
d’être la avec atten tio n , 8c les erreurs répandues
dans fes écrits ne doivent pas déroger à notre re-
connoiflance.
Les fragm'ens qui nous font reliés d’Hérophile ,
nous en donnent la plus grande opinion. Ilp aro ît être
le premier anatomifte , à'q u i le corps humain ait été
familier. Erafiftrafe partage avec lui la découverte
des vaiffeaux la fté e s, mais il a beaucoup plus cultivé
la physiologie que Vanatomie.
On doit beaucoup à Ga lien, quoiqu’il ait noyé
fous un Style Afiatique bien d’excellentes chofes. Il
fu t le dernier des anatomiftes : l’art périt avec l u i , 8c
pendant douze cens ans on n’apprit cet art que dans
fes livres. Son adreffe à faire des expériences pafle
to u t ce qu’on pouvoit efpérer de fon âge ; il en a fait
fu r des animaux vivans , qu’aucun moderne n’a fu
vérifier : c’eft: le fo rt de Galien, on ne l’y a pas fur-
paffé.
Pour l’anatomie, il l’a tirée des animaux. Si jamais
if a difféqué des corps humains , ce n’eft que bien
rarement 8c fort en paffant. Il n’a pas laiffé de faire
beaucoup de découvertes : il eft le feul des anciens
qui ait lailféà lapoftérité un fyftême complet de Part.
V e fale, to u t en le réfutant , n’a que tro p répété
Galien. Il faut lire ce grand h om m e, on y découv
rira bien des morceaux utiles ; mais il faut être en
garde 8c contre l’hypothefe & contre Y anatomie
comparée.
Douze cens ans après Galien, on recommença à
difféquer. Tous ces fiecles font perdus pour Y anatomie.
L’empereur Frédéric I I , rappella un a rt falu-
taire , fans lequel la médecine ne feroit que conject
u r e . Il ordonna que toutes les années il fe feroit
en Sicile la diffeétion d’un corps humain : il fit traduire
Galien ; mais ce légiflateur ne p u t pas créer
des talens contraires au goût du fiecle. Toutes lés
fciences étoient entre les mains des eccléfiaftiques
qui n’étoient pas faits p our difféquer ; elles n’étoient
que leéture ou 'que lubtilité : on avoit perdu de
vue la n a tu re , 8c il fallut plufieurs fiecles po u r y
rappeller les hommes.
Jacques Bérenger de C a rp i, le même qui intro-
duifit le mercure dans la cure des maladies vénerie
nés , fu t l’inftaurateur de Y anatomie. Il difféqua
des corps humains, 8c l’on répéta contre lui la même
calomnie, qui avoit noirci la réputation d’Hérophile.
On Paccufa d’avoir difféqué des hommes vivans. Il
fema de très-bonnes rema rque s, un vafle ouvrage
écrit dans un goût barbare ; il fit deffiner quelques
mufcles ; il décrit exactement bien des chôfès nouvelles
: il écouta la n a tu re , 8c fe permit d’y voir ce
que les livres difoient mal.
Il convint qu’il ne trouvoit dans l’homme ni le
réfeau admirable à l’entrée de la carotide dans le
c rân e , ni les fept cellules de la m a trice, ni le pore
du n e rf optique. Il découvrit 8c injeCta les mamelons
des reins ; il fépâra le premier les deux cartilages
arytænoïdes : il obferva que fous la fécondé
vertebre des lombes , la moelle de l’épine n’eft plus
qu’un paquet de nerfs. T o u t anatomifte doit le lire ;
il fait certainement époque dans fon art. On trouve
dans cet auteur un témoignage irréfragable d’un ancien
r ite , dont on a rougi dans les derniers tem s,
8c qu’on a voulu traiter de fable: c’eft la vérification
du fexe du pape nouvellement élu que faifoient des
cardinaux régulièrement du tems de Bérenger.
Berenger fu t le précurfeur de Vefale. Ce grand
anatomifte s’appliqua avec une ardeur incroyable
à fon art. Il don n a, à l’âge de dix-huit an s, un
ouvrage fupérieur à to u t ce qu’on av o it encore vu.
Cet ouvrage n’eft pas parfait, mais les mufcles les
plus confidérables y font traités fupérieurement.
Les grands .os font très-bien décrits. Il y a des expériences
très - curieufes , faites fur des animaux
vivans ; Vefale a 'connu cet a r t, ave c lequel Winf-
low a de nos jours rappellé la véritable fituation,
8c les liaifons de chaque partie. Ses deffeins, faits
p a r de très-bons artiftes , ,8c qu’on a attribués au
T itie n , font admirables pour la force Sc po u r le
naturel des mufcles fuperficiels. T ro p jeune quand
il publia cet ouvrage , tro p occupé après l’avoir
d onné, Vefale ne p u t pas donner la même perfection
aux nerfs 8c aux vaiffeaux. Il y copia Galien:
il fe fervit des animaux p o u r les parties les plus
fines de l’anatomie ; mais il ofa s’élever contre l’autorité
dans un fiecle oit elle p ouvoit to u t ; il découv
rit plufieurs des erreurs de G a lie n , 8c il mérit%
d’être copié par prefque tous les anatomiftes de
fon fiecle 8c du fiecle fuivant. Les anciens médecins le
perfécuterent, parce qu’il avoit la hardieffe d’en croire
la nature plus que les auteurs ; mais la poftérité
lui a rendu juftice , 8c fon nom ira toujours de pair,
avec les plus grands noms.
Jacques S y lv iu s, précepteur de Ve fale, n’écrivit
qu’apreslui. D éfenfeur tro p zélé des anciens, il pouffa
cet attachement jufqu’à la fuperftition, & il aima
mieux foutenir que le corps humain avoit changé d e
proportion depuis Galien , que.de reconnoître une
erreur dans ce célébré cher de feCte. Il racheta ce
défaut par de très-bonnes obfervations , faites fur
le corps humain 8c fur l’animal. Il connut les trois
ligamens du colon ; il vit des valvules dans les vein
e s , dans le tems que Vefale re fu fo itd e les admettre
; il commença à défigner les mufcles par des
n om s, ce qui rend fans doute Y anatomie beaucoup
plus fa cile, que les nombres avec léfquels Galien
8c Vefale les défignoient.
Charles E tienne, contemporain d e V e fale, fut le
ch e f d’une famille favante. Il accompagna de fes
explications les planches anatomiques de R iv ie re ,
bien inférieures à celles de Vefale, mais originales;
fes nerfs font préférables à celles de ce grand homme,
8c Etienne a connu les cartilages articulaires de la
mâchoire 8c du genou ; il a entrevu même les glandes
qui portent le nom de Havers.
J. Philippe Ingrâflîas de Rachalbute , en Sicile
fut le premier médecin dé cette île , 8c vécût avec
autorité dans fon art. Il donna un commentaire
très-diffuS 8c très-minutieux fur le livre des os de
Ga lien, découvrit l’étrier à-peu-près dans le même
tems que Fallope, 8c connut la nature nerveufe de la
corde du tympan. Il pouffa à une grande perfection
le détail des petits vaiffeaux qui paffent p a r les
canaux du c râ n e , 8c n’ignora point la véritable origine
de l’artere ophtalmique, manquée-parWinflov.
L’infortuné Michel S e rv e t, dont on fait les erreurs
8c la fin tragique, avoit rétabli le fentiment de
Galien, fur l’ufage de l’artere 8c de la veine du
p o um o n , 8c avoit enfeigné la véritable direction
du fang, qui paffe par ce .vifce re, fans avoir porté
fes vues fur le refte du corps humain.
Realdo Colombo de Crémone fut le difciple 8c
le fucceffeur de Vefale. S’il ne fut pas le premier
des anatomiftes de fon fiecle , il fut cependant du
petit nombre de ceux qui confulterent la nature.
Il fit des expériences fur des animaux vivans ; il vit
le cerveau s’élever 8c s’abaiffer ; il décrivit mieux
que Servet la petite circulation. Il s’attribua la découverte
de l’étrier , 8£ il mérite d’être lu pour
plufieurs obfervations particulières dont il a enrichi
fon ouvrage ; mais on doit conferver une jiifte méfiance
fur quelques faits hazardéS qu’il s’eft permis.
Gabriel Faloppia (Fallope) de Modene eft un des
maîtres de l’a r t , 8c il a foppléé prefque par-tout
à ce qu’on trouvoit à redire dans Vefale. D’autant ■
plus digne d’eftimè ? qu’il mourut à 39 ans ; il a
fuivi en to u t la n ature , a fait une infinité de découvertes
, 8c a réuni avec tant de talens une modeftie
fans exemple. Son nom s’eft eonférvé avec les trompes
de l’utérus , 8c avec une partie de l’organe de
l’o u ie ,. dont Fallope avoit perfectionné l’hiftoire.
Ses Obfervations anatomiques, font un ouvrage unique
qu’aucun autre n’a effacé.
Barthelemi Euftachip de S. Séverin , médecin
Roma in, n’avoit pas l’aimable çaraÇtere de F allope,
il étoit dur : fon ftyle 8c fes jugemens fe reftententde
fon caraCtere ; il protégeoit un peu tro p les anciens;
mais pour la parfaite çonnoiffance de Y anatomie,
il furpaffa tous, ceux qui l’avoit précédé , 8c fi jamais
il a été furpaffé , çe n’eft que de nos jours.
Nous ne layo,ns pas m êm e, fi, dans un fiecle aufli
éclairé , il y a eu un homme qui ait mieux connu
toutes - les parties de Y anatomie, 8c qui ait fait plus
de découvertes. Il a été le premier qui ait apperçu
une certaine inconftance dans le détail de la ftruc-
tu re du corps humain, 8c il a compté les variétés
po u r tro u v er par le calcul la ftruCture que
la nature fuit avec préférence. Ses petits ouvrages
fur les reins , la veine azygos , l’organe de
l’ouie , &c. font autant de chefs - d’oeuvre, tif-
fus de vérités nouvelles , fans aucun mélange d’erre
u r. 11 fit fur l’ureter.e la difficile expérience que
Malpighia vérifiée depuis lui. Il découvrit les cap-
fules rénales ( qui s’étôient dérobées aux recherches
de ^ e fa le ) , le canal thorachique , la ftruCture intérieure
des reins. Il pouffa l’angiologie à une perfection
qui n’a pas été furpaffée ; dans les veines
fu r -to u t, il a laiffé des deffeins très-difficiles , pour
exprimer ce qu’il y a de plus compliqué dans les
anaftomofes de ç.es vaiffeaux. Son principal ouvrage
a p é r i, il ne nous en eft refté que des planch
e s, dont M. Albinus a donné la c le f, mais dont
les neffs n’ont pas encore été interprétés. Ces
planches, les premières qui aient été gravées en
cuivre fur Y anatomie , font remplies de recherches
exactes 8c de faits nouveaux. Les nerfs fur-tout 8c les
vaiffeaux font, exprimés dans leur fituation naturelle,
avec une exactitude qu’on n’a imitée-qu’en partie.
Jules-Céfar A rantius, difciple de V e fale, n’a laiffé
que deux petits ouvrages. Le premier traite avec
vérité de l’hiftoiré du foetus. Il rejette l’allantoïde ,
fait l’uterus fpongieux (dans les animaux il eft entièrement
mufculeux) : il nie la communication entre les
vaiffeaux de la meré & ceux de l’enfant. Dans les
obfervations les ventricules antérieurs du cerveau
font expofés avec exactitude, 8c les pieds de l’hippocampe
, plufieurs mufcles , la circulation du poumon
, les globules des valvules arté rielles, les ligamens
de la g lo tte , plufieurs autres objets y font
mieux décrits que dans les anatomiftes qui ont écrit
avant notre auteur.
Volchercofter de Groningue vécut long-tems en
Italie , 8c fut difciple de Fallope dont il a beaucoup,
profité. Il donna plufieurs petits tra ité s , 8c fit deffiner
nombre de Squelettes d’animaux 8c de foetus.
Il y a de très-b o n n es obfervations dans ces
petits ouvrages. Les corps jaunes des ovaires pa-
roiflent ici pour la première fois: il y a des détails fur
le mouvement du coe u r 8c fur Y anatomie comparée.
Vidus Vidius de F lo ren ce , mais qui a enfeigné
à P a ris, a donné les découvertes de Fallope exprimées
en planches mal g ra v é e s, mais pleines de
chofes nouvelles. On n’en doit pas négliger la leCture.
André Céfalpin n’a pas été anatomifte , mais
fon génie lui a fait découvrir ce qui eft refté inconnu à
bien des anatomiftes. Il a connu , & d’autres avant
l’avoient connue, la circulation du fang par le poumon
: mais il y a ajouté des idées, quoique expofées
tro p brièvement-, fur la grande circulation.
Jean-Baptifte Canani eft un des premiers ana-
Tome I.
tomiftes, qui aient parlé des valvules. Il a laiffé des
planches d’anatomie, qui font d’une extrême-rareté
, 8c qui repréfentent les mufcles du bras.
Jean-Baptifte Carcanus, éleve de Fallope, a corrigé
les erreurs de fon maître fur la direction du
fang qui paffe par le conduit a rté rie l, 8c fur la
glande lacrymale.
- Confiance Varole a donné une nouvelle maniéré
de démontrer le c e rv e a u , en commençant par la
bafe ; il y a découvert la membrane arachnoïde ,
le pont qui porte fon nom , la véritable figure des
ventricules antérieurs. Nous lui attribuons ces découvertes
, quoique Euftachio les ait fa ite s, mais
les planches d’Eultachio n’étoient pas connues quand
Varole écrivoit. Dans Y Anatomie pofthume de cet
auteur , on trouve la valvule du colon 8c le mufcle
de l’étrier.
Salomon Alberti, profeffeiir de "Wittemberg, a
des prétentions fur quelques découvertes ; il a donné
la première figure de la valvule du colon ; il a
fait deffiner le premier quelques valvules veineu-
fes ; il a perfectionné Y anatomie des .conduits des
larmes. Difciple de Fabricius d ’Aquapendente , il a
pu tenir de lui ces découvertes.
Se vérin Pineau , chirurgien de P a ris, a acquis de
la réputation par fon ouvrage fur ies parties génitales
de la femme. Il y a cependant rejetté l’h ym en ,
y a fubftitué des caroncules, qui n’en font que les
débris , 8c donné des'figures d’embryons très-fufpe-
Ctes. Le livre au refte eft bien écrit.
Uliffe Aldrovande étoit plutôt un curieux qu’un
anatomifte : il fe procura des recueils immenfes de
ra re té s, 8c laifla affez de manufcrits po u r en former
une douzaine de gros ouvrages pofthumes. Il y a de
Y anatomie dans ces in-fol., il y a fur-tout plufieurs
diffe étions d’oifeaux faites chez Aldrovande par Cor-
tefius , par C o ite r: on y trouve auffi une fuite
d’obfervations fur le poulet. ,
Jérôme Fabrice d ’Aquapendente, médecin , chirurgien
de P ad o u e , n’a commencé que fo rt tard à
publier fes ouvrages ; il en a donné cependant un
nombre conûdérable. Le plus intéreffant contient
l’hiftoire des valvules veineufes. , 8c plufieurs deffeins
faits fur le corps humain. Généralement Fabrice
differtoit beaucoup, 8c quoiqu’il eût de Y anatomie
, il n’épuifoit guere fon fujet. La fuite d’embryons
8c de foetus de plufieurs quadrupèdes 8c de
l’homme mêm e, n’apas cette exactitude qu’on exige
de nos jours. Il a mieux réuffi fur la théorie des
mufcles; à laquelle on n’avoit pas to u ch é , 8c fur
laquelle il a donné de bonnes idées.
Jules Caftériiis, fon difciple, a moins écrit : mais il
a mieux, réuffi dans les deffeins, 8c il a répandu dans
fes ouvrages un certain nombre de découvertes
intéreffantes. On lui doit l’arcade de l’aorte bien
repréfentee, les mufcles Supérieurs 8c poftérieurs de
l’oreille exprimés par des figures, un indice du conduit
de Stenon , une anatomie comparée affez Suivie
du larynx 8c de l’o re ille , des figures entièrement
neuves des mufcles du dos , dont quelques-uns pa-
roiffent ici p our la première fo is , plufieurs figures
du cerveau avec l’arachnoïde bien exprimée. Il y a
plus dans fes figures que l’éditeur n’y a reconnu.
Jean Riolan, le fils, joignit beaucoup defavoir à
la connoiflance de l’anatomie ; mais fon humeur etoit
tro p âc re, 8c il montre trop peu d’équité p o u r le
mérite de fes contemporains. Il décrivit le premier
quelques mufcles, 8c il perfectionna les descriptions
d’un <*rand nombre de parties du corps humain. Il
fit des expériences fur les animaux vivans, 8c laiffa
plufieurs obfervations intéreffantes. Il s’oppofa aux
plus belles découvertes de fon fiecle, à la. circulation
du fang, au canal thoraçhique.
D d d ij