la plaie à fec & à p la t, jufqu’à la fin du mois de
mars, qu’il céda d’être en exercice à l’hôpital.
Le premier avril, ou le vingt-cinquieme joiiKaprès
l’opération faite au grenadier , M. Mar e t , l’aîné, fe
chargea de fon traitement, en eut beaucoup de foin
& Continua le panfemenf fimple dont fon confrère
avoit commencé de faire ufage.-
Le trente-fixieme jour , un lavemenf fit aller le
malade trois fois à la felle ; mais perfonne ne prit
garde à la couleur & à la confiftanee des matières
qu’il avoit rendues par Y anus. La plaie, au trente-
feptieme jou r, étoit rétrécie confidérablement, &
toujours chargée fur les bords de matières chyla-
cées. Le panlement fut fait à l’ordinaire.
Les déux jours fui vans il ne fortit plus de matières
par la plaie. Le ventre étoit un peu élevé & douloureux,
On ne vit fur l’ouverture qui lui fervoit Garnis
, qu’une petite quantité de pus louable & blanc.
Les chirurgiens conseillèrent au malade de prendre
quelques verres ..d’eau de caffe dans la journée.
Le quarantième, il rendit par Y anus, &i enplu-
ileurs fois , une quantité coniidérable dé matière
moulée, d’une couleur grife, & qui n’avoit aucune
teinte de noir ni de jaune. La plaie ne fut humeûëe
que de pus , fans mélanged’exerémens-malgré l’eau
de caffe quë le malade àvoit prife la veille. Cependant
>il ne*r-effentoit plus de douleurs dans le ventre,
& cette partie fi’offroit pas la même rénitence que
le jour précédent.
Le quarante-unieme, le grenadier étoit allé à la
felle deux fois pendant la nuit. On n’apperçut vers
fa plaie aucun veftige de matières excr.émenteufes.
Pendant que M. Hoin étoit à l’hôpital, il fit une
felle. Ses excrémens étoit moulés & de couleur
verte. Le malade ajouta que la veille il avôit mangé
des épinards ; ce qui. me fut affirmé par fes voi-
fins.
Le chirurgien v i t , fans en pouvoir douter, qu’il
«’étoit rétabli une communication dans le canal in-
teftinal, entre la portion fupérieure à-la plaie, &
l’inférieure. Il eft vraifemblable qu’elle s’eft faite
immédiatement-après que les bords du méfentere ,
dont l’efcarre gangreneûfe s’eft: détachée, ont été
réunis & cicatrifés.- Il y a lieu de croire auffi qu’alors
les deux bouts de l’inteftin s’étoient trouvés l’un
près de l’autre du côté du méfentere , qu’ils s’é-
îoient foudés poftérieurement, & que^leur partie'
antérieure étoit reliée béante , jufqu’à ce que dans
le voilinagede l’anneau où elle avoit contracté des
adhérences., le tiffu cellulaire lui eût fourni une
«éfpece de couvercle ; celui - ci ne rélifta pas longtemps
à l’impulfion des matières, puifque dès le qua-
’ rante-deuxieme jour, il parut fur les bords de la plaie
-un peu de matière verdâtre & écumeufe, quoique le
malade fut allé deux fois à la felle.
Le quarante-troifieme, il reparut fur la plaie des
matières excrémenteufes , qui furent plus ou moins
abondantes -jufqü’au foixante - quatorzième jour ,
félon que le grenadie'r fatisfaifoit ou non fon grand
appétit , ou qu?on lui faifoit prendre des potions
purgatives. Pendant ce tems-là , les évacuations fe
firent toujours exaClementparY anus , & ont continué
de fefaire. -
Depuis le foixante-qùinzieme jour , jufqu’ à fept
mois ou environ après Fopération , que Guillaume
Courier partit de Dijon, il ne fortit plus chaque
jour par la plaie, qu’une petite quantité de -matière !
bilieufe,, jaunâtre , fans liaifon , fans confiftanee ,
& fouettée d’a ir , à la réferve des jours pendant lôf-
quels il fit des excès dans «le boire ou le manger.
Il évaluoit cette évacuation à. un‘demi - verre par
jour le plus-ordinairement ; jamais elle n’alloit plus;
lo in , & quelquefois elle étoit beaucoup moindre.
La plaie fut réduite à une petite fiftule., à une efpéce
■ Ayantes artificiel, dont l’ouverture étoit à peifie v'i-
fible. Pendant long-tems les bords en ont été tirés-
rouges; dans la fuite ils ont perdu cette couleur.;.
& fe font comme: froncés. Au refte, le grenadier
-fe pqrtoit à merveille quand il eft parti ; il avoit
repris- de l’embonpoint, il fe promenoit fans augmenter
l’excrétion par fa fiftule. llmangeoit &c buvoit
beaucoup.
- Je;. fuis perfuadé,- dit1 M. Hoin , que s’il ne fe
fût pas livré à des excès de bouche, comme il l’a
fait plufieurs fois pendant fon traitement ; la. plaie
fe feroit cicatrifée , peut-être avant la fin du'feeond
mois depuis, fon opération. Je préfume auffi qu’elle
pourra encore fe fermer entièrement ; ce qui ? fui-
vant toute apparence , ne fera pas autant avantageux
à> cet homme, que s’il confervê un anus artificiel.
En effet, quelque étroit qu’iLfoit,, on petit
efpérer qu’au cas que les matières s’engorgent
au-deffus de lui par défaut de régime,; il ne-réfiftera
pas long-tems à leur: impulfion , en fera dilaté.&
leur livrera paffage ; au lieu que fi la plaie fe guérit,’
le rétreciffement de l’inteftin à l’endroit de la cicatrice
lafermeté.de celle-ci faciliteront la rupture
du boyau-;; gorgé f | la fuite d’un>excès dans les ali-
mens ; alors l’inteftin étant crevé au-deffus de fes. adhérences
,, les matières chylaeées tomberont dans le
bas-ventre, & le malade périra.
Il n’y auroit qit’une grande circonfpe&ion dans le
choix& la quantité,du boire & du manger, auffi-bien
qu?un attention confiante à fe tenir le ventre libre,qûi
pourroientle préferver de ce malheur; mais: comme
il lui, étoit difficile d’être fobre-, il étoit donc plus
convenable à fa maniéré de vivre 1 qu’il eût un anus
artificiel, que>,d’être entièrement guéri de fa plaie.
M. Hoin obferye encore que cette ouverture n’ex-*
pofe pas. le grenadier aux deux grands inconvénjens
qui dépendent d’un anus artificiel en général, Celui
dè'Tâcftîrer la chûte d’une portion de Finteftin qui
eft au-deffus de la plaie, & ,celui de jetter le malade'
.dans un dépériffement ' confidérable , qui v ie
conduit- par dégrës, de l’état languiffant habituel à'
une mort certaine.
La chûte d’une portion de l’inteftin', fituée à là
partie fupérièure de la plaie ,'' doit êtream accident
affez rare de Y anus artificiel ; cependant M. Pu y ,
ancien chirurgien-major de l’Hôtel-Bieu de Lyon ,
& qui étoit à Dijon au mois de juillet 1763 , . ayant
examiné le; grenadier dont on vient de -raconter la
maladie,- dit à M. Hoin qu’il avoit y u ,, dans deux
fujets, l’inteftin renverfé , fortir par un anus artificiel,
à -peu - près comme on obferve que le gros
boyau fe renverfe , fort par Y anus, naturel; forme
la chûte du rèCtum. Il ajouta que ces portions déplacées
n’avôient pu êtreréduites ; qu’elles tfétoient
gangrenées , & que les malades, en- étoiènt morts.
M . Méry ne nous apprend pas fi la fille qu’il a vu
attaquée d’un renverfement de l’ileum , a eu . un
. fort auffi funefte. Cette fille, avoit-perdu .quatre à
cinq pieds d’inteftin grêle , par la gangrené furye-
nue à-ti-iié. hernie étranglée ; il lui en étoit refté im
anus artificiel, dont les bords paroiffoient bien rentrés
en dedans ; cette incommodité ne l’empêcha pas
de fe mettre en fervice. « L à , dit*M. Méry ; étant
obligée de fe courber pour frotter un plancher, il
lui eft arrivé , le ventre étant refferré par cette-pof-
ture gênante , que l’inteftin ileum , uni aux anneaux
■ des mufcles, a été peurà-peu -pouffé dans la tumeur
■ reliante ; qu’il a dilaté fon ouverture d’un pouce &
demi, & qu’il eft enfin forti au-dehors de la longueur
«l’un demi - pied, . en Le renverfant, comme
. fait le' reCtum , quand il tombe - par Y anus. :La flu- '
xion, l’inflammation & la gangrené fuperficielle, qui.
font furvenus à vcet inteftin pendant les-grandes
pb4çvirs du j&çis d’août., ont obligé cette pauvre
fille à rentrer à. l’hôtel - dieu pour y recevoir le
feço.urs dont elle avoit befoin ». L’auteur termine
là fon obfervation, qu’un détail fur l’efpece des
fecours adminiftrés à cette malade auroit pu. rendre
plus inftruélive*
M. Hoin lui-même a vu un exemple de ce renverfement
extraordinaire de l’inteftin par Uanus
artificiel^ à un foldat de marine qui féjourna deux
ou trois ijpis vingt-quatre heures à l’hôpital de Dijon,
au commencement du mois d’août 1.766. Il racon-
toit qu’un très-.habile chirurgien lui avoit, fait à
Toulon , i l y a deux ans , l’opération d’une hernie
gangrenée , à la fuite de l’étranglement; qu’un anus
Artificiel lui en étoit refté ;. & que depuis plufieurs
mois, il s’étoit échappé de cet anus,, fans qu’on eût
•pu la faire rentrer , la portion inteftinale qu’il mon-
troit; elle décrivoit une courbe , d’environ cinq-ou
fix pouces.de longueur : fa couleur étoit rouge-vif,
.& fon diamètre d’environ un pouce. M. Hoin toucha
& foule va cette piece, fans que le malade en fo,uf-
frît: ilapperçut à fa partie inférieure, une ouverture
froncée, de laquelle il vit fortir des matières
fécales pendant un effort que le foldat fit pour les
expulfer. Le foldat alla le faire guérir à. l’hôtel
roÿal des invalides de Paris. .
On ignore fi M. le Cat a. réuffi.dans la cure qu’il
avoit deffein d’entreprendre au fujet d’un double renverfement
d’inteftin.,-furvenu quelque teins après la
formation d’un anus inguinal. Le commencement de
cette . obfervation intéreffante eft - au« n°. 460 des
TranfaHions Philofophiques , pour les années 1740
& 1741.
« A Pâques de 173 g, il furvint un étranglement à
la hernie que Catherine Guilmâtre, de Saint-Adrien
près Rouen, âgée de cinquante ans," portoit à l’aine
droite, depuis fèpt années, fans accident quelconque.
La, malade ne fut pas fecourue pendant l’étranglement
de fa hernie ; la tumeur vint à fuppuration,
s’ouvrit, & des excrémens en fortirent avec le pus,;
ils continuèrent de s’échapper par cette ouverture :
l ’anus ne fit plus de fondions ; la portion gangrenée
â e l’inteftin, qui avoit été pincée dans la hernie,
fe fépara, & les bords de l’ulcere cpntrafterent des
adhérences avec la furface externe des tégumens ;
tout en confervant fon efpece d’anus artificiel, Catherine
Guilmâtre fe rétablit affez bien pour vaquer
à fes affairés,,; mais, vers le tems de la Pentecôte, il
fortit de la fiftule. environ trois ou quatre pouces
d’inteftin retourné , de maniéré que la punique veloutée
fe.préfentoit à la vue ; & ce renverfement
s’étoit fait de la portion du canal inteftin al qui répon-
doit à l'anus naturel devenu inutile : auffi les excrémens
ne fortoient-ils point par cette portion retournée,
mais par une ouverture fituée au*deffous 6t de
côté. Dans le cours du mois d’août de, la même
année , l’autre portion du canal qui répondôit à l’ef-
to-mac, fe renverfa comme l’autre ; de forte que la
fiftule fe trouva cachée par deux portions d’inteftin,
qui formoient fur le ventre une efpecé de fourche '
à canal continu, & dont la branche qui s’étoit échappée
la derniere, donnoit iffue aux excrémens.
Cette malade fut conduite à l’hôtel-dieu de Rouen,
au mois de décembre? M. le Cat la fit tranfporter
chez lui pour l’examiner avec toute l’attention qu’un
cas auffi particulier exigeait.- Je ne fuivrai point cet
auteur dans le$ obfervations qu’il fit fur les.mouve-
mens naturels de ces portions d’inteftin retournées
de dedans en dehors, ni dans fes expériences fur
l’aétion des purgatifs dont il couvrit ces parties : je
ne m arrete^qu’à la même..
C ’etoit l’ileum qui avoit fowffert l’étranglement,
la gangrené & le renverfement extraordinaire dont
j’ai parlé. .Cette chute des deux portions d’inteftin
ouvert, avoit entraîné auffi la portion qui les fépar
o i t d e forte qu’elle fembloit être le trône d’où
fortoient ces deux branchés'.
Quand la malade étoit dans une fituation couchée,
la .portion .qui répondoit à I’eilomac rentroit dans
le ventre,, au lieu que l’autre reftoit toujours au-
dehors ; auffi étoit-eUe* moins faine & chargée de
pullules. Ün état fi pitoyable ne parut point fans
reffource à M. le Cat; en je décrivant à M. Âmyand,
dans.fa,lettre du 10 février 1740, il le propofe de
le: rendre.meilleur, & communique à Ion ami les
moyens qu’il a deffein d’employer pour guérir cette
étrange maladie.
La première chôfe à faire eft de réduire la portiort
qui répond à Y anus. M. le Cat en reconnoît la grande
difficulté,, parce que cette partie eft dure & remplie
de tubercules : cependant il déclare qu’il a déjà ef-
fayé de l’amollir, & de réfpudre l’engorgement par
' l’ufage des cataplafmes ,. & qu’il attend un moment,
favorable pour faire rentrer cette portion. S’il
réuffit, il fe propofe , avant d’aller plus loin, d’attendre
que l’inteftin fe foit bien rétabli dans le bas-
ventre, & qu’il (oit redevenu en état de remplir
fes fondions; pour cet effet, il ehiplovera la première
huitaine,à le fouténirdans fa fituation, à faire
des fomentations réfolütives., & à donner des lave-
mens. Enfuite il placera dans lèqanal inteftinal, une
canule d’argent de la même grouhur que l’inteftin ;
afin qu’elle le foutienne ;. & que la communication
fe rétabliffe entre les, deux portions ei*devant ren-
verfées , & qui feroient alors replacées convenablement.
M. le Cat ajoute qu’il compte fixer cette
canule par une plaque d’argent, qu’une emplâtre,
des compréffes &i un bandage, foutiendront. Il redoublera
eiifuite fes foins.pour que la malade prenne
beaucoup de lavemens ; & quand il fera fur que la
communication entre les deux portions aura lieu, &
quecelle qui eft continue à l’anus fera bien fes fonctions
, il retirera la canule, afin de travailler à fermer
l’orifice extérieur: ilpenfe qu’il n’y arien d’impof-
ftble,avec d’autant plus de raifon que l’on voit quelquefois
la nature opérer ce prodige.
M. le Cat projettoit de l’aider, en rafraîchiffant
les bords de la fiftule formée par les tégumens, &:
en y faifant enfuite la gaftrophie ». Mais on apprend
par une lettre de cet illuflre chirurgien à M. Hoin,
qu’après avoir fait quelques tentatives inutiles pour
la réduction de la portion réfraftaire de l’inteftin de
cette femme , elle ne voulut plus qu’il fît de nouvelles
tentatives, & s’échappa comme furtivement
de1 l’hôtel-dieu de Rouen.
M. Hoin penfe que le fujet qu’il a traité n’a point
à craindre qu’june partie de l’ileum forte par fa plaie ;
il Pefpere au moins , & voici fur quoi fon efpérance
eft,fondée. L’anneau n’a pas fouffert de débridement
dans l’opération , il n’a pas. été non plus détruit pat
la gangrené ; de forte qu’il a toujours conferve fa
parfaite intégrité,, & que fon ouverture n’a point
acquis un plus grand diamètre. Il y a lieu de croire
au contraire , que cette ouverture, eft rétrécie par
le renverfement du tiffu cellulaire & de la peau quz
fe font froncés au-deffus d’elle ; que ces bords ont
.été renforcés , tant en-dedans qu’en-dehors, par
l’adhérence que l’inteftin a contractée ayçè eux à leur
face interne, 8c par celle du tiffu cellulaire., endurci*
pour ainfi dire, à-leur externe. Ainfi, quand bien
même les tuniques intérieures de l’inteftin qui eft
au-deffus de cet anus artificiel, Te relâcherojent affez
pouf être prêtes à fe renverfer au premier effort,
t elles trouverpient, de la part de j ’annéau & des
;tégumens raffermis & confondus entr’eux , une ré-
fiftance qui me paroît . d’autant plus difficile à
vaincre , que, comme jè l’ai déjà fait remarquer.
On voit à peine l’ouverture fiftuleufe du grenadier,
&C que l’aire d’un tel anus artificiel n’eft pas d’une