
 
        
         
		moindre  vertige  d’habitation.  On y   a marché  pendant  
 neuf ou  dix  jours  fur  une  même  direction,  
 avant  que  d’arriver chez une petite horde , ou plutôt  
 chez une famille féparée  du  refte  des  humains,  
 non-feuiement  par  des  montagnes  &   des  deferts,  
 mais encore par fori langage différent de tous les langages  
 connus.  Rien  ne  prouve  mieux  le  peu  de  
 communication qu’avoient eu entr’eux tous les Américains  
 en  général, que ce nombre incroyable d’idiomes  
 qu’y   parloient les  fauvages  de  différentes  tribus. 
   Dans  le Pérou même , où  la  vie  fociale  avoit  
 fait quelques foibles progrès, on a néanmoins encore  
 trouyé  un  grand  nombre  de langues ,  relativement  
 incompréhenfibles  ou  inintelligibles  , 8c 1 empereur  
 ne pouvoit y  commander à  la plupart  de  les  fujets  
 qu’en fe fervant d’interpretes. On  obfervera  à  cette  
 occalion  que les anciens Germains,  quoique  diftri-  
 bués  tout  de même en peuplades,  qui  faifoient autour  
 d’elles  de  vaftes  déferts,  ne  parloient  cependant  
 qu’une même  langue -  mere ;  &   on  p ou vo it,  
 avant le  liecle d’Augufte  comme aujourdhui,  affez  
 bien fe faire comprendre par le moyen du tudefque,  
 depuis le centre de  la Belgique  jufqu’à l’Oder :  tandis  
 qu’au nouveau monde ,  il  fuffifoit,  dit Acofta ,  
 de  traverfer une vallée  pour  entendre  un nouveau  
 jargon. ( De procur. lndorum falut.) 
 La dépopulation étoit peut-être encore plus grande  
 dans les parties  les plus méridionales  de  Y Amérique  
 que dans le nord, où. les forêts avoient tout  envahi ;  
 de  forte  que  beaucoup  de  gros  gibier  pouvoit s’y   
 répandre  8c  s’y   nourrir,  8c  nourrir  à  fon  tour  les  
 chaffeurs ;  pendant  qu’aux  terres  Magellaniques  il  
 exifte  des  plaines  de  plus  de  deux  cens  lieues  où  
 l’on  ne  voit  point  de  futaie  ;  mais  feulement  des  
 buiffons,  des  ronces  8c  de  groffes touffes, de mau-  
 vaifes herbes ( Befchrei. von P atagonien. ) ,   foit  que  
 la  nature  des  eaux  faumâtres  ou  acides  qu’o n y   
 découvre, s’oppofe à la propagation des forêts , foit  
 que  la terre  y   récele  des  dépôts  de  gravier  8c  de  
 fubftances  pierreufes,  d’où  les  racines  des  grands  
 arbres  ne  peuvent  tirer  aucun  aliment.  Au  refte,  
 pour fe  former  une  idée de  la  defolation  de  1 intérieur  
 de  ces régions  Magellaniques, il fuffira de  dire  
 que les Anglois faits efclaves par les Patagon$, y  ont  
 fouvent  voyagé  à la fuite  de ces  maîtres barbares  ,  
 pendant deux femaines,  avant que de rencontrer un  
 affemblage de rieuf ou dix cafés recouvertes de peaux  
 de cheval. Dans le village qu’on a nommé la capitale  
 de  la Patagonie , 8c où refidoit le  grand cacique, on  
 ne comptoit en 1741  que quatre-vingts perfonnes des  
 deux fexes  ( Voyage fait  dans le  vaijfeau  le  Wager  
 Il y  a d’ailleurs dans la latitude méridionale des terres  
 baffes,  dont  une  partie  eft  marécageufe  ,  8c  dont  
 l’autre eft régulièrement inondée tous les ans ; parce  
 que les rivières 8c les  torrens, qui  n’y   ont  pas  des  
 iffues  proportionnées au  volume  d’eau,  fe  débordent  
 à des  diftances  immenfes,  dès  que  les  pluies  
 commençent  dansla  zone  tor*ide.  Depuis  Sierra  
 Itatin  jufqu’ à  l’extrémité de  la  million  des  Moxes,  
 vers le quinzième dégré de  latitude  fu d , on trouve  
 dans une étendue de plus  de trois cens lieues, ou  de  
 ces  marais,  ou  de  ces  terres d’où  les  inondations  
 chaffent  de  tems  en  tems  les habitans  fur les montagnes  
 : aufli n’y  a-t-on  vu  que très-peu  d’habitans,  
 qui parloient trente-neuf langues, dont aucune n’a-  
 voit  le moindre  rapport avec  aucune autre. ( Relation  
 de  la miffion des Moxes.y 
 On ne  croit pas  que  la population de tout le nouveau  
 monde,  au moment  de  la découverte,  a  pu  
 être  de  quarante millions ; ce  qui ne  fait pas la  fei-  
 zieme partie de  la totalité de l’efpece humaine, dans  
 la fuppofition  de  ceux  qui  donnent  à  notre  globe  
 huit  cens millions  d’individus. Cependant on  s’imagine  
 que  la  grandeur  du  nouveau  continent égale 
 à-peu-près celle de l’ancien : mais il eft important dé  
 faire obferver  que les calculs  de  Tempelmann,.de  
 Struy e k , 8c de plufieurs autres fur la furface de Y Amérique  
 réduite  en  lieues  quarrées  ,  ne méritent point  
 beaucoup de confiance, parce  que  les cartes géographiques  
 font encore trop fautives, pour fuffire à une  
 telle  opération ; 8c  on ne croiroit pas que toutes les  
 cartes  connues  renferment  à  peu-près  une  erreur  
 de  cent  lieues,  dansla feule longitude de quelques  
 pofitions  du Mexique, fi cette longitude n’avoit été  
 déterminée depuis peu par une.éclipfe de lune. C ’eft  
 bien  pis,  par rapport  à  ce  qu’il  y   a  de  terres  au-  
 delà  des  Sioux  8c  des Affénipoils :  on  ne  fait  pas  
 où  ces  terres  commencent  vers l’oueft,  8c  on  ne  
 fait  point  où  elles finiffent  vers le  nord. 
 M.  de  Buffon  avoit  déjà  obfervé  que  quelques  
 écrivains Efpagnols doivent  s’être permis beaucoup  
 d’exagérations en ce qu’ils  rapportent de  ce  nombre  
 d’hommes, qu’on trouva,felon eu x, au Pérou. Mais  
 rien  ne  prouve mieux  que  ces  écrivains  ont  exagéré  
 ,  que  ce  que  nous  avons  dit  du  peu  de terres  
 mifes  en valeur  dans  ce  pays,  où Zarate convient  
 lui-même qu’il  n’exiftoit  qu’un  feul endroit qui eût  
 forme de  ville ,  8c  cette  ville  étoit,  dit-il, Cufco.  
 ( Hiß. de la  conquête  du Pérou,  liv ../.  c. g. )  D ’ailleurs  
 dès l’an  1510  la  cour  d’Efpagne  vit que pour  
 remédier à la dépopulation des provinces conquifes  
 alors  en Amérique,  il n’y   avoit  d’autre moyen que  
 d’y  faire  paffer  des negres  dont  la  traite  régulière  
 commença en  1 5 1 6 ,8c coûta des fommes énormes:  
 on foupçonne  même  que  chaque  Africain,  rendu  
 à fille  de  faint Domingue,  revint  à  plus  de  deux  
 Cens ducats  ou  à plus de  deux cens fequins,  fuivant  
 la taxe  que  les  marchands  de  Genes , y   mettaient.  
 Les Efpagnols  ont  fans  doute  détruit,  contre leur  
 propre  intérêt, un grand  nombre  d’Américains,  8c  
 par  le  travail des  mines,  8c  par  des  déprédations  
 atroces ; mais  il n’en eft pas moins  certain  que  des  
 contrées  où  jamais  les  Efpagnols  n’ont  pénétré,  
 comme  les  environs  du  lac  Hudfon ,  font  encore  
 plus  défertes que d’autres contrées tombées d’abord  
 •fous  le  joug des Caftillans. 
 On conçoit maintenant quelle étoit, au quinzième  
 liecle,  l’étonnante  différence  entre  les  deux  hémif-  
 pheres de  notre  globe. Dans  l’un 1?  vie  civile com-  
 mençoit  à  peine  :  les  lettres  y   étoient inconnues  :  
 on  y  ignoroit le nom des  fciences  :  on  y  manquoit  
 de  la  plupart  des métiers  : le  travail  de  la  terre  y   
 étoit à  peine  parvenu au point de  mériter  le  nom  
 d’agriculture; puifqu’on n’y  avoit inventé ni la herfe,  
 ni  la charrue,  ni  dompté aucun animal pour la  traîner  
 :  la  raifon,  q u i ,  feule,  peut  dirier  des  loix  
 équitables, n’y  avoit  jamais  fait  entendre  fa  voix :  
 le fang humain couloit par-tout fur les autels,  8c les  
 Mexicains  même  y   étoient  encore,  en  un  certain  
 fens,  anthropophages,  épithete  qu’on doit étendre  
 jufqu’aux Péruviens; puifque de l’aveu de Garcilaffo,  
 qui n’a  eu garde  de  les  calomnier ,  ils  répandoient  
 le  fang des  enfans fur  le  cancu  ou le  pain,  facré ,  fi  
 l’on peut donner ce nom à  une pâte  ainfi pétrie que  
 des  fanatiques mangeoient dans des  efpeces de  temples, 
  pour honorer la divinité qu’ils ne connoiffoient  
 point. Dans notre  continent, au  contraire,  les  fo-  
 ciétés étoient formées depuis fi long-temps que leur  
 origine va  fe  perdre  dans la  nuit  des  fiecles ;  8c la  
 découverte du fer forgé, fi néceffaire 8c fi inconnue  
 aux  Américains, s’eft faite  par les habitans de notre  
 hémifphere de temps immémorial. C a r , quoique les  
 procédés,  qu’on  emploie  pour  obtenir  la  malléabilité  
 d’un  métal  fi rétif dans  fon état de  minérai,  
 foient très-compliqués  ,  M.  de Mairan a  cependant  
 prouvé  qu’il  faut  regarder  comme  fabuleufes  les  
 époques auxquelles  on veut  rapporter cette découverte. 
   {Lettres fur la Chine.') 
 Noits ne  pouvons pas  nous  engager ici dans  une  
 analyfe'bien  exactement  fuivie  des  fyftêmes  pro-  
 pofés  pour expliquer  lés  caufes  de  cette  différence  
 qu’on  vient  d’obferver  entre  les  deux parties  d’un  
 même  globe.  C’éft  un  i'eeret  de la  nature  ,  où l’ef-  
 prit  humain  fe  confond  à  mefure qu’il  s’opiniâtre  à  
 vouloir le deviner. Cependant  les  vieiflitudes  physiques  
 ,  les  tremblemens de  terre ,  lés volcans, les  
 inondations, 8c de certaines cataftrophes, dont nous,  
 qui  vivons  dans  le  calme  des'  éléniens  j  n’avons  
 .point une  idée  fort  jufte ,  ont pu  y   influer ;  8c  on  
 fçait  aujourd’hui  que  les  plus  violentes  fecouffes  
 de  tremblement  de  terre ,  qui  fe  font  fentir  quelquefois’ 
   dans  toute l’étendue du nouveau continent;  
 ne  communiquent  aucun mouvement  à notre  continent. 
   Si ce n’étoit par les'avis particuliers qu’on en  
 a  reçus  de  différens  endroits,  On  eût  ignoré  en  
 Europe  que  le  4  d’Avril  1768,  toute  la  terre  de  
 l ’Amérique  fut ébranlée  ; de forte qü?il  a  pu y   arriver  
 anciennement des défaftres épouvantables, dont  
 les  habitans  de  notre hémifphere , loin de fe reffen-  
 t i r , n’ont pu même  fe  douter.  Ait  refte  ,  il  ne  faut  
 pa s,  à  l’exemple  de  quelques  fçavans ,  vouloir appliquer  
 au nouveau monde les  ptodiges qu’on trouve  
 dans le Timée  ScleCritias au fujet de l’Atlantique  
 noyé par  une  pluie  qui  në  dura  que  vingt-quatre  
 heures.  Le  fonds  de  cette  tradition  vehoit  dè  l’Egypte  
 ;  mais  Platon  l’a  embellie  ou  défigurée  par  
 line  quantité  d’allégories, 'dont quelques-unes  font  
 philosophiques, 8c  dont d’autres font puériles, comme  
 la  viétoire  remportée  fur les  Aflàritides par lés  
 Athéniens-,  dans  un temps où Athènes n’éxïftoit pas  
 encore : ces  anaeronïfines  fe  font  fi  foüYent  remarquer  
 dans  les.  écrits  dë  PJaron ,  que  ce  n’éft  pas  
 à   tort  fans doute  que les  Grées mèmès l’ont accufé  
 d’igaôrer:  la  chronologie  de  fôn  pays  (  Athen.  
 lib.  V. cap.  rz  &   /J.).  La difficulté  eft  de  fa voir  fi  
 les Egyptiens , qui  ne  naViguOient  pas,  8c  qui  ont  
 dû ,  par conféquent,  être  très-peu  verfés  dans  la  
 géographie pofitive ,  ont5 eu  quelque  notion exa&e  
 fur  Une  grande  Me- ôW un  continent  fîtué  hors  des  
 colonnes  d’Hercule.  Or il faut avouer que cela  rféft  
 pas  probable  mais  leurs  -prêtres  ,  en  étudiant  la  
 cofmographie  ,  ont  pu  foupçonner  qu’il  y   avoit  
 phïs- de-  portions  de'  terre  répandues  dans  l’océàn  
 qu’ils  n’en connoiffoient:  fnoins'ils  en  con.noiffoi'enf  
 par  le  défaut  abfblu  de  là  navigation,  plus  il  eft  
 naturel  que :ce  foupçoh  leur  foit venu ;  8c fur-tout  
 fi  l’on  pouvoit' démontrer qu’avant  l'époque'de  la  
 mefüre de  là  terre ,  faite  en Egypte  par  Eratôftene  
 fous Evergete,  les  prêtres y  aVoient déjà'une idée  
 de la véritable grandeur du globe. Quoiqu’il en foit,  
 leurs  doutes  ou  leurs  foupçOns  fur  l’exifténee  de  
 quelque  grande  terre  ,  ne  côrtcernbiént  pas  plus  
 Y Amérique en particulier, que toutes  les autres contrées  
 qui  leur étoient  inconnues ; 8c  les  limités  de  
 1 ancien monde, telles que nous les avons fixées,ref-  
 tent invariablement les mêmes. 
 . Que le cataclyfme  oii l’inondàtion de l’Atlantique  
 ait  rendue  la mer fi  bourbéufe  au-delà  dit  détroit  
 de Gibraltar  qu’il n’a plus  étépofîîble d’y  naviguer,  
 comme  Platon  le  veut  ,  c’eft  Un  fait  démenti  par  
 1 expérience,  depuis  le  voyage  d’Hannoh  jufqu’à  
 nos  jours.  Cependant feu M.  Gefiner,  dont l’érudition  
 eft  bién  connue,  croyoit  que  Yifle  de' Cér'es  ,  
 dont on  parle  dans  un très-ancien  poëme,  attribue  
 1?' ? f -  ^  fous le  titre  d’Ap^ovawT/xa, étoit un refte de  
 l  Atlantique  :  mais  cette  if le ,  qu’on  défigné  par  
 les  forets  de  pins,  8c  fur-tout par  les  nuages1 noirs'  
 qui  1 enveloppoient , ne  s’eft  retrouvée nulle  part ; 
 e.  ° rte  ?.lî  .  fsudroit qu’elle  eût  été  abymée  depuis  
 expédition desArgonautes, enfuppofarit même,  
 contre  la  vraifemblance  ou  plutôt  contre  la  pofli-  
 pih té,  que  ces  Argonautes  aient  pu  venir  de  la  
 1  orne  I ,   * 
 tnêf Noire dans  l’Océan ,  en portant  le navire Argo  
 du  B o r i H h e n e   dans  la  Viftule  ,  pour  pouvoir  r e n -   
 5 «   érifL,Ùe  dans  la  Méditerranée  par  les  colonnes 
 “ 5.rci^e ’  c°mme il eft dit vers la  fin  de  ce  poëme  
 attri  ue  à  Orphée ;  d’où  on peut juger  que le mer-  
 veilleux n y   eft  pas  épargné , 8c que M. Gefnér au-  
 roit  du  être  plus  incrédule. 
 Si  l’on trouve quelque part à notre.occident  des  
 traces-d un contmént changé en une multitude d’iles  
 c’eft  fans  doute dans  la  nier Pacifique  , Ôc  nous  ne  
 répéterons  pas  ici  ce  que  le préfident  de  Broffe  en  
 rapporte  dans fon  ouvrage  où  il  traite  des  navigations  
 vers les terres auftralés. 
 Q«an5  à  ceux  qui  prétendent  que  les  hommes  
 ne  s étoient  introduits  que  depuis  peu  en  Améri-  
 que ,  en  franehiffant  la  mer  du  Kamfchatka  ou  le  
 détroit  de  Tchutzkoi,  foit  fur  des  glaçons,  foit  
 dans des  canots ,  ils  rie  font pas  attention que cette  
 opiriion,  d’ailleurs  fort  difficile  à  comprendre ,  ne  
 diminue  en rien  le  prodige :  car  il feroit bien  fur-  
 prehaiit  qu’urie  moitié  de  notre  planete  fût  reftée  
 fahs habitans  pendant  dès  milliers  d’années,  tandis  
 que  l’autre  moitié  étoit  habitée  :  cè  qui  rend  encore  
 cette  opinion  moins  probable,  c’eft  qu’on  y   
 fuppofe  qùe  Y Amérique  avoit  des  animaux,  puifT  
 qu’on  ne  faurôit  faire  venir  de  l’ancien  monde  
 les  efpeces  animales,  dont les  analogues n’exiftent  
 pas  dans  l’ancien  monde,  comme  celle  du  tapir,  
 celle  du  glama  ,  celle du tajacu.  Il  n’eft pas poffible  
 non  plus  d’admettre  unè  organîfatîon  récente  delà  
 matièré  pour l’hémifphere  oppofé  au  nôtre : car indépendamment  
 des difficultés accumulées dans cette  
 hypothefe  ,  &   eju’on n’y  fauroit  réfpûdre , nous  ferons  
 remarquer  ic i,  qùe  les  os  foffiles  qu’on  dé-  
 côuvre  dans  tant d’endroits  de  Y Amérique  &   à de  
 fi  petites profondeurs,  prouvent  que  de  certains  
 genres  d’animaux,  Ioih  'd y   avoir  été  organifés depuis  
 peu,  ont  été  anéantis depuis  long-temps. C’eft  
 un  fait  indubitable  qu’au  moment  dé  l’arrivée  de  
 Chxiftophe  Colomb , il n’exiftoit ni  dans l e s   îles  ni  
 dans  aùcune  province  du  nouveau continent,  des  
 quadrupèdes  de  la  première  g r a n d e ù r   : il  n’y   exif-  
 toit  ni  d r o m a d a i r e   , ni  chameau  ,  ni  giraffe, ni éléphant  
 ,  ni r h i n o c é r o s   ,  ni  che v a l,  ni  hippopotame,  
 Ainfi  les  grand  os  qu’o n y   détèrre, ont  appartenu  
 à des  efpeces  éteintes  ou  défruites  plufieurs  fiecles  
 àvàrit  l ’ é p o q u e   de  la  découverte ;  p ù i f q u e   l a   tradition  
 ni'êrne  n’én  fubfiftoit  p l t i s   parmi  les  indigènes  
 qyi n’a vqient jamais ouï parler de quadrupèdes d’une  
 taillé  plus  élevée  que  ceux  qu’on  trouva chez  eux  
 en  1491. Cependant la  dent môlaire ,  qui avoit été  
 confiée à  M.  l’abbé  Chappé ,  mort  depuis  dans  la  
 Californie',  pefôit huit' livres ;  comme on le fait par  
 l’extrait  de  la lettre  adreffée  à  l’académie  de  Paris  
 par  M.  Alzate  qui  affure  qu’on  conferve  encore  
 aftii elle nient a u   Mexique  un  os de  jambe ,  dont la  
 rotule  a  un pied  d e   d i à m e t r e .   Quelques hippopotames  
 de  la  g r a n d e   e f p è c ë   ,  tels  q ù ’ o r i  en rencontre  
 dans l’Abyflinie &  fur  les rivés du Zaire,.produifent  
 dès  dents  machelieres , dont  le  poids'eft de plus de  
 huit livres: mais  on  p e u t   douter qu’il exifte des élé-  
 phans  d o n t   les  jambes contiennent des  articles aufli  
 prodigieux que  celui que  cite  M.  Alzate,  dont  le  
 récit  ne  pàroît  pas  a b f o l u m e n t   e x e m p t   d’exagération. 
  Et  il  en  faut  dire autant des d i m e n f i o n s   q u e   le  
 pere Torrubia donne,dans fa prétendue Gigantolocrie  
 de  quelque  fragmens  de  f q u e l e t t e s   exhumés  °en  
 Amérique,  &   qui  font  aujourd’hui  affez  répandus  
 dans différens cabinets de PEurope. M. Hunner, qui  
 en  a  fait une' étude particulière en Angleterre, croit  
 qu’ils ont appartenu  à  dés  animaux  caruaciers ;  &   
 ce  n’èft  point  f a n s   un ‘ grand  appareil d’Anatomie  
 comparée qu’il a rendu compte, de  ce fentiment à la  
 fociété  royale  de  Loridrés  (   Trâhf.  Philof.  à  Van  
 X x i j