ville n’a jamais été prife, elle fe
ditenfadevife femperfidelis, toujours fidele. M. l’abbe
d’Expilly lui donne 36000 âmes, d’autres 40000;
c ’eft beaucoup trop, puifque ces mêmes géographes
conviennent qu’elle n’a pas 4000 feux, & qu’on ne
doit guere compter que cinq âmes par feu. M. Linguet
prouve que le même auteur s’eft encore trompé
par rapport au canal, qui ne doit s’étendre que juf-
qu’à Amiens. Canaux navig. p. 44. Voyez Notic.
Gai. Àdr. Valois ; Pigäniöl, Dsfcri.pt. dt là Frarlôê j
la Martiniere, Dict. Gébgb. (C.)
* Aß BEY-BOYLE, (Géogr.) Voyé^BoVle , dans
et Supplément.
* ABC AS G AËCASSES, f. m. pl. ( Géogr. ) peuples
d’Afie , entre la Circaffie , la mer Noire & la
Mingrélie. On les appelle àtiffi Abajfas, Abages
& Abafques, ou même AbJJàes-. Ils habitent T A -
bafeie, pays fitué vers le 45e. degré de latitude ;
& quoique un peu nioins fàuvages que les Circaffiens
leurs voifins, ils font comme eux adonnés au brigandage
.& au vol i en confécjuence, les. négocians qui
viennent commercer avec e u x f o n t toujours fur
leurs gardés. Les AbCas donnent en échange des
marchandifes qu’on leur porte, des hommes ( car
ils vendraient leur voifin s’ils pouvoient s’en rendre
maîtres), dès fourures, du lin filé, dü buis, de la cire
& dii miel. Ils habitent des cabanes de bois, & vont
.prefque nuds. Quoiqu’on leur ait prêché autrefois le
chriftianifmè, & que quelques-uns d’eux l’aient em-
braffé, ils font revenus à leur premier état qui n’effi
qu’une ébauche groffiere d’idolâtrie.
ABD ALL A , ( Hiß. des califes% ) oncle dès deux
premiers califes Abbaffides , fut un des principaux
inftrumens de la grandeur de fa famille, que fa
capacité & fes victoires éleverent au califat. Huit
princes de la race des Ommiades avoient occupe
le trône Mufulman pendant environ trente années ;
leur regne agité de diflenfions civiles, n’offrit que
des feenes de carnage , qui les rendirent l’objet de
l’éxécration publique. La nation opprimée appella
au califat les Abbaffides iffus d’Abbas, coufin germain
du prophète légiflateur. L’étendard de la rébellion
fut déployé dans prefque toutes les provinces. Un
Mahomet defeendant d’Abbas, fut proclamé calife ,
& fes deux fils firent valoir fes droits les armes à la
main ; mais le calife Ommiade régnoit toujours dans
la Syrie, & les Mufulmans partagés avoient deux
chefs. Abdalla hâta la révolution par une victoire
remportée près de Tabar, fur Mervan, dernier calife
de la race des Ommiades ; ce prince vaincu fe retira
à Damas, capitale de fon empire. Les habitans, qui
depuis long-tems gémiflbient fous fa domination ti-
ranniqUe, l’accablerent de leur mépris ; & comme
ils paroifloient difpofés à le livrer à fon vainqueur,
il fe réfugia dans l’Egypte, où il Cray oit trouver des
fujets fideles. Il y fut pourfuivi par Abdalla q ui, dans
tous les lieux de fon paffage, immola à fesvengeances
tous ceux dont la fidélité lui étoit fufpefte. Le calife
fugitif ne trouva pas les Egyptiens difpofés à défendre
facaufe ; dès qu’il fut malheureux, il fe vit
abandonné : il crut trouver un afyle dans la mofquée
de B.ufiv, & il y fut tué d’un coup de lance par un
Arabe qui avoit fes parens à venger ; fa mort
affurale califat aux Abbaffides. Abdalla, devenu l’arbitre
des deftinées de l’empire Mufulman, fe rendit
à Damas, qu’il fit démanteler pour contenir dans
l’obéiffance les habitans indociles. Ce- prince féroce
dans fes vengeances , fit déterrer les os des
califes Ommiades pour les réduire en cendres, ne
voulant pas laiffer fubfifter les reftes infenfibles de
cette famille fanguinaire ; il pouffa la férocité à fon
dernier excès. Un fils du calife Abdamalec fut condamné
à recevoir cent coups de bâton nud ; fa chair
fut enlevée de deflùs fes o s , & on la brûla fous les
yeux de cette victime expirante. Le barbare Abdalla,
témoin complaifant de fès fouffrances, crut lès ju-
ftifier endifant : Le devoir m’oblige de lui faire fubir
tant de tourmens ; ce fut par fon ordre que mon
pere, fans être coupable, reçut foixante coups de
bâton; ainfi, je fatisfâis à ce que me preferit la
piété filiale. Ces exemples nous donnent une affreufe
idée de ces premiers Mufulmans dévots & barbares.
Abbas, chef des Abbaffides, fut proclamé calife par
Je fufffage unanime des Mufulmans. Son oncle Abdalla,
pour prix de fesfervices, eut le gouvernement
de la S y r ie , qui étoit le plus confidérable de l’empire.
II en fut prendre poffeffion avec tout l’appareil
de la vengeance ; tous les princes de la race des Ommiades
furent traités en criminels , & quoiqu’ils n’euf-
fent point ete les complices des fureurs des califes
de leur maifon, tous devinrent les viéHmes du fan
gumaire Abbaffide. Les uns expirèrent dans les tor
tures, & les autres au milieu des flammes ; & l’impitoyable'
gouverneur voulut repaître fes yeux de
leur fupplice. ' ‘ ■ '
• -Après la mort d’Abbas, Abdalla, qui avoit fait lés
califes, eut l’ambition de l’être, & de monter à fon
tour fur un trône affermi par fès victoires ; il refufa
de reçonnoître fon neveu Almanfor, & il fe fit proclamer
calife a Damas : fes prétentions n’étoient pas
fans titres. Le calife Abbas, dont la fortune avoit été
ton ouvrage, s’étoit engagé par ferment à le défigner
ton #luéçefleur, s’il pouvoit le délivrer de la concurrence
dé Mervan. Cette condition ayant été remplie
il etpit en droit d’exiger l’exécution de cette pro-
■ nieffe > % ce fut pour faire valoir fes droits qu’il leva
une puiflante armée dans l’Arabie, la Syrie & la
Méfopotamie, à la tête de laquelle il s’avança jufi
qu aux bords du Mafcus, près de Nifibe en Méfopotamie
, où il fut vaincu par le célébré Moflem, qui
le rendit maître de fon camp & de tout fon bagage.
Abdalla, fans efpoir de rétablir fa fortune , fut chercher
un afyle à Bafra, o ù , dégagé de toute ambition.
il mena une vie privée avec fonfrere Soliman. Al-
manlor craignit que ce lion qui fommeilloit, ne fût
terrible au moment de fon réveil; &c au lieu de le
combattre, il ne fongea qu’à le féduire. Abdalla ébloui
par 1 eçlat de fes promeffes, fe rendit à la cour de
V 01111 fut acçueilli avec les diftindions dues
a fa naiflançe. Le calife lui fit conftruire un palais dont
les fondemens étaient de fe l, & dès qu’il y fut logé ,
on fit couler par des canaux fecrets une grande quantité
d’eau qui mina l’édifice. Abdalla fût enfeveli fous
les débris avec fes femmes, fes eunuques & fes ef-
claves, l’an de l’hégire 145. ( T—n .)
| -Abdalla , fils de Motateb & p e re de Mahomet,
etoit d’une beauté fi touchante, que les femmes les
plus infenfibles ne pouvoient réfifter à la tentation
a en jouir ; il etoit âge de quatre-vingt-cinq ans, & ,
félon d’autres ,.de foixante-quinze, Forfqu’il époufa
Amena, qui étoit la plus belle & la plus vertueufe
de toutes les femmes de fa tribu. On débite que la
Femiere nuit de fes noces, cent filles moururent de
defefpoir en voyant une femme plus fortunée qu’elles
paffer dans une couche qu’envioit leur amour. Quelques
années s’écoulèrent dans laftérüité ; mais enfin
leur tendreffe conjugale fut récompenfée par la
naiflançe d’un fils qui changea les deftinées du monde.
Les écrivains Mufulmans fe font fort étendus fur les
circonftançes de la conception de cet enfant extraordinaire
: ce fut , difent-ils , dans une maifon de çam-
pagne & la niut du vendredi où les Méquois afîem-*
blés facrffioient dans la vallée de Muna; l’enfant,
ajoutent-ils, fut précifément conçu dans le tems où
le peuple jettoit des pierres à Sathan. Abdallane jouit
pas de la gloire promife à fon fils ; il mourut deux
ans apres fa naiflançe, avec la réputation d’avoir été
un homme aimable, un bon guerrier & un zélé
citoyen : il avoit donné de grands témoignages de
valeur dans la guerre de l’éléphant, où il avoit combattu
fous les ordres de fon pere qui avoit le commandement
général de l’armée ; ce fut lui qui fut
chargé d’aller reçonnoître l’ennemi , & il s’en acquitta
avec une confiance audacieufe qui lui attira
e îme de fa nation : il laifla à fon fils peu de fortune,
mais U lui tranfmit un riche héritage de gloire. (T—n }
MT lm r SABA’ B | | f Sc3cs né'dans
le fem du judaïfme abjura le culte de fes pefes pouf
embraffer 1 Iflarmfme. Sa vénération fuperftitieufe
*î°"r A>>? nouftni & gendre du prophète Mahomet i
donna natffadee à la fefte des Gholaïtes, dont le zèle
)es j."?ans des attributs de la divi-
mté. Abdalla Safàen faluant A li, lui dit : tu es toi
’ r “ H p W avoit la même idée de Jofuc,
fils de Nun. Cette feSe extravagante, qui faifoit de
u,l rctj.e “ tporel, prtt Je grands accroiffe-
mens & fe partagea en plufieufs branches dont
toutes fe réunirent pour déifier leur iman. Ces in,
ienfes louteno.ent que, quoiqu’il eût quitté la terre ,
il n avoit point ete fournis à la mort, & qu’il repa-
roitroit un jour porté fur un nuagé refplendiffimt,
régner la )ufhce& pour réformer les abus :
us etabliüoient comme une vérité de ftit que Dieu
avoit fouvent apparu fous la forme humaine'; & qua
cetqit fous ce voile qu’il venoit difter fes loix &
mamfetter fa volonté ; & comme depuis le prophète
aucun etre n’a paru fur la terre auffi parfait qu’Ali,
on ne peut, difent-ils, révoquer en doute que Dieu
:ne,., ‘ tnt deguifé fous f i forme; & c’eft en ce fens
qu ils ajtribuoient à cet iman & à fes defeendans les
propriétés divines. Plufieurs de ces hérétiques fe glo-
nfioient pour prix, de leur fo i, de participer à la
dignité divine de leurs imans. Un certain Baftami né
parloit jamais de lui fans dire, louange foil à moi. Un
de cçs fanatiques fut condamné à la mort pour avoir
dit, je fûts la vérité. Cette extravagance fit de fi grands
progrès , que des hommes girofliers afpirerent à la
gloire des dieux ; plufieurs renoncèrent aïi travail
pour fe^ livrer à des exercices bizares , à des jeû»
f es ^ a des auftérités meurtrier.es, pour purifier
leur ame & la rendre (e fanttuaire de la divinité.
Quelques imans ont faverifé ce délire, & leur politique
a non feulement toléré qu’on les prîtpourDieu
même, ils ont encore eu l’impiété de foutenir qu’ils
qvoiertt çette prérogative.
A b d a l l a , furnammé A l-S h a fd , (H ift . des Sectes.
. 3' ) chef de la troifieme fefte orthodoxe de Son,
mtes , naquit à Gaza, ou Afcalon , dans la Paleftine:
Un 150 de l’Hégire. La fainteté de fes moeurs 8c
letendue de fes. lumières, lui concilièrent l’amour
6C ia vénération du peuple & des grands ; &c l’on
diloit qu il était pour les hommes ce qu’eft le foleil
pour la terré, 8ç ce que la fanté eft au corps. Tous
les dofleurs avoient une fi haute idée de fa capacité,
qu ils le dépouillaient de leurs fentimens pour adoo,
ter fes deeifions, 8c lorfqu’il fe montroit dans les
rues monte fur fa m ule, ils fe faifoient une gloire de
le luivre à pied, le reçonnoiffant pour leur maître.
Ce futdansla jurifprudence, dont il développa leS
principes, qu’il s’exerça avec le plus de fuccès. Ses
deeifions parurent fifatisfaifantes, que pour lui faire
honneur on s’aceordoit à dire que ceux qui rapport
toient les traditions de Mahomet avoient dormi juf»
qua ce que Abdalla fût venu les éveiller; en effet,
les Arabes, alors plus occupés dés cérémoniesque de
la morale , avoient négligé la fçience des moeurs, 8c
™ . vans s é;Qient bornés à cultiver leur langue,
iAa/ei partageoit la nuit en trois parties, deftinées,
lune à 1 etude, l’autre à la prière, 8c la troifieme au
lommeil. Le jour étoit çonfacré tout entier à l’in,
itruéhon de ceux çjui venoient le confulter. Une vie
li laborieule n’a rien de pénible pour celui qui a I4
vanité de dominer fur les efprits 8ç fur les coeurs.
Adorateur tremblant de l’être fuprême, il ne jiir^
jamais par le nom de Dieu pour attefter une vérité
Qu pour confondre le menfonge. Toutes les fois qu’il
étoit interrogé, il gardoit quelque tems le filence,
pour méditer s’il étoit plus à propos de fe taire que
de répondre. Jamais il ne fe levoit de table fans ap-
périt, parce qu’il étoit perfuadé que le corps raffafié
oppofoit dss obftaçles à l’anîe pour fe livrer àl’éîyd§