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dignité,, & ne fe trouve plus au rang des cités ,dans
la Notice.de s Gaules , rédigée fous l’empire de ce
prinëe : elle avoit été ruinée apparemment. L’églife
de: S. Vandrille fut bâtie au commencement du hui^
ticme fie:cle, des pierres toutes taillées qu’on tiroit
ü e le s ru ine s .
Sous Louis le Débonnaire, Lillebonne eft appelée
par le chroniqueur de Fontenelle', Cajlrum
quondant nobilifiîmum ac firmiffimum ; il lui donne
même la qualité de cité. Dans le moyen âge, elle
reprit quelque éclat fous les ducs de Normandie ,
&C Guillaume le Conquérant y tenoit fa cour, 6c y
affembla un concile en 10B0, où préfida Guillaume,
dit la bonne ami, archevêque de Rouen.
Il y paffoit un grand chemin qui conduifoit à Ca-
racotïnum , fitué à l'embouchure de la Seine, 6c qui
venoit par Rouen de Paris, Troyes 6c Sens. Une
autre route venoit de Boulogne, Etrées, Abbeville,
Lillebonne ; de-là à Brevpdurum( Pont-Audemer ) ,
&C à Noviomagum ( Lizieux ) ; ainfi Juliobona étoit
placé au point d’interfeftion de la voie romaine de
Caracôtinum (Harfleur ou Graville) à Augufiobona
( Troyes ) , 6c de la voie de Bononia à Breviodu-
num: une autre chauffée y conduifoit àFecamp,
félon les Chartres du xne. fiecle.
Toutes les indications ne peuvent convenir qu’à
Lillebonne au pays de Caux. Cette cité étoit d’une
grande enceinte : on y découvre tous les jours des
fouterrains, des caves, des chaînes, des murs , des
tombeaux 6c des monnoies Romaines , dont les plus
récentes font de l’empereur Philippe. M. de Caylus,
dans fon tome VI des Antiquités, parle de fon château
& de fon amphithéâtre dont il donne les plans,
qui annoncent une ville forte 6c peuplée ; mais il
n’eft point de ciment que le tems ne diffoude. Lillebonne
n’eft plus qu’un bourg compofé de deux pa-
roiffes 6c d’environ 240 feux, avec titre de comté,
à- la maifpn de Lorraine. V 3ye{ les Mémoires de Cacadémie
desinferiptions & belles-Lettres , tome XIV^ notice
delà Gaule, par d’Anville, p a g .39 3 . Mémoires
pris fur ies lieux où j’étois en 1765. (6V)
JÜLIUS-PORTUS, ( Géogr. anc.)Le Pon-Jule,
ainfi appellé en l’honneur de Céfar,fut l’ouv,rage
d’Augufte. Cet empereur croyant que la côte d’Italie
n’avoit que des ports peu fürs 6c trop refferrés
pour recevoir un grand nombre de vaiffeaux, conçut
le deffein dé joindre le lac Lucrin àl’Averne, & l’un
6c l’autre à la mer, pour en faire un vafte bafîïn qui
put recevoir les flottes les plus nombreufes , 6c les
mettre à couvert des vents. Agrippa fut chargé de
l’exécution de ce grand ouvrage, & s’en acquitta
parfaitement. Il fit couper, l’an de Rome 715 , une
langue de terre qui féparoit les deux lacs, 6c donna
ainfi un écoulement aux eaux de l’Averne: il fit réparer
6c exhauffer une digue à l’entrée du lac Lucrin
, pour donner entrée aux, vaiffeaux , 6c y laiffa
deux ouvertures par lefquelles les vaiffeaux entroient
jufqii’au fond de FAverne, qui formoit proprement
le Pon-Jule. En même tems, il fit abattre
les forêts qui couvroient les bords de ce lac, 6c qui
en rendoient l’air infect 6c peftilentiel.
C’eft dans ce port qu’Agrippa raffembla la belle
flotte qu’Augufte devoit employer contre Pompée
, 6c ,qu’il forma 20000 rameurs ou matelots.
Voye1 Rollin, Hiß. Rom. tome XV.
Le rems qui détruit tout, n’a pas épargné cet ouvrage
qu’Horace appelloit regis opus. Un tremblement
de terre a converti le lac Lucrin en une montagne
de cendres, 6c la fameufe digue d’Agrippa
eft aujourd’hui fous les eaux. Géogr. de Virgile, par
M. Helliez. (C.)
3U M ART ou lu mars , f. m. ( Hiß. nat. ) eft le
nom d’un animal qu’on a dit fe trouver dans le Piémont,
ÔC qu’on a cru naître de l’accouplement d’un-
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taureau & d’une ânéffe, ou bien d’un âne te d’tinç
vache., & toujours de l’accouplement entre la racé
des chevaux Ôt celle des boeufs. On trouvé dans Cardan
plufieurs particularités fur cet animal ; on à af-
furé qu’il étoit fans cornes, mais que fon ongle
étoit fendu.
Toutes ces fables n’ont pas réfifté aux efforts de
la vérité. M. le cardinal des Lances a fait difféquer
des jumars, efpece de mulet connue des Romains ,
& née-du cheval 6c del’âneffe, plus petite què le
mulet ordinaire, mais capable comme lui d’un grand
travail. Cet animal eft un véritable âne ; il n’a ni
corne, ni ongle fendu, ni quatre eftomacs. Sa queue
eft plus groffe que celle de l’âne.
En général, deux animaux de différentes efpeces
engendrent enfemble, pourvu que ces efpeceS lôient
fort voifines. Le bouc 6c la brebis, le chien 6c le
renard, le loup 6c la chienne, le coq 6c lé faifan, lè
ferin 6c le chardonneret 6c avec la linotte ont produit
des petits qui, dans la claffe des oifeaux, multiplient
quelquefois l’éfpece, quoiquè en général les
animaux nés de parens de deux efpeces différentes
foient le plus fouventftériles.; les mulets du moins
6c les mules fi connues le font prefque toujours. La
caufe de cette ftérilité eft inconnue ; tout ce qu’on a
débité là-deffus s’eff trouvé ou fabuleux , ou dans
l’ordre ordinaire de la nature. La mule a l’ouverture
de l’uretre à la même place que la jument, 6c l’uté-,
rus eft le même.
Dans,la claffe des plantes, M. Koëlreuter a fait
des expériences très-exaftés fur les nouvelles plantes
nées d’une efpece, dont il poudroit les ftigmates
avec la poufliere des étamines d’une autre. Il s’eft
trouvé que cet accouplement artificiel réufliffoit,
quand les deux plantes étoient du même genre,
comme le font deux oeillets différens, deux efpeces
de tabac, deux efpeces de jufquiame. Dès que la
différence étoit trop grande, l’opération devenoit
ftérile. Le mulet végétal reffembloit aux deux parens,
un peu plus cependant à la mere, ou bien à celui
des parens, dont on avoit le plus fouvent réitéré
l’afperfion de la poufliere fécondante, en la répétant
fur une fuite de générations. La fertilité étoit
plus confiante du côté de la mere. M. Koëlreuter
ne croit pas que la nature feule produife des plantes
mitoyennes, 6c on n’a pas d’exemple d’une véritable
efpece nouvelle, ni entre les animaux, ni entre des
plantes, quoique dans l’un 6c l’autre régné, il y ait
beaucoup d’exemples de variétés eonfidérables 6c
confiantes. (H . D . G. ).
§ JUMELLE, f. f. bijuges infiitee, ( terme de Blafoné)
fafee formée de deux burelles. Voye^fig. 13 7 , plane.
I I I de Blafon, dans le Dicl raif.'des Sciences, &c.
La jumelle occupe dans l’éçu, un efpace égal à la
fafee ; cet efpace fe divife en trois parties égales horizontalement
, la partie du milieu eft le vuide entre
les deux burelles , dont la jumelle eft formée.
Les jumelles Ordinairement au nombre de deux ou
de trois dans l’écu font placées à égales diftances que
le même nombre de fafees. •
Les jumelles fe placent non-feulement en fafcé,'
mais aufli en bandeI en fautoir, &c. quand elles font
autrement qu’en fafee, on en exprime la pofition en
blafonnant.
Landois, Sieur d’Herôuville, en Normandie;
gueules à deux jumelles a or;
De GOuffier de Thôis, en Picardie ; d’or à trois ju melles
de fdblè'.ffif
La reine,' Catherine de Médicis étant régente
du royaume , fit venir François Uè Goùffier, fei-
gneur de Bonnivet , lieutenant - general au gouvernement
de Picardie, capitaine de cinquante hommes
d’armes des ordonnances, pour lui annoncer
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qu’elles avoit nommé fon fils à uri régiment d’infanterie
: « Madame, lui dit - i l , il V a un mois que mon
» fils paffant fur le fôir dans une rue de Paris, allez
» écartée, fut a t t a q u é 'p a r cinq hommes ; le capitaine
» L a v e r g n e , qui rie le connoiffoit point, venant à
» paffer par cette rué, mit l ’ é p é e à la m a i n , fe joi-
» gnit à lui & Chargea feS affàflins avec tant de cou-
» rage que deux furent tués, les trois autres s’en-
» fuirent: agréez, madame , que mon fils ne paffe
» point avant fon bienfaiteur : vous mettrez le com-
» bleà la grâce que vous nous accordez., en Voulant
» bien en difpofer en faveur dé Lavergne : il s’eft
» diftingué en plufieurs o'ccafions ; vous vous acquer-
» rez un des plus braves hommes de France 6c qui
» vous fera entièrement dévoué. ,A l’égard de moi
» 6c dé mon fils, vous connoiffez, madame, notre
» inviolable attachement pour votre majefté ».
» Un coeur aufli rècônnoiffant que le v ô t r e , lui
» r é p o n d i t Catherine de Médicis, engage à ne le
» pas refufer ; je conferis à ce que vous fouhaitëz 6c
» m’oublierai pas Votre fils »^
C e François de Goiifiier de Bon niv et, qui étoit
chevalier de faint M ich e l, fut noriimé chevalier du
faint-Efprit à là première prdriiotion de cet o rd re ,
le 31 décembre 1578. ( G. D . L. T. )
§ JUMIEGE, au pâÿs de C a u x , (Géogr.') bourg
de Normandie, fur là Sèiri'e, à trôis lieues de Cau-
debec & de S a in t-V an d tille , à cinq de R o u e n ; remarquable
par üiié .célébré abbaye de bénédiâiris
fondée en 660, par faint Philibert, fon premier ab bé ,
des bienfaits de Clov is I I , &: de fainte Batilde, fâ
femriie.' Sous faint A icad re , deuxieme abbé , il y
eut n euf cens môiriéS: l’abbé énibarraffé de leur
fubfiftânèê, eut rév é la tio n , dit la chronique, que la
moitié iroit dans trois jours au c ie l; ce qui fu t v é rifié
par Févériement. Deu x freres de C lo v is II s’y
firent religieux & y font inhumés, aufli bien que
Taflillon,. duc de Bavière & fon fils.
Au ix e fie c le , les Normands, fous la conduite de
Hafting,-faccagerent Jumiege: Guillaume Longue-
é p é e , duc de Normandie, la rétablit en 904. C ’eft la
quatrième maifon unie à la congrégation de faint
M a u r, en 1616. Elle a produit plufieurs hommes
illuftres , entre lefqüels oh compte faint Hugues,
abbé & archevêque de R o uen , qui y eft inhumé;
faint Eucher, évêque d’Orléans ; R o b e r t, évêque de
Londres ; F recùlfé, évêque de Lifieux ; Jacques d’Am-
b o ife , évêque de C lermont ; Hélifàcar, abbé, & chancelier
de Louis le Debohnàire ; Guillaume dé Jumiege
, hiftorien fort crédule du x ie fiecle mort en 1088;
don Thomas D u fo u r , fâvant bénédi&in dé Jumiege.
C e fu t , dans le i x & Xe fiecle , uri féminaire d’évêques
, dont il eft fôriverit parlé dans 1 hiftoire de
l’églife gallicane.
On voit encore la fallë des gardes de Charles V I I ,
longue de 102 pieds, unique refte dés appartenons
que ce prince avoit çhoifis pour fon lé jo u r , entre le
dortoir & l'infirmerie ; pendant que la belle Agnès
So rel faifoit le lien au Menil à un quart de lieue de
Jumiege, oîi elle mourut âgée de quarante an s , pleu-
rée du roi & de fes fu je ts , en 1449 » ehè fut appellée
la belle des belles; & plus attachée à la gloiré du roi
qu’à fa perfonné, elle né voulut jamais foufftir qu’il
abandonnât le fiege d’Orléans. « O u b lie z -m o i, lui
» d it - e lle ;.jufqu ’à ce que Vous a ÿ èz yaincu vos
» enrieriiis ». C ’eft pêvit-être la'féiilé niàîtrëffe dé
nos rois dont on piiiffe d ir e , qu’elle avoit allumé le
flambeau de la gloire aux feux de l’amoiir. François I
lui fit ces quatre vers.
Gentile Agne£ plus d'honneur tu mérite,
Ta caujc étant de France recouvrer,
Que ce que peut dedans 'un cloître ouvrer,
Claufe hohaïti', ou bien dévot hermite, -
I V R
On les a ainfi rendu en latin :
Lißa dum fervas, plus Agnes pulchra mereris,
Quam caßus frater , quanive pudic.a for or.
Ses entrailles furent enterrées à Jumiege, & fön
corps à Loches : fon infcripiiori en ces deux endroits
finit ainfi :
Bella fui quondam Agnes nomine, regia pellex ,
. Nunc tumulo vernies turpe cadaver alit
Ilia Gemeticis latitantur , coeur a. Loc/iis. HH
JURENSIS FAG U S , ( Géogr, du moyen jgc.) le
défert de Jura ou terre de Saint - Claude.
Le mont Jura qui, fe]on Céfar, étoit entre les Se-
qiiani & les Helvetii, que Strabon appelle Juraßus,
& Ptoloméei/o/v*, & Jonas, dans la Vit de S. Colom-
barre, Juranus, a donné le nom à ce pagus. Grégoire
de Tours rapporte que Romain 6c Lupicin ,
freres bugiftes, établirent leur monaftere, in Jorenfis
deferti fecretis : ce liéu s’appelloit Condate ou Conda-
tixone depuis S. Oyan, du nom du quatrième abbé, Eu-
gendius ou Augendus, 6c enfin Saint-Claude du nom
du douzième abbé mort à la fin du vue fiecle. La
montagne a aufli pris le nom de Mont-Saint-Claude.
Cette célèbre abbaye érigée en évêché en 1742,
eft délîgnée dans les anciens titres fous le nom d’i c -
clefia Jurenfis.
Ce pagus s’étendoit depuis la Serriere-fous-Jougne
à Echalon en Bugey, & étoit borné par la Serine, le
lac des Rouffes & Orbe.
On lit dans la Vie de faint Colombarre, écrite par
Jonas, que Ramelene, duc de la haute Bourgogne ;
fonda au commencement du v u e fiecle un monaftere
dans le mont Jura fur la riviere de Nozon, in
faltu Jurenfe fuptr Novifondm : on croit que c’eft
Romain - Moutier, oit s’arrêta faint Vandrille à fon
retour d’Italie, en 667, & oh il refta dix ans. (Dunod.
hiß. T. 1, pag. ÿ.f:)
Laucone, aujourd’hui Saint-Lupicin, parce que
ce folitàire y fut inhumé, étoit aufli in Turtna Ju-
renß. Un diplôme de Charles-le-Chauve , daté dé
Reims, en 862, adjuge Laucone, difputé par Gé-
deon, Archevêque de Befançon, à Ricbert, abbé
de Condat. ( lb. p. 10c) -, lio . )
La Chaux-d’Arlier & Cicon font marqués dans
la région du mont Jura, par une chartre de 941 ,
Carlis Arlicana & cico in turma Jurenfi. Cette première
terre fut donnée aux moines d’Agaune. ( Voye^
Dunod. hiß. T. I , p. 294. )
U fie O ^ V e ft aufli cité en 9 67, in Turma Jurenfi.
Villars près de Moirans à une des gorges dé Jura,
détruit par les Sarafins au v i i e fiecle eft appellé Vicus
Jurenfis, Villa Jürenfis. ( Ib. T. I ,p . 133 . )
Anféric, archevêque de Befançon, ayant été bien
reçu à Dijon, par les chanoines réguliers de Saint-
Etieririe, leur accorda une terre fituée dans le Jura
locum in Jurenfi terra fitum. Le pape Innocent, dans
fa bulle pour Saint-Etienne, de l’an 1139, nomme
ce lieu Bonnevalle OU Belvau, de Bond vaile Jurenfi,
( Voye{ hifi. Eccl. J. Et. in-fol. p. 83. pt. J»<f. )
Le château de Joux eft appelle Cafirum Jürènfe par
Güichenori, à l’an 1018, dans fa Biblé Jebuf. p. 11.
L’abbaye de faint Rambert de Joux dans le Bugey
eft nommée Sanclus Regribertus Jurenfis, eri 1538.
(Ib. p. 13$.,)
Fredegaire parle du Pagus ultra Juranus : la bourgogne
Transjùràne occupoit au ixe fiecle leS deux
côtés dù Mont-Jura. ( C. )
IVR Y , Ivriacùm, (Géogr.) bourg fur l’Eurë, entré
Àriet 6c Pacÿ, à quatre lieues dé Dreux, quinze dè
Paris, fix d’Evrëux, au pied d’ùftè colirie où étoit
un château fort par fa fituation, ruiné maintenant.
Ce fut dans là plaine à'ivry que Henri IV battit les