pieu on en plantera un autre dans l’angle oppofe
avec les mêmes précautions, enforte que les deux
pieux oppofés fe trouveront en fautoir ou en croix.
A cinq ou fix pieds de diftànce on réitérera l’operation
, jufqu’au bout du foffe. _ . .,
Alors on couchera fur ces pieux des fafcines liées
de deux ou trois liens., de maniéré qu’elles entrent
les unes dans les autres par leurs bouts. Le tout fera
recouvert de terre, 6c enfin du gazon qui aura ete
mis à part. . , , ,. n . I
Les cultivateurs ne s’accordent pas lui la direction
qu’il faut donner aux faignees : je préféré la trani-
verfale , comme plus propre à egoutterle terrein.
On fera en tout tems la guerre aux taupes. On a
publié, il y a quelques années, un fecret pour les
chaffer. On fait bouillir, dans une leflive nouvelle,
des noix qu’on a précédemment fendues en deux
parties, 6c qui doivent avoir leur ecorce. Lorfque
ces noix ont bouilli afl'ez long^tems, on en^met une
moitié dans tous les nouveaux trous. C ’eft-là un
poifon certain pour ces animaux deftrufteurs. ^
Si le terrein eft léger ou fort à l’excès, 6c qu’on
ait à portée de bonnes eaux, ce fera une tres-bonne '
économie, de corriger ces terreins par le mélangé
de terres contraires. '
Les terres ferruginèufes fouffrent de l’arrofement
même des meilleures eaux. Avant que d’y jetterl eau,
il s’agit de’leé corriger. Le docteur Home indique la
marne, la chaux, les cendres, & toutes les matières
calcaires. A ,
Enfin, pour préparer les prés à être abreuves, il
faut creufer des canaux, conftruire des étangs 6c
faire des éclufes. V'
Les canaux d’irrigation font de deux efpeces : les
uns s’appellent maîirejfes rigoles ; ce font les canaux
de conduite, d’introduftion, de dérivation, de détente
: lés autres font de fimples rigoles ; fa vo ir , les
canaux d’arrofement, de décharge, de repos, dé
reprife, d’écoülement & de defféchement.
Le canal de conduite eft celui qui amene 6c conduit
l’eau à la tête du pré. Il eft déjà quelquefois'
tout formé par la nature, 6c il n’eft befoin que d’une
éclufe , un batardeau ou un arrêt , pour donner
entrée à l’eau. Si le pré éft considérable , & que ■
l’eau ait un long trajet à parcourir , on tapiffera le
fond de ce canal, de.gravier : il tient l’eau fraîche ,
& lui donne une agitation favorable , en même
tems qu’il empêche qu’elle ne fe charge de parties
glaireufes. Cette précaution eft plus ou moins né-
ceffaire auxmaîtreffes rigoles. ^
Le canal d’introduftion eft celui qui amene l’eau
dans l’intérieur du pré , le long de fa partie fupe-
rieure, pour que de là on puiffe la conduire ou l’on
veut. . ...
‘ Cé canal ne doit point déborder, à moins qu il ne
ferve en même tems de rigole ou de canal d’arrofement.
Souvent il eft formé par la nature ; fouvent
encore , à l’entrée de l’eau dans le pré, elle trouve
le canal de dérivation qui part du canal d’intro-
dudion, pour fpurnir les -rigoles. Si la prairie n’eft
pas trop large, le canal de dérivation borde la prairie
de haut en bas. Si elle a beaucoup de largeur, on la
tire dans le même fens, mais dans l’intérieur. On en
fait même plus d’u n , fi la piece eft fort large , ou
qu’elle, ait des pentes en plufieurs fens. On fe laiffë
diriger par les irrégularités du terrein.
Si l’eau coule naturellement le long de la prairie,
on eft difpenfé de faire le canal de dérivation : les
canaux d’arrofement fuffifent. * •. “*•
Le canal de détente eft celui qui reçoit l’eau à la
fortie de l’étang, lorfque la bonde eft ouverte.
Les rigples font les ramifications qui partent
du canal de dérivation, ou de celui qui en fait la
■ fonction. Les grands canaux font le tronc ou l’artere
; les rigoles font les branches ou les veines.
* Lorfque le canal de dérivation eft dans l’intérieur,
les rigoles font doubles. 11 y en a à droite 6c a
gauche.
Ces rigoles ont un pouce 6c demi de profondeur
dans les terres fortes, 8c feulement un pouce dans
les-terres légères. Elles auront huit à neuf pouces
de largeur, 6c iront en diminuant, à mefure qu elles
s’éloignent du tronc. Elles feront tirées au cordeau,
à trente ou cinquante pieds dé diftance, fuivant la
légéreté ou la force du terrein. Dans les terres fortes,
on ne leur donne prefque point de pente.
Si le terrein a beaucoup de pente, on ne fait
point d’ouverture aux rigoles. _ •
En général, toutes les tranchées doivent être faites
avec netteté, régularité 6c précifion.
Pour former les rigoles , on a des efpeces de
haches fortes, pefantes, armées d’un long manche ,
affez femblables à celles dont les charpentiers parent
les poutres, après les avoir dégroflies. Lorfque le
gazon eft tranché des deux côtés le long du cordeau,
on le détache avec une beche de bois garnie
de fe r , _que l’ouvrier pouffe devant lui entre deux
terres. ^ :
On fe fert auffi d’un grand couteau, avec deux
douilles, où s’emmanchent deux perches : un homme
tire celle qui eft devant, 6c un autre pouffe celle
de derrière. Le gazon fe coupe ainfi le long du
cordeau avec beaucoup de propreté 6c de prompti-,
tude, 6c on le détache comme ci-deffus. ;
Le canal de décharge eft celui qui, en tout tems /
reçoit le fuperflu des eaux, ou le ruiffeau en entier,
lorfqu’il ne convient pas d’arrofer. Ce canal a pour
l’ordinaire une éclufe, pour mefurer ou pour ecarter
les eaux. Le canal de dérivation, lorfqu’il a une iffue
commode dans le bas , peut fervir de déchargé.
Quelquefois le canal de conduite en fait la fonftion/
ainfi que le canaLd’introduftion. - -
Les canaux de repos font des foffés ou tranchées
qui coupent tranfverfalement le pré , 6c qui .pnt un
peu plus de profondeur 6c de largeur que les rigoles:
1 Ils fervent à porter les eaux fur quelques endroits
1 trop élevés, pour que les rigoles puiffent y atteindre.
On les emploie dans les prairies qui ont des
pentes en plufieurs fens, 6c on leur donne les courbures
indiquées par le terrein.
Les canaux de reprife font les rigoles qui partent
des canaux de repos. Leur dérivation dépend des
i inflexions du canal de repos d’où elles fortent, 6c
des pentes du terrein.
Les canaux d’écoulement font des foffés plus ou
moins profonds, placés au deffous de la prairie ou
fe rendent les eaux, après qu’elles ont fervi à l’arrofement.
, ;
Les canaux de defféchement font des faignees
dont on a parlé plus haut.
Les étangs fervent, dans l’irrigation, à raffembler.
les eaux, à rompre leur impétuofité, à les porter,
fur la hauteur d’un pré fort incliné, ou plus loin,';
à corriger diverfes efpeces de mauvaifes eaux, à y,
délayer des fumiers. Quelquefois il eft plus commode
de placer ces engrais le long du canal de dé-;
tente. L’eau, fortant avec impétuofité de l’etang,
entraîne ces matières avec elle , pour peu qu’on
leur aide en les remuant. r ,
Les étangs font indifpenfables 1 lorfquon a des
eaux graffes ou des égouts de fumier, qui méritent
d’être difpenfées avec le plus grand ménagement.
Les eaux qui fe partagent entre plufieurs particuliers,
exigent auffi un étang, pour profiter en tout
tems de fon droit, & en augmenter le bénéfice. g
.. Us font encore néceffaires pour empêcher que les
eaux de grand chemin ou d’égout ne laliffent l’herbe
dans le tems que les prés font en fleur ; comme auffi
pour retenir le limon qu’on a foin de répandre fur
les endroits qui en ont befoin.
Enfin les étangs fervent à ramaffer les eaux fuc-
culentes, qu’On eharie au printems dans des tonneaux
fur les prés, où ces eaux ne peuvent être
conduites autrement. Pour conftruire ces baffins ou
étangs , on s’y prend de cette maniéré :
Le fond fera battu , glaifé * ou pavé* fuivant le
local. Le pourtour fera auffi glaifé.
Le pavé fera battu à plufieurs rofées ; & à défaut
.ou refus de demoifelle, on arrofera à chaque fois.
Le corroi deglaife du fond & des côtés , doit avoir
un pied d’épaiflèur. La glaifé fera ferme , duftile *
.point fafilonneufe : elle. doit s’alonger lorfqù’on
veut la rompre, 6c paroître huileufe 6c graffe en la
maniant. C ’eft la terre dont fe fervent les tuiliers *
les briquetiers, potiers, ôcc.
Pour préparer la glaifé * on la coupe deux ou trois
fois avec la beche ou le tranchant de la houe ; on la
bat enfuite, & on la pétrit avec la tête de cet outil.
Pendant ces opérations , on y répand de tems en
tems un peu d’eau, & on l’emploie en la foulant,
en la prefl’ant à pieds nuds, lits par lits, fans y laiffer
aucun intervalle.
La terre qui environne le corroi aura une épaiffeur
6c un talus proportionnés à la preflion, à la largeur
& à la hautelir de l’eau contenue dans l’étang. L’angle
doit être depuis quarante degrés & au deffous.
Lorfqu’on en a la facilité, on fait, fur le devant, un
mur de maçonnerie en chaux maigre.
Si l’on manquoit de bonne terre glaifé* on peut
employer de bonne terre'noire mêlée de terre graffe
ordinaire , 6c de fumier gras 6c eonfommé. Ce
mélange fournit un excellent corroi qui fe pétrit
très-bien*
Si l’on n’â quë de^ terres légères'pour conftruire
l’étang, on s’y prendra de cette maniéré :
En élevant l’enceinte du baffin , on donnera aux
terres/en dédarts * la moitié du talus extérieur; 6c
dans la chauffée même ou dans l’enceinte, à fix pouces
de la furfaee intérieure /on ménagera un efpaeë
vuide de demi-pouce , de qu’on fera par le moyen
d’une planche, qu’on lèvera lorfque l’enceinte fera
formée. Dans cet efpaee vuide , bn fera couler du
lait de chaux refroidi, allez clair 'pour qu’il rem-
pliîfe exactement tout cet intervalle. Sur les terres
qui forment l’enceinte du baffin, on femera du grà-
men n appelle faujfe y vraie ou yvraie fauvage, pour
y former un gazon épais. Si lè fond ne retient pas
l’eau, on y répandra des cendres de bois, d’une
ligne ou deux d’épaiffeur.
Lorfqu’on n’a en vue que î’arrofement , il faut
que le baffin puiffe fe remplir en douze ou vingt-
quatre heures, 6c on l’ouvre à volonté, On a cherché
à épargner cet affujettiffement d’ouvrir 6c de fermer
l ’étang lorfqu’il eft plein , en faifant fervir l’eau
même de l’étang à cette opération.
L’étang n’a ni bonde ni pale pour retenir les eaux ;
mais, au bout extérieur d’un tuyau de fontaine
qu’on place au fond pouf les vuider, on adapte *
avec une charnière, une foupape de bois amincie,
doublée de feutre ou de peau.
Cette foupape eft attachée à la partie inférieure .
de l’orifice du tuyau, de maniéré que lorfqu’elle
eft appliquée & preffée contre le trou du tuyau,
elle le bouche exactement, fans laiflèr paffer une
feule goutte d’eau.
Pour tenir la foupape en cet état, on place , vis-
à-vis & à fa hauteur, une bafcule de chêne de trois
à quatre piés de longueur, pofée fur des pivots qui
roulent fur deux pieux folidement plantés en terre.
A la partie antérieure de. cette bafcule , on fixe,
fur deux pivots , un rouleau de bois dur de trois
pouces de diamètre r6c de quatre ou cinq de longueur*
Tome I,
L’extrémité antérieure de cette bafcule eft creufée
en cuiller, 6c placée au point de chute de l’eau, qui,
lorfque l’étang eft plein ^s’échappe par un tuyau au-
deffus de la chauffée. Le euilleron fe remplit alors
6c baiffé ; la foupape n’étant plus retenue, s’ouvre ;
Peau; de l’etang fait une preflion violente 6c l’ouvre
toujours davantage. Dès. que l’étang eft vuide , ou
qu’il n’y a que peu d’eau, la bafcule reprend d’elle-
même la.fituation horizontale , 6c referme la foupape;
& le fermier , fuivant fa commodité, ouvré
ou ferme les rigoles * ou dirige l’arrofement.
Pour empêcher que l’eau,,en entrant dans l’étang,
ne le creufe ou ne le dégrade, on prend la précaution
de la faire tomber fur une planche qui en rompt
l’effort: 6c fi le baffin eft grand, 6c qu’on .craigne
que le vent n’agite l’eau , 6c ne forme des ondes
capables de dégrader la chauffée de l’étang, il faut
placer .quelque abri, une toile ou un file t, pour
rompre les vagues.
Il faut fouvent des chauffées , des digues, des
batardeaux, des arrêts & des éclufes.
Les batardeaux fe font fouvent à peu de frais*
Quelquefois on trouve fur. les lieux de groffes
pierres qui, rangées au travers du ruiffeau, fuffifent
pour faire refluer lés eaux. D’autres fois il ne faut
qu’une piece de chêne qui le traverfe. On peut auffi
conftruire une grille-de bois de chêne, dont on
remplit les vuides avec de greffes pierres.
Enfin, une feule éclufe qui occupe tout le lit du
ruiffeau * peut faire dégorger Peau * fuivant le
local. On les ap’pelle traverjîeres.
Il y a des éclufes d’introduûion : ce font des portes
qu’on ouvre ou qu’on ferme au befoin, ou bien
des pelles, qu’on éleve ou qu’on abaiffe plus ou
moins , à proportion de la quantité d’eau qu’oii
fouhaite. ,
GÊi en copftruit auffi à demeure & à trous. Ces
derhieres font les plus fimples. Une ou deux groffes
planches,; ou plateaux, de deux pouces d’épaiffeur *
pofées’l’une fur l’autre * fuffifent. On les perce de
plufieurs trous ronds ou quartés, qu’on ferme avec
des tampons lorfqu’il le faut. La planche inférieure
eft enfoncée en terre * 6c toutes font exactement
jointes..
Enfin, on a befoin- d.e planches mobiles, qu’on
affure groffiérement au travers des maîtreffes rigoles,
pour jetter les eaux fur les endroits eonve-
nablésv r
Voici les réglés qu’il faut fuivre dans i’arrofe-
mént : i° . Une prairie élevée 6c découverte demande
plus d’eau qu’une prairie baffe 6c Ombragée*
2°. Pour les arrofemens. ordinaires 6c réguliers,
les eaux doiverit être répandues avec plus d’abondance
fur une prairie en pente, ou dont la terre eft
légère, &c. 30. Les prés dont l’afpeâ: eft au midi
font les plus altérés ; ceux qui font à l’orient ou à
l’occident tiennent le milieu. 40» On court moins
de rifque à trop arrofèr avec de bonnes eaux naturelles
, qu’avec les eaux médiocres. Mais l’excès des
eaux graffes eft toujours pernicieux. 5°. Il faut moins
arrofer dans les années pluvieufes * que dans les
années feches. 6°. L’abondance des eaux médiocres _
nuit plus aux terres fortes , qu’aux terres légères*
70. Tous les terreins qui ont des pentes én divers
fens 6c des contre-pentes* font fujets à devenir fangeux
en les artofartt fans précaution. Il convient d’y
faire attention.. 8°. Quelques-uns penfent qu’une
terre qui eft arroféè pour la première fois * doit être
d’abord abreuvée à fatiété ; d’autres, au contraire *
qu’il faut l’accoutumer peu à peu à l’arrofement.
C’eft à l’expérience à décider. Je crois qu’on ne petit
inonder qu’avec fuccès les terres légères dont là
pente eft régulière : mais je penfe qu’il en eft tout-
autrement des. terres fortes ou mi-fortes, ou de
G ij