•guindé électrique à l’article Gerf VOLANT, Si
il imagina encore l’autre inftrument, qu’on a aufli
■ décrit au même article, pour obferverde jour la
forme delà lumière éle&rique, comme étant l’indice
le plus fur d e l’efpece d’éle&ricité des nuages, qui
eft toujours de même nature que celle de la barre
à caufe de fa pointe. D ’autres phyficiens fe font
contentés d’approcher alternativement un bâton de
cire ou un tube de verre , des petites boules de
liege attachées ;à la barre avec des fils de lin, pour
juger par l’attraftion ou la répulfion de ces boules
Si du bâton de cire ou du tube de verre de quelle
efpece eft Péle&ricité des nuages, qui fera pofi-
tive fi le bâton de cire frotté attire les boules, Si
négative s’il les repouffé ; le contraire a lieu quand
on fe fert du tube de verre. Enfin ce pere employa
beaucoup de monde pour obferver en même te ms
dans les différens lieux oit il avoit de ces machines.
Mais avant que de donner le réfultat de fes expériences
,-il rapporte d’abord les obfervations qu’iia faites
fur la formation desnuagesorageux. Nous le fuivrons
donc aufli dans la route qu’il a tenue , en commençant.
par fes obfervations. >.
La première apparence d’un orage qui arrive ordinairement
lorfqu’il fait peu ou point de v en t,
eft un nuage denfe , ou plufieurs, qui augmentent
promptement en groffeur, Si s’élèvent dans les
plus hautes régions de l’atmofphere. La furface la
plus baffe eft noire Si à-peu-près de niveau ; mais la
ïupérieure eft parfaitement bien voûtée, & bien
terminée. Souvent plufieurs de ces nuages Semblent
entaffés les uns fur les autres, tous voûtés de la
même maniéré; mais enfuite ils s’uniffent, fe renflent
Si étendent leurs voûtes.
Pendant que ce nuage s’é lève, l’atmofphere eft
communément remplie d’un grand nombre de nuages
féparés, immobiles, Si de figures fingulieres Si gro-
tefques. A l’approche de la nuée orageufe, tous
ces nuages vont s’y joindre, & prennent une figure
plus uniforme à mefure qu’ils en approchent,
jufqu’à ce qu’étant arrivés fort près du nuage orageux
, leurs parties s’étendent réciproquement les
unes fur les autres; ils fe réunifient aufli-tôt, & ne
ferment bientôt tous enfemble qu’une feule maffe
uniforme. Il les appellent nuages étrangers, parce
qu’ils viennent pour augmenter la grandeur du
nuage orageux. Mais quelquefois le nuage orageux
fe gonfle Si groflit fort vite fans qu’il s’y joigne aucun
de ces nuages, parce que les vapeurs qu’il y a
dans l’atmofphere fe forment elles-mêmes en nuages
par-tout où paffe le nuage orageux. Quelques-
uns de ces nuages étrangers paroiffent comme des
franges blanches, fur les bords du nuage orageux
ou au-deffous ; mais ils continuent à devenir de
plus en plus fombres à mefure qu’ils s’approchent
pour s’unir à lui.
Quand le nuage orageux eft devenu d’une groffeur
confidérable , fa furface inférieure eft fouvent déchirée
; certaines parties pendant vers la terre fans
en être entièrement féparées. Quelquefois cette
furface fe gonfle en diverfes groffes protubérances,
qui tendent uniformément vers la terre ; d’autres
fois tout un côté de nuage eft incliné vers la terre
à laquelle fon extrémité touche prefque. Quand
l’oeil eft au-deffous d’une nuage orageux, après
qu’il eft devenu grand & bien formé, on le voit
s’abaiffer Si devenir prodigieufementobfcur: dans
le même rems l’on voit plufieu'rs petits nuages étrangers
( dont on ne peut jamais appercevoir l’origine)
dans un mouvement rapide, Si étant pouffés en bas
fuivant des direftions tout-à-fait indéterminées. Tandis
que ces nuages font agités du mouvement le
plus rapide ; c’eft alors que la pluie tombe ordinairement
avec le plus d’abondance; Si fi l’agitation
eft exceffivement grande, il grêle pour l’ordiftàïre*1
Pendant que le nuage orageux fe gonfle Si étend fes
branches fur une grande étendue de pays, les éclairs
s’élancent vifiblement d’une partie de ce nuage à
l’autre ; & fouvent toute fa malle en eft éclairée*
Quand le nuage a acquis une étendue fuffifante, la
foudre frappe entre le nuage & la terre, en deux en-
droits oppofés, laiffant appercevoir fa trace à travers
tout le corps du nuage Si de fes branches. Plus ces
éclairs durent long-tems, plus le nuage devient rare,
& moins obfeur; .jufqu’à ce qu’enfin il fe creve en
• différens endroits, Si Iaiffe voir au travers un ciel
lerein. Quand le nuage orageux eft ainfi difperfé, les
parties qui occupent les régions fupérieures de l’at-'
mofphere , font uniformément étendues Si. fort minces
; & celles qui font au-deffous font noires , mais
aufli minces ; Si elle fe diflipent peu à peu fans être
emportées par aucun vent.
-Après avoir vu ce que ce phyficien a obferve en
plein air , voyons ce qu’il a obfervé enfuite chez
lui à fon appareil. Jamais il n’a manqué d’être éleftrifé ■
à l’approche d’un nuage orageux ou de quelqu’une de
de fes branches, Si le courant de feu qui en partoit ,
étoit d’ordinaire continuel tant que le nuage étoit directement
au-deffus de l’appareil. Il découvrit aufli
de fon côté, que les nuages orageux étoient tantôt
dans un état pofitif, tantôt dans un état négatif d’é-
leâricité,& il éprouva ces changemens dans un même
nuage qui paffa für fon obfervatoire. L’éleâricité
demeuroit plus ou moins de tems de la même efpece
, à proportion que la dire&ion du mouvement
de la nuée orageufe étoit fimple Si uniforme. Mais
quand l’orage changeoit de place, il arrivoit communément
un changement dans l’élettricité de fon appareil.
Elle changeoit fubitement après un violent éclat
de tonnerre; mais le changement étoit graduel quand
le tonnerre étoit modéré, Si que le progrès de la nuée
orageufe étoit lent. M. Canton dit que ce changement
a eu lieu fix fois dans fon appareil en moins de
demi-heure. Le même phyficien a obfervé que du
28 juin au 2y Août 1754, fon appareil avoit été
éle&rifé pofitivement trente Si une fois, qui prifes
enfemble Ont duré trois heures trente-cinq minutes ;
& négativement quarante-cinq fois, dont toute la
durée fut de dix heures trente-neuf minutes.
On voit par toutes ces obfervations tant de l’orage
en dehors que de l’appareil en dedans de la maifon ,
que dans un orage ordinaire il y a une quantité de
fluide élettrique prefque inconcevable; puifqu’un
nombre fort grand de corps pointus, comme les arbres
, les clochers, &c. en tirent continuellement, Si
qu’il s’en décharge une quantité prodigieufe fur la
terre ou de la terre., -;-,
Après avoir donné le précis de ce que le P. Beccaria
dit des apparences , nous préfenterons aufli de
même la maniéré dont ce célébré phyficien les explique
, ainfi que quelques autres phénomènes
principaux Si bien connus de la même efpece d’o rages.
En confidérant l’immenfe quantité de feu éle&ri-
que qui paroît dans les plus petits orages, il juge
impoflible qu’aucun nuage ou même un grand nombre
de nuages puiflent la contenir toute ni fuffire pour
la décharger ou pour la recevoir. D ’ailleurs durant
le progrès Si Faccroiffement de la tempête, quoique
la foudre frappât fréquemment la terre, les mêmes
nuages étoient prêts le moment fuivant à faire une
décharge encore plus grande , Si fon appareil conti-
nuoit à être aufli éleârique que jamais. Les nuages
doivent par conféquent recevoir d’un côté, au
même inftant qu’il fe fait'une décharge de l’autre.
Dans bien des cas l’éleftricité de Ion appareil Si con-
féquemment celle des nuages changeoit tout d’un
coup d’une efpece en l’autre ; effet qui ne peut pas
^expliquer par aucune décharge ou rép'afâtiôn finipleî
L’un Si l’autre doivent venir de ce que ces deux ef-
peces le fuccedent fort vite.
L’étendue des nuages ne diminue pas cette difficulté
; car quelque grande qu’elle foit, la quantité
doit être diminuée par chaque décharge. D ’ailleurs
les pointes par où fe font les décharges infenfibles,
fonten proportion de l’étendue des nuages. Ce n’eft
pas non plus enlever la difficulté que de fuppofer
que de nouveaux nuages viennent remplacer ceux qui
fe font déchargés ; car outre que les nuages ne font
pas propres à former l’orage, jufqu’à ce que tous
ceux qui font à une grande diftance fe foient réunis
Si aient formé une maffe uniforme , ces réparations
ne peuvent pas avoir de proportion avec la décharge
; Si quelque quantité qu’il s’en trouvât, ils feroient
bientôt épuifés.
C’eft pourquoi, dit le P. Beccaria , là matière
élettrique doit s’élancer continuellement des nuages
dans un endroit, dans le même tems qu’elle fe décharge
de la terre dans un autre. On doit néceffaire-
ment conclure de tout cela, que les nuages fervent
de condu&eur, pour voiturer le fluide éleârique des
endroits de la terre qui en font furchargés à ceux
qui en font épuifés. Il propofe même une expérience
à ce fujet ; c’eft d’avoir deux obfervatoiresfort éloignés
l’un de l’autre, mais dans la route que tiennent
les nuages orageux, Si d’examiner fi l’appareil dans
un endroit n’eft pas fouvent pofitif, tandis qu’il eft
négatif dans l’autre.
Ce Pere a été fpe&ateür d*un phénomène affez rare,
t ’eft de voir dans un tems très-calme de la poufliere
& d’autres corps légers emportés dans l’air, Si même
aller quelquefois contre le vent. Ce qu’il ne peut
attribuer qu’à la matière éleârique qui s’élance de la
terre, dans ces endroits-là qui en font fans doute fur-
chargés , pour s’élever dans les hautes régions de Pat-
mofphere, Si qui entraîne avec elle tous les corps
légers qui peuvent luifervirde condu&eur, comme
il a démontré qu’elle le pou voit. V oyez fes Lettres,
pag. 202.
Mais le P. Beccaria n’eft pas le feul phyficien qui ait
joui de la vue d’un tel fpèftacle ; M. W ilcke dit l’avoir
vu quelquefois ; parmi îefquelles il y en eut
une qui fe diftihgua finguliérement des autres, par
la maniéré diftinde avec laquelle les phénomènes fe
préfenterent à lui Si fe fuccéderent ; le détail qu’il en
donne eft affez curieux pour nous engager à en donner
ici le précis. D ’ailleurs, ce ne fera qu’en raffem-
blant ainfi de bonnes obfervations telles que celles-ci,
Si en les comparant eqrr’elles , que l’on parviendra
à là connoiffance de la formation de ce météore. •
Ce phyficien, étant monté au haut de fa maifon ,
qui etoit affez élevée pour qu’il pût découvrir de-là
la campagne Si un horizon affez étendu, vit avec
beaucoup de furprife, dans un après-midi du mois de
juillet de l’année 1758, à quelque diftance de là
ville Si dans la ville même, un nuage épais de pouf-
fiere s’élever de terre dans l’air, lequel augmenta
au point de lui cacher la campagne Si même lesmai-
fons à quelques cens pas de lui, Si tout cela fe paf-
foit fans qu’il y eût l’apparence de vent. Cette pouf-
fiere fuivoit cette direôion dans fon mouvement,
qui d’ailleurs étoit fort lent; elle montoit dans l’air
en tirant infenfiblement vers l’eft. Toutes ces cir-
conftances lui firent-d’abord foupçonnerquel’éleftri-
cité caufoit tous,ces effets, & bientôt après il put vérifier
fes foupçons. Il vit un nuage épais Si fort noir
qui venoità lui depuis l’eft, qui par fon attraâion
faifoit monter la poufliere. Dès qu’il fut à quelque
dïftancc du zénith, fon appareil fut un peu eleârifé
pofitivement. Cette éleftricité augmenta & devint
tresforte,lorfqUe je nuage parvintau-deffus.de l’appareil
, Si elle diminua à mefure qu’il s’en éloigna, en
allant dirëftemènt dit côté de i’büëft. Là pôüfiîëfê
paroiffoit fuivre le nuage ; au moins l’air s’éclairèiÉ
autour de lui, enforte qu’il put voirdiftin&emfentU
fin de cette feene. Le nuage de poufliere paroiffoit fé
refferter davantage, en allant vers la nuée , jufqu’à
ce qu enfin il forma une efpece de colonne très-denfe*
qui avoit la figure d’un cône, Si qui alla fe réunir à
la nuée; Tandis que ces chofes fe paffoient ainfi dans
ce lieu là* il s’élevoit vers l’eft un autre'nuagé fort
grand , Si quitenoit à plufieurs autres qui le fuivoient*
Si qui tous enfemble marchoient avec plus de vîteffé
que le précèdent. Lorfque ce grandnuage fut arrivé
au-deffus de l’appareil , il l’éleétrifa négativement* Il
s approcha toujours plus du précédent, jufqu’à cë
qu’enfin ils parurent fe confondre. Mais à l’inftant oit
cette reunion commença, il fe fit un violent éclat dë
tonnerre , & l’éclair parut venir delà terre au travers
de la colonne de poufliere &du nuage pofitif, Si s’étendre.,.
autant qu’il put le remarquer, fur tout lé
nuage négatif: dans le même moment l’appareil né
donna plus aucun ligne d’éleâricité. On doit con-
clure.detout cela, que l’éledtricitédu nuage pofitif,
qui § étoit communiquée au nuage négatif, n’ayant
pas fuffi pour remplacer tout ce qu’il devoit avoir dë
matière éle&rique, que ce nuage , dis-je, eft devenu
lui-même négatif ; enforte qu’il a tiré de la terre par
la colonne de poufliere (que fonatmolphere pofitive
avoit d’abord attiré) la quantité de matière éleftri-
que qu’il falloit pour remettre ces nuages dansleuf
état naturel, Si eteindre ainfi leur éle&ricité négative.
Par où l’on voit que non-feulement les nuages
frappent la terre , mais qu’ils en font frappés à leur
tour, & qu’ils fe frappent réciproquement. On peut
encore juger par-là, combien l’éledrieité des nuées
influe fur l’élévation des vapeurs.
Mais pour revenir au P. Beccaria , le phénomène
de l’elevation delà poufliere, lui paroît préfenter une
image Si une démonftration parfaites de la maniéré
dont les vapeurs de l’atmofphere font élevées, pour
former des nuages orageux. La matière éleâjique ,
de quelque part qu’elle forte, attire à elle , Si Inlevé
dans les plus hautes régions de l’air, les particules
aqueufesj qui font dilperfées dans l’atmofphere*
Cette matière monte aux plus hautes régions de l’at-
mofphere , parce qu’elle y trouve moins de réfiftance
que dans la maffe commune de la terre, qui dans ces
tems-là, eft ordinairement fort feche & conféquem-
ment fortement éle&rique. L’uniformité avec laquelle
les nuages orageux s’étendent Si fe gonflent en voûtes
, doit venir de ce qu’ils font affe&és par quelque
caufe qui , comme la matière éleélrique, fe répand!
uniformément par-tout où elle agit ; Si aufli de la réfiftance
qu’ils rencontrent en montant au-travers dë
l’air. Pour preuve de cela, la vapeur qui s’élève d’ünë
éolipile éle&rifée, fe répand avec la même uniformité
, forme des routes femblables, Si s’étend vers
toute fubftance propre à lui fervir de condu&eur.
La même Caufe, qni d’àbord a formé un nuage
des vapeurs difperfées dans l’atmofphere, y attire
ceux qui font déjà formés continue à en former
de nouveaux, jufqu’à ce que toute la maffe raffemblée
s’étende affez loin pour atteindre à une partie de la
terre , où il .y ait un manque de fluide éleârique. Là ,
ces nuages remplis d’éle&ricité feront fortement attirés
, Si la matière éleftrique s’y déchargera d’elle^
même fur la terre. Un canal de communication étant
ainfi établi, il s’élèvera de la partie furehargée un
nouveau renfort de matière éleftrique, qui confia
nuera d’être charriée parle moyen des nuages, jufqu’à
ce que l’équilibre du fluide éle&rique foit rétabli
entre les deux endroits de la terre. Quand les nuages
font attirés dans leur paffage par les parties de la
terre où il y a un défaut du fluide, il fe forme
çes fragmens détachés, ainfi que ces protubérances