
 
        
         
		d’Angleterre, dans le  comté  Lincoln,  &  près  de  là  
 ville de ce  nom. Suivant l’itinéraire  d’Antonin,  c’eft  
 l’ancienne  Crococalana  ou  Crorolana ,  capitale du  
 pays des Coritains.  (C i A .) 
 ANCÉE,  {Hiß.  Grecque.)  foid*Arcadie, fameux  
 pour avoir donné lieu au proverbe, il y  a encore bien  
 du chemin  e'ntre  le verre &  la  bouche ,  fut  fils de  Ly*  
 curgue, & ,  félon  d’autres , de Neptune d’Aftipàléei  
 On le  compte  au nombre des  Argonautes ; &  Pau-  
 fonias  rapporte  qu’ayant fuivi Méléagre  à  la  chaffe  
 du fanglier de Calydon, il mourut d’une bleffure que  
 lui  fit  cet  animal.  Ceux  qui  le font fils  de  Neptune  
 d’Aftipalée,  ajoutent que ce prince n’eut  de paflïon,  
 que pour l’Agriculture, &  qu’ayant maltraite un  de  
 les efclaves  pour  avoir négligé  fes vignes  ,  celui-ci  
 lui dit :q u il s'y intéreffoit d tort, que jamais il ne boi-  
 roit  des  vins  qu'elles produiraient.  Ancée  frappé  de  
 cette  prédiétion  ,  attendoit  avec  une  impatience  
 mêlée de crainte,  l’inftant de la vendange :  alors prenant  
 une coupe pleine  de  vin,  vois-tu, dit-il à  l’ef-  
 clave  V accompliffement de ta prophétie ? Mais ce dernier  
 lui  répondit,  que  la  coupe n étoit pas encore^ cl fa  
 bouche. Effectivement, un  fanglier qui  l'avageoit fes  
 vignobles s’étant préfenté, il laiffa échapper la coupe,  
 &  pourfuivit le  fanglier  qui fe jetta fur lui &  le  tua.  
 Il y  a fans doute du fabuleux dans ce récit ;  au reite,  
 le leéteur pourra le  rejetter  ou l’admettre.  Plufieurs  
 prétendent  qu’il  faut  diftiriguer  Ancée,   fils  de  Lycurgue  
 , d’avec le  fils de  Neptune d’Altipalée. Pauf.  
 lïb. F 1II. Aulu. Nocl, attic. lib, X III. ch. iG. Hom. 6*  
 alii. (T—N.) 
 §   ANCENIS, ( Géogr.)  petite ville  de France en  
 Bretagne, à fix lieues-Eft de Nantes &  à dix d’Angers.  
 Elle ell fur la Loire, dans une fituation très-agréable  
 &  dans un pays  fertile.  C’ell l’ancienne Ancenifiüm,  
 capitale des  Anmites, peuples des  environs  de l’embouchure  
 de la Loire. Il y  avoit autrefois un château  
 fort qui ell aujourd’hui ruiné. Long.  /<?, 28. lat. qy9  
 »2.  (G .A f 
 *  §   ANCHEDIVE  ou  Angadive,  {Géogr.  )  
 petite île de l’océan Indien,  fur la côte  du  royaume  
 de Décan,  &   Angedive, petite ville  dans les  Indes  
 dans  le  royaume de  Décan,font  la  même  chofe;  
 favoir, une  île ( &   non  une  ville )  fur  la  côte  de  
 Décan,  car le  royaume de  ce nom n’exifte  plus: ce  
 pays appartient  à l’empereur du  Mogol.  Lettres fur  
 VEncyclopédie. 
 ANCHISE ,  ( Hiß. Grecque.) pere  d’Enée, de  la  
 famille de  Priam, dernier roi  ae Troye.  L’hiftoire  
 nous a confervé peu de détails fur la vie de ce prince ,  
 &   le  peu  qui nous en refte ,  eft  altéré  par  la fable.  
 On  le  fait fils  de  Capis  &  de  la nymphe  Nais.  Sa  
 femme  dont  on  ignore  le  nom,  lui  donna un  fils  
 appellé  Enée.  C’eft  cet Enée  fi  fameux  par  le monument  
 immortel  que  lui  a  érige  Virgile.  Après  
 la prife. de  T ro y e , Anchife  s’éloigna  de  cette  ville  
 qui ne lui offroit plus que des débris; il fit voile vers  
 l’Italie, emportant  avec lui fes dieux &   fes tréfors.  
 Enée fécondé d’Afcagne fön fils, favorifa fa retraite ;  
 &   c’eft  ce  qui  a  donné  lieu  aux  poètes de  feindre  
 qu’Enée l’avoit fauvé  des  flammes en le portant  fur  
 les épaules.  Anchife mourut  en  Sicile près  de Dre-  
 panes, &  fut enterré fur le  mônt Erix.  Les  auteurs  
 fabuleux racontent qu’il avoit  été  frappé d’un léger  
 coup de tonnerre qui le rendit  aveugle,  pour avoir  
 eu part aux faveurs de Vénus, &   les avoir indifcré-  
 tement révélées. Ceci fert  feulement à  prouver que  
 ce fut un prince aimable &  galant. Foye[ Denis d’Ha-  
 licarnaffe , T ite-Live,  Virgile , Homere.  {T— n .) 
 ANCHORA,  ( Géogr. ) nom d’une petite ville  du  
 Péloponefe,  que  les anciens  ont nommée  Afine  &   
 quelquefois  Fdneromini.  Elle  étoit  fituée  près  du  
 golfe de Modon ou de Coron, Strabon  &  Ptolomée  
 #n font mention. 
 ANCIENS ,'f. m. pl. { B elles-Lettres. )  t t  fë dit par*  
 ticuliérement  des  écrivains  &   des artiftes  de  l’ancienne  
 Grece & de l’ancienne Rome; 
 Dans les  dialogues  de Perrault, intitulés : Parafa  
 lele des anciens & des modernes, l’un des interlocuteurs  
 prétend que c’eft nous qui femmes les anciens. « N’eft-  
 il pas v ra i, dit-il ,  que la  durée  du  monde eft communément  
 regardée  comme  celle  de  là  vie  d’un  
 homme1; qu’elle a eu fon enfance, fa jeuneffe &  fon  
 âge  p a rfa it,  &   qu’elle  eft  présentement  dans  fa  
 vieilleffe  ?  Figurons-nous  de  même  que  la  nature  
 humaine  n’eft  qu’un feuLhomme.  Il  eft  certain  que  
 cet  homme  auroit  été  enfant  dans  l’erifancè  dit  
 monde,  adolefcent  dans  fon  adolefcence;  homme  
 parfait dans la force de fon âg e, &  que préfentemertt  
 le  monde &   lui  feroient  dans  leur  vieilleffe;  Cela  
 fuppofé, nos premiers peres ne doivent-ils pas  ê tre  
 regardés  comme  les  enfans,  &   nous  comme  les  
 vieillards & les véritables anciens du monde >> ? 
 Ce  fophifme  ingénieux  d’après  lequel  on  a  dit  
 plaifamment, le monde eflji vieux  qu 'il radote,  a  été  
 pris un peu tro p  à la lettré par l’auteur  du  Parâlleléi  
 11  peut  s’appliquer avec quelque  jufteffe  aux  cori-*  
 noiffances humaines,  au progrès  des fciences &  des  
 a r ts , à to u t  ce  qui rie reçoit fon accroiffement & fa  
 maturité que du tems. Mais qu’il en foit de  même du  
 goût &  du g énie,  c’eft ce que Perrault n’a pu férleti-*  
 fement penfer  ôc dire. Ici les  caprices de  la n a tu re ,  
 les cirçonftançes combinées des  lieu x ,  des hommes  
 &  des  chofes, ont  to u t  fa it, fans  aucune  réglé  de  
 fucceffion  & de  progrès.  Où les caufes  ne font  paS  
 confiantes, les effets doivent être bizarrement divers, 
 L’avantage que Fonterielle attribue aux modernes,  
 d'être montésfuries épaules des anciens ,  eft donc bien  
 réel du côté  des connoiflanees progi'eflives,  comme  
 la phyfique,- l’aftronomie,  les  méehaniques : la mé*  
 moire  &   l’expérience  du  paffé,  les  vérités  qu’on  
 aura faifies,  les erreurs o ù  l’on fera tom b é ,  les faits  
 qu’on aura  recueillis, les  fecrets qu’on  aura furpris  
 &  dérobés à la nature, les foupçoris même  qu’aura  
 fait  naître  l’induûion  ou  l’analogie,  feront  des  ri-»  
 cheffes acquifes ;  & quoique  pour  paffer d’un fiecle  
 à l’au tre , il leur ait fallu franchir d’immenfes  déferts  
 d’ignorance,  il  s’eft  encore  échappé,  à  travers  la  
 nuit des tem s, affez de rayons de lumière, pOuf que  
 les  obfervations,  les  découverte s,  les travaux  des  
 anciens aient aidé les modernes à pénétrer plus avant  
 qu’eux  dafis’ l’étude  de la nature &  dans  l’invention  
 des  arts. 
 Mais  en fait  de  talens,  de  génie  &   de  g o û t,  la  
 fucceffion  n’eft  pas  la même.  La  raifon &  la  vérité  
 fe  trànfmettent,  l’induftrie  peut  s’imiter ;  mais  le  
 génie ne s’imite  p o in t,  l’imagination &  le  fëntiment  
 ne paffent point en héritage. Quand m ême les facultés  
 naturelles  feroient égales  dans tous les  fiecles,  
 les cifConftànces qui  développent,  ou qui étouffent  
 les germes  de ces  facultés,  fe varient  à l’infini : un  
 feul  homme changé,  tout  change.  Qu’importe  que  
 fous Attila &  fous Mahomet  la  nature  eû t produit  
 les mêmes  talens  que  fous Alexandre  &  fous Au-  
 gufte.? 
 Il y   a  plus: après deux mille a n s,  la  vérité  enfé-  
 velie fe re trouve dans fa pureté comme l’o r, &  pour  
 la découvrir, il ne faut  qu’un feul homme. Copernic  
 a vu le fyftême du monde  comme  s’il fût forti  tout  
 récemment de l’école de Pythagore. Combien d’arts  
 &  combien de fciences, après dix fiecles de barbarie,  
 ont repris leurs recherches au même  point où l’antiquité  
 les avoit laiffées ? 
 Mais quand le flambeau du génie eft éteint; quand  
 le go û t, ce fentimentfi délicat, s’eft dépravé ; quand  
 l’idée effentielle du b e a u ,  dans la nature & dans  les.  
 arts, a  fait  place  à  des conceptions  puériles  &  fari-  
 tafque s, ou abfurdes &   tnonftrueufes ; quand  toute 
 la 
 la maffe des  efprits eft corrompue, dans un fiecle  , &   
 depuis  des fiecies ;  quels  lents  efforts ne  faut-il pas  
 à la raifon &  au génie même,  pouf  fe dégager de la  
 rouille de  l’ignorance &  de  l’habitude,  pouf difcer-  
 ner,  parmi  lès  exemples  de  l’antiquité,  ceux qu’il  
 eft bon de  fuivre  &   ceux que l’on doit éviter ? 
 Perrault,  fes partifans  &  fes-ad verfaires ont  tous  
 eu tort  dans cette difpute ; aux uns c’eft le  bon goût  
 qui manque, &  aux autres la bonne foi. 
 Quelle pitié de voir, dans les dialogues fur les  an-  
 tiens & Les modernes,  oppofer férieufement  Mezerai  
 à T i t e - L i v e   &   à Thueidide,  fans daigner parler  de  
 Xénophon,  de  Salufte  ,  ni  de  Tacite ;  de  voir  oppofer  
 l’avocat  Le  Maitre  à  Cicéron  Si  à  Démo-  
 fthene ;  Chapelain,  Defmarets,  Le  Moine,  Sèu-  
 déri à Homere &  à Virgile; de voir déprimer l’Iliade  
 &  l ’Enéide, pouf  exalter  le Clovis,  le Saint-Louis,  
 l’Alaric,  la Pucelle; de  voir donner aux  romans  de  
 l’Aftrëe ,  dé  Cléopâtre,  de  Cyrus,  de  Clélie,  le  
 double avantage de n’avoir aucun des défauts que Von  
 remarque dans les anciens poètes, &  d’offrir une infinité  
 de beautés nouvelles, notamment plus dinvention  &  
 plus d'efprit que les poèmes d'Homere ; de voir préférer  
 les  poéfies  de  Voiture, de  Sarazin,  de  Benferade,  
 pour leur galanterie fine, délicate , fpitituelle, à  celles  
 de Tibule, de Properce &  d’Ovide  , &c ? 
 Il n’eft pas étonnant,  je l’avoue,  qu’un parallèle fi  
 étrange  ait  ému  la bile aux zélateurs  de l’antiquité;  
 mais  auffi  dans  quel  autre  excès  né  font-ils  pas  
 tombés eux-mêmes ?  Une  fi  bonne caufe avoit-elle  
 befoin d’être foütenue par des injures ?  Etoit-ce à la  
 groffiéreté pédantefque  à venger le goût? Leur, mau-  
 vaife foi  rappelle ce  que  l’on  raconte  d’un homme  
 qui par fyftême ne convenoit jamais des torts  de  fes  
 amis. On lui en demanda la raifon :f i favouois, dit-il,  
 que mon ami efi borgne,  on le croirait aveugle. Mais  les  
 amis  des  anciens  n’avoient  pas  cette  injùftice  à  
 craindre  ;  &   d’ailleurs  ne  voyoient-ils  pas  que  ne  
 rien céder,  ç’étoit donner prife fur eux & préfenter  
 un côté  foible ?  Avoit-on befoin  de  leur aveu pour  
 favoir  que  les  grands  hommes  qu’ils  défendoient  
 étoient des hommes? On fait bien  que  l’inégalité  eft  
 le partage du génie. Avoient-ils peur que les beautés  
 d’Homere  ne  fiffent  pas oublier fes  défauts ? Pourquoi  
 ne  pas  reconnoître  que  de  longues  harangues  
 étoient  déplacées  au  milieu  d’un  combat;  que  des  
 comparaifons  prolongées  au-delà de  la  fimilitude,  
 choquoient le  bon fens &  le  goût ;  qu’une  foule  de  
 détails  pris dans les moeurs  antiques,  mais  fans  no-  
 bleffe &   fans intérêt, n’étoient  pas  dignes de  l’épopée; 
  que le  langage  des  héros  d’Homere  étoit fou-  
 vent  d’un  naturel  qui  ne  peut  plaire  dans  tous  les  
 tems ; que  fi Homere a voulu fe jouer de fes  dieux,  
 en les  repréfentant  railleurs ,  coleres,  emportés ,  
 capricieux,  il  a  eu  tort;  que  s’il  les  a  peints  de  
 bonne foi, d’après la croyance publique, il n’eft que  
 pardonnable de n’avoir pas  été  plus philofophe  que  
 îonfiecle; &   que s’il  les a imaginés  tels lui-même,  
 il a  dormi  &   fait de ridicules  fonges? Après  avoir  
 reconnu ces défauts,  n’avoit-on  pas  à  louer  en  lui  
 la poéfie au plus haut  dégré , le coloris  &  l’harmonie  
 ; lahardieffe  du deffein &   la beauté  de  l’ordonnance; 
   la  plus  étonnante fécondité,  foit  dans  l’invention  
 de fes  caraèleres,  foit  dans  la  compofition  
 de  fes  grouppes ;  la véhémence de  fes  récits  &  la  
 chaleur de fes peintures ;  la grandeur même  de  fon  
 génie  dans l’ufage  du merveilleux ;  le  premier  don  
 du  poète  enfin,  l’art  de  tout  animer  &   de  tout  
 agrandir,  cet  art créateur &  fécond  qui  a  frappé,  
 rempli, échauffé tant de  têtes dans  tous les  fiecles,  
 &  tant donné à peindre, après lu i, &  à la plume  &   
 au  pinceau? 
 Après avoir avoué que dans l’Enéide l’a&ion man-  
 quoit de rapidité, de-chaleur &  de véhémence ;  que 
 .  Tome  /.  , 
 les  pâflîons s’y  mêloient trop  rarenient &  laiffoient  
 de trop grands intervalles  vuides;  que  tous  les  ca-  
 radreres,  excepté  Didori,  étoient  foiblement  defîi-  
 n^syi. que celui  d’Enée  fur-tout n’avoit  ni  force ,  ni  
 grandeur;  que  les  fix  derniers  livres  étoient  une  
 tçès-foible imitation  de  l’Iliade,  &c. N’avoit-ôn  pas  
 à dire que les fix premiers etoient une imitation mer-  
 veilleufement  embellie  &   ennoblie  de  l’Odyffée ?  
 Que jamais la mélodie des vers, l’élégànee du ftyle ,  
 la poéfie  des  détails,  l’éloquence  du fentiment, lé  
 goût  exquis  dans le  choix  des  peintures  n’avoient  
 été à un  fi  haut point  dans aucun poète du monde ? 
 Après  avoir  avoué  que  Sophocle  &   Èuripidé  
 étoient  inférieurs  à  Corneille  &   à Racine  pour  la  
 belle  entente  de  l’afHon  théâtrale  ,  l’économie  du  
 plan,  l’oppofition  des  caractères,  la  peinture des  
 pallions,  l’art  d’approfondir  le  coeur  humain,  d’en,  
 développer les replis; n’avoit-on pas  à  faire  valoir  
 le naturel, l’énergie, le pathétique des poètes Grecs $  
 &  fur-tout leur force tragique ? 
 Après avoir mis très-loin  au-deffoüs de  Moliere,  
 Àriftophane, Plaute  &  Térence,  ne leur eût*on pas  
 laiffé  la gloire  d’avoir  formé  eux-mêmes  dans  leur  
 art celui qui les a furpaffés ? Et fi La Fontaine a porté  
 dans  la  fable le génie de la poéfie;  fi  par  le  charmé  
 du pinceau, &   par  cette  illufion  fi  douce que  nous  
 fait fa naïveté, il a paffé de très-lôin  Efope  &   Phèdre  
 fes modèles,  n’ont-ils  pas  comme  lui  le mérité  
 effentiel à l’apologue,  le naturel, la  grâce &  la fim-  
 plicité ? 
 Quel avantage du côté d’Ovide,  de Tibule  &  dé  
 Properce,  fur la  froide  galanterie  du bel-efprit  dé  
 Rambouillet,  fur  les  Voiture,  les  Benferade,  les  
 Sarazin,  &c.?  Quel  avantagé  que  celui  d’Horace  
 fur  Boileau,  fon  foible  &t  froid  copifte  !  Quelle  
 philofôphie dans l’un,. quelle abondance de penfées l  
 &  dans  l’autre  quelle ftérilité dans les In jets les plus  
 riches  !  Combien peu de  profondeur dans fes vues,  
 & d’imagination  dans fes pians ! 
 En  général  rien  de  plus  imprudemment  erigagé  
 que Cette fameufe difpute. On ne conçoit pas même  
 aujourd’hui  comment  elle  put  s’élever. N’avoit-on  
 pa vu du premier cOup-d’oeil, l’avantage prodigieux  
 que  l’un  des  deux  partis  devoit  avoir  fur  l’autre ?  
 Qu’en  oppofant  toute  l’antiquité  depuis  Homere  
 jufqu’à Tacite, au nouveau régné des lettres, depuis  
 le Dante jufqu’à D efpréaux,  on eiribraffoit mille ans  
 d’un côté,  &  tout au plus quatre cens ans de l’autre ?  
 Et que pouvôit-on  comparer? 
 Les orateurs ? Mais Rome &  Athènes avoient des  
 tribunes ; les  droits des  nations, leur faîut, les intérêts  
 de  la patrie &  de  la liberté,  la grande  caufe dit  
 bien public &  quelquefois du falut  commun  étoient  
 confiés à un homme ;  &  le fort d’un état,  celui  des  
 nations  dépendoit  de fort  éloquence. Qu’a  de  commun  
 cet emploi fublime  avec celui  de  nos avocats ?  
 Où étoit dans l’Europe moderne la place d’un homme  
 éloquent ? Etoit-ce dans notre barreau que dévoient  
 naître  des  Démoftheries?  Y  a-t-il  d’éloquence  fans  
 paflïon ?  Et ne fait-on pas que le  langage des  pallions  
 eft  déplacé par-tout  où la loi feule  eft juge ?  Foyeç  
 Ba r r e a u  ,  Suppl. 
 Rien de  plus important fans doute  que  l’objet de  
 l’éloquence de la chaire ; mais la feule  paflïon qu’on  
 y   excite  eft  la  crainte,  quelquefois  la  pitié.  Là  
 haine,  l’orgueil,  la vengeance, l’ambitiori, l’envie ,  
 la  rivalité  des  partis,  les  difcordes  publiques#  les  
 moüvemens  du  faog  &  de la  nature  ,  ie  fanatifine  
 de  la patrie &  de  la liberté, tous ies grands mobiles  
 du coeur humain, tous  ces  grands refforts de  l’éloquence  
 républicaine  n’ont  point paffé  dé  la  tribuné  
 dans  la  Chaire. 
 Les hiftoriens ? Mais de bonne foi quelques talenâ  
 que  la  nature  eût  accordé  à ceux  de  nos  tems de 
 G g ü