traverfa ouvertement les deffeins du general. Apres
ia journée de Canne» Annibal envoya demander - à
Carthage » des provifions 8c des troupes : Hannon
profita de cette demande pour affaiblir la gloire du
vainqueur. «11 a difperlé, difoit-il, les armées Roumaines
& il follicite un renfort, que demanderoit-il,
s’il avoit été vaincu? Il fie vante de s’être emparé
■ du camp ennemi 8c de leurs provifions , il demande
des vivres ; 8c que demànderoit-il, s’il avoit perdu
fon camp » ? Ce fut par ces fophifmes qu’il tâcha
d’obfcurcir l ’éclat dès vi&oires de fan rival , dont
il devoit être l’admirateur. Quoiqu<’il fut véritablement
citoyen, il prépara la ruine de fa patrie, en
refufant de concourir aux deffeins du héros qui feul
pouvoit la défendre. ( T—N.')
Han n o n , (/&ƒ. des Carthaginois.) célébré navigateur,
fut chargé par le fénat de Carthage, de faire
le tour'de l’Afrique 8c de découvrir de nouvelles
terres dont les produ&ions puffent devenir un objet
de commerce; l’hiftoire de fes voyages paroît fabit-
leufe. Tout ce qu’il raconte de l’île Atlantide eft
une exagération qui ne peut fouffrir l’examen de la
critique : quelques favans .ont prétendu qu’étant
entré dans l’Océan par le détroit de Gibraltar, il pénétra
jufqu’aux extrémités de l’Arabie', 8c que ce fut
le défaut de vivres qui l’empêcha de pouffer plus
loin fes découvertes^.
L’hifloire de Carthage fait encore mention d’un
général nommé HANNONqui futaffacié à Bomilcar,
dans le commandement de l’armée qu’on leva pour
s ’oppofer aux progrès d’Agatocle. Il cofnbattit à la
tête de la cohorte facrée, troupe intrépide qui fou-
tint avec fermeté le choc des Siciliens ; fa réfiflance
fut inutile. Hannon accablé d’un déluge de pierres 8c
percé de coups, perdit la v ie , 8c fa mort fut fuivie
de la déroute de fan armée. (T—n .)
HAQUIN, ( Hiß. de Norwege. ) roi de Norwege ,
fut couronné vers l’an 1250. Il fe ligua avec la Suede
contre Chriftophe I , roi de Danemarck : il mit en
mer.une flotte de trois cens voiles, força le paffage
de Munfter-Sund, 8c ravagea les côtes de la Hal-
Iandie ; mais l’an 1257, ces rois, las de verfer fans
fruit le fang des peuples, entrèrent en négociation.
Haquin fe rendit à Coppenhague ; les deux ennemis
s’embraflèrent, renoncèrent à leurs prétentions ref-
peéfives , 8c jurèrent une alliance éternelle. Haquin
demeura tranquille dans fes états jufqu’à l’année
1287 1 mais ayant donné un afyle aux rébelles qui
avoient maffacré Eric V I I , roi de Danemarck,' on
vit fe rallumer entre les Danois 8C les Norwégiens
une guerre cruelle. Elle dura neuf ans, des milliers
d’hommes périrent, des villes entières furent livrées
aux flammes, dè riches provinces furent changées en
déferts ; les deux partis furent également cruels,
également malheureux, 8c Eric ne fut point vengé.
Haquin mourut dans un âge très-avancé. On con-
noît plus ce.qu’il fit pour nuire à fes ennemis que ce
qu’il fit pour rendre fes fujéts heureux. Il y a eu en
Norwege plufieurs rois de ce nom ; mais l’hiftoire
des premiers paroît un peu fahuleufe, 8c celle des
derniers peu intéreffante. ( M. d e Sa c y . )
HARALD, ( Hiß. du Nord.') prince de Norwege,
voyagea d’abord dans l’Orient, 8c fe fixa à la cour
de l’empereur de Conftantinople ; mais ayant appris
que Magnus ; fon neveu 8c fon perfécuteur, déjà roi
de Norwege, difputoit encore à Suénon la couronne
de Danemarck, l’efpoir de la vengeance le
ramena dans le Nord, vers l’an 1046 : il fe ligua
d’abord avec Suénon ; mais ayant étudié le cara&ere
de ce prince, 8c comptant peu fur fa reconnoiffance,
il quitta fon parti pour embraffer celui de Magnus ,
qui lui céda une partie de la Norwege. Magnustégna
donc en Danemarck; mais après fa mort Suénon
remonta fur le trône ; Harald prétendit l ’en chafler.
( Voyii S'tiÉNON II, dans ce Supph) les-denjr p'rma
ces fe firent une: guerre cruelle; Suénon man*
qua plufieurs fois au rendez - vous qu’il ' avoit
marqué pour un combat décifif ; enfin on en vint
aux mains , 1a flotte de Haraldremporta une vi&oire
fignalée ; Harald, quoique triomphant, entra en né*
gociatiort , 8c termina tant de débats par un traite
qui lui afluroit de grands avantages , mais qui’ ne lui
donnoit pas la couronne. (.M. d e S a c y . ) -
Ha r a l d , ( Hill; de Danemarck.) Plufieurs rois
de Danemarck ont porté ce nom ; mais la 'plupart.,
ou n’ont,rien fait de grand, où Ont manqué d’hifto-
riens pour faire paflèr leurs: a&ions à la'poftérite.
Nous ne parlerons que de Hürald V I 8c Harald V I I ,
plus connus que les autres.
Ha r a l d VI fut proclamé roi de Danemarck vers
l’an 8 14 , par une fa&iam'ptiifTante , tandis-qu’uri
autre parti couronnoit Regner , fils de Sivard.’:o n
vouloit d’abord que les deux fouverains pàrtageaf-
fent emr’eux l'autorité fuprême 8c leursétàts; 8c le
moyen dont on fe fervit pour prévenir la guerre
civile, fut précifément ce qui l’alluma. Harald fut
vainqueur; 8c tandis que fan rival, de roi devenu
brigand, alloit porterie ravage vers.le midi, il fit
alliance avec l’empereur Louis-le-Débonnaire. Ré-
gner,reparut bientôt ; HaraldiLit vaincu , s’enfuit à
la cour de Louis, 8c y trouva des fecours. puiffans ,
avec lefquels il rentra dans le Juthland; chaffé bientôt
de cette contrée, il fit de nouveaux efforts ,
remonta fur le trône, 8c,en tomba prefque aufli-tôt;
il fe retira en Frife où'il vécut dans l’obfcurité. Telles
étoient les révolutions qui agitoient un état où l’ordre
de la fucceflion à la couronne, n’étoit réglé que
par les caprices du peuple , 8c les intérêts des
grands.:.
H a r a l d V I I , roi de Danemarck ; on prétend
qu’il fut affaffm avant d’être roi, 8c que le meurtre
de fon frere lui ouvrit le chemin du trône, vers l’an
920; à peine y fut-il monté qu’il fit poignarder un
feigneur Danois, nommé Ach, dont la puiflance lui
donnoit de l’ombrage. Ce prince fit élever deux
maufolées , l’un à fan pere, l ’autre à fa mere ; mo-
numens de fan fafte , 8c non de fon refpeél pour la
mémoire de fes parens. Il eut avec une couturière ,
nommée Efa, un commerce criminel; Suénon qui
lui fuccéda fut le fruit de fes amours. Richard duc
de Normandie avoit été dépouillé de fes états parle
roi de France, Harald partit aufli-tôt pour. le venger
, remporta une viâôire fur les François , prit le
ro i, 8c le força à rétablir Richard dans fon duché;
enfin Haraldïe convertit à la foi chrétienne, 8t n’ea
fut ni plus doux , ni plus jufte.; il fit la guerre à tous
fes voifins : fon ambition tje cherchoit point de prétexte
, il ne connoifloit d’autre droit que celui delà
guerre. Il reconnut Suénon pour fon fils ; 8t pour
prix de ce bienfait, le jeune prince leva contre fon
pere l’étendart de la révolte. Harald mourut vers
l’an 980, après un régné très-long. ( M. d e S a c y . )
HARANGUE , f. f. ( Belles-Lettres. ) Après avoir
expofé avec foin les raifons pour & contre: l’ufage
des harangues, dans la narration hiftorique, l’homme
de Lettres qui a donné cet article dans le Dicl. raif,L
des Sciences, ôcc. laiffe la queftion indécife : fans être
plus tranchant que lui, je me permettrai d’indiquer
le point de la difficulté, 8c les moyens de la réfoudre.
Eft-il permis à l’hiftorien de céder la parçle à fes
perfonnages, ou ne doit-il rapporter qu’indireûe-
ment ce qu’ils ont dit, fans les faire parler eux-
mêmes ? , t
Cela dépend de l’ idée qu’on attache à la fincérité
de Phiftoire, 8c de favoir fi on [exige d’elle la lettre
ou l’efprit de la vérité. Si on exige la lettre, il eft:
certain que prefque toutes les harangues dire&es font
interdites à l’hiftoire ; 8c à l’exception de celles qui
ont été réellement prononcées dans les confeils, dans
les affemblées , dans les cérémonies publiques, 8c
dont on a tenu regiftre , 8c de quelques mots que les
rois^, ou que les capitaines ont réellement adreffés
à leur peuple ou à leur armée, 8c que la tradition a
confervés, il eft rare que Phiftorien ait des harangues
d Celles dont l ’hiftoire ancienne eft remplie font elles-
mêmes fuppofées : ce n’eft pas que l’efprit 8c le caractère
de ceux qui parlent n’y foient fidèlement gardés;
dans celles de Thucidide , par exemple, on diftingue
très-bien le génie des Athéniens 8c celui des Spartiates
; on y reconnoît Périclès , Nicias , Alcibiade, au
langage que Phiftorien leur fait tenir : quant au fonds
même il eft vraifemblable qu’il en étoit inftrujt^mais
quant au ftyle, les bons critiques s’apperçoivent
qu’il eft fa&ice, parce qu’il eft toujours le même.
On peut prendre à la lettre les harangues de Xéno-
phon , quand c’eft lui-même qui parle à les compagnons
8c les encourage dans leur retraite ; mais
lorfqu’il fait prendre la parole à Cambyfe, à Cyrus ,
à Ciaxare, croira-t-on de même qu’il rende fidèlement
ce qu’ils ont dit ?
Polybe, en faifant parler Scipion 8c Annibal dans
leur entrevue, a-t-il répété leurs difcours ? Tite-
Live les a-t-il tranftrits ? Et les belles harangues qu’il
met dans la bouche, d’Horace le pere , de Valerius
Publicola, de Camille, de Manlius , de Fabius,
d’Hannon, de Scipion, &c. ne font-èlles pas auflï
vifiblement artificielles que celles de Marius 8c de
Catilina dans Salufte ?
Il eft plus vraifemblable que Tacite ait recueilli
les propres difcours de Germanicus, de Tibere, de
Néron, de Séneque , de Thraféas, d’Othon, fur-
tout d’Agricola ; mais fi on y reconnoît leur efprit,
on n’y reconnoît pas moins la plume de Tacite ; ainfi
dans toute l’hiftoire ancienne , à l’exception de quelques
mots confervés par tradition , tout paroît
compofé.
Ceux donc qui veulent que l’hiftoire fait un expofé
littéral de la vérité, 8c qui lui interdifent tout
ornement qui reffemble à de l’artifice, doivent re-
jetter ces harangues.
Mais il y a pour l’hiftorien une autre façon d’être
v ra i, c’eft de garder fidèlement le fonds des chofes
8c des faits, 8c de préférer pour la forme le tour le
plus propre à donner au récit plus de chaleur 8c
d’énergie. S’il eft donc vrai, par exemple, que dans
les affemblées de la G rece, tel fut l’objet des délibérations,
des négociations, des harangues, tels furent
les motifs des réfolutions; Thucidide n’a pas été un
hiftorien moins fidele, en faifant parler les députés
des villes, que s’il avoit indireûement réfumé ce
qu’ils avoient dit.
Il n’eft pas vrai que Gracchus 8c que Marius aient
tenu précifément le langage que leur font tenir Tite-
Live 8c Salufte ; mais il eft vrai que tout cela étoit
dans leur aine : 8c il eft plus que vraifemblable,
qu’ayant de pareils moyens d’émouvoir les efprits
8c de les foulever, ils étoient l’un 8c l’autre trop
éloquens 8c trop habiles pour ne pas les taire valoir.
S’ils n’ont pas dit les mêmes chofes dans les mêmes
termes 8t dans une feule harangue, ce font des propos
détachés qu’ils ont tenus 8c fait répandre, 8c que
l’hiftorien n’a fait que reffembler pour leur donner en
même tems plus de chaleur, de force 8c de lumière.
De quoi s’agit-il après tout? Il s’agit de paroître,
en écrivant l’hiftoire, un peu plus ou un peu moins
artificiellement arrangé ; car fi l’hiftorien prend ce
tour ufité : Gracchus repréfenta au peuple que fa filiation
étoit pire que celle des efclaves , qu'on le frujlroit
du prix de fes travaux ; que le fénat avoit tout envahi :
Marius dit à fes concitoyens que, li les nobles le mépris
Tome I I I .
foient f ils rüavoient qu'à méprifer auffi leurs propres
aïeux, dont la vertu avoit fait la nobleffe ; que s'ils lui
envioient fon élévation, ils rdavoient qu'à lui envier
auffi fes travaux, fon innocence, les dangers qu'il avoit
courus, dont fa grandeur étoit le prix ; ce récit aura ,
je l’avoue , l’air plus fimple , plus naturel, plus fin-
cere qu’une harangue ; mais cela même encore n’eft
pas la vérité littérale , 8c chaque article du difcours.
même indireâ:, ne fera qu’une conje&ure fondée fur
les carafteres, ou autoriléepar les circonftances des
chofes, des lieux 8c des tems ; il n’y a donc prefque
jamais , dans l’une 8c l’autre maniéré de faire parler
fes perfonnages , qu’une vraifemblance , plus ou
moins approchante de la réalité.
Ainfi la difficulté fe réduit à favoir fi l’apparence
de la vérité eft aflez détruite par le difcours direét,
pour que l’on s’interdife, en écrivant l’hiftoire, ce
moyen d’être dans fon récit plus vif, plus véhément,
plus clair & plus rapide. Or voici , ce me femble,
un milieu à prendre pour éviter les deux excès : que
le difcours qui n’eft qu’un expofé de faits, une accumulation
de motifs raifonnés, fenfibles par eux-mêmes,
8c qui n’avoient befoin pour frapper les efprits
d’aucuns des mouvemens de l’éloquence pathétique,
fait rappellé indireâement 8c en fimple réc it, fa
précifion fera fa force. Mais s’agit-il de développer
les fentimens d’une ame palfionnée, 8c de faire pafler
dans d’autres âmes la chaleur de fes mou vemens, on
peut, je crois fans balancer, employer la maniéré
direâe ; la vérité même feroit trop affaiblie, 8c per-
droittropde fon effet, fi elle étoit froidement réduite
à la fimple narration. Le leéleur s’appercevra bien
qu’on aura mis de l’art à la lui préfenter, mais il fen-
tira que cet art n’eft pas celui qui la déguife, 8c qu’en
la rendant plus fenflble il n’a pas voulu l’altérer.
(A f . Ma rm o n te l . )
HARAS, ( Hifl. nat. Zool.) chevaux de l’un 8c
l’autre fexe, deftinés à la propagation de l’efpece :
ce terme eft encore pris pour défigner le lieu où ces
chevaux font établis ; on dit les haras du royaume,
pour lignifier les chevaux entiers ou étalons diftribués
dans les provinces chez divers particuliers ; chevaux
deftinés à fervir les jumens de ces cantons.'[L’on
dit encore, les haras du ro i, les haras de tel prince,
de tel particulier , pour indiquer le lieu où fe trouvent
raffemblés 8c établis certains nombres d’étalons,
8c uniquement employés à la propagation : tels font
les haras d’Hyefme, de Pompadour, &c. Il en eft encore
qui appartiennent à des particuliers , qui ne le
cedent en rien à ceux-là, par l’efpece : tels font les
haras de MM. de Bouchet de la Getiere, chevalier
de l’ordre de S. Louis, en Poitou; Loiffon de Gui-
naumont, 8c de Chalette, en Champagne, 8c plufieurs
autres que l’on pourroit citer : les étalons 8c les jumens
qui compofent ces haras, ne font employés à
aucun autre ufage qu’à la population ; au lieu que
dans ceux du royaume, les propriétaires des jumens
les emploient à différens travaux. On ne peut par
conféquent établir la même adminiftration pour ces
deux efpeces de haras, ce qui nous oblige d’en traiter
féparément : comme le premier eft fans contredit le
plus parfait., le feul à proprement parler qui mérite
le nom de haras, ce fera lui qui fervira de réglé, 8c
par lequel nous commencerons. Le but de tous haras
eft l’augmentation de l’efpece , 8c la plus‘grande
perfe&ion ou la correftion des défauts de la race
dominante ; cette amélioration a des rapports intimes
avec une foule d’objets qui lui femblent étrangers
; ces rapports font fouvent fi nombreux 8c fi
délicats, qu’il eft difficile de les faifir8cd’en profiter.
D’ailleurs la nature femble avoir pofé des bornes
qu’il n’eft pas poflible de franchir ; il n’eft permis que
d’en approcher, quiconque efl'aieroit de les paffer
s’y briferoit ; elle paroît avoir attaché à chaque pays,
O o ij