mouvement de venus & de mars autour du foleil, &
d’où l’on peut croire que les autres planètes principales
fe meuvent également autour du foleil. Quelle au-
roitété la joie de Copernic, s’il avoitpu alléguer de
pareilles preuves en fa faveur , comme l’a très-bien
obfervé M. de Montucla ? Galilée a beaucoup contribué
par fes Dialogues fur le fyftéme du monde , au
triomphe qu’a remporté depuis le fyfteme de 1 illuf-
tre pruffien, & qui fut fi funefte à notre italien.
Dans le fécond dialogue, les phénomènes terreftres
font fi bien expliqués, & dans le troifieme , tous
les célefles ; la fimplicité de l’hypothefe de Copernic
eft fi bien relevée, & les-inconvéniens des autres
hypothefes de Ptolomée & de Tycho Brahé expliqués
fi clairement, que l ’on commença par fes dialogues
à connoître le mouvement de la terre avec
autant de certitude qu’il peut y en avoir dans les
matières phyfiques , même avant que Bradley , en
Angleterre , eut découvert l’aberration de la lumière
, vérifiée en Italie par Euftache Manfredi
qui vivra toujours dans l’niftoire &c dans les faites
de l’aftronomie.
Galilée , avant que de partir de Padoue , avoit
découvert les taches du foleil; & étant à Rome au
mois d’Avril 16 11 , il les avoit fait voir à plufieurs
perfonnes diftinguées qui l’attefterent. Les premières
obfervations de Scheiner furent poftérieures de fix
mois : il les publia enfuite en i 6 n , fous le titre
Apelles pofi tabulant, avec trois lettres adreffées à
Velfer. Galilée répondit auffi-tôt, & s’affura l’honneur
d’avoir découvert le premier ces taches. 11 fit
même voir que le feint Apelle en avoit donné une
théorie toute oppofée , en affluant que ces taches fe
mouvoient d’orient en occident, & qu’elles décli-
noient vers le midi ; tandis que réellement elles fe
meuvent d’occident en orient , & qu’elles déclinent
vers le nord ; peut-être que l’Apelle , attaché
à l’ancienne opinion de l’incorruptibilité des cieux ,
penfa que ces taches étoient des planètes. Pour
Galilée qui étoit un homme au-deffus de tout préjugé
, il dit dans fes premières lettres à Velfer , que
ces taches étoient des matières très-proches de la
fuperficie du foleil, qui fe raffembloient & fe diffi-
poient, & en produifoient de nouvelles, à la reffem-
blance des vapeurs de notre atmolphere ; & il jugea
par le mouvement dè ces taches, que le foleil tourne
autour de lui-même , environ dans l’efpace d’un
mois lunaire. M. de Montucla a laifféà Galilée l’honneur
d’avoir, quoique le premier, parlé plus judi-
cieufement que les autres fur ces taches.
Ce fut l’année 1612, que Galilée commença à
publier fes découvertes fur les taches du foleil, dans
l’ouvrage fur les corps qui furnagent fur un fluide ,
ou qui s’y meuvent. 11 rétablit par ce difeours la
doûrine hydroftatique d’Archimede, & démontra
que l’immerfion des folides dans un fluide , ou leur
fupernatation , ne dépend point du tout de la configuration
de ces folides , mais de leur gravité fpéci-
fique. Dans l’ouvrage intitulé Saggiatore ou le Son-
deur, que le comte Algarotti reconnoît pour le meilleur
ouvrage polémique dont l’Italie puiffe fe vanter
; dans cet ouvrage , dis-je , il eft formellement
établi pour maxime que les qualités-fenfibles ,
comme la couleur & le goût, ne réfident point proprement
dans ces corps, mais en nous-mêmes ;
maxime que l’on devoit plutôt attribuer aux anciens
philofophes, qu’à Defcartes. Ainfi Galilée fixa les
principes de l’hydroftatique & de la phyfique : il
créa le premier la méchanique. Dès l’année 1602 ,
il écrivoit au marquis D el Monte, qu’il avoit obfervé
que les vibrations des corps mobiles attachés à des
fils de différentes longueurs, fe font en des tems qui
font entr’eux comme les racines de leurs longueurs.
Il annonça dans une lettre écrite de Padoue, en
1604,le théorème que les efpaces que des corps pefans
parcourent en tombant, font comme les quarres des
tems, & que cependant les éfpaces qu’ils parcourent
en tems égaux, font comme , 1 , 3 , 5, 7 , Gc. La première
édition de fes dialogues fur la méchanique ,
parut dans la même année 1638 , que le traité du
mouvementée Baliani ; mais les écrits &. les découvertes
de Galilée fur les méchaniques s’étoient bien
avant ce tems répandues en deçà des monts ; & il
n’eft pas vraifemblable que Defcartes, & encore
moins Baliani, en aient trouvé plufieurs fans avoir
. lu Galilée.
Parmi les principales découvertes qui fe trouvent
dans fon dialogue de la méchanique , je compte en
premier lieu , le principe de la compofition & de la
réfolution du mouvement, que Galilée a expreffé-
ment enleigné dans le théorème fécond du mouvement
des projectiles, & dans la note du théorème
fécond du mouvement accéléré. Je compte en fécond
lieu les loix du mouvement 'uniforme & du
mouvement accéléré, d’où réfultent les deux formules
fi connues , communément appellées les formules
de Galilée : i° . que la force multipliée par l’élément
du tems, eft égale à l’élément de la vîteffe ;
20. que la force multipliée par l’élément de l’éfpace,
eft égale à l’él.ément de la vîteffe multiplié par toute
la vîteffe. Galilée confidéra ces deux formules dans
le cas de la force confiante , & Newton Jes étendit
enfuite généralement à toutes les hypothefes de la
force variable. Mais tout ce qui s’eft fait depuis dans
les méchaniques, dépend entièrement de ces deux
formules , &c du principe de la compofition & de
la réfolution du-mouvement. Le traité du mouvement
fur les plans inclinés & dans les cordes-des arcs
circulaires , eft plein d’élégance géométrique ; & on
fera toujours étonné qu’un homme feul loit arrivé
à ce point fans le fecours de l’algebre. Les problèmes
dans lefquels on cherche l’inclinaifoa des plans,
par laquelle un corps peut palier le plus vîte , ou
d’un point donné à une ligne horizontale donnée de
pofition , ou d’une ligne horizontale à un point
donné ; ces problèmes , dis-je , font de la plus
grande fineffe.
Galilée a merveilleufement traité dans fon quatrième
dialogue la baliftique qui étoiî totalement
ignorée avant lui ; car Cardan 6c Tartaglia foupçon-
nerent feulement que les projectiles lancés fe meuvent
dans une ligne compofée d’une ligne droite &
d’un arc circulaire. Galilée,avec le principe de la compofition
du mouvement, démontra non-feulement
que les projectiles lancés décrivent une parabole ,
mais enfeigna même tout ce qui appartient à l ’étendue
du je t , portée , ' hauteur 6c direction y car de
deux de ces quantités, on peut toujours tirer les
deux autres. Enfin dans le fécond dialogue il jetta
encore les principes de toute la doârine de la réfif-
tance des folides, qui fut enfuite pouffée fi loin par
Viviani & par Grandi.
Galilée, dans fon premier & troifieme dialogue,
en traitant du cylindre creufé dans une hémifphere,
6c des efpaces parcourus dans le mouvement accéléré
, nous a laiffé les traces de la méthode des indi-
vifibles, en confidérant les folides comme compofés
d’une infinité de plans , 6c les plans d’une infinité de
lignes. Mais la vérité nous oblige ici d’obferver: 1 °.que
Kepler avoit déjà dans fa Stéréométrie introduit l’infini
dans les mathématiques , 6c fourni l’idée des in-
divifibles ; 2?. queCavalieri employa avec beaucoup
de précaution ces mêmes phrafes métaphyfiques,
comme il paroît parla préface du livre V I I de fa
Géométrie, 6c comme a obfervé Mac-Laurin ; 30. que,
quoique Galilée eût deffein de compofer un Traité
Géométrique furies indivifibles, il n’eut aucune part
au grand ouvrage de Cavalieri. On pourroit joindre
& tant de preuves qu’on en a , celle d’une lettre que
Cavalieri écrivit à Galilée, lé 21 mars 1616, qui eft
Une preuve inconteftable que le premier avoit terminé
cet ouvrage avant que je dernier eût feulement
commencé le fien. Pôùr ce qui ejl de Vouvrage
fur les indivifibles ( dit-il ) je ferais charmé que vous vous .
y appliqua (fie£ du plutôt, afin que je puijfe expédier le
mien, auquel je retoucherai en attendant, ÔCC. Cavalieri
publia fon ouvrage trois ans après, &c il fut la
bafe principale du Calcul différentiel 6c intégral.
Mais pour revenir aux dialogues, dans là première
édition 6c dans le troifieme de ces dialogues, Galilée
donna comme un axiome, qu’un corps mobile paf-
fant d’un point donné par un plan incliné quelconque
â une ligne horizontale donnée, y arrive toujours
avec la même vîteffe. Viviani fut le premier à lui faire
voir que ce principe a befoin de quelque démonftra-
îion; 6c Galilée, quoiqil’aveûgle-, la trouva fur le
champ, & en fit part à Viviani de la maniéré que nous
le voyons dans les autres éditions de fes dialogues.
Galilée dans fon Difeours fur la riviere Bifen^io, appliqua
cette propofition au cas des eaux courantes ; 6c
expliqua dans un autre théorème, que les vîteffes
font les mêmes dans deux canaux de différente longueur
6c de différentes finuofités, quand ils ont feulement
la même hauteur, c’e ft-à -d ire , quand ils
relient fixés dans les mêmes limites. Dans le cas particulier
des rivières,il y a à confidérerlesféfiftances
& beaucÔup d’autres chofes ; mais la proportion généralement
prife , eft très-vraie,& l’application que
Galilée a faite le premier de la géométrie à la con-
noifl'ance des eaux courantes, lui fait beaucoup
d’honneur.
Varignon a relevé une erreur qui eft dans lé dix-
feptieirie théorème du troifieme dialogue, oü Galilée
fuppofe qu’un corps pafl'ant d’un plan à un autre
d’une inclinaifon différente , retient toute là vîteffe
correfpondante à la première chute; mais Grandi,
dans fes notes au même dialogue , dit que lé paffage
de Galilée ne devoit pas s’entendre abfolument , mais
dans une fitnple hypothèfe dont il devoit partir,
pour arriver enfuite à la chûte des corps dans les '
arcs circulaires. Il eft très-vrai que dans les arcs circulaires,
comme dans toutes les lignes courbes, il
n’y a point d’altération fenfible, par rapport aiix
différentes inclinaifons des petits arcs dont la ligne
courbe efteompofée , comme Varignon, Grandi &
beaucoup d’autres l’ont démontré. On ne peut voir
un théorème plus élégant que celui auquel Galilée
s’eft frayé une route, avec cette hÿpothefe qu’un
corps dëfcend plus vîte par un arc circulaire que par
la corde. Jean Bernouilli a entendu trop généralement
ce théorème, comme fi Galilée avoit cru que
la defeente le faifoit plus vîte par un arc circulaire,
que par toute autre ligne courbe quelconque, com-
prife entre deux points donnés ; enfuite Bernoulli a
prouve que la courbe de la plus vîte defeente eft
une cycloïde , & non un arc circulaire. Mais la note
du théorème vingt-deuxieme fufiît pour faire voir
que Galilée n’a voulu dire que ce qui eft très-vrai :
Quà igitur per inferiptos polygonos mugis ad circum-
ferentiam accedimus, eà citius abfolvitur motus inter
duos terminos fignatos.
On a pourtant imputé généralement à Galilée
d’avoir cru que la ligne courbe parabolique, dans
laquelle les corps lancés fe meuvent, eft la même
a laquelle fe conforme une chaîne fufpendue par fes
extrémités, & qui s’appelle chaînette; 6c il eft fin-
gu 1er que ce foit Krafft qui, dans ces derniers tems,
en ait fait l’apologie dans le tome y des Nouveaux
ommentaires de Pétersbourg, citant le paffage qui
ui a quatorzième propofition du quatrième dia-
* uniquement que les deux courbes ne
cutterenlpas beaucoup entr’elles, « La corde tendue,
» plus oit moins tirée, fé plie en ligne qui âptirôchè
» affez des paraboliques ; 6c la reffemblance eft tell e *
» que fi vous marque! fur une furfaee plane & éle-
» Vée à l’horizon une ligne parabolique, & la tënéü
» rénverfée,'c’eft-à-dire, lefommeten-bas, & aved
», la bafe parallèle à l’horizon, tenant fufpendue u'né
| petite chaîne foutenue par les extrémités de.U
» bafe de la parabole marquée, vous verrez, en lâ-
» chant plus ou moins', ladite petite chaîne fe Cour-
» ber & s’adapter à la même parabole; & eetrô
» adaptation eft d’autant plus précife, que la para*
» bôle marquée fera moins courbe, C’eft-à-direi
» plus étendue; tellement que dans les pàraboleâ
» décrites avec l’élévation de45dégrés, la chaîné
» marche prefque ad unguem fur la parabole ». •
Galilée paffa peu après à une autre propofitiOni
Qu’une corde horiiontale'tournant fur deux pivots *
& confidérée comme ne pefant rien , foit tenduô
avec deux très-grps' poids attachés aux extrémités ;
“ attache au milieu un autre poids quelque petit
qu’il foit, elle pliera dans le milieu, & par confisquent
ne fera plus droite. Viviani en écrivant ait
prélat Ricci, éleve quelques doutes par rapport à la
demonftration de Galilée, tires premièrement de cé
que le mouvement des deux poids qui montent lorfi.
que la corde fe plie , n’eft point égal. Cette'diffi*
culté, quoiqu’approuvée par des hommes illuflres »
ne paroît pas pouvoir s’adapter au cas de Galilée*
dans lequel fuppofant des poids infiniment grands >
eu égard au petit corps attaché au milieu de la corde*
leur mouvement ne peut être que fort petit & paé
cortféquent uniforme. Il eft vrai que le cas de l’équi-*
libre n’eft pas-précifément celui que Galilée â fiip*.
pofé dans fa démonftration, comme le fôupçonnoit
Viviani, & comme Simplon l’a démontré dans le
trente-huitieme problème de l’application de l’algebre
à la géométrie. Mais la démonftration de GaUilét
fépeut adapter également au vrai cas de l’équilibre
& la propofition principale eft toujours très-vraie*
A ces difficultés méchaniques, on en joint quelques»
autres * phyfiques & aftronomiques, qui fe réduifent
principalement à trois; i° . que Galilée a attribué
l’élévation de l’eau dans les pompes à l’horreur dit
Vuide; 20. qu’il a voulu expliquer le flux & reflux
de la mer par la combinaifon du mouvement journa**
lier & annuel de la terre ; 30. qu’il n’a pas cru que
les cometes étoient des planètes qui tournent autour
du foleil. Quant à la première objeûion , Galilée ,
dans le premier dialogue, a décrit Amplement ce
phénomène que l’eau ne s’élève qu’à trente-deux
pieds dans les pompes , & en a Amplement inféré
que la force néceffaire pour détruire le vuide, égale
un cylindre d’eau de trente-deux pieds de hauteur,
&c à cela il n’y a rien à dire , quoique Galilée ait
ajouté d’autres conjectures qui ne font pas égalèmenf
folides. Galilée a encore propofé urte machine pour
mefurer combien la force de la cohéfion eft pluà
forte que celle qu’on cherche pour procurer le
vuide, & a enfuite donné deux maniérés différentes
pour mefurer même le poids de l’air ; & quoique
dans fes expériences il n’ait tiré d’autre proportion
entre le poids de l’air & de I’e a ii, que celle d’un 4
400, on doit cependant les regarder comme le fondement
& le principe de tout ce qu’on a fait depuià
à ce fujet.
L’hypothefe donnée dans le quatrième dialogue
fur le fyftême du monde, pour explique^ le flux Si
reflux, eft fort ingénieufe, & c’eftla première paf
laquelle les philofophes ont tenté d’expliquer phyfi»
quement ce phénomerte fingulier; & quoique l’hy-
pothefe ne foit pas vraie, Defcàrfes qui a écrit de*
puis Galilée, n’en a pas donné une meilleure. Pour*
ce qui regarde les CoMétes, Galilée a objeélé à fort
adyerfaire, qu’iln ’étoit pas encore- prouvé que le»