
 
        
         
		pendant  les premières  années de Ton régné,  ne ref-  
 pirer  que guerre ôc carnage ;  fe baigner dans le fang  
 des Mahométans,  démanteler des  places,  faccager  
 des  villes,  changer  de  riches campagnes  en déferts  
 affreux ;  tels furent les exploits par lefquels il fîgnala  
 fa  haine  contre  le Mahométifme.  Las  ou  honteux  
 de  tant  de  dévaluations  ,  ce  guerrier  fanguinaire  
 devint  un  roi doux,  pacifique  ôc  bienfaifant,  plus  
 occupé  du bonheur de  fes  fujets , que de la deftruc-  
 tion  des  infidèles.  11 mourut  en  757,  8c laiffa  fon  
 trône  à  fon  fils  Froïla. 
 Alphonse I I ,  dit  le  chajle,  parce  qu’il fit  voeu  
 de chafteté, voeu plus qu’indifcret dans un monarque  
 5c  un  époux,  monta  fur  le  trône  des  Afturies  en  
 791  ,  par  l’abdication  volontaire de  D. Bermude ,  
 fucceffeur  de  l’ufurpateur Moregat;  5c  eutaffez  de  
 générofité  pour oublier  des injures  dont il  lui  étoit  
 fi  aifé  de  fe  venger,  préférant  le  noble  foin  de  
 fe  concilier  tous  les  coeurs  par  fes  bienfaits,  à la  
 peine  inquiétante  de rechercher des. coupables  qu’il  
 eut été obligé de punir.  Il fit la  guerre aux Maures,  
 mais  ce  fut  pour  défendre  fes  provinces  de  leur  
 fureur;  c’étoit l’àmour de  fon peuple qui l’animoit,  
 ôc  non la  haine de  fes ennemis,. Ce  roi bon 8c  jufle  
 fut  dépofé  par  une  troupe de. faôieux y mecontens  
 de  la  juftice  qu’il faifoit obferver  dans fes  états.  Ils  
 l’enfermerent dans un monaftere. Des citoyens généreux  
 volèrent au fecours de leur monarque,  le tirèrent  
 de fa prifon, 8c le rétablirent fur le trône au bruit  
 des acclamations publiques. Alphonfene fçutfe venger  
 que  par des  bienfaits.  Cette  générofité héroïque  fit  
 rentrer  dans le devoir  ceux qui  s’ en étoient fi étrangement  
 écartés. Après un régné floriffant de 44 ans, ce  
 prince  moins  fatigué  de  la  royauté  qu’épuifé  par  
 les foins pénibles de l’adminiftration, ôc fes longs travaux  
 militaires, affembla les grands du royaume, demanda  
 qu’il  lui fût  permis  de  jouir d’un repos  auquel  
 fon  âge  ( il avoir 70 ans)  5c  fes  infirmités  le  
 condamnoient,  leur  recommanda pour fon fuccef-  
 feur,  Ramire  fon  coufin,  vit  fon choix approuvé,  
 remit  à  celui-ci  les  rênes  du  gouvernement,  Ôc  
 vécut  encore  fept  ans  fimple  citoyen,  obfervant  
 les loix aufli exaftement qu’il les avoit fait obferver. 
 Alphonse III,.furnommé le grand, roi d’Oviédo  
 ôc  de  Léon, monta  fort jeune  fur  le  trône,  ôc vit  
 les premiers  jours  de  fon régné  troublés  par  la révolte  
 de  Froïla,  comte  de  Galice,  qui  obligea le  
 jeune  monarque  à  fuir  devant lui,  ôc à lui laiffer le  
 fceptre.  Mais  Froïla  ne jouit pas long-tems  du fruit  
 de  fon crime,  ayant  été  affaflïné  dans fon palais un  
 peu moins  d’un  an  après  fon  ufurpation.  Alphonfe  
 reprit  les  rênes  du gouvernement,  ôc courut rifqué  
 d’être  détrôné  une  fécondé  fois;  il  réduifit  les rébelles  
 , à la tête defquels étoit le comte d’Eylon. Une  
 continuité  de  vi&oires  fur  les  Sarrafins  illuftrerent  
 la  fuite  de  fon  régné ,  ôc lui méritèrent  le  furnom  
 de grand :  grandeur  fatale  qui  ne  lui  laifla  pas  un  
 moment  de  tranquillité.  Tandis  que  le  fouverain  
 triomphe  hors  dé  fes  états,  le  défordre  s’y   gliffe ;  
 ôc lorfqu’il s’agit  de  réformer  les  abus,  on trouve  
 des  obftacles  qui  entraînent  de  grands  troubles.  
 Les feigneurs  vexoient le  peuple  ;  Alphonfe  voulut  
 borner  leur  autorité.  Plufieurs  fe  révoltèrent,  ôc  
 Alphonfe fe vit contraint  de  tourner contre fes propres  
 fujets,  des  armes  encore  fumantes  du  fang  
 des Maures.  Le fang des rebelles coula fans éteindre  
 le  feu  de  là  rébellion.  Il  eut  la  douleur  de  voir  
 fes  fils  ôc  la reine  fon  époufe  conjurés  contre  lui;  
 ÔC dans cette conjonfture accablante ,  foît  foibleffe'  
 ou  générofité, il  abdiqua  en  faveur  de  D. Garde,  
 l’aîné  de  ces fils  dénaturés,  Ôc  donna  la  Galice  à  
 D.  Ordogne,  le  cadet.  Alphonfe  mourut deux ans  
 après cette abdication,  le 20 décembre de l’an 012.  
 Il  avoit  fait  lui  feul  plus  de  conquêtes  que  tous 
 fes  prédéceffeurs  enfemble ;  fes  états  comprennent  
 les  Afturies  ,  la Galice,  une partie  du  Portugal  ôc  
 de  la  vieille  Caftille  ,  avec  le  royaume  de  Léon. 
 Alphonse  IV,  dit Ve moine,  parce  que,  ne  fè  
 fentant aucune des  qualités  néceffaires pour  régner ,  
 il  abdiqua  la  couronne  en  faveur  de  Ramire,  fon  
 fre re ,  quoiqu’il  eût  un  fils ,  ôc  fe  fit moine  dans  
 l’abbaye  de  Sahagun.  Mais  il  fe  repentit  de  cette  
 démarche ;  ôc  ,  comme  s’il  eût  appris  dans  l’obf-  
 c.urité  du  cloître  ,  le  grand  art  des  rois  ,  il  fortit  
 de  fon couvent,  8c prétendit que Ramire lui rendît  
 la  couronne ;  il  eut des partifans ,  mais  ils  furent  
 bientôt  diflipés.  Alphonfe  abandonné  fe  jetta  aux  
 pieds de  fon  frere qui  lui fit  créverles  yeux  ôc  le  
 fit  étroitement  garder  dans  le  monaftere  de  Saint  
 Julien,  où  il  finit  fes  jours. 
 Alphonse V  n’avoit que  cinq ans lorfqu’il monta  
 fur  le  trône ;  fon  éducation  fut  confiée  au  comte  
 de  Galice  D.  Melando  Gonzalez,  ôc  la  régence  à  
 Dona Elvire ,  mere  ôc tutrice  du monarque  enfant.  
 L’une  ôc  l’autre concoururent à   en  faire un  roi vertueux, 
   doux,  équitable, bienfaifant,  qui gouverna  
 fes  états  en  paix,  ôc  mourut  en  1028  fous  les  
 murs  de  V ifé e,  place  importante de  la  Lufitanie,  
 dans  la  première  entreprife  qu’il  forma  contre les  
 Maures.  Il  étoit  dans  fa  34e  année. 
 Alphonse V I ,  dit  le  brave  ,  réunit  les  trois  
 royaumes  de  Caftille,  de  Léon  ôc  de  Galice,  que  
 Ferdinand le Grand, fon pere, avoit divifés entre  fes  
 trois  fils.  Mais  les Caftillans ne voulurent le recon-  
 noître  pour  leur  fouverain  ,  qu’à  condition  qu’il  
 jureroit de  n’avoir  eu aucune part à la mort du roi  
 fon frere.  Le  Cid ,  ce héros fi célébré par fa valeur  
 ôc la  continuité  de  fes  vi&oires  fur  les  Sarrafins ,  
 reçut  ce  ferment ; ÔC  l’on  aflure  qu’il  exigea ü A lphonfe  
 qu’il  le  répétât  jufqu’à  trois  fois:  hardieffe  
 indifc'rette qui  le nt  exiler parle nouveau roi.  Mais  
 bientôt  le  bruit  de  fes  exploits  le  fit rappeller. 
 La  conquête  de  Tolede  ôc  de  plufieurs  places  
 des  environs  ,  qui. fu b ir e n t   le  joug des Caftillans,  
 ôc  donnèrent  commencement à  une  nouvelle province  
 ,  nommée  la  nouvelle  Caftille,  eft  l’événement  
 le  plus  remarquable  du régné  d’Alphonfe.  Si  
 fes  armes  ne  furent  pas  toujours  vi&orieufes ,  fon  
 courage  ne  brilla  jamais  avec plus d’éclat q u e   dans  
 les  revers.  Ce  fut après avoir  perdu  deux  grandes  
 batailles contre les Maures, qu’il força le Miramolin,  
 vainqueur  du  roi  de  Seville ,  à faire  hommage  de  
 fes  conquêtes  à la couronne  de  Caftille ,  à s’en  re-  
 connoître  tributaire,  ôc  à payer fur le  champ une  
 fomme confidérable.  Ce  fut  après la fatale journée  
 des  fept  comtes  ,  qu’Alphonfe  infirme  ôc  âgé  de  
 75  ans  ,  arrêta un  vainqueur  qui  fembloit  devoir  
 envahir  la  Caftille,  l’infulta  jufques  fous  les murs  
 de  Seville ,  ôc  revint  à Tolede  chargé  de gloire  ôc  
 de  riches dépouilles.  Il y  mourut peu de  tems après,  
 le  premier jour de  juillet  1109. 
 Alphonse le  batailleur,  roi  d’Aragon, ôc  U r r a -   
 que fon époufe,  fille unique ôc héritière d’Alphonfe  
 , V I ,  fe  difputerent  pendant  fept  ans  la  couronne  
 de Caftille : ce qui plongea l’Efpagne dans une guerre  
 inteftine  qui  n’aboutit  qu’à  rendre  vaines  les  prétentions  
 de  l’un  ôc de  l’autre.  La  couronne appar-  
 tenoit  fans  contredit  à  Urraque  par  le  droit  de  fa  
 naiffance.;  ôc  cette  princeffe,  au lieu de la partager  
 avec  le  roi  d’Aragon  fon  époux,  prétendoit  gouverner  
 feule la Caftille  ôc  fes autres états. Alphonfe  
 cependant  n’avoit  époufé Urraque que  pour réunir  
 toute l’Efpagne chrétienne fous un feul maître ; auflî  
 prit-il le  titre  d’empereur des Efpagnes, à   l’exemple  
 de  fon  beau-pere.  Mais  Urraque  avoit  un  fils  de  
 fon premier m ari, Raimond de Bourgogne.  Ce fils,  
 exclu du trône par  une  volonté  aflez bifarre  de  fon  
 aïeul,  étoit  élevé  dans  la  Galice  qu’on  lui  avoit 
 laiffée 
 laiffée pour apanage  avec le titre  de  comte.  Tandis*  
 que  lès  deux  époux fe faifoient une guerre  cruelle,  
 les  Galiciens  reconnurent  l’infant  pour  fouverain,  
 ôc le  couronnèrent à Compoftelle.  Bientôt il eut un  
 parti confidérable.  Le Roi  d’Aragon jugea  à propos  
 de  laiffer  la mere  ôc le  fils aux prifes,  ôc de  fonger  
 à  agrandir  fo*n  propre  royaume par  des  conquêtes  
 fur les Maures.  La  reine Urraque mourut;  fon  fils,  
 aidé  du  pape  C a lixte ll,  fon  parent,  força  le  roi  
 d’Aragon  à  lui  reftituer,  par  un  traité,  les  places  
 qu’il  occupoit  encore dans la  Caftille.  Voy.  ci-aprhs  
 Alphonse I ,  roi d’Aragon. 
 Alphonse VII, roi de l’ancienne ôc de lanouvelle  
 Caftille ,  de  Lépn,  des  Afturies  ôc  de  la  Galice,  
 fe fit couronner empereur des Efpagnes,  à Tolede,-  
 en  113 5  ;  il  fut le quatrième  ôc le dernier qui porta  
 ce  titre  faftueux ;  îl'fignoit  Ildefonfus  pius ,  fe lix ,  
 augujlus, totius Hifpanice imperator.  C’eft cette affectation  
 qui  le  fait  furnommer  l’empereur par les  hif-  
 toriens  d’Efpagne.  Il mourut  en  1157 ,  après avoir  
 divifé  fes  états  entre  Sanche, .fon fils aîné,  à  qui il  
 donna  les  deux  Caftilles,  ôc  Ferdinand  qui  eut  en  
 partage  le  royaume  de  Léon  ôc  de  Galice. 
 Alphonse  V III,  dit  le noble  ou  le bon ,  roi de  
 Caftille, n’avoit que quatre ans lorfqu’il monta furie  
 trône.  Sa  minorité  fut  orageufe ;  fes  états  furent  
 démembrés.  Mais ayant atteint fa  quinzième année,  
 il fut déclaré majeur en  1166 par  les  états-généraux  
 du  royaume  de  Caftille  affemblés à  Burgos,  ôc reconquit  
 rapidement  tout  ce  que fes voifins avoient  
 ufurpé  fur  lui  pendant  fon  enfance.  En  1176,  A lphonfe  
 tourna toutes  fes  forces  contre  les  Maures ,  
 dans  le  deflèin  de les  chaffer de  l’Efpagne  ;  il fuivit  
 fi conftammentce  projet,  que quand les rois d’Aragon  
 ,  de  Navarre  ôc  de  Leon  fe  liguèrent  contre  
 lui  en* 1 1 9 1 ,  il  leur  demanda  la pale,  ôc fut aflez  
 heureux pour  changer la  ligue en  une  croifade dont  
 il fe déclara le chef.  Cependant il perdit une  grande  
 bataille  contre  le  Miramolin  ,  en  1195.  On  aflure  
 que  vingt  mille  hommës  d’infanterie  ôc  toute  fa  
 cavalerie  refterent  fur  le  champ  de  bataille.  La  
 journée  de  Marandal  en  12 12 ,  le  vengea  de  cette  
 défaite.  Les  hiftoriens  difent  que cent mille  Maures  
 y   perdirent  la vie. -La  pefte  ôc  la  famine  qui défo-  
 loient alors l’Efpagne, ôc fur-tout l’armée d’Alphonfe,  
 l ’empêcherent de  tirer  de fa vi&oire  tout l’avantage  
 qu’il  eût  pu  en  efpérer  dans  des circonftances plus  
 favorables.  Ce  prince  mourut  en  12 14 ,  âgé de  60  
 ans. 
 Alphonse  IX  ,  roi  de  Léon  ,  des  Afturies  ôc  
 de  Galice,  fils  de  Ferdinand,  roi  de  Léon,  ôc de  
 Donna  Urraque,  infante  de  Portugal,  forcément  
 répudiée  par  fon  époux  ,  fuccéda  à  fon  pere  en  
 1188.  Tour-à-tour allié ôc  ennemi  dès  rois  de Caftille  
 ,  tantôt  il  leur  fit la  guerre,  ôc  tantôt il joignit  
 fes  armes  aux  leurs  contre  les  Sarrafins.  Plus heureux  
 lorfqu’il  combattit  les  infidèles,  que  lorfqu’il  
 porta  les  ravages  de  la  guerre  dans  les  états  des  
 princes  chrétiens,  il  ne  contribua  pas  peu  à  affoi-  
 blir  la  puiffance  des  Maures  en  Elpagne , ■ par  les  
 conquêtes  qu’il  fit  fur  eux.  Il  mourut  en  1230,  
 après  un  régné  de  42  ans. 
 Alphonse X , furnommé lefage, ou  Tafronome,  
 fils  de  Ferdinand  I II,  lui  fuccéda  en  1252.  Peu  
 fatisfait de  la  couronne  de  Caftille ,  il  fe  laiffa aller  
 à l’ambition indiferete  d’y  joindre la couronne impériale  
 ; démarche inconfidérée, qui caufa fon malheur  
 oc  celui  de  l’état.  Il fut réellement élu empereur en  
 I2,57> Pa fla  faélion  de  quelques  feigneurs  Allemands, 
  qu’il gagna par fes profufions; mais il  ne  put  
 pas  foutenir  efficacement cette  prétendue ■ éleâiori ;  
 ôc  l’or qu’il prodiguoit  à des étrangers,  il l’amaffoit  
 par des impôts exceffifs, dont ilehargeoit fes  fujets,  
 ÔC  en retenant les appointemëns des  principaux officiers  
 de  la  couronne. On commença par murmurer  
 dans  la  Caftille ;  puis on  confpira.  Alphonfe  tâcha  
 en vain d’appâifer cette révolte, à la tête de  laquelle  
 é to i t  l ’in fant Don Philippe.  Jaloux de  fe faire recon-  
 noître  empereur,  il  vouloit partir  pour  l’ Ita lie   ;  il  
 promit  aux  révoltés de les fatisfaire, ôc leur donna  
 de  1argent  :  ceux-ci  profitèrent  de  la  crainte  qu’ils  
 •  lui  infpiroient,  pour  fortifier  leur  parti. Alphonfe  
 couroit r ifq u e   de perdre la couronne qu’il poffédoit,  
 en  pôurfuivant  celle  qu’il  ne  devait  pas  pofféder.  
 Heureufement  pour  lui,  l’élévation  de  Rodolphe  
 de Habsbourg au trône impérial, fit évanouir toutes  
 les  efpérances du roi de  Caftille.  Il  revint dans  fes  
 états,  gagna  les mécontens  à  force  de,dons  ôc  de  
 prom'ëffes  ;  mais il laiffa un  levain de rébellion dans  
 les  èfprits. 
 Don Ferdinand étoit mort, ÔC laiffoit deux  enfans,  
 qui dévoient naturellement hériter des droits de leur  
 pere ,  déclaré  fuccëfleur d'Alphonfe:  mais Don San-  
 chë,  frerè de  Ferdinand,  conçut le  perfide  projet,  
 non-feulement  d’être déclaré héritier du trône,  préférablement  
 à  fes neveux, mais  encore de détrôner  
 fon  pere.  Ce  fils  ingrat réuffit  à  fe  faire  déférer le  
 titre  de  r o i ,  par  les  états/affemblés  à   Valladolid.  
 Alphonfe fe, ligua avec le  roi  de Maroc, qui  ne  put  
 le rétablir fur le  trône.  Il maudit  fon  fils, le  déshérita; 
   puis  rétra&a  cette  exhérédation  ,  ôc  mourut  
 dè  chagrin  en  1284.  Ses  tables  agronomiques  ,  
 connues  fous  le  nom  de  Tables  AÏphonfines,  lui  
 avoient  mérité  le  furnom dlAfronàme.  Le code  des  
 lo ix,  qu’il forma  ôc publia , lui  firent  donner  celui  
 de fage,  dont  il  ternit  la  gloire  par  la  folle  ambition  
 qu’il  eut  d’être  empereur  d’Allemagne. 
 Alphonse X I , furnommé le  vengeur,  fils de Ferdinand  
 IV ,  lui fuccéda  aux  royaumes  de  Léon  ôc  
 de  Caftille  en  13 12 ;  il  ne.faifoit,  pour  ainfi  dire,  
 que de-  naître,  lorfque fon pere mourut;  ôc  tout  le  
 tems  de  fa  m in o r ité   fu t   une  c o n tin u ité   d’in t r ig u e s ,   
 de  cabales  ,  de  révoltes  ôc  d e '  g u e r r e s   ihteftines.  
 L’Efpagne  chrétienne  fut  alors  dans  la  fituation  la  
 plus  déplorable.  Alphonfe  devenu] majeur ,  s’arma  
 d’une, fé vérité  peut-être  trop  duré,  maisjugée né-  
 céffaire ,.pour  faire  rentrer  les  grands dans, le  devoir. 
   Ce  prince  ajouta même  quelquefois  la  rufè  
 .ôc la  trâhifon  à  la rigueur. Ces moyens v io l e  ns n’eurent  
 pas tout l’effet qu’il en attendoit : il ne put jamais  
 détruire  entièrement  le  levain  de '  r é b e llio n - ,  qui  
 fermentoit  depuis  le  régné  de  F e rd in an d   III.  Là  
 rigueur  de  fes  jugeinens  lui  mérita  le  furnom  de  
 vengeur;  titre  plus  terrible  que  glorieux.  Alphonfe  
 fe fignala contre  les Maures : la bataille de  léSalado,  
 où  fon  armée  combinée  avec célle "du  r o i   dè  Portugal  
 ,  tua plus  de deuxcënç mille M a u re s  yôcfit un  
 nombre  incroyable  de. prifonniers ,  è ft   c é lé b r é   dans  
 les  annales  de  fon  régné.  Les hiftorieris  affûtent que  
 cet  horrible  carnage  couvrit  dé cadavres  tous  les  
 chemins,  à  plus  de  trbis lieues à:  la  fonde. Alphonfe  
 prit  enfuite  Algezire ,  place  forte dè  T À n d a lô u f ie   ,  
 lur  la   c ô t e   du  détroit.de  Gibraltar.;'ôc  peut-être  
 eut-il  conquis Gibraltar même,  fi la  pefte n’ëût terminé  
 fes jours,  lorfqu’il  en  faifoit  le  fiege  en  1350.  
 Les Caftillans  le  regrettèrent: fa grande  févérité devint  
 alors  un  fujet d’éloges.  On  jugea  qu’elle avoit  
 pùrgé la Caftille des brigands qui l’infeftoient, donné  
 une nouvelle force aux lo ix, réformé un grand nombre  
 d ’abus  dans  l’adminiftration  dé  la  juftice,  ôc  
 fouvent réprimé la tyrannie  des  grands  qui  oppri-  
 moient  le  peuplé,  ôc  faifoient des ufurpations inju-  
 rieufes à   la  couronne.  Il n’eft pas fur que la douceur  
 eût  produit les mêmes  effets, dans  un  tems où i’ef-  
 prit  de  révolte  animoit  prefque  tous  les  grands.  
 Plaignons  un  roi  qui  fe  voit  dans  la  dure  nécëflité  
 de  faire  couler le  fang  des  plus  puiffans  de  fes fujets, 
   pour affurer la  tranquillité  ôc  le bonheur  des  
 S s .