
 
        
         
		Alexandre  III »  en  1 1 7 7 ,  a  été  ainfi  nommé de  la  
 ville  $Alcantara,  conquife  fur  les  Maures  par Al-  
 phonfe 1X ,  roi de Leon, l’an  1212 ; lequel la  donna  
 en  garde  à  dom  Martin  Fernandès  de  Quintana,  
 douzième grand-maître  de l’ordre de Calatrava  , qui  
 remit cette place aux  chevaliers de  S.  Julien du  Poirier  
 ,   lefquels  prirent  alors  le  nom  d'Alcantara, 
 Après  la  défaite  des  Maures  8t la  prife  de Grenade  
 ,  la grande  maîtrife  de l’ordre  d'‘Alcantara fut  
 réunie  à  la couronne  de  Caflille, par  Ferdinand  SC  
 Ifabelle,  en  1 4 8 9 .  . 
 Les  chevaliers  d'Alcantara  demandèrent dans  Ce  
 te ms  la  permilïïon  de  fe marier,  8c  ils  l’-obtinrent  
 du  pape  Innocent  VIII. 
 La  croix de  cet ordre eft d ejtnople  &  fleurdelifle ;  
 un  écujfon  ovale,   et or  au  centre  de  la croix ,  chargé  
 déun poirier du premier émail. PL  X X I I I  -, fig.  14*  du  
 blafon dans le  Recueil des planches du  Diclionn.  raif.  
 des. Sciences,  Arts& Métiers.  ( G.  D .  L.  T. ) 
 ALCATILE,  ( Géogr.,)  ville  des  Indes au royaume  
 de  Carnato -,  au midi de Cangivouran ,  au  couchant  
 de  Madras ,  &  à l’orient de  Velour.  C’eft une  
 grande  ville ,  mais fale  &  mal  peuplée , comme  la  
 plupart  des  villes de  l’Inde.  ( C .A . ) 
 AL-CATIPF  ,  ou  A l-k a t if   ou  El-k a t i f ou  
 C a t if  ,  ÇGéogré) ville d’Afie dans l’Arabie Déferte,  
 fur le  golfe  Perfique ,  à  fix journées  de  Baflora  au  
 fud.  Elle eft entourée  de murs  8c de foflès,  &  communique  
 avec  la  mer  par  un  canal  que  les  plus  
 grands vaiffeaux  peuvent  remonter quand  la marée  
 eft haute. Il croît,  aux  environs,  une  grande  quantité  
 de  dattes ,  &   il  s’y   fait  une  pêche  de  perles  
 dont  le  profit appartient au shérif de Médine.  Long.  
 6y.  lat.  z5 ,  30.  {C .  A .} 
 ALC AUD E TE ,  ( Géogr. )  très-jolie  petite  ville  
 d’Êfpagne dans l’Andaloufie  au diftrid  de  Cordoue.  
 Elle  eft  au  milieu  d’une belle plaine  très-fertile entre  
 le Guadalquivir &  la Marbella, au fud-fud-eft de  
 Cordoue.  Long.  14  ,  20.  lat. 3 7  ,  j J .   ( C. A. ) 
 ALCESTE ,  (  Myih. )  fille de Pélias  8c  d’Anaxa-  
 b ie ,  étant recherchée en mariage par un grand nombre  
 d’amans , fon pere pour fe défaire de leurs pour-  
 fuites ,  dit  qu’il ne la donneroit qu’à célui qui pour-  
 roit  atteler  à  fon  char  deux bêtes  féroces de  différente  
 efpece,  &  promener Alcefle  deffus.  Admete,  
 roi  de Theffalie,  qui étoit fort amoureux de  la prin-  
 ceffe ,  eut  recours à Apollon :  ce  dieu avoit été autrefois  
 fon  hôte  8c  en  avoit été  bien reçu ;  aulïï fe  
 montra-t-il  reconnoiffant  en  cette  occafion,  car  il  
 donna à Admete  un  lion &   un  fangüer  apprivoifés,  
 qui  traînèrent  de  compagnie  le  char  de  la  prin-  
 ceffe. 
 Alcejle accufée d’avoir  eu  part au meurtre de Pé-  
 ia s ,  fut  pourfuivie.par  A cafte,  fon  fre re,  qui fit  
 la  guerre  à  Admète  ,  le prit  prifonnier  ,  8c  alloit  
 venger  fur  lui  le  crime  des  filles  de  Pélias,  lorf-  
 que la généreufe Alcejle  alla  s’offrir  volontairement  
 au  vainqueur pour fauverfon époux. Acafte  emme-  
 noit  déjà  Yolchos  la  reine  de  Theffalie,  dans  le  
 deffein  de  l’immoler aux mânes  de fon  pere ,  lorf-  
 qu’Hercule ,  à la priere d’Admete,  ayant  pourfuivi  
 Acafte  ,  l’atteignit  au-delà  du  fleuve  Achéron ,  le  
 défit  8c  lui enleva Alcejle pour la  rendre à fon mari.  
 -La fable  dit  qu’Alcejle  mourut  effedivement  pour  
 fauver  fon mari,  8c qu’Hercule  ayant rencontré  la  
 mort,  combattit  contr’e lle ,  la  vainquit,  8c la lia  
 avec  des  chaînes  de  diamant  jufqu’à  ce  qu’elle  eût  
 confenti  de  rendre  Alcejle  à  la lumière du jour.  Allégorie  
 affez  jufte ; car délivrer une  perfonne prête  
 à  perdre  la  vie ,  n’eft-ce  pas  l’arracher des bras de  
 la  mort ?  on parle ainfi  tous  les  j.ours  fans  fi&ion.  
 Mais  ce qui  aidoit encore  à Bla  fab le,  c’eftqu’AÏ-  
 ujle avoit déjà paffé le  fleuve Achéron avec Acafte,  
 lorfqu’Hercule la délivra. Homere furnomme Alcejle 
 la  Divine;   fans doute,  dit madame  D a c îe r ,  parce  
 qu’elle  aima  fon mari  jufqu’à  vouloir mourir  pour  
 lui  fauver  la  vie.  Euripide ,  qui nous a  donné  une  
 tragédie dont  le fujet  eft  le  dëvouem'ent  ôé Alcejle à  
 la  mort  pouf  fon  mari,  traite  autrement  cette  fable. 
   Admete,  dit-il,  feuvé.par Apollon  qui  avoit  
 trompé les parques j  enforte  qu’il  ne  lui  étoit  plus  
 libre  de  mourir, fut contraint de  chercher une autre  
 viéfime de  la mort :  tous  fes  proches refuferent de  
 l’ê tre,  il  ne  reftoit  qu'Alcejle  :  elle  fe  dévoue  8c  
 les  parques  l’acceptent. Sur  quoi  Platon,  dans  fon  
 Banquet, fait cette réflexion finguliere ; Alcejle  feule  
 eut  le  courage  de  mourir  pour  fon  mari,  quôi-  
 qu’Admete  eût  fon pere 8c fa m ere,  que l’étrangere  
 furpaffa* tellement  en  amour,  qu’elle  fit  bien  voir  
 qu’ils  n’étoient  liés  à  leurs  fils  que  de  nom  ,  8c  
 qu’ils  étoierit  véritablement  étrangers  à  fon  égard.  
 ( + ) 
 ALCHABUR  ,  ( Géogr.}  ville d’Afie dans le Diar-  
 bekir. Elle eftfur,le fleuve  de  l’Euphrate,  au  fud-eft  
 d Alep, 8c au fud-oueft  de  Mozul, dans une fituation  
 fort agréable 8c  fort commode.  Elle  fert  d’entrepôt  
 &  de  féjourauxcaravannes qui viennent de  Baffora.  
 Long,  y  5 ,  40.  lat.  34 .  Il  y   a une  riviere du même  
 nom  dans  le  même  pays.  (  C.  A .} 
 ALCHAMARUM,  ( Géogré)  ville  d’Arabie.  Elle  
 eftfituée près du fleuve Ormannus, fur un montagne  
 dont  le  penchant eft environ de4ooo pas. L’abord en  
 eft  fi  difficile  que  deux  hommes peuvent en garder  
 les  avenues.  Le  fommet  en  eft  très-fertile  &  fournit  
 à  cette  ville  toutes  les  provifions  néceffaires.  
 C ’eft  la  réfidence  d’un  roi  Arabe.  (C .  À.') 
 ALCIBIADE,  ( Hijl.  des  Athéniens; )   ce  prince  
 Athénien defeendoit  d’Ajax, 8c  fon  origine du côté  
 de  fa mere  n’étoit pas  moins glorieufe ,  puifqu?elle  
 étoit de  la famille des Alcméonides, la plus illuftre de  
 l’Attique.  U faut qu’il ait fixé l’attention de fon fîecle,  
 puifque l’hiftoire  eft defeendue  dans tous les  détails  
 de  fa vie , 8c qu’elle nous a.tranfmis jufqu’au nom dé  
 fa  nourrice  Sc  de  fon  inftituteiir.  La  nature  en  le  
 formant  reunit  toutes  fes  forces  pour  en  faire  un  
 homme  accompli.  Des  traits  nobles &   intéreffans  
 des grâces touchantes foutenues de tous les dons du  
 génie 8c de  l’aménité  du caradere, lui  affurérent un  
 empire abfolu fur les coeurs &  les efprits. Né avec toutes  
 les pallions, il les affervif à fon ambition, &  Pro-  
 tée politique, il  fut  tour-à-tour altier &  populaire  
 intempérant &  frugal, décent 8c licentieux. Toujours  
 différent  de  lui-même,  il ne  fut  que  ce  qu’exigeoit  
 le moment.  Sa beauté  n’éprouva point les  outrages  
 du tems  ,  &   par  un privilège  exclufif, il  fut  plaire  
 dans fon été comme dans fon printemS.  Il eft difficile  
 de ne pas  abuferd’un fi riche partage;  auffi  fut-il  le  
 .corrupteur  des moeurs  publiques.  Il  prêta à  la  débauche  
 les grâces  de  la volupté; &  les  vices, pour  
 ainfi dire  annoblis par fes exemples, n’offrirent  rien  
 de  rebutant.  Les  inclinations  de  fon  enfance  mani-  
 fefterent  ce  qu’il  feroit pendant  tout le cours de fa  
 vie. Un jour  qu’il  luttait  contre  un  de  fes compagnons  
 ,  il  fe fentit fi vivement preffé  qu’il le  mordit  
 au bras, comme  s’il eût voulu le dévorer. L’offenfé  
 s’écrie : ah traître !  tu mords comme une femme; dis plutôt  
 1  comme un lion,  répond  Alcibiade.  Dans  une  autre  
 occafion qu’il  jouoit  aux  offelets  dans  la  rue,  un  
 charriot  vint à paffer, il prie le condudeur d’arrêter  
 un moment ;  mais  ce  charretier  fans  complaifance  
 preffe plus  vivement  fes  chevaux : tous les  compagnons  
 d'Alcibiade fe difperfent, &  au lieu de  les imiter  
 ,  il fe couche  .devant  la roue,  en difant : malheureux  
 , p  ajfe, ( i  tu  Lofes.  C es  détails  qui  parorffent  
 minutieux, font bien dignes d’être obfervés par ceux  
 qui  préfident  à l’éducation  de la jeuneffe. Quoiqu’il  
 fût- naturellement impérieux, l’avidité de tout fa voir  
 le  rendit docile à la voix  de fes maîtres ; 8c  ce  fut  à 
 l’école de Socrate qu’il développa  le germe heureux  
 -de fes taiens. Alcibiade, beau  8c voluptueux,  donna  
 lieu à la malignité  de  croire  que  cette  union  étoit  
 fondée  fur  une  paffion  proferite  par  la  nature ;  8c  
 •la licence  de  fes  moeurs  accrédita ces bruits  calomnieux. 
   Tous  fes  contemporains  fe  réunifient  pour  
 dépofer qu’il  étoit  fouillé  de  Ce vice ; mais eft-il  à  
 prëfumer  qu’il  eût  donné la préférence  à  un philosophe  
 grave  &  rigide  fur tant de  jeunes voluptueux  
 qui briguoient l’avantage de lui plaire ? Quoi qu’il en  
 foït,  Socrate  lui .devint  néceflaire ,   il  t’affocia dans  
 tous  fes  amufemens.  La  bonne  chere  lui  devenoit  
 infipide ,  s’il ne  la partageoit  avec le philofophe qui  
 l’accompagnoit  à  la ville  &   à  la  campagne,  &  fous  
 la  tente. Il fe trouva  avec  lui à  l’expédition de  Poti-  
 dée, où Socrate montra que,  s’il favoit differter fur le  
 m épris de  la  vie , il favoit auffi méprifer la mort. Le  
 prix  de la valeur lui auroit été adjugé, mais les généraux  
 le déférèrent à Alcibiade qui  avoit  montré  autant  
 dé courage,  &   qui  lui  étoit  fupérieur  par  la  
 naiffance  ;  &   dans  une  autre  occafion  oii  l’armée  
 Athénienne fut défaite, Socrate à pied fut rencontré  
 par Alcibiade, qui, ne Voulant point abandonner fon  
 ami,  lui  fervit de  rempart  contre  une  troupe d’af-  
 faillans.  Quoique  l ’éleve  eût  beaucoup  d’attachement  
 pour  fon maître,  il  fe déroboit  quelquefois à  
 fa vigilance  pour fe livrer fécrétement  à  la  licence  
 de fes  penchans.  Socrate  le  pourfuivoit  comme  un  
 ■ efclave fugitif de  la maifon de fon maître.  Son  goût  
 pourries  beaux-Arts  alloit  jufqu’à  l’enthoufiafme :  
 étant entré dans l’école d’un grammairien:,  il  lui demanda  
 un  Homere ; il  lui donna un  foufflet pour le  
 punir de n’avoir pas un fi  beau modèle à offrir  à fes  
 éleves.  Un autre pédagogue  lui montra un  Homere  
 corrigé de fa main : quoi ! lui dit-il, tu te crois capable  
 dé ôter les  taches a  un J i beau génie,  &   tu  Lamufes  à  
 enfeigner des enfans !  tu dev roisplutôt P occuper à former  
 le  coeur des rois &  des miniJlres. Sa naiffance lui Ouvroit  
 le chemin aux plus hautes dignités , il  ne voulut  être  
 redevable de  fon élévation qu’à fes taiens. Ce fut fur-  
 tout par fon éloquence qu’il ambitionna de fubjuguer  
 les fuffrages. Une imaginationjiante &  féconde, une  
 prononciation gracieufe &  facile, un  gefte  noble &   
 décent afîuroientle triomphe de fon éloquence. Egalement  
 jaloux de plaire au peuple que le fafte féduit.,  
 il noiirriflbit  lès  plus  beaux  chevaux  pour difputer  
 le  prix  dans les jeux  de  la  Grece, &   fes  charriots  
 furpaflbient en magnificence  ceux  de  tous  les  rois  
 qui en envoyoient aux jeux olympiques. Il y  fut deux  
 fois couronné, &  les villes  lui  firent de magnifiques  
 préfens.  La  réputation  de Nicias,  qui  le  furpaffoit  
 en éloquence,  choquoit  fa  fierté.  Tout  moyen  lui  
 parut légitime pour lefupplanter;ille décria comme  
 le  partifan fecret &  mercénaîre des  Lacédémoniens*  
 Nicias devenu fufpeft, fut obligé de partager le commandement  
 avec  Lamachus  &   Alcibiade.  La Sicile  
 devint  le  théâtre  de  la  guerre.  Athènes  épuifa  fes  
 tréfors pour lever des foïdats &  des matelots.  L ’ardeur  
 de  s’enrôler faifoit  envifager de grands  fuccès.  
 La diverfité  des  cara&eres  des  généraux  affoiblit  le  
 commandement. Nicias,  circonfpeft jufqu’à  la timidité  
 , voyoit les difficultés fans découvrir les moyens  
 de  lès furmonter.  Alcibiade audacieux jufqu’à  la  témérité  
 , paroiffoit affuré de vaincre,  s’il pôuvoit réfoudre  
 fes collègues à combattre. Son éloquence  les  
 tira de  leur affoupiffement,  &   leur réveil fut  fuivi  
 de la vi&oire. Tandis qu’il  triomphoit en Sicile,  on  
 1 aceufoit  à  Athènes  d’avoir  mutilé  les ftatues  -des  
 dieux,  &  d’avoir profané les myftereS facrés.  Celui  
 que  l’on  avoit révéré comme le héros  de là  patrie,  
 fe vit abhorré  comme  un  facrilege,  digne  d’expirer  
 fous  le  glaive  de  la  loi.  Sa  religion  étoit  fort fuf-  
 pea e  ;  on l’avoit  déjà  accufé  de  faire  fervir  dans  
 fes banquets  les  vafes  facrés  qu’on  portoit dans les  
 Tome  /, 
 procédions, &   cette accufatiOn donna  dé  la probabilité  
 à  la  fécondé. Les Athéniens aveuglés  par  leur  
 zele, fermèrent les yeux fur le cara&ere des témoins.  
 •Tout  fut  admis,  rien  ne  fut difèuté,  parce  que  la  
 fuperftition  fe  difpenfe  de  tout  examen.  Tous  les  
 profanateurs  furent condamnés  à la mort. Alcibiade  
 eut ordre de  quitter l’armée, pour  aller fe juftîfier à  
 Athènes : il s’embarqua avec fes amis, 8c affefta une  
 confiance qu’il  n’avoit  pas ,  parce  qu’il  connoiffoit  
 fes  ennemis.  La  crainte  d’être  livré  à  un peuple  fanatique  
 ,  l’engagea de débarquer  à  Thurie,  8c  à  fe  
 fouftraire  à  la  vigilance  de  fes  conducteurs.  Les  
 Athéniens  furieux  d’avoir manqué  leur proie, prononcèrent  
 fon  arrêt  de  mort  ôc  la  conhfcatiôn  de  
 fés  biens.  Ce  fut  ainfi  que  ce  peuple  voluptueux,  
 jour  rélever  quelques  ftatues  ,  renverfa  la  co-  
 onne  de  l’état.  Les  foïdats, privés  de  ieur  chef*  
 tombèrent  dans  l’abattement :  la  flotte  des  Athéniens  
 fut détruite,  &  Nicias périt par la main de  fes  
 ennemis  qui  dévoient refpeàer  fa  vertu.  Alcibiade  
 retiré à Sparte , leur fufèitoit par-tout  des  ennemis :  
 mais fans  frein dans fes  paffions,  il  féduifit Timée,  
 femme du roi A gis, qui lui avoit donné l’hofpitalité.  
 Après avoir trahi  fôn hôte  &  fon proteéleur, il crut  
 avoir tout à redouter de  fes vengeances :  il  fe  retira  
 dans  le Peloponnefe,  mais  les  peuples  alarmés  de  
 pofleder un homme fi dangereux par l’art de  féduire,  
 confpirerent fa mort. Alcibiade, inftruit de leur complot, 
   fe  réfugia vers Tifapherne, gouverneur  de  la  
 baffe Afie.  Sa dextérité &  fa foupleffe  infinuante, le  
 rendirent bientôt l ’ami de  fon nouveau  prote&eur ;  
 &  il fie fervit à  l’avantage  de  fa patrie  de  l’afcendant  
 qu’il ùfurpa fur le  Satrape. Il ménagea aux Athéniens  
 l’alliance  des  Perfes  contre  les  Spartiates  &   leurs  
 alliés,  qui  n’éprouverent plus que des revers. Quoique  
 comblé d ’honneurs dans une  terre d?ex il,  il con-  
 fervoit  un  tendre  attachement  pour fa  patrie ,  qui  
 l’âvoit  retranché  de  fon  fein  ;  &   il  aimoit  mieux  
 qu’elle  fût  ingrate  envers  lu i ,  que  d’être  Criminel  
 envers  elle. L’idée que les Athéniens avoient de  fon  
 crédit,  leur  fit  defirer fon retour  :  il leur répondit,  
 non avec -la modeftie d’un banni, mais avec la fierté  
 d’un vainqueur qui preferit des  loix.  Il déclara  qu’il  
 fe  priveroit  de  la  confolation  de  revoir  fa  patrie,  
 tant que le gouvernement feroit démocratique, pour  
 ne  pas être une fécondé  fois la  victime  d’une popu*  
 lace  infblente  qui  l’avoit  perfécuté  après  ravoir  
 fervie.  C e   Fut  à Samos,  au  milieu  du  tujpulte  du  
 camp,  que  la  conftitution  d’Athenes  fut  changée;.  
 P-ifandre  affuré de  l’armée,  fe  rendit dans  Athènes,  
 où il  força  le peuple  à remettre  l’autorité illimitéë  
 entre  les mains de  quatre Cens nobles q u i,  dans des  
 circonftances  critiques , ferOient  obliges  de  convoquer  
 cinq mille citoyens, pour  délibérer  fur les be-  
 foins de  l’état*  Les  nobles  envahirent tout  le  pouvoir, 
  8c  Alcibiade ,  dont  ils redoutoient  les  taiens,  
 ne  fut point  rappellé.  Les  prifons  furent  remplies  
 de citoyens généreux*  Athènes  eut  autant  de bourreaux  
 qu’elle eut de tyrans. L’armée  apprit  avec indignation  
 que  le  peuple  avoit été  dépouillé de  fes  
 privilèges. Les foïdats  qui  étoient  citoyens,  dépo*  
 fent leurs généraux 8c rappellent  Alcibiade.  Le peup 
 le  confirme  leur choix,  8c d’une  voix  unanime  il  
 eft élevé au commandement. Il ne  voulut point que  
 fon rappel  fût  regardé  comme  une  grâce,  8c  il  ne  
 rentra dans  fa  patrie  que  fuivi  de  la  vidoire.  La  
 fortune ne l’abandonna pointpendanteette campagne,  
 8c les Peloponéfiens furent obligés de  lui céder l’empire  
 de  la  mer.  Alors,  il  fe montra  dans  Athènes,  
 précédé des prifonniers qu’ilavoit faits» Les dépouilles  
 8c  les  débris  de  deux  cens  vaiffeaux  ornoient  fa  
 pompe  triomphale.  Les  Athéniens attendris  fe  reprochoient  
 les  outrages  qu’il  avoit  effuyés.  Cette  
 ivreffe  d’admiration  fut bientôt  diffipée ; le  peuple  
 K k i j