On fait que toutes les parties d’une droite, déterminées
& confidérées comme on v eu t, ont la
même pofition. Auffi Euclide demande que d’un
. point donné à un autre point donné on puiffe mener
une ligne droite ; c’eft-à-dir'e que deux points étant
donnés de pofition, la droite qui paffe par ces points
eft auffi donnée de pofition. Enfuite il ( dtm. /. )
pofe pour axiome que deux lignes droites n'enferment
point un tfpace ( ax. //. ) , c’eft-à-dire par deux
points donnés on ne peut tirer qu’une feule droite..
La définition qu’Euclide donne de la ligne droite
revient à celle que je viens de donner, & qu’on
peut expliquer d’une maniéré populaire, en difant :
la ligne droite ejl celle qui tournant autour de deux de
Jes points ne change point déplacé.
Une ligne courbe n’a pas trois de fes points qui
aient la même pofition ; c’eft ce qui fuit naturellement
de la notion que chacun a naturellement de la
ligne courbe.
Donc, à parler exaClement, il n’y a d’autres angles
que les angles reCtilignes ( Dictionnaire raif. des
Sciences, &c. ANGLE RECTILIGNE k Y art. Angle).
De-là Vient que tous les géomètres déterminent
unanimement l’angle que font deux courbes, par
celui que forment leurs tangentes {jbid. art. Curviligne).
Ainfi Y angle fphérique A C E (Pl.de Trigon.
fig. 2 1 .) , c’eft-à-dire, Y angle que forment les deux
arcs de cercle A I C, E G C tracés fur la furface
d’une fphere, fe détermine par l’inclinaifon mutuelle
des--deux plans C A F ; C E F ( ibid. art. Sphérique)
, & l’inclinaifon de ces deux plans fe mefure
par Y angle que forment les perpendiculaires à la
droite C F , tirées l’une dans le plan C A F , & l’autre
dans le plan C E F (ib. dèfin. (T, liv. II.') : & ces perpendiculaires
font les tangentes : l’une du cercle C À F ,
& l ’autre du cercle C E F (ibid. prop. /<?. liv. I I I .).
Ainfi pour connoître Y angle que font les branches
des courbes qui ont un noeud (ibid. article Noeud )
en A ( Planches EAnal. fig. 41 & 42. ) , on tire par
le p o in té les tangentes des deux branches. De-là
vient que , par exemple, on dit que la ciffoïde
( Dicl. rdif.&c. art. ClSSOÏDE ) A O L (PL d'Anal.
f is 9 ' ) e& au point A perpendiculaire au cercle
générateur A N O B , parce que la tangente commune
aux deux branches de la ciffoïde à ce point A
eû.A B , diamètre du cercle auquel eft perpendiculaire
la tangente du cercle tirée par le même point A.
Par conféquent on peut bien fixer Y angle que font
deux points d’une ou de deux courbes, ou le même
point confidéré comme appartenant à deux courbes
ou à deux différentes branches de la même courbe;
mais on ne peut pas fixer Y angle que font deux courbes,
piiifque les angles varient à chaque point. Les
courbés qui fe rencontrent en un point, & qui ont
à ce point une même tangente, ne font point d'angle
entr’elles : mais les unes s’écartent de la tangente
plus lentement que les autres ; & quand on dit que
Y angle du contaft formé par une courbe & fa tangente
au fommet de la courbe, eft infiniment plus
petit qu’un pareil angle formé par une autre courbe,
on veut dire que; celle des courbes de la première
forte qui fe détourné le plus de la tangente, immédiatement
après le point de contaâ, s’en détourne
moins que celle des courbes de la fécondé forte qui
s’en détourne le moins.
Par exemple, l’équation aux paraboles de quelque
ordre*que ce foit, eft a*x =2y . Prenons pour
toutes les paraboles d’un même ordre (Pl. de Géométrie
, fig, /. Suppl, ) la même ordonnée D F ou A B
( y ) ; le produit ou af x .A D = a x B F eft
conftant ; donc plus a eft grand, plus x eft petit, &
au contraire. Si. donc les courbés A E & A F font
deux paraboles du même ordre ; en forte que le
paramétré de la courbe A E foit plus petit que le
paramétré de la courbe A F , l’abfciffe A E fera plus
grande que l’abfciffe A F , & la parabole A E plus
courbe, que la parabole A F. Ainfi dans un ordre
quelconque de paraboles, en augmentant leur paramétré,
on aura une fuite de courbes qui s’écarteront
toujours moins de la tangente commune ; c’eft dans
ce fens qu’on dit qu’elles feront les angles de contad
toujours plus petits.
A préfent que les courbes A E , A F r.epréfen-
tent des paraboles du premier ordre, dont l’équation
eft a x = y s ; & que le paramétré de la courbe
A F foit fuppofé auffi grand qu’on veut.
Prenons des paraboles du fécond, ordre , dont
l’équation eft b - x —y >; & foit leur ordonnée commune
( y ) la même que dans la fuppofition précédente
, de plus que B G indique l’ablciffe qui cor-
refpond à l’ordonnée y dans une de ces paraboles.
On aura donc
F B : B 6 = y a : y'>=.b-: y
7 $- 7
Quelque petit que foit b' , & quelque grand que
foit a y la fraCtion b 1 eft toujours finie,: mais plus le
point B s’approche du point A ; plus nous nous
approchons de ce que nous cherchons, qui eft la
pofition du point de la courbe qui fuit immédiatement
le p o in t é ; on peut donc prendre A B plus
petite que : & dans ce cas B G eft plus petite que
B F; .quelque petit que foit le paramétré d’une parabole
du fécond ordre, cette courbe s’écarte moins
de la tangente qu’une parabole du premier ordre,
quelque grand que foit fon paramétré. C ’eft dans ce
fens qu’on dit que f i , avec le même, axe M avec le
même fommet, on décrit des paraboles .des différens
ordres, en paffant régulièrement de l’ordre inférieur
à celui qui lui eft immédiatement fupérieuf, on aura
une- fuite d’angles de contingence qui décroîtront à
l’infini ; & c’eft dans ce fens qu’a parlé Newton dans
l’endroit cité par le Dicl. des Sciences, &c. endroit
qui fe trouve au coroll. VII. de l'ex. IV. du prob. F»
dans YOpufcule I I du premier des opufcules, de Newton
, que j’ai donnés ; pag. 114. 115.
Ainfi tout le merveilleux difparoît & fe réduit à
cette idée fimple & claire, que chaque ordre de
lignes, chaque ligne du même ordre & de la même
elpece a fa courbure particulière, différente de la
courbure de toute autre ligne , & que la courbure
des lignes d’un ordre peut approcher de l’autre tant
qu’on veut, fans que l’une devienne l’autre, comme
plus on augmente le rayon d’un cercle , moins la
circonférence devient courbe, fans devenir jamais
droite.
Au refte il eft douteux qu’Euclide ait parlé de
Y angle de contaft du cercle & de la tangente ; voyez
les remarques que Simfon a mifes à la fin de .iota
édition d'Euclide. C’eft pourquoi mon fils a omis ,
par mon confeil, dans fon édition de cet auteur,, la
partie de l’énoncé de la prop. i 6 du liv. I I I , qui
regarde Y angle du contaft. Obfervez que ni Euclide
ni Apollonius, quand ils parlent d’une tangente &
d’un cercle ou d’une feCtion conique, ne difent jamais
angle ; ils difent toujours lieu, efpace ( tmmi- ).
; Cette remarque eft de Wallis, de ang. contact, cap.
(J . D. C.)
§ ANGLESEY, ( Géogr. ) île de la grande Bretagne
, dans, la mer d’Irlande, & prefque vis-à-vis
Dublin. C’eft une annexe de la province de Galles.,
avec titre de comté, & une dépendance du diocefe
de Bangor. Elle n’eft fépàrée de l’Angleterre même
que par lé détroit de Menay : on lux donne vingt-
quatre milles d’Angleterre en longueur, & quatorze
milles en largeur. On compte dans fon diftritt environ
foixante & quatorze paroiffes ; fa capitale eft
Beaumarish. Son terroir eft fertile en grains & en
fourrages ; elle a des carrières de marbre oii l’on
trouve de l’amyante & d’autres d’o ù l’on tire de très-
bonnes meules de moulin : il-y a auffi des mines de
cuivre & d’ocre en pierres de couleurs diverfes,
rouge, verd & bleu : on y trouve également une
forte d’argille très-blânche qui fert au même ufage
que la cimolé. Cette île a un député au Parlement.
Long. 12 , / j . lat. 5g , 64. ( C. A . )
* ANGLOIS ( l ’ ) , f. m. la l a n g u e A n g l o i s e .
( Litt. Gramm.) \IAnglois tel qu’on le parle aujourd’hui,
vient du Saxon , dialeftede l’ancienne langue
des Goths, ou langue Teutonique. U Anglais du roi
Alfred , que l’on peut regarder comme le plus ancien
Anglais y n’eft qu’un Saxon'affez pur, & l’on
n’y trouve que très-peu de mots de la langue Romaine
ou Latine. Ce n’eft guère que vers le milieu
du douzième fie cl e que l’on voit ce Saxon s’altérer
& prendre une forme un peu plus approchante de
YAnglois d’aujourd’hui. 11 ne paroît pas que l’on
doive attribuer ce changement à la conquête des
Normands , car dans l’efpace de cent ans qui fuivi-
rënt cette conquête, on ne voit qu’un très-petit
nombre de mots François paffer dans YAnglois. Dans
la transformation fucceffive & graduée d’une langue
en une autre, on ne peut pas raifonnablément
exiger que l’on marque précifément un point où
les Anglois ont ceffé. de parler Saxon & commencé
à parler Anglois. Cé point n’exifte pas.
Robert de Glocefter, qui floriffoit dans le xm e
fie cl e , fem b le a v o i r parlé unlangage mitoyen qui
n’étoit proprement ni Saxon ni Anglois, Mais le
langage de Jean Mandevillé , ou comme il fe
nomme lui-même, John Maundeville, eft plus
Anglois que Saxon. Il écrivoit dans le x i v e. fiecle.
Mais le premier que l’on puiffe dire avoir écrit en
Anglois y ç’eft Jean G ower, auquel fuccéda Chau-
cer , fon difciple. Gower eft le pere de la poé-
fié angloife. Chaucer ne mérite ni tous les éloges,
ni tout le blâme qu’il a reçus. Dryden , qui confond
le génie avec la fimple érudition, & qui par une
étrange préfomption a parlé de ce qu’il n’avoit pas
affez examiné, attribue à Chaucer la gloire d’avoir
trouvé le-premier le rithme Anglois, ou la profo-
die de fa langue , d’avoir le premier fait ufage des
rimes aifées & naturelles, d’avoir perfectionné YAnglois
en l’enrichiffant à propos d’un grand nombre
de mots empruntés des langues les plus polies du
continent. Skinner le blâme au contraire, de la mal
niere la plus dure, d’avoir corrompu fa langue maternelle
par l’alliage d’un grand nombre de mots
étrangers. Que ce foit à tort ou avec raifon, il eft
fur qu’encore aujourd’hui tous les écrivains Anglois
plus occupés des chofes que de la façon de les
rendre, tiennent peu de compte de la perfection
du langage, & n’envifagent les mots que relativement
au befoin qu’ils en ont pour exprimer leur
penfée, & non relativement à l’effet que leur arrangement
& leurs rapports peuvent produire. Tout
terme, foit Latin, foit François , foit Italien , qui
paroît à l’Anglois le plus propre à rendre fon idée,
eft acquis à fa langue qui l’admet fur le champ ,
fans même fe foucier de le fléchir par des termi-
naifons analogues. T el eft le génie de cette langue,
elle admet aifément toutes les formes des autres,
& fe plie avec une condefcendànce exceffive au
caraftere , aux befoins, aux caprices de chaque écrivain.
Revenons à Gower : fes oeuvres offrent cette
cadence harmonieufe ; ces rimes aifées dont on attribue
gratuitement l’invention à Chaucer : on y
trouve ces mots étrangers, ces mots latins, c es
mots françois, bon ou mauvais affemblage dont on
rend Chaucer refponfable. Celui-ci peut bien avoir
introduit quelques innovations dans fa langue, comme
on avoit fait avant lu i , fur-tout dans l’enfance
de la poéfie angloife. Mais les oeuvres de Gower èc
de Lydgade prouvent inconteftablement que la diction
de Chaucer fut en général femblable a celle de
fes. contemporains, qu’il la perfeftionna feulement
par fa poéfie, parle choix Sc la difpofition du métré
& des rimes, en quoi il femble avoir été auffi heureux
que judicieux.
Fqntefcue, qui écrivoit fous le régné de Henri
V I , & qui a compofé la plupart de fes ouvrages
après l’an 14 7 1 , dans la retraite, fert à montrer
quel étoit l’état de la langue angloife à la fin du
quinzième fiecle. Au temps de Thomas More, la
langue étoit prefque'formée. Skelton , poète lau-
réatde Henri VIII,floriffoit dans le même, temps.
Mais l’auteur le plus pur & le plus célébré de ce
régné, fut le comte de Surry.,La diftion de Barclay
qui écrivoit vers le milieu du x v i. fiecle , n’a prefque
plus rien d’antique, fi ce n’eft l’ortographe,
refte de l’ancienne barbarie qui fe remarque auffi
dans les écrits du Doéieur Wilfon, en 1553 , auteur
auffi renommé par l’élégance de fon ftyle que
par l’étendue de fon favoir.
Nous voilà infenfiblement parvefius.au temps de
la reine Elifabeth, époque où l’on fixe la formation
entière de la langue Angloife. 11 feroit peut-être à-
propos de montrer les différens changemens qu’elle
a effuyés & fa métamorphofe, par des exemples
tirés des ouvrages qui tint été. cômpofés dans fes
différentes révolutions ; ces longues citations an-
gloifes n’entrent point dans notre plan ; &- l’on peut
confulter là-deffus le grand Diétionnaire Anglois de
M. Johnfon en 1 vol. in-folio. - On y trouvera des
échantillons de la langue Angloife dans les divers
périodes depuis Alfred le grand jufqu’au temps de
la reine Elifabeth. Ce Diétio'nnaire eft fans contredit
le plus régulier, le plus complet, le plus fa-
vant, que nous ayons en Anglois. L ’âuteur qui dans
plufieurs autres ouvrages , s’eft montré philofophe
profond, littérateur folide, écrivain póli & correâ,
loutient ces trois carafteres dans fon diétionnaire!
C’eft le fruit d’une lefture immenfe. Les exemples
y font abondans ; mais ils n’y font pas accumulés
fans deffein : ils préfenteht des lignifications variées
■ ou du moins des nuances du même fens. Ici le mot
eft appliqué aux perfonnes , & là aux chofes. Un
paffage le montre pris en bonne part, un autre
en mauvaife , un troifieme en. un fens indifférent.
Celui-ci tiré d’ufi auteur ancien, conftate l’authenticité
du mot, celui-là tiré d’un moderne en prouve
l’élégance. Une autorité douteufe eft confirmée par
une plus forte ; une phrafe ambiguë eft éclaircie
par un paffage clair & déterminé ; le terme paroît
dans divers régimes, & avec des affociations différentes
, & chaque affociation contribue en quelque
chofe à fixer & à perfectionner la langue. Ce dictionnaire
, par l’abondance & le choix des citations,
forme un recueil agréable des plus beaux morceaux
des auteurs en vers & en profe.
La diftinCtion la plus importante dans les mots
d’une langue, c’eft celle de l’antiquité, & de la '
nouveauté. Nous avons déjà vu que YAnglois s’eft
formé fuçceffivement, qu’il n’a été ni plus exempt
de caprice , ni moins fujet à l’altération que les autres
langues. La variation inévitable des langues
vient des progrès du commerce , de la culture des
efprits , de l’invention des nouveaux arts, du mé- ‘
lange des idiomes étrangers , & fur-tout des vices
des traductions. Les langues vivantes ne fe fixent
point. L’élixir qui promet l’immortalité aux hommes
n’éft pas plus une chimere que le dictionnaire
qui prétend affurer l’immutabilité Ou même la perfection
à leur langue. Dans Ce flux continuel de
mots qui fans raifon tombent dans l’oubli, ou fans