
labour pour femer de Porge , & enfuite deux fois
du froment , après deux labours pour chaque fe-
maille. A la fin de la troifieme année on femé du
trefie , ou pur ou mêlé, comme il a été dit.
Quelques-uns, au lieu du trefle, femèrit de la
luzerne qu’on appelle fainfoin en quelques endroits,
en latin medica major, fiorib uspurpurafcentibus & viola*
ceis , C. B. fanum Burgundiacum feu trifolium, qu’on
cultive comme le trefle. Cet herbage fubfifte fix-
années dans fa force : à la troifieme on y répand quelques
engrais : au bout de ce tems-là, on renverfe la
lüzerniere en automne , & au printems fuivant on
y fême de Porge : on y fait enfuite déux récoltes
de froment.
Si la terre eft trop maigre pour la luzerne ou le
trefle , on la met en efparcette. On lui donne aufli
le nom de pelagra , afpercette ; en latin onobrychis,
foliis vifeice , Jiliculis echinatis , major, floribus dilate
rubmtibus , qui fe feme & fe cultive comme la
luzerne. Elle fubfifte aufli dans fa force environ
fix ans.
Dès que l’efparcetiere commence à décheoir, on
la renverfe en automne , & on donne un fécond
labour au printems pour de l’orge, après Porge du
froment, enfuite des navets, enfin des pois ou de
l’orge.
Réglés à fuivre dans la culture alternative , fu ivant
Vexpofition & la nature du fol. J’ai dû donner
quelque étendue à cette partie hiftorique , non-
feulement afin de mettre par des faits avérés , fous
les yeux les moins intelligent, les fuccès' éclatans
dont a été fuivi l’établiffement de la culturé alternative
dans tous les pays où elle a été introduite ;
mais encore , afin de tirer de ces expériences, les
réglés générales qu’on y doit obferver , fuivant
les diverfes expofitions & la diverfe nature de chaque
fol.
Nous donnons pour première réglé, que dans le
plat pa ys, il ne faut pas s’attendre que les terres,
après avoir été labourées , fe couvrent promptement
d’elles-mêmes d’herbages naturels. Cela ne
fauroit avoir lieu que dans les montagnes. Ailleurs il
faut avoir recours , comme en Angleterre, aux herbages
artificiels. Et il paroît heureufement par toutes
les expériences qui ont été faites, que cette
efpece de fourrage réuffit très - bien prelque partout.
;
2°. J’obferve que la méthode de défricher, fui-
vie dans quelques endroits de la Suifle, eft plus
expéditive & plus exacte que la méthode angloife :
elle eft par conféquent préférable. On péut, après
la première récolte de fourrage , préparer la terre
pour femer encore en automne des bleds d’hiver,
même dans les terres les plus fortes ; fi les terres
font légères, on peut faire la fécondé récolte de
foin.
Il paroît que les fermiers anglois exagèrent ,
lorfqu’ils proicrivent abfolument l’avoine , comme
donnant de trop minces produits. J’ai conftamment
éprouvé , que pour remettre un champ en pré naturel
, dans les pays à bled , l’avoine convenoit
mieux que tout autre grain, & que le terrein le
gazonnoit plus promptement. Voici la maniéré dont
je m’ÿ prends :
J’emploie dix boiffeaux d’avoine pour un arpent,
mais je les mets auparavant tremper pendant vingt-
quatre heures dans une compofition végétale, qui
donne une vigueur extraordinaire au germe & à la
racine féminale.
En voici la compofition : prenez un pot d’eau
bouillante, dans laquelle vous jetterez une livre de
potafle, ou deux livres de fel de foude, il n’importe.
Verfez peu à peu cette eau fur deux livres de chaux
yive. Dès que la chaux commencera à s’échauffer,
délayez-y demi-livre de fleur de fotifre, en braffant
continuellement avec un bâton, jufqu’à ce que la
chaux & la fleur de foufre foient exactement incorpores.
Jettez te tout dans un cuvot avec la vuidange
d’un ventre ou deux de mouton, ou avec des crottes
de brebis difîbutés dans l’eau : vous y ajouterez une
demi-livre de lie d’huile d’olives & dix pots d’eau-
chaude , où vous aurez fait fondre une livre de
potafle, une livre de falpêtre, & u n e livré & demie
de fel commun. Enfin, vous y verférez vingt-cinq
pots de jus de fumier.
Lorfque la liqueur eft froide , j’y fais tremper
mes femences vingt-quatre heures, fi elles ont des
enveloppes, comme l ’avoine, &c. & quinze heures
feulement fi elles font nues , de maniéré que l’eau
furmonte tes femences de deux pouces. Pendant ce
tems-là , je tes fais brader cinq à fix fois.
• Si on veut femer au fortir du bain, on étend tes
femences fur 1e plat de la grange, & on 1e faupou-
dre de cendres de bois , en les remuant avec un
rateau jufqu’à cé que l’humidité foit abforbée, &
que tes grains foient féparés.'
Si quelque contre - tems oblige de différer cet
ouvrage , on tes laiffe étendues fur 1e plat de la
grange, & en tes remuant de tems en tems avec
un rateau ; on peut tes conferver ainfi ‘ fans danger
pendant deux ou trois jours & même plus. Mais
on évitera foigneufement de faire fécher ou effuyer
ce grain au foleil.
On peut fubftituer au fel de foude de la cendre
de fougere, & à la châux vive , de la chaux éteinte
non defféchée, pourvu qu’on en mette une double
dofe , c’eft-à-dire quatre livres.
On peut faire fervir cette liqueur pour un fécond
bain, & pour arrofer quelque terrein qu’on veut
fertihfer.
Après avoir donné au terrein une première façon,
dès que la derniere récolte eh a été enlevée en automne
, & l’avoir labouré & herfé au premier printems,
je feme cette avoine ainfi préparée, & enfuite
une bonne quantité de poufliere de grange , en
choififfant un tems calme.
De cette maniéré j’ai eu plus d’une fo is , de très-
abondantes récoltes. Dès l’automne l’herbe forme
le. plus beau tapis, qu’il ne faut ni faucher ni faire
’pâturer. Le fuccès de la récolte fera complet, fi
l’on peut fe procurer de l’avoine de Hongrie; &
l’on n’en devroit jamais femer d’autre. Elle donne
plus de grain ; le grain eft plus gros, plus farineux
& plus pefant. Elle n’eft point fujette à s’egrainer
fur pied. On la peut ferrer aulïï - tôt au’elle eft
coupée.
S’il y paroît de grandes & mauvaifes herbes,
comme des bardanes ou glouterohs, des jufquiames
ou hannebannes , en latin hyofeyamus, des chardons
rolands ou chardons à cent têtes, des chardons étoilés
ou des chauffes-trappes , de la graffette ; il faut tes
arracher.
Dès l’année fuivante , on y recueillera deux coupes
de foin ; & à la troifieme & non auparavant,
on pourra, fi l’on y eft obligé , envoyer 1e bétail
fur 1e petit regain d’automne, mais avec modération.
4. On comprend aifémentque fi 1e peu de produit
du champ ou du pré vient de quelque vice du terrein
, de quelque eau qui filtre entre deux terrés,
ou qui croupit en quelque endroit, des ravages
caufes par tes mulots ou les taupes , il faut y remédier
, à quelque ufage qu’on veuille deftiner le
fonds.
Nous avons vu que les fermiers anglois corrigent
leurs terres par le mélange de terres oppofées, la
marne convenable & 1e fumier mélange par couches
alternatives.
Chacun fait qu’on deffeche tes terreins mouillans
paf
par des, pierrées , des prifincs , de la chaux, du
gravier , &c.
S’il y a des pierres qui puiffent empêcher le cours
de la charrue , il faut tes enlever, atifli-bien que
celtes qui pourroient s’oppofer à la faux.
Quant aux taupes, je conhois 1e propriétaire d’un
domaine qui prétend qu’elles font fort utiles dans
les prés : aufli n’en fait-il point prendre ; mais en
fe promenant, il a une petite bêche & un petit fac
rempli de graine de foin : dès qu’il apperçoit une
taupinière , il en répand la terre & jette par-déffus
un peu de graine de foin ; & dans le tems de la fe-
naifon , ce font tes plus belles places.
Comme tout 1e monde ne peut pas prendre cette
peine , & que plufieurs la regarderoient comme
inutile, j’ajouterai ici une recette qui a été publiée en
France , par ordre du gouvernement, après divers
eflais réitérés en divers lieux. 11 faut prendre deux
ou trois douzaines de noix bien faines, qu’on fait
bouillir pendant trois heures, avec quatre pintes de
leflive naturelle. Pour s’en fervir, on les partage
en deux , & on en met une moitié dans chaque
trou des taupes : fi la taupe ne travaille plus dans
le même endroit, eeffez d’y en mettre, parce qu’alors
on doit être affuré qu’elle a péri. Les rats, qui fe
trouvent dans tes campagnes, mangent quelquefois
ces noix, alors il faut s’attacher à détruire ces rats
par tes moyens ordinaires.
«>. Les chaumes en Angleterre font fi forts, fi
épais & coupés fi haut, qu’il peut y avoir de l’avantage
à tes brûler, & à en répandre la cendre. Il
pourroit même' quelquefois arriver qu’ils empê-
cheroient de herfer. Je doute cependant que cette
opération fût d’une grande efficace chez nous, &
la paille de nos champs eft fi mince & coupée fi
b a s , qu’elle ne fauroit incommoder.
D ’autre part tes cultivateurs anglois , dans "la
culture ordinaire, ne brûlent pas leurs terres ; ils
ontraifon : cette amélioration n’eft que momentanée
dans la plupart des terreins, & il s’agit d’établir fes
terres à demeure. Tout ce qu’on pourroit & devroit
faire , c’eft que fi, après avoir fait rompre par des
manoeuvres les gazons , il reftoit des chevelus , il
faudroit y mettre 1e feu pour détruire plus promptement
tes racines & tes femences , & en répandre
les cendres fur 1e terrein ; on fe procureroit ainfi
un amendement préfent, qui ne cauferoit aucun
préjudice pour l’avenir. Si cependant 1e fol étoit
parfemé de pierres à chaux menuifées , on lui procureroit
un très-grand avantage en 1e brûlant : on
pourroit même revenir dans la fuite à cette opération
avec fuccès.
6. Dans tous tes pays tes cultivateurs intelligens
s’accordent à condamner l’ufage d’introduire tes
beftiaux fur les prés artificiels ; il faut aufli fe fou-
le t t r e à cette réglé, fi la chofe eft pofîible. On
doit en fentir tes raifons.
7. Les rouleaux que tes cultivateurs intelligens
de la Suifle & tes fermiers anglois font paffer fur
leurs prés artificiels, fervent à affermir & à unir
1e terrein, à envelopper & à affujettir la femence,
à chauffer tes plantes , à rompre tes mottes & à
faciliter la coupe du foin. L’ouvrage eft donc indif-
penfable. J’ajoute qu’il faut, outre cela, épierrerle
fonds avec foin; car il eft rare que 1e labour n’amene
des pierres à la fupérficie.
8. Je n’approuve pas 1e retour des mêmes herbages
de fourrage fur les mêmes terres. Comme on
change les efpeces de grains , il convient, parles
memes principes, de changer aufli les herbes des
prairies. Il me paroît même qu’on devroit varier
encore plus qu’on ne fait tes grains ; on a tes hari-
co ts , les feves , les feveroles, le mars ou bled lom-
bard »divers legumes, les carottes, tes paftenades,
Tome I.
crc. la garance, du fenugfec, de l’anis, du fenouil,
de la moutarde, des coriandes, &c. Les productions
de la terre font fi variées qu’il y a à choifir
pour tes terreins & les climats. Il faudroit feulement
s’appliquer à connoître la fucceflîon qu’il fe-
roit à propos de fuivre pour faire ces changemens
avec fuccès.
9- J’ai autrefois héfité entre la méthode angloife
& la nôtre , s’il faut femer tes herbages artificiels
fur des terres déjà enclavées, ou fi on doit tes
femer fur 1e terrein vuide. U y a des raifons pour
& contre.
On dit que les plante? de bled garantiflent l’herbage
encore jeune & tendre des premières chaleurs
de' l’été. L’on comprend que, cette raifon ne peut
être bonne que pour tes pays chauds, & que même
en ce cas l’avoine donneroit un meilleur abri que
1e froment, 1e feigle ou l’orge qui font trop d’ombre
quand ils font grands, & qui étouffent l’herbage.
L’avoine fe fauche , foit verte , foit après fa
maturité. D ’ailleurs cette raifon fuppote qu’on feme
l’herbage le printems ; mais on doit 1e femer en
automne, & l’année fuivante il a acquis affez de
force pour réfifter à la chaleur. Enfin il eft fur que
fi la faifon étoit pluvieufe , l’herbage courroit rifque
d’avorter au milieu des plantes qui 1e couvrent. Il
paroît qu’il vaut mieux dans tes climats tempérés,
comme, le nôtre, ne point mélanger avec aucun
autre grain , les femences de prairies artificielles,
qui acquerront certainement plus de force. C’eft.
ce qui a été expérimenté.
10. Enfuite de mes expériences, j’approuve extrêmement
la méthode angloife de répandre le fumier
& l’engrais fur les herbages artificiels, pendant
l ’hiver. Par-là on tes abrite, on les reterre , on tes
rechauffe & on les nourrit à la fois. J’ai vu aufli des-
cultivateurs qui, ayant la facilité d’y faire trànfporter
des égoüts de fumier dans cette même faifon, fe
trouvoient fort bien de cette économie.
1 1 . Les Anglois feme rît les herbages en automne;
Sc nous les femons communément au printems. Dès
qu’on les feme fans mélange , il faut fuivre la pratique
angloife. Et dès la première année on fait déjà
une bonne récolte.
12. Toutes tes expériences que j’ai faites & toutes
celtes dont j’ai été .témoin , m’ont convaincu que
les Anglois ont raifon en renverfant leurs luzernieres
& leurs efparcetieres au bout de fix ans. C’eft tout
ce qu’il en faut pour améliorer le terrein, & pour
jouir des beaux jours de ces prairies, qui après ce
terme, déclinent fenfiblement, lors du moins qu’on
tes abandonne à la nature. (+ )
* § A LTIN, (Géographie.) ville & royaume en
Afrique , dit le Dm?, raif des Scien. &c. par une
faute typographique; lifez en A fie. Ce royaume eft
habité par des Tartares Calmouks : il y a un lac
. nommé aufli A l tin ou Kilhai, qui eft traverfé par
l’Obi.
* Altin, f. m. {Monn.) denarius Rufficus cente-
Jîm.a imperialis pars, petite monnoie de Ruflie qui
vaut trois copeques, & dont dix font un griefe,
& cent un rouble.
A L T IN O ,. ( Géogr; ) ville d’Italie dans l’état de
Venife, entre Padoue & Concordia; elle fut détruite
par Attila, roi des Huns : on en voit encore tes
ruines fur la riviere de Site ; il y avoit le fiege
d’un évêque que l’on transfera à Torcello. (C. A.')
ALTO BASSO, {Luth.') efpece d’inftrument de
percufîion à corde , décrit par Garlin comme il
fuit.
Valto-bajfo étoit une caiffe quarrée d’environ
une braffe & vuide, fur laquelle étoient tendues
quelques cordes accordées entr’eltes à l’o&ave , à
la quinte ou à la quarte. Le muficien frappo.it toutes