
 
        
         
		retient: aifénjerçt, nous pouvons fans peine parler avec  
 clarté de  diverfes choies, dont nous n’aurions jamais  
 pu fans coufufion faire le fujet de nos conventions,  
 ni l’objet  de  nos jugemçns.  Sans  Yabjlraciion  métaphyfique  
 ,  nous ne pouvons  juger que des individus  
 que  nous  eonnoiffons  ;  mais  ayant  généralifé  nos  
 i.dées,  nous  pouvons  juger de  tous  les individus  de  
 l’efpece,  pourvu  que  nous  ne  prononcions  à  leur  
 égard que  l'ur les idées  diftin&es que nous en avons  
 àçquifes.  • 
 Quelque  avantage cependant  que nous tirions de  
 la capacité d’abftraire ; quelque fupériorité que nous  
 ayons  à  çet égard fur les brutes, n’oublions pas d’un  
 coté  que  cette  faculté  ne  nous  eft  néceffaire  qu’à  
 çaufe des bornes de nos connoiflances ; &  de l’autre,  
 que l’abus qu’il  eft fi  facile d’en faire,  eft pour nous  
 une  fource  funefte  de difputes  vaines  &   d’erreurs  
 dangereufes. 
 Incapables de voir d’un coup-d’oeil &  diftindement  
 toutes les faces d’un fujet, toutes  les idées partielles  
 renfermées dans l’idée totale, il a fallu, pour en acquérir  
 la connpifiance, le décompofer &  en féparer chaque  
 idée par Y abjlraciion phyfique ; trop bornés pour  
 yoir êç examiner tous les ê tres, tous les  faits  individuels, 
  nous avons dû nous reftreindre à l’étude d’un  
 très-petit nombre , d’après lefquels nous jugeons de  
 tous les  autres que  nous  croyons  leur  être  fembla-  
 jbles. : notre mémoire étant trop foible pour rappeller  
 toutes lescirconftancesparticulières,  &: les modifications  
 propres à chaque individu, &   tous les caractères  
 qui les diftjnguent les uns des autres,  nous  les  
 retranchons par Y" abjlraciion métaphyfique,  nous les  
 laiffons  à  part  comme  s’ils n’exiftoient pas,  &  nous  
 nous bornons à ce  qui  nous a paru  être  effentiel &   
 commun à chacun d’eux. Rien de tel n’eft néceffaire,  
 &   n’a  lieu  dans  l’intelligence  fuprême ; rfa  connoif-  
 fance infinie comprend tous-les individus ; il ne lui eft  
 pas plus difficile de penfer à tous en même tems, que  
 de  ne  penfer  qu’à un feul, de  voir  toutes  les faces  
 d’un  fujet,  que  de  n’en  envifager  qu’une  feule,;  au  
 lieu que la capacité  de notre efprit eft remplie,  non  
 feulement lorfque nous penfons à un feul objet, mais  
 même lorfque nous ne le  confidérons que par un feul  
 endroit. 
 Des  notions  qui  partent  d’une  telle  origine,  ne  
 peuvent  être  que  défectueufes,  &  vraifemblable-  
 ment il y  aura  du danger à nous  en  fervir  fans  précaution  
 ; l ’expérience ne nous  en a que trop fouvent  
 convaincus,  &   il  eft du  devoir d’un philofophe de  
 fe  tenir en garde  contre les  erreurs  qui peuvent  en  
 naître. Nous allons parcourir en peu de mots  les dif-  
 férens piégés que nous tend l’agrément des idées uni-  
 verfelles. 
 i ° .  abjlraciion  métaphyfique,  en  généralifant  
 nos  idées,  a  donné  plus  d’étendue  à  nos  connoif-  
 fiances, &  a ouvert un champ plus vafte à nos méditations. 
   Il  eft flatteur pour notre  efprit de pouvoir,  
 au  moyen  des  claflifications  fous  lefquelles  nous  
 rangeons tous les êtres, embraffer la nature entière :  
 nous  en  fournies,  ou  au moins  nous  en  paroiffons  
 plus favans, plus profonds : nous faifons, d’après ces  
 idées universelles, des  regies  générales  en plus petit  
 nombre, nous portons  des  jugemens  plus  étendus,  
 notre pareffe,  ou  plutôt  la foiblé portée  de  notre  
 efprit  en eft  flatté ;  mais  en  nous  applaudiffant  de  
 notre  fcience  fpéculative  ,  nous  fommes  forcés  à  
 chaque  pas de déplorer notre peu d’habileté  dans la  
 pratique.  Etendre nos  idées  générales n’eft pas perfectionner  
 nos  idées individuelles,  &   cependant ce  
 n’eft  jamais  d’une  maniéré  générale  &   univerfelle  
 que nous agiffons, mais  toujours  dans  les cas  particuliers, 
  &   envers tel ou tel individu.  O r ,  ces traits  
 particuliers, ces différences  propres, ces circonftan-  
 ices  individuelles, dont nous faifons  abjlraciion pour 
 genéralifer nos  idées, modifient fi  çonfidér-ablement  
 6ç de tant de  façons différentes dans chaque individu,  
 l’objet de l'idée métaphyfique que nous nous fommes  
 faite  par Y abjlraciion,  que  ce  qui étoit vrai à l’égard  
 de l’idée générale, ne  l’eft plus a l’égard de l’individu.  
 Si pour juger fainement d’une chofe dans chaque  cas  
 particulier, il faut la connaître fous toutes fes faces ;   
 u pour  réuifir à  produire  tel effet  defiré fur tel individu  
 g il  faut  avoir une  idée la  plus  exa&e poffible  
 du fujet fur lequel on veut  agir,  &  des moyens que  
 l’on  emploie,on devra convenir  que  le  plus habile  
 dans chaque  genre d’o.cçupation, &  dans chaque cas  
 particulier, ne fera pas celui qui aura  le plus d’idées  
 abftraites métaphyfiques, &  les notions les plus univerfelles  
 , mais celui  qui aura le plus d’idées  diftinc-  
 tes  individuelles.  Delà  vient,  par  exemple  ,  que  
 tant  de  favans médecins, dont  les  jugemens  généraux  
 font  des  oracles,  &   qui  dans  la  fpéculation  
 l ’emportent fur tous- les autres, ont fi peu de  fuccès  
 &   montrent  une  capacité  au-deffous  du  médiocre  
 dans la cure des maladies pour lefquelles les particuliers  
 les confultent. De là tant de  lyftêmes de  légifla-  
 tion,  d’éducation, d’économie, q u i, aufli long tems  
 que  l’on  s’en  tient  aux  idées  générales,  paroiffent  
 bien  liés  &   infaillibles,  qui  cependant,  lorfqu’on  
 vient  à  en  faire  l’application  aux  cas  particuliers,  
 font  abfolument  impraticables.  De  là  tant de  machines  
 inventées avec  efprit, mais q u i,  pour avoir  
 été conftruites d’après des idées purement métaphyfiques  
 ,  ont  prouvé  ce  que nous  avons  dit, que  ce  
 ne font pas les idées univerfelles, mais le plus grand  
 nombre  d’idées  diftinftes  individuelles  ,  qui  font  
 l’homme  habile  dans  chaque  genre  d’occupation,  
 dans  chaque  cas  particulier. Les  défauts  dont  nous  
 avons  parlé viennent  de  ce  que  l’on ne  fe fouvient  
 pas  comme on le devroit,  i°. que  les abjlraaions ne  
 font que dans notre  efprit &  jamais  dans  la nature ;  
 qu’il n’exifte  point d’être métaphyfique ,  aucun objet  
 général,  mais  feulement  des  individus ;  que  la  
 nature n’agit jamais  par  claffe, mais par individus ;  
 &  que l’idée abftraite univerfelle eft, dans chacun des  
 êtrés, modifiée  par  tant  de  circonftances propres,  
 que  l’on ne faura établir aucune  réglé générale d’une  
 applicationfure, fur la feule idée univerfelle formée  
 par Y abjlraciion  métaphyfique.  On oublie ,  i ° . que  
 quelque  profondément  que  l’on  ait médité  furies  
 êtres  d’une  même  efpece  ,  quelque foin qu’on  ait  
 apporté à raffembler dans  l’idee univerfelle tous  les  
 traits  qu’on  fuppofe leur  être  effentiels,  &   qu’on  
 voit  leur  être  communs  à  tous ,  jamais  cette  idée  
 univerfelle ne nous repréfentera leur effence, &  par  
 conféquent ne  nous mettra en  droit de  dire fans  témérité  
 : Je  ne  vois rien de  plus  que  cela  dans mon  
 idée,  donc il  n’y  a  rien  de  plus  que  cela  dans  les  
 êtres  qu’elle  doit  me  repréfenter, donc  tels  êtres  
 ne peuvent produire ou fouffrir que tels effets préci-  
 fémenfc 30. Que c’eft moins par rapport à leur nature  
 réelle,  que  par rapport  à nos  connoiflances ,  que  
 nous rangeons les êtres dans différentes claffes fubor-  
 données ; un oeil plus perçant, des fens plus délicats ,  
 plus de pénétration  dans l’efprit,  nous feroient ap-  
 percevoir,  entre  des  êtres  que  nous  croyons  fem-  
 blables,  des différences  qui nous  obligeroient à  les  
 ranger dans  d’autres  claffes  diftin&es  de  toutes les  
 autres : nous  verrions  qu’il n’eft  pas  dans la  nature  
 deux  êtres  parfaitement  femblables ;  que  chacun  a  
 des  rapports,  des  influences,  des  qualités,  des  facultés  
 ,  des  pouvoirs  différens ;  nous  voyons  des  
 reffemblances,  &   nous  en  concluons  précipitamment  
 ,  que  les  différences dont nous faifons abjlrac-  
 tion,  ou  que  nous n’avons  pas  apperçues,  ne font  
 rien ; en conféquence, nous croypns pouvoir attendre  
 les mêmes effets de chacun des individus que nous  
 rangeons dans la même claffe, &  nousnous trompons. 
 2.0.  Une fécondé  erreur qui naît de  l’habitude  des  
 abftraclions, &  de l’abus des idées univerfelles, confiée  
 à regarder  chaque  genre , chaque  efpece, chaque  
 claffe  d’êtres ,  comme  faifant un  corps à part,  
 qui agit  en b loc, qui  forme dans la  nature une province  
 ifolée, qui ne tient qu’à elle-même, &  qui fuit  
 en  corps une  même  loi  générale ;  au  lieu que  dans  
 le v rai, nul  être n’agit en général ,  nul  genre, nulle  
 efpece  n’agit en  corps : chaque individu  agit  individuellement, 
   par  une  fuite de  ce  qu’il  eft,  comme  
 étant un  tel  être &  non un autre,  déterminé  en tout  
 fens, qui exifte en ce moment  en tel  lieu, avec  tels  
 carafteres, tels  rapports qui lui font propres,  &  qui  
 a  en  conféquence  des  influences  particulières  dont  
 l’effet  eft  détruit fi vous lui  fubftituez un autre individu. 
  Cet être tel qu’il exifte eft aufli différent  dans fa  
 place, de tout individu de  fon efpece ,  relativement  
 aux  effets qu’il produira, que s’il  étoit d’une  efpece  
 différente ; c’eft de  l’oubli de cette  vérité  qu’eft fans  
 doute  venue  l’erreur fi  commune  aujourd’hui  chez  
 les philofophes à la mode,  qui,  pour combattre  le  
 fyftême  eonfolant  d’une  providence  particulière,  
 enfeignent que  Dieu  n’agit  que  par  des  loix  générales; 
   fuppofant  qu’il  ne  connoît la nature  que  par  
 les  idées univerfelles,  qu’il ne  fait  attention  qu’aux  
 genres  &  aux  efpeces  &  jamais  aux  individus, ne  
 faifant pas réflexion que ces claflifications, ces idées  
 univerfelles  ne  font  dues  qu’aux  bornes  de  notre  
 efprit, &  qu’elles ne peuvent avoir lieu dans  l’intelligence. 
  infinie  à qui tout eft préfent;  qui découvrant  
 toutes les différences qui diftinguent un individu d’un  
 autre, ne peut jamais  les confondre ; ■ qui par conféquent  
 n’a jamais befoin (Y abfractions , &  d’idées univerfelles  
 pour étendre  fes  connoiflances, pour prévenir  
 la confufton dans fes id ées, &  pour foulager fa  
 mémoire.  Chaque  individu  eft  pour  lui  un  être  à  
 p a rt ,  un agent déterminé,  dont les rapports ," l’influence  
 ,  les  modifications,  font  fixées par ce qu’il  
 eft précifément. 
 30. Une troifieme  erreur due  à l’abus des abjlrac-  
 dons  métaphyfiques,  confifte  à  donner à nos  idées  
 univerfelles  abftraites une  exiftence  hors  de  nous  ,  
 une réalité diftinéte des individus qui nous ont fourni  
 les  idées fimples  dont  nous compofons  l’idée  générale. 
  Onfemble foupçonner hors des individus  je ne  
 fais quelle  effence qui va fe placer dans chaque être,  
 &  à laquelle enfuite vont fe joindre les modifications  
 qui font  qu’un  tel  individu  eft  tel  &   non un autre.  
 D e   là  tous ces  termes  inintelligibles  des  fcholafti-  
 ques,  nature  univerfelle ,  relations, formalités,  qualités  
 occultes, formes  fubjlantielles,  efpeces  intentionnelles. 
   De  là  tant de  queftions  vaines  &   abfurdes  
 fur le néant, fur les êtres poflibles,  fur les créatures  
 non exiftantes encore.  De là la fameufe controverfe  
 entre  les  nominaux &  les réaliftes.  Peut-être même  
 les modernes ne font-ils pas exempts de cette erreur;  
 au moins ne  paroît-il  pas qu’ils  emploient toujours  
 comme ils  le  devroient  les mots  d’être,   par exemple  
 ,  de  fubjlance ,  d’efpece  ,  de  genre,  d'effence,  
 & c . pour être  feulement les noms  de  certaines  collerions  
 . d’idées  fimples, mais  ils  femblent  vouloir  
 défigner  par-là  je  ne fais  quelles  réalités  exiftantes  
 hors  d’eux.  Voye{  L o c k e ,  Ejfai fur   Ventendement  
 humain. Condillac, Ejfai fur U origine des connoijfances  
 humaines, fecl.  5.  Clerici,  opéra  Philofophica.  Pars  
 prima  Logicoe.  V a t s ,  Philofophical  "Works,  Ejfay  
 ■ III.  W a ts ,  Logick.  Bonnet,  Ejfai  de  Pfychologie'.  
 (G .  M. ) 
 §  ABSTRAIT (T erme) ,   Logique. On entend par-  
 là , tout terme qui eft le ligne d’une idée  abftraite.  II  
 y   aura  donc  autant  de  diverfes  fortes  de  termes  
 abjlraits qu’il  y   aura de  différentes  idées  abflraites ;  
 puifque  chacune  d’elles  doit  avoir un  nom  qui  la  
 fixe  dans  notre  mémoire,  &   qui  lui  donne  dans 
 notre efprit line réalité qui lui manque hors de nous.  
 Nulle  part  la  nature  ne  nous  offre  l’objet  ifolé  &   
 fubfiftant d’une idée abftraite. Voye{ ABSTRACTION,  
 Abstraite,  Suppl,  fous  les  termes  de  la  langue  
 font  ou individuels ou abjlraits, les individuels défi-  
 gnent chacun un individu  diftinéi ;  ce  font ceux  que  
 l’on appelle noms propres,  tels  que Cicéron,  Virgile',  
 Bucephale, Londres, Rome , Seine, Tibre.  Les autres  
 font  des  termes  abjlraits ;  parce  qu’ils ne  dëfignent  
 pas  des individus ,  mais  des idées communes  à  plu—  
 fleurs.  Tous  les fubftantifs de cette  efpece qui  défi-  
 gnent  des  idées  univerfelles,  des  efpeces  ou  des  
 genres d’êtres,  fe nomment chez  les  grammairiens,  
 noms appellatifs ,  tels  que poiffon ,  cheval,  homme ,  
 ville,  riviere,  &c.  mais  en  philofophie  on  nomme  
 abjlraits} généralement tous les termes qui défignent  
 quelque  idée  abjlraite,  de  quelque  nature  qu’elle  
 foit, de fubftance, de mode, de relation, foit qu’ elle  
 fe rapporte  à  des  êtres  exiftans  fubftantiellement,  
 foit qu’elle  n’ait  d’exiftence  que  dans  notre  efprit,  
 comme font les mots corps, efprit, étendue,  couleur,  
 folidité, mouvement, vie, mort, penfée ,  volonté,Jen-  
 timent, honneur, vertu, tempérance, religion,  &c. Les  
 pronoms,  les  a d je& i fs le s   nombres;  les  verbes,  
 les adverbes,  les  conjoriûions,  les prépofitions, les  
 particules font des  termes abjlraits,  puifqu’ils ne défignent  
 point par  eux-mêmes d’individus,  mais  des  
 idées  communes  à  plufieurs,  formées’dans  notre  
 efprit par abjlraciion. 
 Entre  cès  termes,  les  fcholaftiques en ont diftin-  
 gué  deux fortes, qu’ils  ont oppofees l’une à l’autre ,  
 dont l’une, forme  une  claffe  de  termes  qu'ils  nomment  
 abjlraits  ,  &   l’autre  celle  des  termes  qu’ils  
 nomment concrets. 
 Les abjlraits,  félon  e u x , font les termes qui figni-  
 fient-les modes  ou les qualités d’un  être, fans aucun  
 rapport à  l’objet en  qui  fe  trouve ce mode  ou cette  
 qualité  ,  ce  font  lès  noms  fubftantifs  en  grammaire  
 ; tels font les mots blancheur, rondeur, longueur,  
 fagejfe , mort, immortalité, vie, religion , f o i ,  &c. 
 Les concrets font ceux qui repréfentent ces modes,"  
 ces qualités  avec  un  rapport  à  quelque  fujet  indéterminé, 
   ou  autrement  ceux  qui  repréfentent  le  
 mode  comme  appartenant  à  quelque  être  ;  &   ces  
 termes  font  ceux  que  les  grammariens  nomment  
 adjectifs,  quoiqu’affez fouvent  ils  foient  employés  
 comme  fubftantifs  ;  tels  fon t,  blanc,   rond,  long,  
 fage ,  mortel  ,  mort,  immortel,  vivant,  religieux ,  
 fidele, &rc. quoique les termes fage, fou , philofophe,  
 lâche,  &c.  s’emploient fouvent  comme  fubftantifs,  
 ils  font  cependant termes concrets,  parce qu’ils  ont  
 leurs termes abjlraits  correfpondans,  fagejfe, fo lie,  
 philofophie, lâcheté, &c. 
 Après  ces  explications  ,  que  nous  ne  faurions  
 étendre  fans  répéter  ce  que  nous  avons  dit  fous  
 abjlraction, &  ce que  nous dirons fous  idées- abffaites  
 ,  il  ne  nous  refte  qu’une  ou  deux remarques à  
 faire fur les termes abjlraits. 
 i° . Un terme abjlrait  peut quelquefois  être  employé  
 comme nom propre  &  individuel,  en  y  ajoutant  
 quelque mot qui en reftreigne  le  fens  à  un  feul  
 individu, ou en indiquant quelque  circonftance  qui  
 produife le même  effet dans  l’efprit  de  ceux  qui  la  
 connoiffent.  Ainfi pere, mere, femme , foeur,  maifon  
 font des termes généraux,  des  termes  abjlraits :  ils  
 deviendront  individuels,  fi  je  dis,  par  exemple,  
 mon pere,  ma. mere, ma femme,  fa  feeur,  la  maifon  
 de S.  Paul.  De même  f i ,  étant  à Paris,  je dis ,  le  
 roi,  la  riviere,;  le  lieutenant  de police ,  chacun  fait  
 que  je  parlé  de  Louis  X V I ,   de  la  Seine,  de  M.  
 Albert,  quoique  ces  termes  roi,  riviere,  lieutenant  
 de police  loient  des  termes  généraux  q u i,  en  tout  
 autre cas, defignent chaque roi,  chaque riviere,   chaque  
 lieutenant de police.