fous prétexte des hoftilités exercées fur le territoire
des Arcadiens par Aratus , déclara la guerre aux
Achéens : lès avantages qu’il remporta fur eux , les
forcèrent d’accepter la paix aux conditions qu’il
prefcrivit lui-même ; il exigea d’être reconnu gené-
ràliflime de la ligue. Aratus accoutumé au commandement,
regarda cette condition comme un
outrage ; & ce fut pour en prévenir l’effet, qu’il
fe dépouilla de fa haine contre les Macédoniens. Il
fit alliance avec eux ; & pour gage du traité, il leur
remit Corinthe. Antigone qui gouvernoit alors la
Macédoine en qualité de tuteur du jeune Philippe ,
joignit fes forces à l’armée des Achéens. On en vint
aux mains dans les plaines de Selafie; & la phalange
macédonienne eut tout l’honneur de cette journée.
Aratus, enflé de ce fuccès, marcha contre les Eto-
liens qui ravageoient la Meffehie ; & il effuya une
fanglante défaite. Depuis ce revers il: devint plus
circonfpeft & plus timide ; il fe confola de cette
difgrace par la gloire dont fon fils fe couvrit au
'fiege de Pfopolis, ville d’Arcadie, dont il fit la con-
quête au milieu de l’hiver. Philippe étant monté
au trône de Macédoine, avoit donné toute fa confiance
à un favori nommé Appelle , dont les Achéens
eurent à- effuyer les hauteurs. Ce prince inftruit
de fes vexations, lui ordonna de ne rien faire fans
l’approbation d’Aratus ;,mais ce tyran fubalterne ,-
abufant toujours de fon pouvoir, força fon maître
de l’arrêter & de le faire mourir.
Tant que Philippe fuivit les confeils & Aratus,
fa vie fut un enchaînement; dè profpérités ; mais
aufli-tôt qu’ébloui dé fa fortune, il fe gouverna par
lui-même, il s’afloupit dans les plus fales débauches.
Les Romains , dont il étoit l’ennemi, eurent des
avantages qui, au lieu dë.l’humilier, aigrirent fon
cara&ere ; & d’humain & populaire , il devint fom- -,
bre. & féroce. Il punit fur fes alliés la ho,nte de fa
défaite ; & ce furent fur-tout les Mefféniens qu’il
traita avec plus de rigueur. Aratus eut le courage
de lui remontrer l’injuftice de fa conduite ; &
Philippe le fit affafliner pour fe débarrafler de l’importunité
d,e fa cenfure. Toutes,les villes de l’Achâïe
fe difputereht l’honneur d’être les dépôfitaires de
fes cendres. Sycione où il avoit prit naiffance, eut
le privilège d’obtenir fes dépouilles mortelles ; on
lui fit de ‘ magnifiques funérailles. On offrit des
facrifices fur fon tombeau, & toutes les villes lui
érigerent des autels, & lui décernèrent les honneurs
divins. ( T—n . )
ARAUQUES ( l e s ) , Géogr. peuples qui habitent
la vallée d’Arauco, au Chili, dans l’Amérique
méridionale ; ils font vaillans & ont fa\t la guerre
pendarft près de cent ans aux Efpagnols établis dans
leur- voifinage. Leurs armes font des arcs , des fléchés
, de longues piques , des rondaches & des
cuiraffes faites de peaux de loups marins ; ils ont
coutume d’élire pour chef celui d’entr’eux qui porte
le plus lourd fardeau. Alonzo de Ercilla a célébré /,
dans fon poëme de Y Araucaria, la paix qu’ils firent
en 1659 avec les Efpagnols. (C . A . )
ARAURACIDES ( l e s ) , Géog. ancien peuple
d’Afrique que Ptolémée place dans la Pentapole
Lybienne , aux environs de Bérénice; il ne nous
apprend rien de plus particulier fur ce peuple ijfpi
ARAXAI, ( Géogr. ) rivieré de l’Amérique méridionale
au Bréfil ; elle coule vers la préfecture de
Paraïba où elle fe jette dansla riviere de Mongagùaba.
ARAYA , (Géogr. ) cap de l’Amérique méridionale,
dans la nouvelle Andaloufie ;'il forme le
golfe appellé par les Efpagnols , Golfo di Cariacô.
C’eft près de là qu’on v o it, à trois cens pas de la
mer, la plus fameufe faline que l’on connoiffe relie
donne un fel excellent & très-dur. On l’exploite
tous les mois. (C . A . ) .
ARBACE , ( Hijl. d'AjJyrie . ) Mede d’origine, fut
un des principaux capitaines de Sardanapale, dernier
roi d’Aflÿrie : ce monarque honteufement célébré
par fa molefle & fes débauches, s’étoit rendu invi-
fible à fes. fujets pour vivre dans fon palais environne
^ d’eunuques & de concubines. Arbace profita
du mécontentement du peuple pour le précipiter
du trône ; &c pour mieux affurer le fuccès d’une
révolution, il crut devoir fe faire un complice parmi
les prêtres dont le miniftere faeré en impofe toujours
au vulgaire : il jetta les yeux fur Be lifisp rê tre
révéré,a Urologue fçavant, & qui joignoit à ces, deux
titres tous les talensde l’homme de guerre. Ce com-
plice artificieux l’afîura que les dieux, rappelloient
au trône d’Aflyrie. Arbace flatté de cette prédiction ,
lui promit le gouvernement dé Bahylone : fes maniérés
affables & populaires lui concilièrent tous
les coeurs ; mais ambitieux avec prudence, il voulut
connoître le caraCtere du monarque avili, dont il
vouloit envahir la puiffance. Les eunuques corrompus'par
fes largeffes , l’introduifirentdans l’endroit
oîi languiffoit ce phantôme couronné ; dès qu’il eut
étudié les penchâns & fes moeurs , il eut une pleine
confiance dans les promeffes de Belifis qui eut'
l’adreffe de fairet entrer les principaux feigneurs
Babyloniens dans la conjuration.
La conftitutioh militaire de l’Affyrie étoit de lever
une armeè qui, après avoir fervi un an , étoit remplacée
par une autre l’année fuivantë. Arbace profita
de cette coutume pour faire entrer dans fa rébellion
les Perfes, les Medes & les Babyloniens qui de-
voient.fervir l’année fuivantë,: il en forma une armée
de quatre cens mille; hommes tous dévoués à fes
volontés. Sardanapale forti du fommeil de la débauche
, marche contre les rebelles qu’il a la gloire de
tailler en pièces. Arbace ne fut pas moins redoutable
apres fa défaite ; iLraflemble les débris de fon armée,
& vient defier fon vainqueur au combat. Sardanapale,
au lieu d’oppofer la force, met à prix la tête de
ce rebelle. Aucun foldat ne fut affez avare, pour
fe fouiller d un affaflînat : il fallut décider la querelle
par les armes ; & Arbace vaincu une fécondé
fois, fe retira dans des montagnes inaccefiibles, où,
fans efpoir de vaincre , il n’etit rien à redouter des
vengeances du monarque offenfé. Belifis fit fervir
la religion .pour .le relever de fa chute ; il annonça
aux rébelles que les dieux, dont il étoit l’interprête,
lui avoient révélé qu’ils n’avoient qu’à combattre
pour remporter la victoire : encouragés par fes
promeffes, les rébelles engagent une a'éïion ; & ils
effuientune nouvelle défaite. Belifis ne fut point
rebuté par ce mauvais fuccès ; il emploie toute la
nuit à confulter les affres : & au lëver de l’aurore,
ij. leur annonce l’arrivée d’une milice célefte. Il
étoit informé qu’une armée de Baftriens marchoit
au feeours de Sardanapale ; il députe des hommes
de confiance à ces auxiliaires pour leur repréferiter
là honte d’obéir à un prince efféminé , pour leur
offrir les moyens de rentrer „dans leur ancienne indépendance.
Les Baâriens éblouis par cette pro-
meffe, fe joignent aux rebellés. Arbace fôutenu de
ces nouveaux alliés,; attaque Sardanapale qui étoit
occupé à donner des fêtes aux complices de fes
débauches ; il en fit un horrible carnage ; & ce
monarque fe retira fous les murs de Ninive, où
il effuya une fécondé .'défaite. Il y foutint un fiege
de trois ans; & fe voyant fans efpoir d’être fecouru,
il fe précipita dans un bûcher avec fes femmes, fes
concubines & fes eunuques. Arbace, poffeffeur de
fes états, forma de l’empire d’Affyrie trois grandes
monarchies ; la Médie, Babylone & la Perfe eurent
leurs rois particuliers..( T—jv. )
A r b a c e § (Géogr. ) ville de la Celtibérie félon
Étienne le Géographe. On ne 'nous apprend àucu-
ment en quel lieu elle étoitfituée. (C, A .)
§ ARBALETE, (ArtMilitaire. Armes-.') L!'arbalète
, appellee en latin arcus balijlarius où balifla ■
vianualis, pour la 'diftinguer .des balliffes & des
catapultes, étoit une machine offenfive qùiconfiftoit
en un arc attaché au bout d’une efpece de bâton ou
chevalet de bois, que la corde de l’arc, quand il
n’étoit point bandé, coupoit à angles droits.
Ce bâton ou manche ou chevalet, qu’on appelloit
aufli Yarbrier de f arbalète, avoit vers le milieu une
petite ouverture ou fente de la longueur de deux
4oigts!, dans le milieu de‘ laquelle étoit une petite ^
roue d’acier folide & mobile, au-travers du centre
de laquelle paffoit une vis qui lui férvoit d’eflieu.
Cette roue fortoit en partie en-dehors au-deffüs du
chevalet, & avoit une coche o,u échancrure oùs’arrê-
toit la corde Y arbalète quand elle étoit bandée, &
une autre coche plus petite dans la partie oppofée de
fa circonférence, par le moyen de laquelle le reffôrt
de la détenté tenoiç la roue ferme. Cette rôue s’ap-
pelloit la noix de U arbalète. Sous le chevalet, en approchant
vers la poignée, étoit la clef de la détente,
affez femblable a celle de la clef du ferpentiri d’un
mOufquet. Par le moyen de cette clef, que l’on
preffoit avec la main contre lé manche de Y arbalète,
le reffort laiffoit le mouvement libre à la roue qui
arrêtoit la corde, & celle-ci;'ën fe débandant, fai-
foit partir le dard.
Sur le chevalet, au-deffôus de la petite roue,
étoit une petite lame de cuivre qui fe levoit & fe
couchoit, & étoit attachée par fes deux jambes avec
deux vis aux deux côtés’’du chevalër. C’étôit le
fronteau de mire. Elle étoit percée au haut de deux
petits trous l’un fur l’autre ; & quand la lame étoit
le y é e , ces deux trous répondoiëht à un globule dé
la groffeur d’un petit; grain de chapelet, qui' étoit
fufpendit tout au' bas de Y arbalète par un fil de fer '
très-menu- & attaché à deux petites'colonnes de fer
perpendiculaires , une à droite & l’autre à gauche.
Ce' petit globule répondant au trou de la lame , fer-
voit à régler la mire, foit pour tirer horizonfale-
ment, foit pour tirer en haut, foit pour tirer en-bas.
La corde de l’arc éïoit double. Les deux cordons
étoiënt tenus féparés l’un de l’autre à droite & à
gauche par deux petits cylindres de f e r , à égale
diftance des deux extrémités de Tare & du centre.
Alix deux-cordons dans le milieu tenoit un anneau
de corde , qui fervo’it à l’arrêter à la coché .dont j’ai
parlé , lorfque l’arc étoit bandé. Entre les deux cordons
au centre de la corde,& immédiatement devant
l’anneau, étqit un petit quarré de corde où l’on pla-
çbit l’extrémité de la fléché pour être pouffée par
la corde.'^oye^la planche I. de Y Art militaire,
A r m e s 6* M a c h i n e s , dans ce Supplément. Voici
l’explication de la figure qui repréfente[ Ydrbalete &
fes différentes parties.
A. A. A . Le bois de Y arbalète.
B. B. L’arc de Y arbalète.
C. . C . La .corde tendue.
D. D. Les. deux cylindres qui tenoient les cordons
de :1a corde lëparés:Tun de l’autre.
G. G. Les deux petites colonnes:de-fer, auxquelles
ctoit attaché le petit fil de fe r , -au centre duquel
. étoit le^petit globule pour régler la mire.
I. La noix ou roue mobile d’acier où l’on arrêtoit
la corde bandée,
K.. Coche intérieure de la noix.
M. Clef de la détente.
N. bf. Fronteau de mire.
O. La fléché,
T elle etoit l’anciennë arbalète ; & je crois qu’elles
fe reffembloient toutes pour les parties effentielles»
C’étoit avec la main que Ton bandoit la corde des
petites arbalètes, par le moyen d’un bâton ou d’un
fer en forme de levier, appellé pied de chevre, parce
qu il etoit fourchu du côté qui s’appuyoit fur Yarbar
lete & fur la corde. On bandoit lès grandes avec le
pied ,& quelquefois avec les deux, en les mettant
dans une efpece d’étrier, félon ce vers de Guillaume
le Breton : •
Ballijlâ duplici tensâ pede mijfa fagitta.
On les bandoit aufli avec un moulinet & avec une
poulie. Ces arbalètes étoient ou de bois ou de corne
ou d’acier, ce qui fe doit entendre de l’arc feul.
Elles étoient de différentes grandeurs, comme d’un
pied & demi, de deux pieds & demi, & de trois
pieds, & d’autres plus longues, fournies de leur
pied de chevre, de leur moulinet & de leur poulie.'
Ce fut Richard Coeur-de-lion, roi d’Angleterre,
qui rétablit l’ufage de Y arbalète, & il fut tué de cette
arme. Ce n’eft pas qu’avant ce tems-là on ne fe fut
jamais fervi de Y arbalète oh s’ en fer voit fous Louis
le G ros, aïeul de Philippe Augufte; car l’abbé Su-
ger, dans la vie de Louis le Gros, dit épie ce prince
attaqua Drogon de Montiar avec une groffe troupe
d’archers & d’arbalétriers ; & plus bas, que Raoul
de Vermandois eut l’oeil crevé d’un quarreau àlarbalète.
Il y avoit un canon du fécond concile de Latran,
tenu en 1138 , fous le régné de Louis le Jeune,
pere de Philippe Augufte, qui défendoit cette arme.
On l’obfervà fous le régné de Louis le Jeune & au
commencement du régné de Philippe Augufte; mais
depuis on n’y eut nul égard , ni en France, ni en
Angleterre, quoiqu’Innocent III. en eût recommandé
l’obfervation. L’ufage de la ballifte & de Y arbalète
avoit été aboli dans ces deux royaumes pendant
qti’on obfèrvà le canon du fécond concile de Latran ;
& cet ufagë fut rétabli d’abord en Angleterre par
Richard, & én France par Philippe Augufte ; & il
redevint commun depuis ce tems-là.,
Uarbalète étoit encore en ufage en France fous le
régné de François I : il avoit à la bataille de Ma-
rignan pour une partie de fa garde une compagnie
de dëux cens arbalétriers à cheval qui y firent des
merveilles: mais dans la fuite cet ufage fut prefque
entièrement aboli, excepté parmi les Gafcons. Guillaume
du Bellai rapporte qu’à la Bicoque, en 15.22,
il n’y avoit dans l’armée Françoife qu’un.feul arbalétrier
, mais fi adroit, qu’tin capitaine Efpàgnol nommé
JeandeCardonne, ayant ouvert lavifiere de fonarmet
pour refpirer, l’arçher tira fa fléché avec tant de ju-
fteffe, qu’il lui donna dans le vifage & le tua. Ce même
auteur rapporte qu’au fiege de Turin, en 15 3 6, le feul
arbalétrier qui étoit dans la place, tua où bleflà plus
de nos ennemis en cinq ou fix efcarmouch.es où il fe
trouva, que les meilleurs arquebuuers qui fuffent
dans la ville, ne firent durant tout le tems du fiege.
Cela prouve qu’on ne fe fervoit plus guere d’arbalétriers
en France vers le milieu du régné de François
I : mais on s’en fervoit encore en Angleterre fur la
fin du régné de Charles IX , comme il paroît par le
traité fait en 1.572 entre ce prince & la reine Elifa-
beth, qui s’obligea à fournir au roi 6000 hommes
armé's partie d’arcs & partie d’arquebufes. On confond
quelquefois dans l’hiftoire le nom d'archers &
& arbalétriers, & l’on donna à celui qui comîmandoit
çies troupes le nom de grand-maître des arbalétriers.
On a abandonné Y arbalète depuis l’invention des fu-
fils ou de nos moufquets, quoique cette arme fût
ipfiniment plus meurtrière & plus avantageuse que
he lé font les fufils ; fes coups font plus certains ôe
plus affurés-, & fa force au moins égale. SiTon n’eût
introduit la baïonnète au but du fufil, qui fait prefque