avoines, dans la famille des gramens, & qu’elle
forme un genre voifin de la Apure, anthoxanthon ,
indépendamment de fa Angularité de n’avoir qu’une
feule étamine, feul caraûere fur lequel M. Linné
s’étoit fondé pour en faire un genre nouveau; ca-
raftere qui nous paroît d’autant plus douteux & in-
conftant, que les botaniftes qui obfervent fcrupu-
leufement, remarquent tous les jours que nombre
de plantes étrangères , «tranfportées & lemées en
Suede, & dans d’autres pays froids de l’Europe, perdent
dans ces climats la plupart de leurs étamines
deviennent par-là ftériles. ( M. A d a n so n . )
§ ABOLITION, f. f. ( Jurifpr. crimin. ) on confond
mal à propos les termes à'abolition , de rèmif-
jio n , de pardon, de grâce. Grâce eft le terme générique.
Pardon eft cette clémence dont ufe le prince
envers un homme qui a participé à un crime, fans
en être ni l’auteur, ni le complice ; par exemple,
celui-là doit obtenir de lettres de pardon, qui s’eft
trouvé dans une querelle où un homme a été affaf-
finé. La rémifjîon a lieu dans les cas de meurtres involontaires,
ou qui ont été commis en défendant fa
vie. Sur la forme de ces fortes de lettres, la nature
des tribunaux à qui elles font adreflees, la maniéré
de les leur préfenter, les formalités de l’entérinement
, on peut confulter le tit. 16 de l’Ordonnance
du mois d’Aout 1670, & le s commentateurs qui en
ont interprété les difpofitions.
L 'abolition eft différente ; elle fuppofe que le
crime exifte, & qu’il n’eft pas de nature à être remis.
Le prince ufe alors de fon autorité fouveraine , &
fait grâce au coupable : A celui-ci eft déjà jugé, les
lettres d'abolition n’écartent que la peine ; l’infamie
fubftfte. Elle ne fubftfte pas au contraire, A les lettres
^abolition font obtenues avant le jugement.
Elles doivent être préfentées dans les trois mois
du jour de l’obtention. Celui qui en eft porteur, eft
obligé de fe conftituer dans les prifons ; il y demeure
pendant toute l’inftruttion de la procédure en entérinement
: c’eft: lui-même q u i, après avoir été condüit
de la prifon à l’audience, y préfente fes lettres à
genoux & tête nue ; il en écoute la le dure dans cette
pofture ; il prête ferment que leur expofé eft conforme
au vrai ; après quoi, on le reconduit en
prifon, d’où il ne fort qu’après l’entérinement de la
grâce.
Il eft des crimes que les lettres $ abolition ne fau-
roient dérober au châtiment: tels font'les aflaffinats
prémédités, le rapt de violence, & c . L’article 4 de
l’Ordonnance criminelle en contient la difpofttion
précife : le légiflateur y déclare qu’il n’accordera
point d'abolition dans ces cas-là ; & il fait affez entendre
qu’on doit regarder comme furprifes à fa religion,
les lettres qui auroient été obtenues pour ces
fortes de crimes.
Il feroit à deftrer qu’ils fuffent tous dans la même
claffe. A dieu ne plaife qu’on veuille ôter au prince
le droit de faire grâce, ni aux malheureux l’efpé-
rance de l’obtenir ! Mais la nature même des lettres
d’abolition, a quelque chofe qui outrage l’humanité.
Différentes en ceci des lettres de pardon ou de ré-
mifiion, elles ne s’accordent qu’à de vrais criminels ;
& c’eft moins les circonftances du fait que la qualité
du coupable qui en détermine la conceffion. Elles fe-
roient accordées à l’homme puiffant, pour le même
crime qui conduiroit l’homme du peuple au gibet ;
c’eft un abus. S’il falloit mettre une différence entre
deux criminels, ce devroit être pour aggraver la
peine de celui qui tient dans la fociété un rang plus
conftdérable, parce fes fautes font d’un exemple plus
dangereux ; tel fut l’ufage confiant des anciens peuples
, tel eft encore celui des Chinois. Il paroît donc
que les lettres d’abolition s’éloignent du but de toute
bonne légiftation, qui yeut que le crime foit puni,
fans faire acception du criminel. Ce qu’on pourroit
faire dans quelques cas rares, ce feroit d’accorder
de Amples lettres de commutation de peine à un criminel
qui, par fesfervices perfonnels ;.ou ceux de
fa famille, auroit mérité de l’indulgence.
Peut-être n’eft-il pas hors de propos d’obferver
en finiffant, que la cour de Rome a la prétention lin-
guliere de pouvoir donner des lettres d:'abolition,
dans tout le monde chrétien ; c’eft étendre bien loin
le pouvoir des clefs : heureufement il eft balancé en
France parle pouvoir de la raifon, c’eft-à-dire des
maximes & des libertés de l’églife gallicane. ( A A . )
§ ABONDANCE, ( Politique Economique. ) ce
mot eft tiré par métaphore ( comme celui d’affluence )
de la Amilitude des fieuves qui regorgent d’eau après
les pluies & les fontes de neige, de ab & unda.
L’abondance des richeffes & des commodités de
la v ie , eft le partage d’un petit nombre de particuliers
privilégiés , que l’on regarde avec envie , mais
dont on cefl'eroit fbuvent d’ambitionner le fort, A
l’on pouvoir favoir à quel prix ou par quels moyens
ils ont acquis cette abondance qui fait l’objet de nos
defirs, & par combien de peines, de foins, de folli-
eitudes & fouvent de remords, ils font parvenus à
cet heureux état, dont ils ne peuvent fentir eux-
mêmes les avantages, s’ils n’en profitent pas pour
exercer la bienfaisance. Voye^ dans ce Suppl, ce
mot. qui manque dans le JD ici. des Sciences, &c.
L’abondance des particuliers n’eft point l’objet de
cet article, où il ne s’agit que de celle qui fait la ri-
cheffe des états & le bonheur univerfel des citoyens;
Une paix durable dans un état policé, où la loi
facrée ^des propriétés eft maintenue dans fa plus
grande vigueur, pourroit être regardée comme la
caufe première de P abondance & de la félicité publique ,
puifque une guerre inteftine de quelques années
fuffit pour entraîner après elle les fiéaux de la famine
& de la pefte, avec la défolation univerfelle & la
deftru&ion entière du corps politique. L’état a&uel
de la Pologne, l’un des pays le plus abondant & le
plus fertile de l’Europe , luffit pour la confirmation
de cette trifte vérité. Mais fi la paix procure Yabondance
, ce n’eft qu’autant qu’elle met les hommes en
état de s’occuper fans relâche des travaux de la terre,
dont les fruits renaiffans fourniffent à leurs befoins
journaliers comme à leurs commodités & même à
leurs plaifirs, tandis que l’éducation des beftiaux qui
eft une fuite & une dépendance de cette occupation
tranquille, procure au peuple agricole des richef-,
fes d’un autre genre, que l’induftrie fait mettre en
valeur pour fatisfaire la multiplicité de nos goûts.
Ainfi les deux fources uniques de Y abondance
générale roulent fur deux points fondamentaux-
que les hommes ne doivent jamais’perdre de vue :
Y agriculture & toutes fes branches d’une part,
& de l’autre, la nourriture des beftiaux. Delà découlent
les jouiffances des citoyens confomma-
teurs, l’augmentation de la population, la gloire &
la puiffance de l’état, & meme le progrès des arts
& des fciences. En effet, l’efprit humain tranquille
& raffuré fur les moyens de fe procurer le néceffaire,
comme le fuperfiu (fuivant les conditions où les
hommes fe trouvent ) dans un état où la terre le
produit, cherche à multiplier fes jouiffances par l’invention
des arts, & à fatisfaire par l’étude & la culture
des hautes fciences la curiofité qui le dévore &c
le confume. La félicité publique s’augmente en raifon
des efforts que font tous les membres de la fociété
pour concourir au même bu t, & participer à cette
abondance de Üetat qui fait le fruit du travail. C ’eft
alors que le luxe de confommation devient véritablement
utile, & contribue à entretenir la joie & la
fanté parmi les hommes, à la différence de ce luxe
defteutteur qui ne çonfifte que dans une fomptuofité
d’appàrence, dont le but eft d’avilir l’agricuiture
en dévorant fa fubftance en pure perte.
Lifez l’admirable Effaide M. Melon, fàr le Commerce
: dans fa fuppofidon de trois ifles feules fur la
terre, celle qui ne,produiro.it que des métaux & des
richeffes de convention , feroit bientôt abandonnée
pour aller peupler l’ifle du bled, où Yabondance &
le fuperfiu deviennent la fuite néceffairedes récoltes
annuelles, fur-tout fi l’on fait'y mettre le fuperfiu
en réferve, comme à la .Chine, pour prévenir les
difettes.
On diftingue dans YEfprit des L o ix , les peuples
chajfeurs, comme, les fauvages de l’Amérique ; les
peuples palleurs, comme les Tartares, les Arabes;
iSc les peuples agricoles* Les premiers né peuvent
jamais être dans Yabondance, & la population y
eft néceffairement reftreinte au plus petit nombre
pdflible, eu égard à la vafte étendue de terrein qu’il
faut parcourir pour fe procurer la fubfiftance. En
•effet, les progrelfions de la population Auvent né-
ceffairement les moyens de fubfifter; & les peuples
qiû ne font point agricoles, ne peuvent jamais forme
r une grande nation. S’ils font pafteurs, ils ont
befo in d’un grand pays, pour qu’ils puiffent fubfifter
en certain nombre : ils peuvent fe réunir pour quelque
te.ms, comme les Tartares de l’Afie, parce que
leurs troupeaux peuvent être raffemblés quelque
îems; ma\\s toutes ces hordes étant réunies, il faut
qu’elles fe Véparent bientôt, ou qu’elles aillent faire
de grandes conquêtes dans quelque empire du midi.
Si ce font au contraire des peuples chaflèurs, comme
les fauvages de l ’Amérique, ils font encore en plus
petit nombre, & forment pour vivre une plus petite
nation. La chaffe &Ja pêche ne peuvent fuffire à tous
leurs befoins ; ils ntf peuvent acquérir l’objet de
leur recherche qu’avec4 des peines & des foins im-
menfes, & qu’en parcourant de vaftes folitudes pour
les dépeupler des animaux dont ils fe nourriffent :
aufli les peuples chaffeurs font néceffairement fauvages,
nomades, errans,igfîoranstous les arts, &
réduits à la plus petite population. Leur pays eft
ordinairement plein de forêts ; & comme les hommes
n’y ont point donné de cours aux eaux, il eft rempli
de marécages où chaque troupe fe cantonne & forme
de loin à loin une petite nation fauvage.
Quand les nations ne cultivent pas les terres , dit
l’auteur de YEfprit des L o ix , voici dans quelle proportion
le nombre des hommes s’y trouve. Comme
le produit d’un terrein inculte eft au produit d’un
terrein cultivé, de même le nombre des fauvages
dans un pays eft au nombre des laboureurs dans un
autre; & quand le peuple qui cultive les terres, cultive
aufli les arts, le nombre.des fauvages eft au
nombre de ce peuple, en raifon compofée du nombre
des fauvages à celui des laboureurs, & du nombre
des laboureurs à celui des hommes qui cultivent les
arts.
La population, cette force des empires, fuit donc
néceffairement les moyens de fubfifter ; plus ces
moyens font faciles & fûrs, plus la population augmente
: au contraire , plus ces moyens diminuent,
plus la population fe rétrécit. \Yabondance influe donc
néceffairement fur la population ; mais il n’appartient
qu’aux peuples agricoles d’être dans Yabondance
de toutes chofes, fur-tout fi à la culture de la terre ils
joignent le foin & la nourriture des beftiaux, dont
les profits continuels & journaliers s’accumulent
avec le produit annuel des récoltes.
La fertilité ayant des bornes, & les fruits de la
terre étant périffables , Yabondance des chofes nécef-
faires à la vie eft néceffairement reftreinte & peu
durable, fi l’induftrie humaine ne prévient ces in-
conveniens, & fi la légiflation des peuples agricoles
îi’eft pas fans eeffe occupée des moyens de perpétuer
cettê alondanct qui fait la félicité de tous, & de l’af-
furerfur une bafe folide & inébranlable. Les terreins
incultes, les. friches, les landes & les marais font
donc des lignes, vifibles de la négligence d’un eou-
vernement, n'y ayant aucun de ces terreins que l’art
ne puifle féconder: l’agriculture livrée à la routine
& à 1 ignoranceides gens qui l'exercent fans principes,
la mauvaife diltribuuon des folles dont on laiiîe ordinairement:
1a moitié fans culture, fous prétexte de
repos, le defaut des prairies artificielles, par lefquelles
on pourroit fuppléer fi aifément ,aux prés naturels;
la langueur du commerce, les loix fifcales qui l’en’
chaînent , les formes jûdiciaires qui rendent la juftice
li lente & fi coûteufe, l’encouragement des arts fu-
tiles , la mendicité forcée par le défaut d’atteliers
publics, ou l’on ocouperoit les mendians valides -
les troupes trop nombreufes, dont l’inaftion en tems
de paix pourroit être utilement employée aux travaux
publics , ôcc. font autant de reproches faits aux
gouvernemens, & de moyens pour éloigner & ré-
trecir cette abondance qui rendroit les états floriffans *
mais ce n’eft qu’en fe précautionnant contre l’intem-
pene des faifons & l’incertitude des récoltes, par des
approyijîonnemtns £ ordonnance, & par des greniers
publics de confervation, où l’on met quelques années
en referve, que l’on peut rendre Y abondance fixe &
durable. La Chine eft le feul pays de l’univers où
1 homme ait une prévoyance d’où dépendent fa vie
& celle de fa poftérité. Voye^ C hine, dans ce Supplément,
On a beaucoup écrit depuis quelques années en
faveur de la liberté du commerce des grains & de
l’exportation, avec une chaleur inconfidérée qui a
obfcurci le jugement des têtes les mieux organifées.
On n’a pas fenti qu’en fe privant volontairement de
fon fuperfiu fur l’efpérancë d’une récolte incertaine,
avant d’avpir mis en réferve une fuffifante quantité
de bled, on rend précaire la vie du peuple, &
on l’échange contre l’or des commerçans & des monopoleurs
qui hâtent le moment de la difette pour
fe^aire rentrer leurs fonds avec ufure. On n’a pas
même fenti que l’enehériffement d’une denrée dont
dépend la vie de l’homme, entraîne avec lui la chute
des manufactures & des arts, & l’émigration de ceux
dont les biens , l’induftrie ou le travail ne peuvent atteindre
le prix des grains ; que ce n’eft qu’en faifant
confommer à bas prix fur les lieux le fuperfiu des
récoltes, qu’on peut faire fleurir les arts, augmenter
les manufactures & encourager la population par la
certitude de Y abondance ; & qu’en tous cas, fi l’exportation
pouvoir avoir quelques avantages, de ne
feroit qu’en la reftreignanfiau fuperfiu : mais qu’il ne
peut / a vo ir de fuperfiu que lorfque le nceeflàire eft
affure , & fous la main, pour ainfi dire -, dans des
greniers d'abondance, toujours prêts à être ouverts
dans les difettes ; car plus la population eft confidé-
rable, plus les difettes font à craindre.
On a dit ingénieufement que le bled étoit un cinquième
élément, aufli néceffaire à l’homme que l’air
& l’eau. Il feroit donc à fouhaiter qu’il fût aufli abondant,
& que l’homme trouvât aufli aifément à appai-
fer fa faim qu’à étancher fa foif; mais ce n’eft qu’à la
fueur de fonfront, ou par un travail opiniâtre, que
l’homme fe procure cette denrée de première nécef-
lite ; la providence l’ y a condamné, pour l’obliger à
lin exercice u tile, d’où dépendent fa vie & fa fanté.
Sedpàter ipfie colendi '
JHatid facilem effe viam voluit , primufque per artem
Movit agros curis acuens mortalia corda ,
Nec torpere gravi pajfus fiua régna veterno.
Georg. de Virg.
Mais fi l’homme ne peut fe procurer Y abondance
de cette denrée qu’avec des peines & des foins infinis,