armes contre l’Egypte, dont le roi Actions lui oi>-
pofa une vieoureufe réfiftance ; Artaxerxes qrn avoit
plus de confiance dans la valeur & la difciphne des
Gre cs, que dans fes propres fujets, voulut que
leur nombre dominât dans fon armée, & pour mieux
les intérefler à fa deftinée , il ordonna de rendre à
leurs villes tous leurs privilèges, & de les rétablir
dans leur ancienne indépendance : cette politique lui
concilia tous les coeurs, & lui fournit d’intrepides
défenfeurs. Vingt mille Grecs . commandés par Iphi-
crate, fe réunirent à cent mille Perles ious les murs
de Ptolémaïs ; cette armée, capable de tout exécuter,
ne fit rien de mémorable; la mefintelligence
des généraux s’oppofa à toutes les opérations ; Iphi-
crate fut accufé de corruption, & il accufa à Ion tour
Pharnabafe d’incapacité, & laPerfe épuifa les tre-
fors fans gloire & fans fruit. .
Douze ans après cette malheureufe expédition ,
la guerre contre l ’Egypte fe ralluma ; Taclios qui
occupoit alors le trône de Memphis , fe fortifia de
l’alliance des Lacédémoniens , qui lui fournirent un
corps de troupes, commandé par Agéfilas. La Grece
fut fcandalifée de voir un roi de Sparte à la folde
d’un roi barbare ; ce général, âgé <Je plus de quatre
vingts ans, fuccomba à la vanité de fe voir l’arbitre
de deux rois puifl'ans ; mais dès qu’il parut à
la cour de Memphis , il n’effuya que des dégoûts,
& fes confeils dédaignés favoriferent ^les progrès
des Perfes, qui poufloient leurs conquêtes dans le
fein de l’Egypte , dans le tems que Tachos, contre
l’avis d’Agé lilas, faifoit de laPhenicie le théâtre de
la guerre : Artaxerxes, accablé de chagrins dôme fti-
ques, devenoit chaque jour plus infenfible à la gloire.
de fes armes. Ses enfans voyant fa fin approcher, fe
difputoientfon héritage, il en avoit cent-quinze de fes
concubines, & trois d’Atoffa, fa femme légitime.
Il crut- pouvoir prévenir leurs divifions en désignant
fon fucceffeur , fon choix tomba fur l’aîné ,
nommé Darius, qui dès le moment fut couronné de
la thyare, & prit le titre de roi. Ce jeune prince brû-
loit d’un feu fecret pour une des concubines de fon
pere , & fur le refus qu’il effuya, il conçut l’horreur
d’un parricide : il fut découvert & puni avec
les plus diftingués de la Perfe , qui s’étoient rendus
fes complices. Tant de fang n’étouffa point le
feu des haines & des révoltes ; Ariafpe & Ochus ,
nés d’un légitime mariage, avoient une égale ambition
de régner ; Ariane, né d’une concubine, leur
parutun compétiteur dangereux. Le pere avoit pour
lui un amour de préférence, qui étoit juftifié par
fes moeurs & fes talens : Ochus & Ariafpe fe dé-
barraflerent de fa concurrence parlepoifon. Le pere,
iuftement irrité, menaça de punir ce fratricide ;
Ariafpe , pour prévenir fon reflentiflement, aima
mieux fe donner la mort, que de la recevoir de
la main d’un bourreau. Anaxerxes qui n’avoit plus
que fon unique héritier à punir, ne put furvivre à la
honte de fa famille fouillée des plus grandes atrocités.
Il mourut âgé de quatre-vingt-quatorze ans,
dont il avoit régné quarante-fix. Ce fut un prince
généreux & politique qui refpe&a les loix, la juflice
& les dieux. ( T— N. )
A r t a x e r x e s O c h u s , ( Hijl. de Perfe.) Ce
prince détefté des grands & du peuple, eût trouvé
dé grands obftacles pour arriver au trône , s’il n’eût
caché pendant dix mois la mort de fon pere : il employa
cet intervalle à acheter des partifans, & dès
qu’il fe crut affez puiflant, il donna en fon nom les
ordres qui jufqu’alors avoient été revêtus du fceau
de fon pere. Les Perfes qui ne voyoient en lui que
le meurtier de fa famille, allumèrent le feu de la
révolte dans toutes les provinces. L’Afie mineure,
la Syrie, la Phénicie refuferent de le reconnoître
pour roi. Tous les gouverneurs des provinces furent
déclarés les chefs de la révolte. Les impôts qu’on
avoit coutume de vërfer dans le tréfor du roi, furent
deftinés à lui faire la guerre. La rivalité divifa les
chefs, & les plus îéditieux devinrent les plus fournis.
Datame, gouverneur de Cappadoce, foutint
feul tout le poids de la rébellion , il fe rendit maître
de la Paphlagonie, oîi il fe maintint avec gloire jusqu’au
moment qu’il fut aftaftiné par un traître dont
il avoit été le bienfaiteur. Sa mort fit rentrer dans
l’obéiffance tçutes les provinces qui ne reconnurent
plus qu’un feul maître. Artaxerxes poflefleur
paifible de fes états, n’ufa de fon pouvoir que pour
, le iivrer à la férocité de fes vengeances. La rébellion
qui venoit de s’éteindre lui en fit craindre une
nouvelle. Tous ceux qui pouvoient la rallumer,
furent fes viftimes: il prononça un arrêt de mort
contre tous les princes de fa famille ; fon oncle fut
invefti avec cent de fes fils, & tous périrent percés
de fléchés. Qcha fa foeur, dont il avoit époufé la
fille, fut enterrée vivante. Tous lés grands qui lui
faifoient ombrage, furent immolés à fes foupçohs,
& aveugle dans fon ambition, il fembloit moins
vouloir régner fur des hommes que fur des déferts.-
Ce fléau de l’humanité eut autant d’ennemis qu’il
lui refta de fujets. Artabaze , gouverneur de l’Afie
mineure, donna le lignai de la révolte. Artaxerxes
fit marcher contre lui foixante tk dix mille hommes
qui furent taillés en pièces par Charès, général
des Athéniens, partifans de ce gouverneur rebelle.
Le monarque les menaça de les faire repentir un
jour d’une alliance qui étoit un attentat contre les
traités. Charès fut rappellé. Artabaze privé de la
main qui pouvoit le défendre ; implore les Thé-
bains qui lui fourniflent cinq milles hommes , avec
lefquels il remporta plufieurs vi&oires : les Thébains
fe laiflerent corrompre par l’or d’Artaxerxes. Trois
cens talens qui leur furent comptés , les rendirent
infidèles à leurs engagemens; & Artabaze deftitué
de tout fecours , fe réfugia chez Philippe de Macédoine.
Sa retraite ne mit point fin, aux troubles
de la Perfe : les Sidoniens & les .Phéniciens armèrent
pour récouvrer leur indépendance ; & ils
taillèrent en pièces les gouverneurs de Syrie & de
Cilicie , qui furent contraints de laifler cette révolte
impunie. Les Cypriots fuivirent l’exemple des Phéniciens
rebelles. Le roi de Carie fut chargé de
mettre tout à feu & à fang.dans leur île , tandis
au Artaxerxes , à la tête de trois cens mille hommes
de pied & de trente mille chevaux , marchoit
contre la Phénicie. Mentor le Rhodien, que les Phéniciens
avoient mis à la tête de leur armée , fe
fentit trop foible pour réfiffer à cette multitude de
combattans ; il faifit cette occafion pour élever fa
fortune aux dépens de .fa gloire : il offrit au monarque
de lui livrer Stdon , & de pafler à fon
fervice avec le corps de troupes qu’il avoit à fes
ordres : cette propofition fut acceptée ; & Artaxerxes
ne crut pouvoir trop acheter une fi belle
conquête & un aufli grand capitaine fans effufion
de fang. Les Sidoniens trahis s’enfermèrent avec
leurs femmes & leurs enfans dans leurs maifons ,
& ils y mirerit le feii. Plus de quarante mille ha-
bitans fe précipitèrent volontairement dans les flammes:
défefpoir qui n’a rien de furprenant chez des
peuples libres, que la néceflïté réduit à l’alternative
de mourir ou de ramper fous un maître.
La deftinée de Sidon en fit craindre aux autres
une aufli déplorable. Toutes également empreffées
à rentrer fous l’obéiflance , implorèrent la clémence
du vainqueur. Quoique la clémence ne fut
point une vertu naturelle à Artaxerxes , ilaima mieux
les traiter^en fujets qu’en rebelles , parce que voulant
porter la guerre en Egypte, il lui eût été dangereux
de faire des mécontens : il étendit fa générohté
jufques
jufques fur les Cypriots qu’il laifla fous la domination
paifible de leur roi. Après avoir pacifié Chypre
Sc la Phénicie, il marcha contre l’Egypte avec trois
armées, dont une feule eût été fuffifante pour en
faire la conquête. Neâanebe, qui en occupoit alors
le trône, avoit des forces beaucoup inférieures ;
mais il mettoit fa confiance dans des étrangers mercenaires
, dont la guerre étoit le métier &c l’unique
xefl'ource. Mentor qui commandoit l ’armée pèrfarie ,
fit publier que fon maître, magnifique dans fes ré-
compenfes & terrible dans fes châtimens, exigeoit
une obéiflance prompte , & qu’il faurôit punir
févérèment les téméraires & les rebelles. Les étrangers
corrompus par fes largefles , trahirent Nèfta-
nebe , & furent renvoyés, dans leurs pays chargés
de préfens. Artaxerxes s’en retourna triomphant à
Babylone qu’il enrichit des dépouilles de l’Egypte;
■ quand il n’eut plus d’étrangers ni de rebelles à
combattre, il s’afloupit dans les plus rebutantes débauches,
fe repofant du foin de l’empire fur l’eunuque
Bagoas & fur Mentor le Rhodien. L’eunuque
qui étoit Egyptien , étoit aufli attaché aux fuperfti-
tions de fon pays, que fon maître les trouvoit avi-
liflantes ; & ce fut pour venger fa religion & fon
p a y s , autant que par ambition, que cet eunuque-fe
fit un devoir de l’empoifonner avec toute la famille
royale. ( T— N. )
A R T A X IA S , ( Hlßoire' ancienne.) lieutenant
d’Antiochus le grand, profita des diflentions de la
maifon des Séleucides pour fe rendre indépendant
dans l’Arménie, dont fes fervices lui avoient mérité
le gouvernement ; il rechercha l’alliance des Romains
qui le maintinrent dans fon ufurpation qu’il affermit
lui-même par fes maniérés affables & populaires;
& fa domination s’étendit fur tout le pays fitué
entre la Capadoce, Llbérie , la Médie & la Méfo-
potamie. Poflefleur paifible de cette région, il vit
fon alliance recherchée par Pharnace, roi de Pont,
& par Eumene ., roi de Pergame , qui fe faifoient
une guerre fanglante , où les Syriens étoient entrés
pour favorifer Pharnace. Les Romains »arbitresdes
querelles des rois de l’orient, leur ordonnèrent de
dépofer les armes. Les hoftilités ceflerent ; & dans
le traité de paix, dont ils difterent les conditions,
le titre de roi d’Arménie fut confirmé à Anàxias ;
dès qu’il eut un titre pour régner , il fit de fa province
un empire floriflant. La ville d’Artaxatë dont
il jetta lès fondemens, devint la capitale de ce
nouvel empire & la réfidence des rois. Annibal
qui avoit une haute idée de fon courage & de fes
ialens, fe rendit.à fa cour dans l’efpoir de l’aflocier
à fon reffentiment contre les Romains. Artaxias
plus jaloux d’affermir fa puiflance que de faire des
conquêtes nouvelles, le traita honorablement fans
fe laifler féduire par fes promefles. Quelque tems
après , Antiochus Epiphane lui redemanda les provinces
qu’il avoit ufurpées. La guerre fe ralluma.
Artaxias perdit une bataille fans rien perdre de
fa' gloire ; il tomba au pouvoir du vainqueur, Sc
mourut dans la captivité : fa détention ni fa mort
ne changèrent point le deftin de l’Arménie qui forma
pendant 2x7 ans un royaume indépendant fous
quatorze rois defcendus Artaxias. ( T—N. )
ARTEMISE , reine cCHalicarnajfe, ( Hiß. anc. )
fille de Lygdamis, ro'i d’Halicarnafle, de C o s,
de Calidon & de plufieurs autres contrées, fut une
de ces femmes privilégiées, qui, tenant leitrs pallions
aflervies à leur raifon, fe font montrées dignes
de commander aux hommes. Après la mort dé'fon
pere & de fon mari , elle tint les rênes'de l’état
pendant la minorité de fon fils, dont elle augmenta
les pofleflions : ayant appris que Xerxès méditoit
une invafion dans la^ Grece, elle faifit cette occafion
de montrer qu’elle favoit combattre , comme elle
Tome I.
favoit gouverner ; & fans attendre les follicitations
du monarque afiatique, elle fit équiper une perite
flotte , dont fes vaiïïeâux ne Je cédoient eri magnificence
qu’à ceux des Sidoniens. Cette princefle voulut
la commander elle-même ; & quoiqu’elle-n’eût
aucune expenençe de la navigation , elle fut un
témoignage que le génie eft propre à tous les emplois.
Xerxes étonné de fon intelligence, l’appella
dans tous fes confeils ; & lorfqu’on agita s’il étoit
avantageux , d’engager une aûion dans le détroit
de Salamme, elle fut la feule qui en repréfenta
le danger ; parce que;, difoit-elfe, les Grecs étoient
plus expérimentés dans la marine qué les Perfes
& que la perte d’une bataille feroit fuivie de la
ruine de l’armé'e dè terre. Il lui paroifloit plus
avantageux de tirer la guerre en longueur, & de
S’approcher du Péloponefe, perfuadée que l’armée
des Grecs , compofée de différens peuples qui
avoient leurs intérêts particuliers à ménager, fe
| difliperoit pour aller défendre fes propres foyers.
I ^}ccès juftifia la fagefle d’un confeil qui ne fut
pas fuivi. Ce fut elle qui dans ce combat donna
à tous 1 exemple de l’intrépidité. Xerxès, frappé de
farefiftance héroïque , s’écria que les hommes com-
battoient en femmes, & que les femmes combat-
toient en hommes. Il falloit qu’elle parût bien redoutable
à fes ennemis, puifque les Athéniens eurent
la baffefle de mettre fa tête à prix.
Xerxès , qui fe repentoit de n’avoir point fuivi
les^avis, la confulta trop tard fur le parti qui lui
reftoit à prendre pour réparer une perte qu’il auroit
du prévenir. Artémife qui le voyait déterminé à
rentrer dans fes états , & à lailfer Mardonius dans
la Grece , ne s’obftina point à combattre fa réfô-
lution ; mais prévoyant le mauvais fuccès d’une
guerre conduite par un général fans talens & fans
expérience, elle ne voulut point en partager la
honte ; & elle follicita fon retour dans fes états.
Xerxès, après l’avoir comblée d’éloges & d’honneurs,
la fit conduire avec une forte efcorte jufqu’â
Ephefe ; & pour témoignage de fon eftime , i l lui
confia plufieurs de fes enfans nés/de fes concubines
qui l ’a voient fuivi dans cette guerre. Les autres
aéhons de cette princefle font tombées dans l’oubli;
mais ce que Phiftoire nous aconfervé, fuffit pour
lui aflîgner une place parmi les plus grands hommes.
( T—n . )
v A r t e m i s e , reine de Carie , ( Hiß. anc. ) femme
de Maufole. roi de Carie., s’eft rendue immortelle
par fa tendreffe conjugale , & fur-tout par-les re-'
grets dont elle honora la mémoire de fon époux.
Ce prince qui venoit de fubjuguer les îles de Rho^
des,& de C o s , fut enlevé par une mort prématurée
au milieu de fes conquêtes. .Son époufe vivement
touchée de fa perte, lui éleva un fuperbe
tombeau qui a fervi de modele à tous les ftecles
fuivansdans les pompes funéraires. On donne encore
le nom de maufolèe à ces monumens que la vanité
des vivans érige aux reftes infenfibles des morts.
Cette princefle ne pouvant vivre féparée de celui
qui avoit fait fa félicite , fit brûler fon corps, en
recueillit les cendres , & en mêla toujours dans fa
boiflon , jufqu’à ce que fon corps fut devenu la
véritable fépulture de fon époux. Les poètes & les
orateurs qui célébrèrent les vertus de Maufole
furent récompenfés avec magnificence. Artemifc
inftitua des combats & des jeux funèbres où
Ifocrate & Théopompe déployèrent les richefles
de l’éloquence. Quoiqu’occttpée de fa douleur, elle
ne négligea point l’adminiftration publique. Élevée
au trône de Carie , elle fe montra digne de l’occuper.
Les Rhodiens qui s’étoient révoltés , furent.
punis. Les vengeances qu’elle exerça fur ces in-
iulaires, çxciterent la compaflion des Athéniens,
G G gg