n’y a point de roi des Romains, l’éle&eur de Saxe
& le Palatin font les vicaires de l’empire.
L * Allemagne a plufieurs fortes de fouverains q u i,
avec une égalité de prérogatives, font diftingués
par la différence des noms. Les landgraviàts qui ,
dans leur origine , n’étoient que des commiflions ,
■ devinrent héréditaires. La jurifdifltion de ces landgraves
s’étendoit fur une province ; c’ eft pourquoi
on les appelloit juges ou comtes provinciaux. Les
tins relevoient immédiatement de l’empereur, dont
ils recevoient l’inveftiture de leur dignité, 8c les
autres relevoient des évêques 8c des feigneurs, à
qui ils étoient obligés de rendre hommage comme
à leurs fouverains. Leur grandeur attuelle fait méconnaître
leur origine. Les margraves ou marquis
commandoient fur la frontière. La jurifdiâion du
burgrave étoit bornée dans une ville. Quoique la
prérogative d’élire un chef de l’empire, foit annexée
exclusivement à certaines maifons, il y a plufieurs
fouverains qui marchent leurs égaux. Les princes
de Heffe-Caffel, maîtres d’un pays étendu 8c fertile,
font rechercher leur alliance parleurs voifins. Ceux
de Holftein poffedent prefque toute cette peninfule,
connue autrefois fous le nom de Cherfone£e cimbri-
gue. Le duc de Virtemberg poffede une partie de
la Spuabe. Les états du duc de Meckelbourg font
renfermés entre la mer Baltique 8c l’Elbe , 8c ceux
du marquis de Bade s’étendent le long du Rhin.
Plufieurs autres princes font véritablement fou-
yerains; mais leur puiffance bornée les met en effet
dans la dépendance de leurs voifins plus puiffans : .
tels font fur-tout les princes eccléfiaftiques. Comme
leur dignité n’eft point héréditaire, elle leur donne
moins de confidération : ils ne font fouverains,
qu’autant qu’ils fe tiennent enfermés dans le cercle
de leurs états..
Le chef du corps Germanique prend le titre d’em-
pereur ; 8c comme il n’y a point de revenus attachés
à cette fuprême dignité, on â foin de n’élirë qu’un
prince allez riche 8c affez puiffant, pour en foutenir
l’éclat. Ce roi des rois n’a pas une ville à lui: les
titres de toujours augufle , de Céfar , de majejlé
facrée, ne lui donnent point le droit de prononcer
fouverainement fur les affaires de la paix 8c de la
guerre. L’établiffement des impôts, 8c toutes les
branches de l’adminiftration dépendent des affem-
blées générales, qu’on appelle dictes. Tout ce qu’on
y décide, ne peut avoir force de lo i, s’il n’a le fceau
de l’empereur.
Les états de l’empire font compofés de trois corps
ou colleges, dont le premier eft celui des électeurs ;
le fécond celui des princes ; le troifieme eft celui des
villes impériales. Les électeurs 8c les princes font
véritablement fouverains dans leurs états ; il eft des
cas où on peut appeller de leurs jugemens à la chambre
impériale de Spire , ou au confeil aulique, qui
f e tient dans la réfidence de l’empereur : e’ eft-là que
fe décident les affaires de la nobleffe. Le college des
princes eft encore compofé d’évêques 8c d’abbés
qui forment une claffe particulière. Quoiqu’ils ne
doivent leur élévation qu’aux fuffrages de leur chapitre
, ils ont la préféance fur les princes féculiers,
dans les dietes 8c les cérémonies publiques. L’étendue
de leurs poffeflions, 8c leurs immenfes revenus
leur fourniffent les moyens de tenir une cour, dont
la magnificence éclipfe celle de la plupart des autres
princes. Il eft vrai que, depuis l’établiffement de la
religion proteftante, plufieurs font déchus de cet
état d’opulence ; les archevêques de Mayence, de
Treves , de Cologne, n’ont point été enveloppés
dans cette révolution. Leurs rich elfes 8c leurs privilèges
leur donnent une place diftinguée parmi les
autres fouverains. L’archevêque de Salsbourg tient
JLe fécond rang après eux, Lçs princes évêques font
ceux de Bamberg, de Virzbourg, Spire, Vormes,
Confiance, Ausbourh, Hildesheim, Paterbon, Frei-
fingen, Ratisbonne, Trente, Brixen, Bâle, Liege,
Ofnabruck, Munfter 8c. Coire, &c> 8c quelques-uns
de ces évêques occupent plufieurs fieges, dont les
revenus donnent un nouvel éclat à leur dignité, dont
rarement ils rempliffent les obligations religieufes ;
le luxe de leurs moeurs eft bien éloigné de la fimpli-
cité évangélique. Le grand maître de l’ordre Teuto-
nique tient le premier rang dans la claffe des évêques.
Les abbés qui ont le titre de princes, font ceux
de Fulde , de Kempten , de Prum, d’Elvan, de
Viffembourg, &c. Le grand prieur de Malte prend
place parmi eux : le titre dé comte 8c baron donne
autant de confidération dans ces dietes , que celui
de prince. Au refte cette confidération eft toujours
proportionnée à l’étendue de leurs états.
Plufieurs villes , qui ont confervé leur indépendance
, forment chacune des'efpeces de république,
8c figurent avec éclat au milieu d’un peuple de fouverains.
On compte cinquante-une de ces villes ,
qu’on nomme impériales, parce qu’elles ne dépendent
qiie de l’empereur. Le traite de Munfter leur,
donne voix délibérative, 8c toutes enfemble ont deux
voix dans les dietes : l’état floriffant de ces villes eft:
une nouvelle preuve que l’abondance eft un fruit
certain de la liberté. On y voit germer les richeffes;
8c les befoins y font ignorés. Les plus confidérables
font Hambourg, Lubec 8c Breme dans la bafîe-Saxe ;
Ratisbonne dans le cercle de Bavière ; Nuremberg 8c
Altorf dans la Franconie ; Aufbourg, Ulm, Hailbron
dans la Souabe ; Cologne , Aix-la-Chapelle dans la
Weftphaüe; Francfort, Spire, Worms., dans le cercle
du haut-Rhin. Toutes ces villes offrent le fpeûacle
de l’opulence.
. Il eft une autre efpece de villes qui forment une
puiffance fédérative pour les intérêts de leur commerce
: on les appelle anféatiques, qui font Cologne
dans le cercle de la Weftphaüe, Hambourg, Lubec ,
Breme 8c Roftoch, dans le cercle de là baffe-Saxe ;
8c Dantzic dans la Pruffe Polonoife : ces villes
font des efpeces de républiques q u i, fous la protection
de l’empire, fe gouvernent par leurs propres
lo ix , 8c n’obéiffent qu’à leurs magiftrats.
\J Allemagne fut divifée en différens cercles,. ou
grandes provinces, l’an 1439, dans la diete de Nuremberg.
Chaque cercle -.renferme plufieurs états
dont les fouverains s’affemblent pour régler leurs
intérêts communs. Quatre de ces cercles font au
midi de la haute Allemagne , favoir ceux d’Autriche ,
| de Bourgogne, de Bavière 8c de Souabe- Les cinq
} autres font la Weftphaüe, la Haute 8c baffe-Saxe,
! le haut'8c le bas-Rhin. Le cercle de Bourgogne ne
fubfifte plus depuis que les pays d’où il tiroit fon
nom ont paffé lous une: autre domination.
Le cercle d’Autriche renferme l’archiduché de ce
nom, les duchés dé Stirie , Carinthie 8c de Car-
niole, le comté de Tirol 8c la Souabe Autrichienne ;
l’archiduché eft un pays fertile en vins, en grains
8c en pâturages ; fes anciens marquis étoient chargés
de défendre la frontière contre les invafions des
Huns ou Avares. Ce pays faifoit partie des provinces
Romaines de Norique 8c Pannonie ; La Stirie
eft un pays montagneux qui nourrit beaucoup
de bétail ; fon nom allemand fignifie boeuf. Sa principale
richeffe confifte dans fes mines de fer. Le duché
de Carinthie fournit les mêmes productions.
Celui de Carniol eft dominé par de hautes montagnes
, 8c le fol eft hériffé de rochers : on y trouve
des mines de fer 8c d’argent. Le T ir o l, quoique
rempli de montagnes couvertes de neige , eft corn,
fidérable par fa population, par fes mines de fe r ;
d’argent 8c de mercure.
Le cercle de Bayieje, du tems des Romains a
faifoit partie de la Norique 8c de la Vindelicie. Ce
pays pauvre n’auroit befoin que d’habitans induf-
trieux8c commerçans pour y voir naître l’abondance.
La terre y produit d’abondantes moiffons de bled.
On y trouve des mines de fe r , de cuivre, de vitriol
8c d’argent ; les falines y font d’un produit
confidérable. Six états font renfermés dans ce
cercle, le duché 8c le palatinat de Bavière ; le duché
de Neubourg, l’archevêché deSalzbourg, les
évêchés de Freifingen, de Ratisbonne 8c de Paf-
faw ; l’éle&eur de Bavière , de la branche cadette
de la maifon palatine , ne poffede la dignité électorale
que depuis 1621. L’archevêque de Saltzbourg
eft un fouverain riche 8c puiffant qui prend le titre
de légat du S. Siégé. Il a la prérogative de nommer
à plufieurs évéchés; le duché de Neubourg 8c
la principauté de Sulsbaclc s’appelle aujourd’hui le
nouveau palatinat, parce qu’il a paffé fous la domination
de l’éleCteur palatin du Rhin. Les évêques
de Freifingen de Ratisbonne 8c de Paffaw font princes
de l’empire.
La Souabe , qui tire fon nom des Sueves fes anciens
habitans, eft célébré par fes bains 8c fes fontaines
falées, ce cercle renferme trente 8c une villes
impériales 8c un grand nombre de principautés ecclér
fiaftiques 8c féculieres , dont les plus confidérables
font les duchés de Virtemberg, la principauté 8c le
comté de Furftemberg , le marquifat de Bade , l’évêché
d’Ausbourg8cl’abbaye de Kempten; les princes
de Virtemberg tiennent le premier rang parmi
les fouverains du cercle de Souabe. La principauté
ou comté de Furftemberg eft poffédée par les princes
de ce nom , qui datent de la plus haute antiquité.
Kempten n’eft confidérable que par les privilèges
dont jouit fon abbé., Ausbourg, célébré par fes ouvrages
d’orfevrerie, d’horlogerie 8cd’ivo ire, donne
le titre de fouverain à fes évêques. Ulm , fur le Danube
, eft une ville commerçante en toiles , en laines
, en futaines 8c en ouvrages de fe». C ’eft la pre- !
miere des villes impériales de la Souabe.
La Franconie , qui fut le berceau des conquérans
des Gaules, dont elle conferve encore le nom , eft
riche par fes bleds, fes pâturages 8c fes fruits. Ce
cercle, qui renferme cinq villes impériales, a pour
dire&eur l’évêque de Bamberg, 8c l’un des deux
marquis d’Anfpach 8c de Culembach, qui rempliffent
tour-à-tour cette fonftion ; mais l’évêque jouit
feul du droit de propofer les affaires, de recueillir les
fuffrages 8c de dreffer les conduirons. Cet évêque,
par un droit fondé uniquement fur l’ufage , a pour
officiers héréditaires les électeurs de Bohême, de
Saxe, de Bavière 8c de Brandebourg, qui font
remplir leur fonôion par des fubalternes ; ils font
trop grands pour s’en acquitter eux - mêmes. Il
paroît furprenant que des princes aufli puiffans
n’aient pas aboli une coutume (jui.femble déroger
à leur dignité ; des motifs d’intérêts ont perpétué
cette bifarrerie. Ils ont grand foin de fe faire invef-
tir de leurs offices par les évêques, pour jouir de
plufieurs terres qui y font attachées ; l’évêché de
Virtzbourg eft d’un revenu confidérable ; lorfque
quelqu’un fe préfente pour être reçu chanoine , il
eft obligé de paffer au milieu des chanoines rangés
en haie , qui le frappent légèrement fur le dos.,
Cette coutume eft un artifice pour éloigner des ca-
nonicats les princes de l’empire qui refufent de fe
foumettre à cette cérémonie. C ’eft dans ce cercle
que les princes de Saxe , de Gottha, de Cobourg,
d’Hildburghaufen, ont leurs poffeflions. Le landgrave
de Heffe - Caffel y poffede plufieurs principautés.
Lesmarquifats d’Anfpach 8c de Culembach ou de Ba-
reith, qui appartiennent à des princes cadets de la
maifon de Brandebourg, y font aufli renfermés : les
principales villes impériales font Nuremberg, où fe
fait ntl grand commerce , 8c Francfort fur le
Mein.
Le cercle de la Haute-Saxe, Comprend la Saxe ;
l’éleûorat deBrandebourg 8c le duché de Poméranie;
il n’y a que deux villes impériales enclavées dans la
Thuringe. La Saxe eft un pays fertile en bled 8c
en pâturages ; on y trouve des mines de plomb 8c
d’argent,c’eft de-là qu’on tire la gaude , plante propre
à la peinture. Les princes de Saxe defeendent
du marquis de Mifnie. Ils ne poffedent ce duché que
depuis l’an 1 4 2 1 ,8c l’éle&orat que depuis l’an 1448.
Perfonne ne leur contefte d’être une des plus anciennes
maifons de l’Europe ; la branche Albertine
a prefque tout englouti l’héritage de cette maifon.
L’Erneftine a fes principales poffeflions dans la Thuringe
, unie à la Mifnie en 1240. La principauté d’An-
halt eft poffédée par les defeendans des princes d’Af*
canie, qui , dans le douzième fiecle , figuroient
parmi les plus grands princes de l’Europe. Ils pof-
féderent fucceflivemént le marquifat de Brandebourg
le duché de Saxe 8c plufieurs autres grandes principautés.
La marche de Brandebourg a effuyé de fréquentes
révolutions, 8c a fouvent changé de maître.
Elle eft enfin paffée fous la domination des defeendans
de Frédéric maregrave de Nuremberg, qui
font maîtres de la Pruffe 8c de beauroup de pays
qui forment aujourd’hui le royaume de Pruffe,
royaume puiffant 8c devenu redoutable à l’Europe
parle génie de fes derniers rois. L’éle&eurde Brandebourg
, roi de Pruffe, ne le çede qu’à la maifon d’Autriche
par l’étendue de fes poffeflions. La multitude
de fes principautés lui donne rang 8c droit de fuf-
frage dans plufieurs cercles. C ’eft ce qui établit fon
crédit dans tout l’empire.
Le cercle de la Baffe-Saxe comprend les duchés
de Meckelbourg, de Holftein, de Brunfvick, de
Hanovre , les principautés d’Hildeshein 8c d’Hal-
berftadt, avec le duché de Magdebourg. La maifon
de Brunfvick , partagée en deux branches , la ducale
8c l’éle&orale , y a fon plus riche patrimoine.
La principauté d’Halberftadt, qui étoit un riche évêché
, a paffé dans la maifon de Brandebourg, ainfi
que l’archevêché de Magdebourg qui a été fécula-
rifé. Le duché de Meckelbourg eft un démembrement
de l’ancien royaume des Vandales. Les princes
de cette maifon font divifés en deux branches ,
qüi partagent le duché. Le Holftein , qui dans fon
origine n’etoit qu’un comté , fut érigé en duché en
faveur de Chriftiern, roi de Danemarck , dont les
defeendans le partagent aujourd’hui. Lubec, ville
libre 8c impériale, tient le premier rang parmi les
villes Anféatiques. L’évêché eft héréditaire dans la
maifon d’Holitein.
Le cercle de Weftphaüe eft divifé en treize états
principaux , l’évêque de Liege en eft le fouverain,
8c fa qualité de prince de l’empire lui donne féance
8c droit de fuffrage dans les dietes. Les duchés de
Juliers 8çde Berg font devenus le patrimoine des
électeurs palatins héritiers des ducs de Cleves. Le
■ roi de Pruffe poffede dans ce cercle , la Marck ,
Cleves 8c Ravenfperg, l’évêché de Meinden qui
fut fécularifé en 1648, Emden 8c la principauté
d’Ooftfrife. Les comtés d’Oldenbourg 8c de Del-
menhorft appartiennent au roi de Danemarck.
Le cercle du Bas-Rhin eft appellé cercle-éleclomt,
parce qu’i l renferme les trois éleftorats eccléfiaftiques
8c les palatinats du Rhin qu’il ne faut pas
confondre avec le palatinat de Bavière ; 8c le cerc
le du Haut-Rhin eft compofé .des évêchés :de
"Worms, de Spire 8c de Bafle, des duchés des Deux
Ponts 8c de Simmeren, des landgraviats de Heffe
8c de Darmftadt ; du comté de Naffau , de la prin^
cipauté de Naffau,