■ eft prouvé clairement dans Y art. R h y THME, (Mufîq. )
Suppl. On comprend facilement que la répartition
des fons en membres é g a u x , peut être faite de plusieurs
maniérés, dont chacune a fon caraûere particulier
, fu r - to u t, lorfqu’on y joint encore la différence
des mouvemens. C ’eft de-Ià.que réfultent les
divers genres & les efpeces différentes de mefures que
nous allons examiner en détail.
L’expérience nous montre que les plus célébrés
compofiteurs admettent différentes fo rtes de mefures.
Cependant comme il n’y a exa&ement que deux différentes
efpeces de mefures, la paire & l ’impaire; il
femble que les mefures à 2 , 4 , 6 , 8 , 6*c. tems, forment
les mefures paires, & celle à 3 , 5 , 7 ,9 » les
impaires, & qu’ainfi il eft fuperflu d’admettre d’autres
fubdivifions. Cela feroit très -v rai s’il étoit pof-
fible de former une mefure paire de plus de quatre tems
é gaux , & de battre cette mefure fans fe figurer une
fubdivifion, qui la partage en parties, ou en d’autres
mefures. Pour s’en convaincre on n’a qu’à répéter fix
tems égaux à plufieurs reprifes, & l ’on fentira d’abord
qu’on les arrange ainfi -|R'T _f - r -r - > ou ainfi
T T T T T - r » & qu’on en fait les pieds de deux
o u de trois tems, que nous regardons comme les
principaux, auxquels font fubordonnés les autres,
C e font ces pieds principaux qui déterminent la mé-
fure, & qui décident li elle eft paire ou impaire, d’où
i l fuit que le premier exemple de fix tems revient à
la mefure impaire de trois tems, & que le fécond au
contraire revient à la mefure paire de deux tems. Si
l ’on v ouloit compter de façon à marquer avec la
même force chaque couple ou chaque ternaire de fon?
c om m e iü T f T r f T . f ' f >ou f T f T T T f * ' *
on auroit dans le premier cas trois mefures à deux
tems , & dans 4e fécond deux mefures à trois tems ,
d’où il fuit que la mefure en tems p a ir , ne peut c o n tenir
que d eu x , ou tout au plus quatre tems égaux ;
& que les mefures impaires au con tra ire, ne peuvent
jamaiscontenirni plusnimoins que trois tems , parce
qu’une fuite impaire de davantage feroit fatigante,
& incompréhenfible ,-& q u ’à caufe de cela elle n’eft
point admife en mufique.
On trouve il eft vrai dans les planches de mufîq.
du D i cl. raif. des Sciences, & c . un exemple de mefure
à cinq tems ; ma is, quoique M. Rouffeau le trouve
très - bien cadencé, nous n’y trouvons que de la con-
fulion & de 4’obfcurité. Teleman qui cherchoit la
Angularité , a com po fé , dans des mufiques d’églife-,
des choeurs entiers dans la même mefure; & dans
d’autres auffichimériques, & qui font aufli fatigantes
pour les muficiens que pour leurs auditeurs.
Il n’eft pas plus poffible de faire une mefure d’ un
feul tems , parce que ce tems fera toujours'compofé
de plufieurs autres. Q u ’on effaie de réciter de
fu ite , & à égales diftances, plufieurs monofyllabes
lo n g s , les feuls qui puffent prouver la néceflité de
cette mefure, par exemple.
d e u x , a ir , moi, dans, mais , fond.
& l ’on s’appercevra qu ’il fe trouv e toujours entre
un mot & l’autre un petit repos ou filence qui occupe
jufte 4a moitié de la diftance d’un mot à l’autre ,
comme ici.
cieux, air-, moi, dans, mais, forid.
O n le fentira encore mieux fi en récitant on inféré
la particule copulative & , entre un de ces monofyllabes
& l ’au tre ; car l’on verra que le mono-
fyllabe & la particule n’occupent pas plus de tems
qu e les autres mots feu ls , comme ;
cieux, air, ' m o i, dans, mais & , fond.
L ’on appelle donc triple la mefure im p a irep a rc e
qu’elle ne peut être compofée que de trois tems
& que tout autre mefure impaire eft contraire de
gênée.
Pour mettre toutes les mefures d’une efpece d’un
c ô t é , & celles de l’autre d’un au tre , il fuffiroit donc
de reconnoître une mefure à deux tems, & une à
quatre pour les pa ires, & celle à trois pour les impaires
: & en marquant exactement à la tête d’une
piece quel doit être le mouvement, on auroit déterminé
fi cette piece doit être exécutée v ite ou lentement.
Il femble qu’on ne pourroit exiger rien déplus
quant à la mefure & au mouvement de chaque piece.
Mais fans confidérer que ce mouvement eft fufeep-
tible d’une infinité de degrés de vîtefle ou de lenteur
, degrés impoflibles à déterminer ni par des m o ts,
ni par quelqu’autre ligne ou ma rqu e, il faudroit
encore employer quantité d’autres lignes & d’autres
mots néceffaires, pour expliquer toute l’exécution
de la piece ; c ’eft-à-dire, fi elle doit être exécutée
pefamment & avec fo r c e , ou plus légèrement ôr
me%{0 forte, ou tout-à-fait légèrement, car o’eft de
là que dépend tout le caraftere de la piece. Il y
a une différence infinie , & que tout le monde fent j
entre une piece exécutée fu rie violon avec de grands
coups d’arche t, ou avec la pointe de l ’archet Sc délicatement.
Nous parlons ic i , non d’une exécution parfaite
, mais feulement de celle que chaque piece doit
avoir félon fon caraâere , & fans laquelle la mufique
feroit d’une monotonie plate & ennuyeufe. C ’eft c e
cara&ere particulier à chaque piece qu’il faut bien
reconnoître pour le faifir.
Les habiles muficiens font accoutumés à pefer fur
les notes longues, comme les rondes, & les blanches
qu’ils jouent avec fo r c e , & à p a f f e r , au contraire,
légèrement fur les notes courtes, comme les noires
& les croches. Une piece donc dans laquelle il ne fe
rencontre que peu de noires, & où ces noires font
les notes les plus b rè v e s , uh?Bon‘ muficien l’exécutera
pefamment & avec fo rc e , tandis qu’il exécutera
av e c légéreté une autre piece du même mouvement
& de la même mefure, mais où les notes les plus longues
font des noires; c ’eft-à-dire, en un m o t , qu’in-
aépendamment de la mefure & du mouvement, le
bon muficien réglé le dégré de fo rc ed e chaque note
fur fa valeur.
L’ expérience rend encore le muficien habile à fen-
tir le tems précis & naturel de chaque piece par le
moyen de la valeur des notes qu’elle contient. Il
e xécutera, par exemple, une piece qui n’aura aucun
lig n e , ou devant laquelle, ce qui revient au
même, on n’aura mis que les mots tempo giujlo; il
l ’e xécutera, d is - je , plus lentement ou plus v î t e , &:
toujours dans le mouvement qu’il fa u t, fuivant la
valeur des notes qu’elle contient ; il faura donner le
véritable degré de force ou de légéreté aux notes ,
& il faura ajouter ou retrancher ce qu’il faut de
cette force & de cette légéreté, fi la piece venoit à
être marquée adagio, andante, allegro, & c . Ce que
nous venons de dire montre l’avantage qui réfulte de
la fubdivifion de la mefure paire & de l ’impaire en
différentes mefures, dont les rems principaux font
marqués par des notes plus longues où plus brèves ;
ca r , p a r -là , chaque mefure acquiert le mouvement
qui lui eft p ro p r e , & l ’exprefiionqui lui co n v ien t,
en un mot fon vrai caraôere. Si donc une piece doit
être exécutée légèrement, mais en même tems d’un
mouvement len t, le compofiteur d o it, félon que fon
fujet demande plus ou moins de légé re té , choifir une
mefure compofée de tems plus ou moins longs, &
employer les mots andante} largo, adagio, félon que
la
Ja Ienteur de la piece doit furpaffer le mouvement -
naturel de la mefure; Ôc au contraire, lorfqu’une
piece doit être exécutée av e c fo r c e , & néanmoins
a v e c un mouvement v i f , il fera choix d’une mefure
compofée de tems longs & convenables à l’exécution
qu exige fa piece ; mais il y ajoutera ces mots vivp.ee,
allegro & preflo, & c . Un muficien habile, en jettant
un coup-d’oeil fur les notes qui compofent une telle
piece fera en état de l’exécuter félon les idées du
compofiteur, & de fe rencontrer parfaitement avec
lu i , au moins av e c autant de précifion que s’il étoit
guidé par les mots ou par les fignes les plus clairs
pofliblës.
Il étoit néceflàire de faire précéder c e c i , pour
démontrer la néceflité des diverfes fortes de mefures
paires ou impaires, & pour faire fentir leur in fluence
fur l’exécution & fur le mouvement. Peu de compo-
fiteurs font en état de rendre raifon du choix qu’ils
ont fait de telle ou telle mefure, paire où impaire,
bien qu’ils fentent que la mefure qu’ils ont cho ifie,
e ft la feule qui convenoit à leur piece : les autres
q u i , avec l’auteur de Xarticle Me su re , (Mufîq.)
Dicl. r a i f des Sciences, & c . regardent la multiplicité
des mefures comme une invention arbitraire , & s ’en
formaïifent , ou ne font point fenfibles à l’expref-
fion de chaque forte de mefure, ou ne veulent pas
l ’a v o u e r , & rifquent en conféquence de compofer
des pièces q u i , faute d’être écrites dans la mefure
con v en ab le , feront exécutées tout autrement qu’ils
ne l’ont penfé. C a r enfin fi chaque efpece de mefure
r ’a pas quelque chofe de particulier, d’où vient
que tout muficien expérimenté fent d’abord quelle
eft la mefure d’une piece en l’entendant exécuter ?
Il eft tems à préfent de paffer à l’examen de chaque
forte de mefure. Nous commencerons par les
diverfes mefures pa ire s, & d’abord par celles à deux
tems , qui font :
it>. La mefure à deux tem s , que l’on nomme auffi
alla-breve, dont les tems font compofés chacun de :
deux no ires , & qui fe marque à la tête de' la piece
par ce figne £E auquel on joint fouvent le mot alla-
breve. Cette mefure s’exécute av e c ,force , mais le
double plus vite que ne le porte la nature des notes
dont elle eft compofée ; elle eft propre aux expref- -
fions férieufes & v iv e s , elle eft fur-tout très-con v e nable
dans les fugûes, & ne peut avo ir dans ce ftyle,
& dans le mouvement qui lui font propres aucune
note plus breve que des croches. Nous âvons parlé
de cette.mefure dans Y article A l l a -B reve , (Mufîq.)
Suppl. Lorfque les compofiteurs , pour s’épargner
la peine de marquer toutes les mefures, notent deux,
tro is , quatre ou plus de mefures entre les barres qui
marquent ordinairement chaque mefure,4’effence de
Valla-breve n’en eft pas changée, & l’on accentue
toujours la première, note de chaque mefure plus
fortement que les au tre s, pour marquer le frappé
qui revient conftamment après deux blanches , &
pour déterminer la valeur des paufes ; valeur qui
demeure toujours la même,
2P. La mefure de deux quatre ; celle-ci lorfque le
mouvement particulier n’eft pas ma rqué, a le même
dégré de vîtefle que la mefure précédente , mais on
l ’exécute beaucoup plus légèrement, & l’on peut y
inférer des blanches, des noires , des croch es , des
doubles c roch es , & même des triples c roch es , mais
en.petit nombre. Cette mefure s’accorde a v e c toutes
les pallions légères & agréables, tempérées par les
mots andante , adagio , & c . ou rendues, plus'.vives
par les mots^vivace, allegro , & c . fuivant que l’ex-
preffion l’exige. Ces mots qu’on ajoute & ces' différentes
efpeces de notes qui compofent. la piece ,
déterminent.le mouvement qu’on lui doit donner,
tant dans cette mefure que dans, les autres. Si la piece
eft marquée & allegro, ôc ne contient qu’un petit
Tome I I I ,
nombre de doubles croches; le.moùVemeht eft plus
v i f que fi elle é toit remplie de doubles croches ; il
en eft de même dans les mOuvemèns'plus lents.
3 • La mefüre de | . Cette mefire demanderoit
une exécution des'plus légères , & ne feroit propre
que pour les expreffions les plus v iv es des airs à
danfer ; car il eft inconteftable que tout bon violon
éxécutera l’ëxemple ifig i io. planche X I 1. de Mufîq.
Suppl, beaucoup plus légèrement que s’il étoit noté
avec des noires & dans la mefure à deux quatre. La
mefure des deux huit n’eft pas d’ufage.
Chacune des mefures , dont nous venons de parler
, contient deux tems. O r il eft connu que tout-
tems fe peut partager auffi facilement en trois autres
tems qu’en d eu x , mais non en cinq ou en fept. De -là
proviennent encore les mefuns {uivantes à deux
tems, dont chacun eft divifé en trois parties, & q u i,
par la nature, pour ainfi dire , fàutillante du mouvement
^un, d eu x , t ro is , quatre , c in q , fix , ou
I. .T I r r r font en general d’un mouvement plus,
vif & d’une expreffion plus gaie que les précédentes.
T e lle s font:
i ° . La mefure à ^ q u i s’exécute avec autant de
force que l’alla-breve à qui elle reflemble beaucoup;
par fon mouvement férieux & v i f : elle eft.conye-v
nable dans les mufiques d’églife. On compte trois
, noires pour chaque tems d e là mefure.
2 ° . La mefure de f légère & gracieufe dans l’exe cution
& . dans le mouvement j comme celle d e ;
les notes les plus.breves qui s’y rencontrent font des
doubles croches.
3°. La mefure de Cette mefure demande la plus-
Iegere.des expreffions & le mouvement le p lu s 'v if;'
elle fouffre rarement des notes plus brèves què d e s doubles
croches. Jean Sébaftien Bach & Couperin
j jp ? fans contredit font les plus exa&s de tous les
; compofiteurs & qui n’auroient pas compofé fans-
raifon des fugues & d’autres pièces dans cette me-
fure, & dans d’autres qui à préfent font hors d’ufage,
confirment par là-même ce que nous avançpns ,
c’eft-à-dire que' chaque mefure a une exécution 6c
| un mouvement qui lu i, eft pro pre , & que par con-
féquent il n’eft point indifférent dans quelle mefure
on .noté & l’on exécute une,piece.
Les mefures à quatre tems font:
i ° . La grande..mefure à quatre tems dont les tems
font chacun d’un qu a r t, & qui fe marque ainfi 3 z ,
ou encore mieux f pour la diftinguer de la mefure (3£:
fes notes les plus brèves font .des croches q u i , de
même que les noires ou les autres notes J plus .-longues
, doivent être exécutées-fur ta violon! a v e c
toute la force de l’archet,.fans nuances de pian o te
de forte, mais en accentuant toujours comme il eft
neceflàire la première note de chaque mefure. Gette
mefure à | par fa marche grave :& pathétique n’eft
propre que dans les mufiques d e g life , & principalement
dans les choeurs & dans les^fugues à .plufieurs
parties , & dont l’expreffion eft .magnifique &
maj.eftueufe : on a coutume de la marquer du.mot
grave pour diftinguer fon exécution & fon mouve--
ment de- ceux de Y alla-breve ou de la petite mefure-
à quatre tems dont nous parlerons plus bas. Il ;y a
des muficiens q u i , ait lieu de cette mefure ; emploient
celle d e 4 , comme, au lieu de Xalla-breve.,.
ils emploient \a mefure -de 7 , où l’exécution forte fe
trouve ^encore mieux indiquée par les notes d’une
valeur idouble ; .mais la gêne de ces fortes de mefures
compôfe'es chacune de deux rondes caufe une te lle 1
confufion , principalement dans les paufes qui lignifien
t, par exemple, tantôt une m o itié , tantôt, un
quart de mefure ,..que l’on préfer,e. les .premières &
qu’elles font le plus en ufage.
Z Z z z z