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corps dur, ne peut donc opérer d’autrè effet que
■ leur deftrudlion, fans nous éc'airer fur la meilleure
■ maniéré de lés fabriquer* Tant d’accidens diverfe^
■ ment combinés , concourent à produire des inégalités
dans le fer forgé & vivement chauffé à plufieurs
reprifes, qu’il eft impoffible d’affigner à la. caffe
la vraie caufe qui fait paroître tel ou tel grain. Le
meilieur,/tf7'peut_avoir été altéré ou décompofé fur
-une certaine étendue : celui qui avoit paru médiocre
, peut avoir acquis. Que conclure de la caffe des
fragmens des canons qu’on fera parvenu à cafter?
On ne peut donc fe promettre de fuccès dans ce
travail qu'a près une longue étude, des expériences
multipliées 6c faites avec la plu's fcrupuleufe attention.
m
Le procédé de fabrication dont nous rendrons
compte à Van. Maquette, Suppl. 6c à celui-ci, pour-
roit cependant paroître fujet à quelques inconve-
niens.. On pourroit obje&er que trois morceaux de
f i r , d’un pouce d’épaiffeur, fuperpofés les uns fur
les autres , forment une maffe qu’il eft difficile que
le feu pénétré entièrement, & qu’on ne peut par
conféquent fouder parfaitement, & fans qu’il y ait
quelques doublures. S’il y a doublure dans la maquette
, elle fe confervera dans la lame qu’elle produit
, 6c peut être même dans le canon qui en résultera.
Je voudrois qu’il y eût un terme reçu pour exprimer
ce que c’eft que la foudure du f i r , c’eft-à-dire ,
l ’union intime 6c la pénétration réciproque de deux
ou plufieurs morceaux de fer que l’on foude enfemble.
On entend communément par foudur-e , l’union
que l’on fait de deux pièces de métal, que l’on ne
joint que par leur furface aumoyen d’une compofition.
Cette foudure eft une colle qui joint les pièces
qu’on veut réunir : & fi cette matière intermédiaire
eft détruite par le feu ou par quelqu’autre accident,
les piecés qu’on avoit réunies fe féparent.
La foudure du fer eft abfolument différente : toutes
fes parties chauffées jufqu’au centre , amollies 6c
portées à un dégré de chaleur qui les met prelqu’en
fufion , fe pénètrent réciproquement comme deux
morceaux de cire chauffés au dégré qui convient
pour les unir enfemble. Si donc notre maffe de fer
eft mêlée dans la proportion qui convient, de maille
& d e nerf, 6c par conféquent de nature à fe bien fou-
tenir au feu 6c à s’y perfectionner, au lieu de s’y appauvrir
, l’ouvrier ne craignant pas de la détériorer,
brûler ou détruire , ne la retirera du feu qu’au dégré
de chaleur connu pour opérer la foudure. La maffe
totale, bien pénétrée par le feu dans toute fon épaif-
feu r& réduite en pâte, étant fortement & rapidement
faifie par le gros marteau , toutes fes, parties
fe pénétreront réciproquement, 6c la maquette
n’aura point de doublures..
Si par la négligence d’un ouvrier, l’épaiffeur totale
de nos trois morceaux de fer n’eft pas entièrement
pénétrée par le feu , il pourra y avoir quelques
couches dans la maquette qui ne feront pas parfaitement
adhérentes dans toute leur longueur ; car en
fuppofant que de deux morceaux de fer que l’on
veut fouder enfemble, l’unfoit porté au dégré de
chaleur requis , & dans l’efpece de fufion néceffaire
pour opérer la foudure , 6c que l’autre ne foit que
foiblement chauffé , la partie chauffée à blanc s’étendra
fous le marteau 6c fe fuperpofera fur l’autre
mais ne la pénétrera , ni n’en fera pénétrée ; 6c c’eft
ce qu’on appelle une doublure. Or en .fuppofant
qu’il y ait doublure dans la maquette, il faut obfer-
ver que cette maquette doit être chauffée de nouveau
6c alongée fous le martinet pour former la lame
à’eanon ; 6c que cette lame réduite à cinq ou fix
lignes d’épaiffeur , effuie deux ou trois chaudes fondantes
fur chaque point, comme on l’a vu dans le
F E R
détail des procédés de la fabrication du canon ( Voÿi
Canonier , Supplément.'). La doublure ou le défaut
d’adhérence fuppofé, ne fubfiftera plus après ce nombre
de chaudes vives 6c pénétrantes , données fut
tous les points d’une piece qui a très-peu d’épaiffeur,
fi elle a la qualité que nôus lui avons fuppofée d’abord,
de foutenir bien le feu, 6c de s’y perfe&ionner aulieu
de s’y appauvrir.
Dans le cas où on n’auroit pris aucune précaution,1
& où la doublure dé la maquette fe feroit confervéë
dans la lame , 6c fubfiftât même encore dans le canon
, malgré la quantité de chaudes blanches qu’il a
effuyées, 6c le peu d’épaiffeur de la lame, la doublure
fera plus ou moins voifine de la paroi intérieure
du canon. Dans le premier cas, l’explofiort
des deux fortes charges dont on l’éprouve, la déchirera
& fera appercevoir dans l’intérieur la chambre
qu’elle aura formée : mais il y a à parier qu’ilcreverâ
à l’épreuve, à laquelle il eft difficile qu’il réfifte dans
ce cas. Si la doublure eft fuperficielle , on la découvrira
en blanchiffant 6c poliffant le canon.
Je ne prétends pas inférer de ceci que la foudure
dont il eft queftion , ne puiffe jamais manquer dans
quelque partie de la maquette : mais je crois que Cet
accident aura rarement lieu avec dés foins 6c de l’attention
, & fur-tout une matière bien compofée.
On pourroit peut-être foupçonner encore que les
écailles ou exfoliations qui fe détachent de la furface
du fer chauffé 6c battu , fe détachant effectivement
des furfaces des morceaux de fer que l’on place les
uns furies autres, feroientautant de corps étrangers
qui pourroient empêcher la réunion des parties métalliques
, 6c par conféquent nuire à la foudure. J’ai
vu plufieurs perfonnes perfuadées que ces exfoliations
étoient une vraie chaux métallique. Cette opinion
m’a engagé à les examiner de près. J’ai reconnu
qu’elles coniervent la vraie couleur du fer, & qu’elles
font attirables par l’aiman. Ces deux qualités prouvent
évidemment que ces écailles ne font pas de la
chaux. J’ai cherché enfuite à vérifier, par des faits ,
fi elles pouvoient empêcher la foudure du fer : j’eiï
ai mis une poignée entre deux fers que j ’ai fait chauffer
au dégré requis pour fouder , & la foudure s’efl
parfaitement exécutée. Il réfulte de cette expérience
que les écailles ou exfoliations qui fe détachent de
la furface'du fer chauffé & battu, font elles-mêmes
du fer : & je penfeque l’air extérieur très-froid , par
rapport à la chaleur du m étal, qui eft bouillant, doit
être regardé comme la principale caufe qui les détache.
Ne pourroit-t-on pas préfumer en effet, que
les parties fuperficielles de la barre qu’on retire
du feu , acquièrent à l’air une efpece de trempe qui
la fait exfolier, comme cela arrive fouvent aux
pièces que l’on trempe, fur la furface defquelles
il fe fait des bourfoumires 6c des exfoliations qui
mettent quelquefois dans la néceffite de refaire une
piece nouvelle, lorfqu’il eft queftion d’un ouvrage
propre 6c d’un beau poli? Il paroit d’ailleurs évident
que ces exfoliations n’ont lieu que fur la furface du
fe r , 6c que l’intérieur d’une maffe, où la chaleur eft:
concentrée , 6c qui n’eft pas expofé au contaft immédiat
de l’air, ne peut ni fe tremper ni s’exfolier
comme l’extérieur.
Tout dépend, dans la foudure du fer, d’employer
une bonne matière , de chauffer au dégré requis, 6c
de faifir 6c battre la chaude à propos. J’ai eu lieu de
me convaincre de ces principes par plufieurs expériences
: j’ai fait faire des canons de fufil avec des
tubes de fix pouces de longueur, que j’ai fait fouder
bout-à-bout. J’en ai fait faire avec des barreaux de fer
de fix à fept pouces de longueur, que j’ai également
fait fouder bout-à-bout 6c fans fe croifer ; & ces canons
ont réfifté à des charges extraordinaires. J’ai vu
des pièces de canon du calibre de 24, en fer forgé ;
on peut juger de combien de mifes lès unes furies
autres, des pièces de ce volume étoient compo-
fés ; on les a fciées, 6c la matière m’a paru très-com-
patte dans l’intérieur, très-bien foudée 6c fans doublures.
La fabrication, des grandes maffes, comme
les ancres, les ax’es des meules, les enclumes, les
gros effieux^Ies voitures, qui fe font par mifes à
chaudes portées, réuffitavecdu ferdwn0 convenable
& de l’attentipn ; 6c au contraire , ils feront fragiles
comme du verre , fi on choifit, pour les fabriquer,
des barres qui aient déjà acquis toute leur qualité,
& qui ne pourroient que la perdre dans les différentes
chaudes décompofantes, par lefquelles il faudroit
les faire paffer.
Il réfulte de tout ce que je viens de dire , qu’en
prenant les précautions, indiquées, la foudure des
trois morceaux de fer dont on fabrique les maquettes
, doit réuffir ; qu’elles feront rarement fujettes à
l ’inconvenient des doublures ; 6c qu’elles auront de
p lu s , le grand avantage d’être compofées de bon
Fer refonda de vieilles ferrailles. J’ai dit qu’on em-
ployoit avec fuccès un morceau de ferde vieilles ferrailles,
que j’appelle fer refondu ,à la compofition des
maquette (V . Maquette,^/»/.) dont on fait les canons
de füfil> Je vais expôfer les procédés avec le s quels
on fabrique ce fer, 6c indiquer les précautions
qu’il eft nécèffaire de prendre pour lui donner une
.très-bonne qualité.
Toutes les ferrailles qu’ on ramaffe dans les rues,
dans les démolitions des bâtimens, & généralement
tous les fragmens des vieux uftenciles de fer battu ,
àesfèrs 6c doux de chevaux, fe refondent & produisent
de très-bon fer.
Lorfqu’on a amaffé une certaine quantité de vieilles
ferrailles , on les dépofe à bas & à côté de la cheminée
d’une groffe forge ; il faut en bien nettoyer le
creufet & le remplirà comble de charbon de bois léger
, bien fec 6c bien cuit ; on allume le charbon &
on donne l’eau aux foufflets ; à côté du tas dés ferrailles
, on en fait un autre des feories 6c des craffes qui
fe font écoulées 6c détachées dès loupes , précédemment
formées , ou avec la gueufe, ou avec des ferrailles.
Quand le feu eft bien allumé, on jette dans le
creufet deux pelletées de ces craffes 6c du charbon
par-deffus : au bout d’un quart-d’heuré, on met fur le
foyer une pelletée de ferrailles, qu’on recouvre entièrement
de charbon, fur lequel on jette un peu
d’eau de tems en tems , pour concentrer la chaleur.
A mefure que la charge s’affaiffe, on remet un lit de
ferrailles & un lit de charbon, 6c de tems en tems des
feories & des craffes. Après une héure de travail, on
introduit le ringard dans le creufet pour réunir les
ferrailles, qui y font dans une efpece de fufion. On
continue de charger, comme je viens de le dire ; &
lorfque la loupe commence à fe former, on la fou-
leve avec le ringard , plutôt pour que le charbon ,
qui l’environne, s’arrange avec des feories au fond
du creufet & lui ferve de l it , que pour l’expofer au
vent de la tuyere ; car il eft moins queftion ici de
chercher à purifier les parties métalliques, que d’empêcher
qu’elles ne fe deffechent, s’appauvriffent 6c
le décompofent. C ’eft pour prévenir cet accident,
qu’il faut avoir grand foin d?énvelopper d’abord les
ferrailles, & enfuite la loupe, avec des feories' 6c
des craffes , qui lui fervent de bain & la garantiffent1
de la trop grande violence du feu. On ne fe propofe
donc pas ici de dégager dans le dreufetles ferrailles
des parties étrangères qui pourroient s’y être attachées
; mais on doit avoir pour objet au contraire de
leur ajouter des matières qui fe. fondent, les abreuvent
& les tiennent elles-mêmes dans l’état de fufion
dont elles font fufceptibles, fans les expofer à fe brûler
&c fe calciner.
A mefure que la loupe groffit par les charges fuc-
cèffives que l’on continue toujours, on la fouleve de
tems en tems, cômime je viens de le dire. Au bout de
trois heures elle pefe environ 800 à 100 livres , 6c
elle eft affez grofle. On pourroit la faire plus forte
& continuer l’opération ; mais il feroit à craindre
que, malgré lés précautions que nous avons indiquées
, le métal ne-s’appauvrît, en reftant plus lông-
tems expofé à l’aéHon continue d’un feu très-vif: il
faut donc retirer la loupé. On commence par diminuer
le vent pardégfés; & après quelques momens,
bn l’arrête tOut-à-fait, 6c i’ôh écarte les charbons
pour découvrir l’oüvrage , qü’on laiffe ainfi découvert
pendant quelques minutes. On retire là loupe
du foyer avec le ringard, 6c on la roulé jufqu’au
pied de l’enclume , fur laquellfe on la porte avec dés
tenailles, ou avec une barre de fer qu’on fait entrer
& fouder dans la loupe. Cette loupe eft blanche,
étincellante, 6c percée de cavités qui la traverfénr.
Touslës morceaux de ferraille, dont elleeftcompo-
fee, ont abfolument perdu leur première forme;
aux premiers coupsdu gros marteau, on voit couler
de tous côtés dés flots d’une matière vitrifiée , 6c fe
détacher delà furface dé la loupe, des fragmens enflammés
qui fe refroidiffent promptement, 6c ne pa-
roifferit aux yeux que des craffes fpongiéufes 6c cal-,
cinées : elles confervent cependant Bèaucoup de parties
métalliques, qu’on peut en féparer par le moyen
du feu : à mefuré que lés parties étrangères s’eva-
cuènt 6c fe détachent de là loupe par lapreffion du,
gros marteau , les parties métalliques fe réunifient
& l’on forme une piece qtiarrée à l’ordinaire, qu’on
chauffe dé nouveau pour l’étirer en barre.
Lorfque ce fer a été fabriqué avec les précautions
que j’ai rapportées, la.barre eft liffe 6c unie : 6cfi. vous
la caftez à froid, ce à quoi on ne parviendroit pas
avec cent coups de maffe’à main, vous appercevrez
dans l’intérieur quelques couches de nerf; & tout le
reftede fon épaifleur formée d’une maille fine, qui
indique , au premier .coup d’oe il, qu’en continuant
de travaillér & battre ce f i t ,^vous le rendrez, après
quelques chaudes, de la meilleure efpece. Si o,n néglige
au côhfraire de faire aux ferrailles un bain convenable
dans le creufet ; fi on expofe trop la loupe
au vent de la fuyere , 6c fi on la laiffe trop long-tems
au feu, vous aurez- un fir defféché 6c infra'itàblë ;
la barre fera pleine de criques & de crévaffés , & les
parties-intérieures, au lieu dé nerf & dé maille pro-
preà devenir nerf, ne vous montreront que dès grains
brillans & fans adhéYencé : cë qui vient encore à
l’appui de ce que j’ai dit ailleurs fur là compofition
6c la décompofition du fir.
J’avoue qu’avant d’avoir examiné de bien près le
fer refondu, d’en avoir fîiïvi la fabricàtîon 6c de
l’a voit éprouvé, j’avôis peine à me figurer qu’il fût
auffi bon qu’il l’eft effedivement. Le mélange dés différentes
elpeces de ferrailles, lès fables, les terres 6c
les ordures dont éllès fe chargent dans les différens
endroits ôii on les ramaffe'; lés foüdures multipliées
d’une infinité de'fragmens ; le defféchëm'ént que dévoient
éprouver lés parties méfàlliqu’és, à'PaSion
d’un feu extrêmement v if & continue lôhg^tems ; 6c
enfin les écailles ou exfoliàtiôns qüi‘ fe défàchënt du
f ir chauffé & battu., qUé-je n’âVois pas'ehcôre bien
obfervééS, me pàroifToiértt autant dëf caùfes qui
dévoient concourir à rendté cë f ir iriàüvais^6t d’un
ufage dangereux. Après l’avôir' miëùx obférve , 6c
m’être convaincu , par dès expérienéés-en grand,
qu'il reuffiffoit très-bien à là' compofitïôh; dés maquettes
, en obfervant dé lé côüVfif dé' dëùx1 aüfres'
morceaux de fer, pour le garantir1 dë l’à&îdn trop
vive du feii , 6c que leS cahôhs , qui en proVehoient,
étoient capables de la plüs grande réfîffaricè ; :cônfi-
dérant d’ailleurs que la plupart des canons dë'fufil