
 
        
         
		, -.t é * 
 un degré plus élevé  d’aibftraâion aux idées qui n’orit  
 pour objet  que  les  relations qui  fubfiftent  ou peuvent  
 fubfifter entre les êtres : je les acquiers en comparant  
 un  être à un autre ,  en  obfervant les circon-  
 Élances dans lefquelles un être eft  par rapport à l’autre  
 ,  &  enfin  en  féparant  l’idée  de  ces  relations  de  
 celle  des  êtres  entre  iefquels  je  lésai  apperçues:  
 telles  font  les  idées  de  caufe  ,  d’effet,  de  reffem-  
 blance , de différence  , de tout, de partie , &c. 
 4°. Si les idées de  caufe, de fubftance , de mode,  
 font ,déjà par  elles-mêmes  des  idées  abjlraites;  les  
 idées  de  caufalité,  de  fubfiantialité *  de modalité,  
 feront plus  abftraites  encore;  car ces mots ne figni-  
 fient  pas  la chofe même,  mais  feulement une  maniéré  
 de conlïdérer une chofe comme caufe,  comme  
 fubftance  ,  comme  mode.  Dans  ce  rang  on peut  
 mettre  les idées générales de  genres,  d’efpeces,  de  
 nom, de  pronom ,  de  verbe ,  &e. &  une multitude  
 d’autres  idées  qui entrent  dans  le difcours  des gens  
 du  cominum auffi bien que des favans. 
 Remarquons  ici que  les  idées de  caufe  ,  d’effét  
 de  fubftance,  de mode,  de  différence,  de  reffem-  
 blance &   autres de  cette  efpece,  ont  ceci  de'  particulier, 
  par une fuite  de  leur plus grand degré d’ab-  
 ftra&ion  ,  qu’elles  font  toujours-les  mêmes  ,  foit  
 qu’on  les tire  de l’idée  d’un  être  corporel  ou  d’un  
 être  fpirituel  ,  où  qu’on  les y  rapporte,  &  qu’ainfi  
 elles  font  d’une  efpece  différente  des  autres idées  
 abjlraites dont nous  avons  parlé d’abord,  qui font  
 moins abjlraites, moins générales ;  ces dérnieres font  
 néceffairement  corporelles  ou  intellectuelles,  félon  
 ia nature  de  l’objet  dont  ôn les  à  abjlraites^  Que  je  
 regarde  l’épée  comme  la  caufe  de  la bleffure j ou  
 mon ame  comme  la  caufe  de ma penféé,   ou  Dieu,  
 comme la caufe de l’univers, l’idée abjlraite de caufe  
 eft toujours la même* Mais que je  penfe  au mouvement, 
  à la couleur, à l’étendue * mon idée fe rapporte  
 néceffairement  à un corps ;  que je  parle de penfée ,  
 de volonté, de defir, mon idée fe rapporte riéceffai-  
 rement  à un efprit.  - 
 Finitions cet expofé,  en remarquant qu’aux fema-  
 tions  &   au  fentiment intime  de ce  qui  fe  paffe  en  
 nous i que M. Locke indique  comme lès deux feules  
 fources de nos idées,  on peut a jouter,  comme  une  
 troifieme  fource féconde d’idées d’un genre particulier  
 ,  l’abftradlion,  quoiqu’elle  doive  avoir  pour  
 s’exercer, les  matériaux  fournis  par  la fenfation ou  
 la réflexion ;  car  il eft  certain que les fens &  le fentiment  
 intime  ne  nous  fourniront  jamais  feuls  des  
 idées abjlraites.  V o y e z   J. "Wats,  Logick.  ejufd.  Phi-  
 lofophical  Ejfai  I I I .  "Wolfii  Pfychologia  Empirica. 
 { G .  M .)   •■ ■ ■ -.  JM  JM 
 •AB SURDE, adj.  (  Gramm. ) qui eft contraire au  
 fens commun. 
 Absurde. \Géom.')  En Géométrie  on  démontre  
 prefque  toutes  les  converfes  en  les  réduifant  à  
 Yabfurde,  c’eft-à-dire ,  en  prouvant que fi la con-  
 verfe  n’étoit  pas  vra ie ,  une  propofition  déjà  démontrée  
 feroit  fauffe.  Or  il  eft  contraire  aü  fens  
 commun, il eft abfùrde,  qu’une propofition démpn-  
 trée  ne  foit  pas  vraie.  ( J. D . C. ) 
 *  Absurdement,  adv.  (  Gramm.  )   d’une  maniéré  
 àbfurde ou contraire  à la raifon. 
 * Absurdité , f. f.  ( Gramm. ) tout ce qui choque  
 le fens commun. 
 §   ABSUS,  f*  m.  ( liijl.  nat.  Botaniq.  )   genre  
 de plante confondu  jufqu’ici  avec la caffe &   le  féné  
 dans  la  famille  des  légumineufes.  Il  différé  de  la  
 caffe par fon fruit, qui n’eft ni cylindrique ni charnu ;  
 &   du  féné,  par  le nombre des  ailerons ou folioles  
 de fes  feuilles  qui  ne  paffe  pas  quatre,  par  fes  
 gouffes  q u i,  quoique plates ,  font  étroites ,  alon-  
 g é e s,  &   par  fes  graines  qui,  au-lieu  d’être  triangulaires  
 &  imprimées de  caraûeres  ,  font rhomboïdates  
 à qüatres  angles .&  liffes. Nous eil connoiffons  
 trois  efpeees. 
 .  Première  'efpece.  ABSUS. 
 Vabfus, proprement  d i t ,  &  figuré  par  Profper  
 Alpin  fous  ce  nom  Egyptien, à  la  pag. ÿ j  de  fon  
 Hijloire  des  Plantes  de  C Egypte,  eft  une  plante  
 annuelle  ,  haute  d’un  pied  au  plus,  qui  fleurit  en  
 Septembre &  Oâobre  dans  les  terres  argilleufes de  
 Podor au Sénégal, oit elle eft moins commune qu’en  
 Egypte.  Elle  s'élève  rarement  bien  droite,  étant  
 penchée  communément  vers  la  terre ,  &  eft  toute  
 couverte  d’un  velouté  de  poils  argentins ,  iuifans »  
 affez longs.  Ses  racines  font  fibreufes,  courtes  
 fort  ramifiées.  Sa  tige  cylindrique  à  à  peine  une  
 ligne  de diamètre , &  eft  partagée  en un  petit nombre  
 de rameaux ,  fur Iefquels  les  feuilles font diftri-  
 buées alternativement &  affez  ferrées,  c°eft-à-dire,  
 près  à  près  ;  elles  font  ailées Amplement,  compo-  
 pofées  de  deux,  paires  de  folioles  fans  impaires  ,'  
 chacune  à  cinq nervures de  chaque  côté  ,  occupant  
 la  moitié fupérieure  dé  leur  pédicule  ,  qui  porte  
 une  glande  ,  c’eft-à-dife,  Une  dertticule  conique  
 élevé entre chaque paire , &  deuxftipuleS fubulées  à  
 fon  originej  Chaque  foliole  forme une ellipfe  fort  
 Courte de  fep't  à  huit  lignes  ,  comme arrondie ,  &C  
 terminée  par  une  petite  pointe* 
 Les fleurs  fortent  au  nombre  de  dëux  Ou  trois  
 en  corymbe  de  l’aiffelle  des  feuilles  fuperieures dé  
 chaque  branche  ,  portant  deux  écailles  au  milieu  
 du pédicule  qui  les  foutierit,  &c une  à  fon.origine»  
 Elles  font  d’abord  rougeâtres,  enfuite  blanchâtres  
 en fe  flétriffant.  Leur  calice  eft  compofé  dé  cinq  
 feuilles  inégales,  caduques , &  leur corolle de cinq  
 pétales  affez égaux. Dix étamines,  dont cinq ftériles  
 peu fenfibles,  &   cinq plus longues.,  égales à  la corolle  
 j  Si terminées par des anthères  quarrées, longues, 
   qui ne  s’ouvrent  qu’à leur  fominet par  deux  
 ’’ trous  qui  répondent  à  deux  loges.  L’ovaire  eft atf  
 centre  dés  étamines,  fo us  la  forme  d’un  cylindre  
 applati,  terminé  par  un  ftile  âffez  long  &   par  un  
 ftygmate  ovoïde*  Cet ovaire  devient  par  la  fuite  
 un  légume  très-applati  ,   long d’un  pouce  au  plus,  
 &  deux fois moins  large, velouté,  blanchâtre, s’ouvrant  
 en deux battans  &  partagé  intérieurement  en  
 deux  à  trois  loges  qui  renferment  chacune  une  
 graine  b run -n oir,  liffe  ,  luifante,  comprimée  eh  
 forme  de  lentille,  mais  rhomboïdale  à  quatre  angles  
 inégaux* 
 Seconde  efpece.  T elamANDU-KOLA. 
 L’efpece de  plante la plus approchante, de  l'abfus  
 eft  celle que  les  habitans de  l’Ifle de Ceylan appellent  
 telamandu-kola  ,  fe Ion  Hermann,  &   que M.  
 Burmann  défigne  à la  page  103  de  fon  Thefaurus  
 Leylanicus,   fous  le  nom  de  galega  quadrifolia  té-  
 lamandu-kola  Zeylanicé  dicta.  C’eft  le fenna  exigu a  
 MaderafpatartaJive tetraphyllafiliquifera glabra , flo -  
 rum pediculis ad exortum foliorum prodeuntibus.  Plu-  
 kenef, Almagejl. pag. 341. Phytographie, planch. Go*  
 jig.  1 ,  médiocre &  incomplette. 
 Elle diffère  de Yâbfus  en  ce  qu’elle  eft liffe partout  
 ,  à feuilles moins pointues au bout,  &  à gouffe  
 un peu  plus petite,  de  la  grandeur  du pois chiche,  
 cicer, renfermant deux  ou  trois graines très-noires,  
 en  lentille  rhomboïdale  à  quatre  angles  ,   du  diamètre  
 d’une  ligne  &  demie. 
 Ufages. Qn cu it, aux Indes, cette plante au défaut  
 de la brede  ou du bajan ,  comme on cuit en  Europe  
 la  poirée  ou  l’épinar ;  fon nom  Ceylanois  indique  
 qu’elle  a  du  goût ,  quoique  cuite fans  beurre*  
 Troifieme  efpece.  GaSDAMINI. 
 Les  habitans de  l’Ifle  Ceylan  appellent  du  nom  
 de  gafdamini  une  troifieme  efpece d’abfus dont M.  
 Burmann  a  donné  une  figure  affez  bonne  quoique 
 incomplette ,  à  la page  213  , planche  ÿ j ,  de  fon  
 Thefaurus  Zeylanicus,  fous  le  nom  de fenna.  qua-  
 drifoli'a, Jîliquâ plana hirfutâ, flore aureo fanguineo. 
 Cette plante  différé  des  deux  précédentes  en  ce  
 que fes  feuilles font  les  feules parties  qui en foient  
 liffes,  &   que  le  poil  de fes  tiges,. de  les  branches  
 &   de  fes  gouffes,  eft  comme  hériffé.  Ses  feuilles  
 font obtufes comme  celles du Telamandu-kola, mais  
 portées  fur  un  pédicule  plus  long.  Ses  fleurs  font  
 purpurines  avec  des  veines  rouges.  Ses  légumes  
 font  plus  longs  &   plus étroits ,  ayant quinze  à dix-  
 huit  lignes  de  longueur  fur  deux  à. trois  lignes de  
 largeur,  &   partagés  en  cinq  à  fix  loges  ,  qui  contiennent  
 chacune  une  graine.  C ’eft  une  gouffe  de  
 cette  efpece  que  Plukenét  a  figurée  à  la  planche  
 Go de fa Pythographie,  fous là lettre d ,  fans aucune  
 defcription. 
 Remarque.  M. Linné  a confondu  ces  trois efpeees  
 dans  fon  Syjlema Naturæ, pag.xS-8 , fous  le.nom de  
 Cafjia ,  abfus,  foliolis  bijugis  fubovatis  :  glandulis  
 dUabus fubulatis inter infima; &  c’eft bien à  tort qu’il  
 dit  ,  page  (fo  de  fon  Flora  Zeylanica,  que  leurs  
 gouffes  font à  une  feule  loge , puifque  dans  la  première  
 &   la  fécondé  efpece  elles  font  à  deux &   
 trois  loges , &  que  dans la troifieme  elles  font partagées  
 en cinq à  fix  loges,  ( M. A  d a n  s o n . ) 
 ABU ,   f:  m.  ( Hijl.  nat.  Botaniq. )  Les  Malays  
 appellent  de  ce  nom,  &   indifféremment  de  ceux  
 de  pijfang-abu  ,  pijfang  fqldado  ,  une  efpece  de  
 bananier  ,  décrit,  par  Rumphe  au  vol.  V.  de  fon  
 Herbdrium' Amboinicum  ,  pag.  132 ,  dont le  fruit  eft  
 ovoïde  , comprimé par les côtés , long de  trois  pouces  
 ,  épais  de  deux pouces ,  cendré de  fa  couleur,  
 vifqueux,  d’un  goût  fadé  ,  mais  qui  devient  fup-  
 portable lorfqu’on le  fait rôtir &  frire. (M . A  d a n -  
 s o n . j 
 ABUB  ,  ( Mujique  injlrument.  des  Hébreux. )  Ce  
 mot  Chaldéen ,  qu’on trouve  dans le  Vieux Tefta-  
 men t,  pour  défigner  Un  infiniment  de  Mufique  ,  
 lignifie,  félon  quelques  Auteurs ,  la  même  chofe  
 que  Hngab  ou  Ugab.  Foye%_  Ugab.  ( Mujique  infiniment. 
   des  Hebreux )   dans  ce  Supplément.  • 
 Kircher ,  dans fa Mufurgie,  fait de  Yabub  un infiniment  
 à  vent  du  genre  des  cornets,  mais  non  
 percé  de  trous  pour  produire  les  différens  tons  :  
 il  ne  cite  aucune  autorité  ;  ainfi  nous  n’en  dirons  
 pas  davantage. 
 Qu elques-uns veulent que Yabub ou abuba, lignifie  
 une  flûte,  &   la même  que  les  Latins  appelaient  
 Ambubaia.  La  grande  reffemblance  des mots  rend  
 très-probable cette  opinion ,  qui  eft  auffi  celle  de  
 D .  Calmet.. 
 .  Un  paffage duTalmud tend  encore à la confirmer.  
 Il y  eft dit que  Y abub étoit un infiniment qui fe trou*  
 voit dans le  fan&uaire  du  temple  de  Salomon ,  &   
 qui avoit  exifté  déjà  depuis  Moyfe.  Il étoit  mince ,  
 uni  &   de  rofeau,  qualités  qui conviennent  toutes  
 aux  flûtes.  De plus,  le  Roi le fit  garnir  d’or  &  le  
 fon  fe  perdit :  on  ôta  l’or  &   le  fon  redevint  tel  
 qu’il  étoit.  La  même  chofe  arriveroit  à  une  flûte  
 mince ; l’or étant un métal très-compaéle &  peu élastique  
 ,  en  rendroit  le  fon fourd  &   trille. 
 D ’autres veulent  encore que Y abub fut la baguette  
 de rofeau dont on frappoit le  tambour des Hebreux,  
 prétendant  que  cette  baguette de  rofeau  rendoit le  
 fon  du  tambour  plus  doux  ;  mais  je  penfe  qu’il  
 faut s’en  tenir  au  fentiment de  ceux  qui  font d'abub  
 une flûte.  (F . D .  C. ) 
 ABU-BEKER okAbu-Becre fH i j l .  des Califes, )  
 premier  calife,  fucceffeur  de  Mahomet,  fut  un  
 de  fes premiers difciples.  Son vrai nom étoit Abdal-  
 Caaba,  que le  prophète  changea  en celui d’Abdala,  
 qui  lignifie  ferviteur de Dieu.  Il  eft  plus  connu fous  
 lè   nom  d Abu - Becre,   qui  défigne  le  pere  de  la 
 pucellé ;  parce-fa fille Aïesha étoit vierge lorfqu’elle  
 éjpoufa le  prophète ,  dont foutes  les  autres  femmes  
 étoient  veuves  lorfqu’elles  entrèrent  dans  fon  lit.  
 Abu-Becre,  illuftre  par  fa  naiffance  &   plus  encore  
 par fes richeffes,  fembla  dégagé  de  toute  affeélion  
 pour les biens  de la terre. Son défintéreffement,  fes  
 moeurs pures &  rigides,  donnèrent beaucoup d’éclat  
 à la  feéle  naiffante  : 1 exemple  d’un homme  de  bien  
 qui  tombe  dans  l’erreur,  répand bientôt là  contagion. 
  Le  vulgaire juge  de  la folidité d’une  opinion,  
 par  l’idée  qu’il  fe  forme  du  mérite  de  ceux  qui la  
 fuivent ;  &   il  ne  croit  pas,  quand le  coeur  eft  fans  
 tache,  que  l’efprit  puiffe  s’égarer^’ Le  nouveau  
 profélite fit fervir fes immenfes richeffes au triomphe  
 de  la religion nouvelle.  Les principaux feigneurs de  
 l’Arabie furent fubjugués par fon exemple ;  &   ce fut  
 à  fon  fanatifme ,  que le prophète  fut  redevable  de  
 la conquête  d’Omar ,  de  Zobeir ,  de  Thela ,  &  de  
 plufieurs  autres  illuftres  Mequois.  Abu-Becre  fut  
 Mufuknan de bonne-foi ;  &  quoiqu’il ait paffé fa vie  
 dans la familiarité du  prophète ,  il  eut pour lui une  
 vénération  qui. ne  fe  démentit  jamais.  Ce  dévot  
 imbécille fe rendit garamdes révélations dontl’impof-  
 teur prétendoit être gratifié,  ainfi que de fon voyage  
 hofturne dans  le  ciel :  c’eft  ce  qui  lui  fit  donner  le  
 nom de Sedit ou de  témoinfidele ; Mahometl’honora  
 encore  du  titre  à’Atik,  qui  veut  dire  prédejliné.  II  
 ne  pouvoit  donner  une  idée  trop  fublime  d’un  
 difciple dont la crédulité réalifoit toutes fes chimères.  
 Ce  fondateur  de  fefte  eut  raifon. de  ch'oifir  pour  
 agent, un ignorant  fufceptible  de  fanatifme  : il  n’au-  
 roit pas  trouvé  fon compte  avec un  philofophe.  Il  
 eft  plus  facile  d’ébranler  l’imagination,  que  de  fé-  
 duire la raifon. 
 Abu-Becre,  fans  avoir  aucune  des  qualités  qui  
 forment  le  grand homme,  fut  chargé  de  toutes  les  
 expéditions qui  fembloient  exiger de  la  capacité.  Il  
 les exécuta avec gloire,  parce qu’il étoit né dans un  
 fiecle  où une valeur brutale étoit  plus néceffaire que  
 des  combinaifons  réfléchies ;  &   comme  il  étoit  
 perfuadé qu’une milice célefte combattoit toujours à  
 les côtés,  il fe précipitoit avec une affurance imprudente  
 dans  tous les périls.  Lorfque  le  prophète  eut  
 rendu le dernier foupir,  fesdifciples entboufiaftes ne  
 purent fe réfoudre à croire qu’il eût fubi la commune  
 loi.  Omar,  entraîné  par  lè  préjugé  populaire,  tire  
 fon fabre,  &  menace de hacher  en pièces les téméraires  
 qui  ofoient  dire  que  le  prophète étoit mort.  
 Toute  la  ville  étoit  en  rumeur ;  Abu - Becre,  plus  
 calme, parle àla multitude féditieufe, &  lui dit : ejl-ce  
 Mahomet que vous adore£, ou  le Dieu qu'il vous a fait  
 connoître ; fâche£  que  ce  Dieu  e(l feul  immortel,  &  
 que tous ceux q u il a créés font fujets  à  la mort.  A  fa  
 voix les  efprits fe calmèrent,  &  l’on ne fongea plus  
 qu’à nommer un fucceffeur.  On  fut  quelque  temps  
 incertain  fur  le  choix.  Le  prophète ,  avant  que  de  
 mourir, avoit chargé Abu-Becre d’officier en fa place  
 dans  la  mofquée ;  &   cette  fonûion  fervit  de  titre  
 pour le  nommerait califat,  au préjudice d’A li, qui,  
 en  qualité  de  eoufin -  germain  &   de  gendre  du  
 prophète, avoit des droits à fon héritage. Ce mépris  
 de la lo i ,  fut  une fource malheureufement féconde  
 des guerres qui ravagèrent les champs de l’Iflamifme.  
 A l i ,  forcé  de  fouferire  à  l’éleétion,  n’en  fut  pas  
 moins  regardé  par fes partifans comme  le  fucceffeur  
 légitime,  &  leur  opinion  s’eft  perpétuée  parmi  un  
 grand  nombre  de  Mufulmans,  qui  prétendent  que  
 l’autorité  fouveraine,  tant  dans  le  temporel  que  
 dans  le  fpirituel,   réfide  dans  fes  defeendans :  c’efi:  
 .l’origine de cette haine invétérée  qui  régné  entre les  
 Turcs &  les Perfans. Abu-Becre prit le titre de  calife ,  
 c’eft-à-dire.,  lieutenant :  ce  titre  modefte  lui  parut  
 convenir  au  fucceffeur d’un  homme  extraordinaire.  
 Les premiers jours de  fon régné furent orageux.  Un