
 
        
         
		talens,  fermèrent  les  yeux, fur  les  erreurs  de  fa  
 première  jeuneffe.  Gabinius.,  en  partant  pour  fon  
 gouvernement  de  Syrie  ,•  lui  donna  le  commandement  
 de  fa  cavalerie  :  polie honorable  l’un des  
 premiers  de la milice romaine. Les fuccès d’.Antoine ,  
 fon  activité  ,  fa  prudence ,  &   principalement  fon  
 humanité dans  la victoire .éclipferent  auffi-tôt  toute  
 la  glorre  de  Gabinius  qui  lui dut  fes  yii&ôires.  fur  
 les  Juifs  &   fur  les  Egyptiens.  Antdipe.[àans  ces  
 différentes  expéditions,  qui  furent  marquées par la  
 défaite  &   la  captivité  d’ArRlobule , ’roi.-de; Ridée,  
 &   par  le-rétabliffement  de  Rtolomée, Rir; le  trône  
 d’Egypte ,   montra  qu’il fa v<fit vaincre,.mais vaty?£re  
 en épargnant même le fang des ;ennemis.:L’ha.imanité  
 dont  il  ufa  envers, Archelaüs.qqi  fuit trouvé  fanà  
 vie  fur  le  champ  de. bataille ,  lui concilia  fufÿtout  
 le  coeur  des  Egyptiens ,qui  honoroient  les> morts  
 d ’un, culte  prefquë  fuperftitieux.  L’ayant-,revêtu, de  
 fes  habits  royaux  ,.  il  lui  fit rendre :les;-rlK>ng.eurs  
 funebrçs.avèc  toute  la .pompe  .Egyptiepne»  .Qette  
 modération  lui  auroit  fait. ériger ,des autels  dans  
 Alexandrie,s’ileût. voulu leperm_ettre,^.les Romains  
 le comptèrent depuis au nombre dp leurs plus grands  
 généraux.  Ce fut  alors  .qit’on, s’étudia  à  lui trouver  
 des  traits de conformité avec;  les  Héraclidës,  dont  
 les  Antoniens  fe  -difoient  descendus,  il  avoir  une  
 taille -majeftueufe ,  un  front  large  &  é le v é ,  un  air  
 d’infpiration  dans  le regard,  Ja  barbe  extrêmement  
 .épaiffe,  les-membres nerveux &  parfaitement  proportionnés  
 :  tout  en fa  perfonne  retraçoit  le  héros  
 auquel il  affeéloit dereffembler. Plein d’eftiine pour  
 la valeur,  il. lui  rendoit un efpece d’hommagefoit  
 qu’elle fe  rencontrât  dans  le  foldat  ou dans  le  capitaine  
 : quiconque s’étoit diftingué par quelque aétion  
 d’éclat,  étoit admis à fa table. L’hiftoire lui reproche  
 .de  n’avoir  point  eu  la  même  vénération  pour  les  
 .vertus pacifiques.  De  retour  à Rome ,, il .la- trouva  
 partagée  en  deux  factions.  Forcé  de  fe-déclarer  
 pour  Pompée  ou  pour  Céfar,  il  embraffa le parti  
 de  celui-ci  par  les  intrigues  de  Curiôn  qui  le  fit  
 élire tribun du peuple,  &  lui procura la crofle q.u’on  
 appellolt  alors  le  bâton augurai.  Dès qu’il Fut entré  
 ;en charge , il donna la .plus haute, idée de là, fermeté.;  
 &   quoiqu’il fe  fût  déclaré  pour C éfar,  il ne pai-oît  
 pas que ion intention pour  lors  fût de  le  fervir,  en  
 trahiffant  les  intérêts  de  la  république.  Le  fénat,  
 -après  plufieurs  féances,  propofa  deux  quefiions,  
 favoir : fi Pompée renverroitfes légions., ou,fi Çéfar  
 renverroitles  fiennes.  Les uns,  mais en petit nombre  
 ,  furent d’avis que ce fût Pompée ; mais Antoine  
 f e   levant de  fon tribunal,  demanda hautement d’où  
 pouvoit provenir cette prédilection pour l’un de ces  
 rivaux,  &  s’il  n’étoit  pas  plus jufte  de  -leur donner  
 l’exclufion à l’un &  à  l’arutre  ?  il  conclut’auffi-tôt  à  
 ce que Pompée &  Céfar  licenciaient  leurs troupes  
 dans  le  plus  court  délai.  Il  fe  difpofoit à  recueillir  
 les  fuffrages,  lorfque  les  partifans de Pompée ,  , du  
 nombre defquels étoient les  deux confuls &  Çatqn,  
 le chafler enthonteufement dufénat. Le tribun n’ayant  
 pu  digérer  cette  injure,  fortit  auffi-tôt-  de  Rome,  
 .&   fe  retira  dans  le  camp  de  Céfar.  Il fe  plaignit,  
 non fans de raifon,« de ce que lesloix les plus fa-intes  
 .»  étoient  violées  ,  difant  que  la capitale  étoit  en  
 .»  proie à des  féditieux  qui ôtoient  la  liberté même  
 . » aux tribuns  de  dire  leur  avis ,  &   qu’il y  avoit du  
 »  danger  à ufer dans Rome d’un droit dont  les gqh-  
 »  feillers  d’état  ufoient  impunément  dans  les  gou-  
 »  vernemens  les  plus  defpotiques ».  Céfar qui haïf-  
 foit  mortellement  Pompée ,  auquel  on  pretendoàt  
 le  fubordonner  ,  &   qui  p,eut -être  avoit  dès-lors  
 . formé  le  projet  d’ufurper  la  puiffance  fouveraine,  
 tira avantage de l’imprudence de Caton, &  s’appuya  
 des  clameurs  du  tribun. Antoine  fut dès-lors affocic  
 à  la  gloire  de  ce  grand  homme  qui.,  a-près  s’être 
 afluré'de  fa capacitélui-.donna pour derniere  marque  
 de. fa confiance,  le commandement de l’aîle  gau-?  
 che de fon armée  à   la journée  de  Pharfale ,  journée  
 fameqfq.qui de voit  décider  de  fon fort.- Céfar pour  
 ré.coiîipenfer  fès  ferviçes ,   le  nomma  fon  général  
 de:.cayajèçiej  dès  qu’il-fe  fut  fait  élire  dictateur,  
 &  Renvoya  à Rpme,f Antoine  au  lieu  d’y.  jouir  de  
 fa -gloire ,  l’obfctvrcit.  Il  s’y  livra  à  un  luxe, révoltant,, 
  ,&;fe  plongea;.dans  des,,débau$es( qui  fou-  
 lçyerenî  contre fu i  toutes  les,  amès  honnêtes.  Ses  
 excès allièrent fi loin, queCéfar ne putfe. réfoudre à  
 le prendre,pour collègue dans ton troifiemê confulat,  
 &   lui  préféra  Lepidus  qui  n’avoit  pas  les memes  
 talens.-,Ce fut pour le retirer de fa crapule que Çéfar  
 Rengagea, à  époufer Fulvie,  femme  grave &  impé-  
 rieufe  ,q.ui,,  comme,.dit Plutarque  ,  ne  s’àmufoit  ni  
 à . fes daines ,  ni  à, fes. fùfeaux,  ni aux foiris domef-  
 tiques j,  &  qui ne  bornait, pas [fan  ambition à dominer  
 fur,un Ample .particulier,  mais qui  voidoit;commander  
 a  un  mari  qui  cdmmanqoit ' aux  autres ,  &  -être  elle-  
 même le .général d\un,mari qui était, à  la. tête des armées:  
 de , maniéré  que  Cléopâtre  devait à  Fulvie  le  prix  des  
 bonnes  Leçons  qu elle  avoit données a Antoine pour lui  
 apprendre à  dépendre  .toujours de fes femmes :  car ç. eft  
 d'elle  qu elle le reçut J i Jouple ,  & Ji  accoutume à leur  
 ■ obéir en, tout.  Antoine  n,e fut pas  plutôt époux  qu’il  
 apprit à rougir de  fes  intempérances.  On  n’eut plus  
 à  lui  reprocher  que  le  trop  de  foibleflè  envers fes  
 femmes.-'Géfarforigea alors à l’élever aux plus grands  
 honneurs ,  &  le pr-itpoyr  fon  collègue  lors de fon  
 icinquiêtne  cpnfulat,  qui fut auffi  le. .dernier de ce  
 gçand  homme,  bious  .dirons  à   ¥article CÉsa r   com-  
 ment  Antoine  fut  la  caufe  innocente  de  fa  mort ƒ   
 peu  s’en -fallut qu’il ne fût lui-même enveloppé dans  
 fon défaire. Les conjurés délibérèrent fi après avoir  
 tué  Géfer ,  ils  ne tueroient pas Antoine.  Brutus s’y   
 oppofa de tout fon pouvoir, voulant,, dit Plutarque,  
 qu’une  aétion  qu’ils  -avoient  le  courage  d'entreprendre  
 -pour  la  défenfe  des  loix  &   de la liberté,  
 fût  pure  &   exempte  de' tout  reproche, dinjufficg.  
 Etrange  réflexion  de  cet  écrivain,  d’ailleurs  fi  judicieux. 
   Dès. qu’Antoine eut appris, que  les conjurés  
 a voient  confommé  leur  forfait  ,  il  fe  déguifa  en  
 efclave,  ; mais  voyant que  tout étoit tranquille ,  &   
 que  Brutus ,  retiré  au  capitale,  proteffoiî ne  voit  
 .fofi-  exercer aucune  violence furies amis de  Céfar,  
 il reprit les marques  de  fa  dignité,  &   convoqua le  
 fénat.  Plutarque  vante  fa  dextérité  dans  ces  conjonctures  
 emharraffantes.  Il  eft  vrai qu’il  fut  plaire  
 également  aux  deux  partis.  Il  empêcha  les  peres  
 coafçripts.de délibérer fur cette importante queftion,  
 favoir  fi  Céfar  devoit  être  regardé  comme  tyran,  
 &  les  fit prononcer pour la négative  dans un décret  
 par  lequel  le  fénat  confirmoit  tout  ce  que  Céfar  
 avoit  fait depuis  le commencement  de fa dictature,  
 &   accordoit  aux  confpirateurs  un  pardon  illimité.  
 Cette  conduite  lui  attira  de  grands  éloges ; mais,  
 .dit Plutarque « l’enflure  que  lui  caufa la  grande  opi-  
 »  nion que le.peuple  avoit de lui,  bannit  de fa tête  
 »  tout raifonnement fage, &  lui fit croire qu’il feroit  
 » le  premier  de  l’empire's’il parvenoit  à  détruire le  
 »  parti de Brutus » : c’étoit effectivement fon deflein.  
 Ayant  fait  confirmer  le  teftament  de  .Céfar,  qui  
 léguoit  des  fommes  immenfes ,au  peuple ,  &  prononcé  
 fon  oraifon  funebre  ,  il y  eut une  rumeur fi ^  
 grande ,   que les  conjurés furent obligés de fortir de  
 Rome.  Peu s’en  fallut que  leurs  maiîons ne fuflènt  
 réduites  en cendre. Cette démarche  lui attacha  tous  
 les  p a r t ifa n s to u s   les  amis  de  Céfar.  Calpurnte  
 fa  veuve,  alla Je  trouver,  &  lui confiant  fes  intérêts  
 les  plus  chers  ,  elle  lui  remit  environ  douze  
 millions  de notre  monnoie.  Elle lui  donna  des mémoires  
 où  fon  mari  avoit  écrit,  non  feulement  
 tous  les  change,mens  qu’il  avoit  opérés  dans  le 
 gouvernèmënt,  mais  encore  lé plan  de  ceux  qu’il  
 avoit projettés. G’étoit un recueil important, fur-tout  
 depuis que  le fénat  avoit confirmé tous les  a êtes  de  
 Céfar. Antoine y  inféroit  chaque  jour tout  ce  qu’il  
 jugéoit  à  propos.  Il  crépit  des  offices.',  rappelioir  
 les  bannis  ,  remettoit  les  prifünniers  en  liberté,  
 profcrivqit  les  fénateurs  qui  lui  étoient  fufpeCts ;  
 &   toujours en  vertu de ce  qu’il  difoit  être dans les  
 mémoires du dictateur.  C’eft ainfi que Céfar régnoit "  
 après  fa mort plus defpotiquement  qu’il, n’avoit fait  
 pendant fa vie :  tout prouve, tout démontre eyf Antoine  
 tendoit  au  rang  fuprême.  II  y   feroit monté  
 fans  beaucoup  d’obfiacles,  lorfqu’il vit paroître un  
 concurrent qui  d’abord  né  lui  fit  qu’une  impreffion  
 fort  légère.  C’étoit lé jeune Caïus OCtavius,  mieux  
 connu  fous  le nom  d'Augufie.  Adopté  par  Cé far,  
 il venoit en  revendiquer l’héritage.  Cette démarche  
 dépkifoit à Antoine  qui  étoit depofitaire  des riches  
 tréfors du dictateur.  11  lui fit  une  réponfe  très-choquante  
 .-«Vous vous trompez, lui dit-il, fi vous croyez  
 »  que Céfar vous ait légué l’empire romain, aufli bien  
 »  que fes richeffes &  fon nom.  La mort du dictateur  
 » doit apprendre à fôn fils adoptif que la conffituîion  
 »  d’une  république'  libre  rejette  également les fou-  
 •  »  verains éleCtifs &  les fouverains héréditaires ; & .ce  
 » n’eft point  à un  jeune homme  à interroger de fon  
 v>  chef unconful.. . . . .  Sansmoi on aboliffoit jufqu’au 
 »  nom  de  Céfar,  on  flétriflbit fa mémoire  comme  
 >>  celle  d’un  tyran ;  alors i l   n’y   avoit  ni  héritage, 
 *>  ni  teftament  ,  ni  adoption..........J’ai  fait palier 
 »  quelques  décrets  favorables  aux  confpirateurs, 
 »  mais les  raifons  qui  m’ont déterminé  ne  font  pas  
 »  de -nature à être  iaifies par une perfonne  de votre  
 »  âge-.  L’argent que vous  demandez,  ne monté  pas  
 i>  à une  fomme  âuffi eonfidérable que  vous pouvez  
 »  le croire ;  cet  argent  appartient  à  la  république, 
 »  &   les  magiftrats  s’en  font  fervi pour  lés  befoins  
 ■  »  de  l’état  ;  je  vous  remettrai  volontiers  ce  qui  
 »  m’en refte ; mais permettez-moi  jeune  homme , 
 »   de vous donner un confeil  : prenez  garde de vous  
 s>  répandre  en  libéralités  inutiles,  fervez-vous  de  
 »  vos  biens  pour renvoyer  des  partifans  qui  s’atta-  
 9>  chent moins à vous qu’à votre  fortune.  Craignez  
 »  le  peuple  qui  vous  carefle  ,  &   montrez - vous  
 »  avare des  bienfaits  qu’il  attend  de vous.  Ç’eft un  
 »  monftre qui ne  connoît d’autre guide que fa cupi-  
 » dite,  &  toujours  prêt à  vous payer d’ingratkudei  
 »  Vous êtes  verfé dans  l’hiftoire  grecque ,  &   vous  
 »  favez  que  les favoris de  la multitude  n’ont qu’un  
 »  éclat  paffager,  que  l’amitié  d’un  peuple eft  plus  
 »  inconftante que  lès  flots de  là mer ».  . 
 ...  Ce  confeil  intérefle  étoit  donné  avec  trop'de  
 hauteur  pour  conduire  à  la  perfuafion.  Augufte  
 n’étoit  jeune  que  par  fes  années,  la  nature  l’avoit  
 comblé'de  tous  les  avantages que  puifl’e  delirer un  
 homme  .d’état ;  &  il  n’étoit  point  encore  forti  de  
 l’enfance*  qu’on  admiroit  en  lui  une  maturité  de  
 raifon  ,  rare  même  dans  les  perfonnes  d’un, âge  
 avancé :  Antoine ne  tarda  point  à  s’appercevoir de  
 fa  faute.  Il fe repentit de ne l’avoir point traité avec  
 -cette douceur,  cette aménité  que  la  politique  exige  
 oit : mais  la fierté ne  lui permettant pas  de  changer  
 de  fyftême ,  il  chercha  par  toutes  fortes  de  
 moyens  à  le  tenir  dans  l’abaiffement,  &   ne  laiffa  
 échapper  aucune  occafion de  lui faire eljtùyer quelque  
 humiliation.  Cette  conduite  engagea. Augufte  
 à  fe jetter  dans  le  parti  du  fénat.  S’étant  concilié  
 l’eftimé  de  cette compagnie,  dont Cicéron  fui attacha  
 les  principaux  membres,  Augufte  s’apprêta,  à  
 lui  demander  raifon  les  armes  à  la  main.  Antoine  
 craignant l’événement  d’une guerre civile, confentit  
 à  une  conférence , qui  fe  tint  au capicole.  Si l’on en  
 croit Plutarque, ce fut un fonge dans lequel Antoine  
 crut  voir  Augufte  liü  drefièr  des  .embûches,  qui-  
 Tome  1, 
 empêcha les fuites de  leur récbnciliatibn : mais nous  
 croyons  que le  vrai  motif de  leur  nouvelle  rupture  
 ,  etoit celui dont  nous  rendons  compte  à ¥ article  
 A u g u s t e .  Cicéron  qui  ne  pouvoit  entendre  pron 
 o n c é e   nom XAntoine ,  fit paffer  Un  décret,  par  
 déclaroit  ennemi  de  la  patrie.  Cet  
 ■ S I   f t  ,ta"   Par  fes  fo"'àtaiions & par  fes  bri-  
 gliçs ,  que le  fenat  envoya  à Augufte  les  faifceauv  
 &   tous  les  orneraens  de  prêteur  ,  &   ordonna  à  
 Brutus  j  ainfi  quaux  confuls Hirtius  &   Panfa  ■  de  
 1 affilier <fes lroupes.de-  la  république.  Antoint  ne  
 pouvant refifter à leurs  forces réunies,  prit la fuite  
 apres  avoir  été  vaincu  aux  environs  de. Modene.  
 Sa défaite .coûta bien cher à fes ennemis :  ils Ja pave-  
 ,  rent  de  là  vie  des  deux  confuls. 
 Mntoine traînant lés  débris de  fa défaite j  fe retira  
 i  vers  les Gaules.  Son  delTein  étoit  de  fe  joindre  à  
 .  Lepidus  qui commàndoitplufieurs légions dans cette  
 contrée, &  qui lui étoit .en partie .redevable  de  fon  
 ;  élévation.  Ce  fut pendant  cette  retraite  qu’il  eut  à  
 ,  .. loutenir toutes  les  incommodités  de la guerre ■ mais  
 cet  homme  qui  venoit  de  fçandalifer. les  Romains  
 par  fa  vie  voluptueufe  &   efféminée,  montra  dans  
 .  ladugrace une artie au-deffus des revers. C’étoit dans  
 ladverfite qu’Ahtoine paro'iffoit vraiment grand. On  
 je VOJ'OII confondu avec lesfoldats,  dont il relevoit  
 •  j?  courage  abattu  par  la  mifere'&  les  fatigués.  Il  
 fpt .réduit, a une  extrémité  fi trifte\en  paflimt  les  
 Alpes,  que  .les  troupes  &   lui-même  ne’vécurent  
 que  de  racines  &   d’écorce.d’arbres';  on  le  voyoit  
 porter à  fa bouche de  l’eau  corrompue,  &  la boire  
 lans  témoigner,  le  moindre  dégoût.  Arrivé  fur  les  
 frontières  des  Gaules ,  il  écrivit  à  Lepidus  qui  lui  
 fit . une  reponfe  peu  fatisfaifante,  Ce  faux  ami  lui  
 mandoit  que  le  fénat  l’ayant déclaré  ennemi  delà  
 patrie ,  il  ne  pouvoit  unir  fa  bannière  k la  tienne  
 lans  s’expofer  au même  décret ;  il l’afluroit cependant  
 quejamais il ne le traiterait en ennemi Antoine  
 , né  s en tint .point  à  ce  refus ,  il continua  fa route ,  
 ot  alla  camper  près  d’une  riviere - qui  bordoit  le  
 camp de Lepidus.  Le  lendemain ayant- pris les habits  
 de  demi,  il s'approcha des retranchemens.  Les fol.  
 dats  émus par le récit de  fes infortunes,  n’en purent  
 loutenir  le  fpeftacle;  Antoine ; avoit  la  barbe  longue  
 ,   &  ,lp  cheveux  négligés  -  touchés  jufqu’aux  
 larmes,  ils  lui  envoyèrent  deux  officiers, déguifés  
 en  colutifannes,  lui  dire  d’attaquer  le  camp  avec  
 confiance,  qu’ils  étoient  prêts  à;  le  recevoir ,  &   
 même à tuer Lepidus, s’i l  en donnoit l’ordre. Antoine  
 les  remercia de  leur zele., mais il leur .recommanda  
 de  ne  faire  aucune  infulte.à leur, général.  Quel fut  
 l’étonnement  de  Lepidus  ,  lorfqu’à  fon  réveil  it  
 apperçut  Antoine dans fa tente  entouré de  fes  propres  
 gardes.  Il  fe jetta  à fes  pieds en lui demandant  
 la vie. Antoine auffi-tôt lui  tend la main ,  l’embrafle  
 en  l’appellant fon pere-. U-le  dépouilla du commandement, 
   mais  il  lui  laifla  le  titre  de  général  avec  
 tous  les honneurs attachés à cette, dignité.'Juveritius  
 Laterenfis ne voulant point être le témoin des maux  
 qu’il  voyoit  prêts  à  fondre  fur  fa  patrie,  fe donna  
 la mort dans ; le  tems que  ces  deux  généraux s’em-  
 brafloient. Antoine, après avoir reçu les témoignages  
 d amour  de fa nouvelle  armée,  fe  dilpofà à rentrer  
 en  Italie.  Il fe mit en marche  avec dix-fept légions , 
 &   dix  mille  chevaux ;  il  avoit  de  plus  fix  légions  
 qu’il  laiffa  dans, les Gaules, pour  faire  refpecter foii  
 autorité.  L’armée  qu’il  conduifoit  en I ta lie n ’étoit  
 pas  capable  de  le  raffurer  contre  les  caprices  du  
 % t   :  il  avoit  toujours  contre  iui  le  fénat  &   les  
 conjurés  dont  Brutus  étoit le chef. Il étoit en proié  
 aux  plus, vives  inquiétudes  ,  lorfque  des  députés  
 d’Augufte.  lui  propoferent  un  accommodement  de  
 la  part  de  ce  prince.  Cette  réconciliation:,  funefîe  
 à la république  ,  Ôc infpirée. par la  politique,  fe fit  
 N h n  i j