
tendres, mais qui nous viennent des contrées de
l’Amérique feptentrionale, où la terre profonde 8c
humide , & les longues automnes les excitent à pouffer
fort tard, confervènt cette difpofition dans nos
climats ; mais leur végétation v iv e , leurs jets pleins
de feve fe trouvent brufquement faifxs par nos premières
gelées. Que l’on couche leurs*branches en
automne , l’humidité de la terre ne fera que hâter
leur deftruâion. S^l’on'attend le printems, on les
trouvera alors mortes par le bout ; on ne faura pas
précifément où finit la partie defféchée ou chancée,
& oùçpmmence la partie vive 8c faine qui fera d’ailleurs
le plus fouvent trop courte pour fe prêter à la
courbure qu’il conviendroit de lui donner.
On préviendra ces inconvéniens fi l’on fait au
mois de juillet les marcottes de ces arbres, un peu.
avant le fécond élan.de la feve. Dans nos climats
les printems mauffades & fantafques ne laiffent à la
première végétation qu’un mouvement foible &
intermittent : fon jet d’été moins contrarié eft ordinairement
plus continu & plus vigoureux ; ainfi
nos marcottes ne feront guere moins avancées que j
celles de la première faifon, 8c auront beaucoup
d’avance fur celles de l’arriere-failon. En général
elles feront parfaitement enracinées la fécondé automne
ou le fécond printems ; fur-tout fi aux foins
ordinaires on ajoute celui de répandre fur leur partie
enterrée de la rognure de buis ou telle autre
couverture capable d’arrêter la moiteur qui s’élève
du fond du f o l , & de conferver le bénéfice des
pluies 8c l’eau des arrofemens.
Ce ne font pas là les feuls avantages du choix de
cette faifon pour faire les marcottes. Il convient fin-
guliérement à certains arbres dont les branehes ne
pouffent volontiers des racines que lorfqu’élles font
encore tendres & herbacées ; en les couchant on
aura foin de faire l’onglet, autant qu’il fera poffible,
au-deffous du noeud qui fépare le jet de l’année précédente
d’avec le jet récent ; & fi l’on eft contraint
de l’ouvrir dans ce, bourgeon, il faùdra s’y prendre
avec beaucoup de dextérité. D ’autres arbriffeaux
dont les jeunes branches furvivent rarement à l’hiver
, 8c qui tiennent de la nature des herbes , ne
peuvent même abfolument être marcottées qu’en
été. La marcotte ayant produit des racines, périra à
la vérité jufqu’à terre durant le froid, mais elle demeurera
vive à fa couronne 8c pouffera de nouveaux
jets au printems.
Il y a encore des arbres comme l’élæagnus, dont
les branches mûres font fi fragiles qu’elles fe rompent
foüs la main la plus adroite , lorfqu’on veut
les courber pour les coucher foit en automne , foit
au printems : en été on les trouvera liantes 8c dociles.
Plufieurs arbres toujours verts, dont les boutures
ne fe plantent avec fuccès que dans cette faifon
, font auffi par une fuite de cette inclination, plus
difpofées à reprendrè de marcottes dans ce même
tems qu’ en tout autre ; & les marcottes de certains
arbriffeaux, comme les chevrefeuils , faites même
affez avant dans l’é té , prennent encore affez de
racines, pour qu’on puiffe les févrer en automne.
Nous avons ainfi obtenu dans l’efpace de trois mois
cinq individus d’un feul chevrefeuil panaché que
nous avions reçu au printems maigre & fluet : nous
marcottions les jeunes branches qu’il pouffoit fuc-
ceflivement, fitôt qu’elles fe trouvoient fuffifam-
inent déployées.
Au refte , s’il eft des marcottes qu’il faille garro-
terau-deffous de l’endroit où fe doivent développer
leurs racines, ce font en particulier celles que l’on fait
fans les coucher, en environnant quelques branches
droites d’un arbre d’un pot à deux parties, ou d’un
çône de fer-blanc ; car ces marcottes n’ayant qu’un
petit volume d’aliment j & ne jouiffant pas de cette
douce vapeur qui s’élève du fein de la terre 8c que
rien ne peut fuppléer, ne font pas, quelque foin
qu’on en prenne , auffi difpofées que les autres à
s’enraciner. Mais il faut obferver que le fil de laiton
eft mortel à certaines elpeces.il faut préférer par
cette raifon de lier avec du fil ciré , & quelquefois
il fuflira d’ôter un demi-cerne d’écorce dans la partie
inférieure de la marcotte. Il y a des arbres dont
la feve paffe en affez grande abondance p«u\ le corps
ligneux ; à ceux-là on pourra ôter un cerne-entier ;
& dans les deux cas il fera bon de recouper un peu
le bout de la branche marcottée, de lui ôter fes
plus grandes feuilles, & de l’arrofer fouvent, 8c
même de l’ombrager.
Il y a une méthode de marcotter préférable à celle
qui le fait fur les branches droites & élevées , qui
convient encore mieux aux arbres rares & délicats, .
mais qui n’exclut pas les précautions dont nous venons
de parler. On l’emploie pour les arbres 8c arbriffeaux
dont les branches latérales inférieures ne font
pas trop éloignées de terre. Elaguez ces branches
par avance pour les alonger : lorfqu’elles feront affez
longues, vous apporterez deffous des pots emplis de
bonne terre, 8c les y marcotterez. Vous couvrirez
la terre & les parois extérieures du pot de beaucoup
de moufle, & vous les arroferez fuivant le
befoin. Lorfque vous ferez affuré que ces marcottes
auront produit des racines fuffifamment, vous les
févrerezjmais vous les laifferez dans le pot jufqu’à
ce que leurs tiges foient affez fortes; alors vous les
planterez à demeure avec la motte, & leur fuccès
fera infaillible. ( M. le Baron d e T s c h o u d i . )
M ARGG RABOVÀ, (Géogr.') ville de la Lithuanie
Pruffienne, dans la préfecture d’Oletzko. Elle
fut bâtie dans le x v i e fiecle par Iemarggrave.de
Brandebourg, en mémoire de la conférence que
ce prince eut dans le voifinage avec Sigifmond Au-
gufte , roi de Pologne, l e q u e là fon tou r, fonda
la ville d’Auguftowa, à huit milles de celle-ci. L’an
1656, les troupes de Suede & de Brandebourg battirent
lesTartares proche de Marggrabowa. {D . G.)
MARGUERITE , S a m b i r i e , {Hiß. de Däne-
marck.') reine 8c régente de Danemarck , fille d’un
duc de Poméranie , avoit époufé Chriftophe I , roi
de Danemarck. Elle excelloit dans tous les exercices
, 8c fe fit admirer fouvent dans les tournois. Sa
figure‘annonçoit fon mâle caraôere. Elle avoit le
port noble , les traits durs, & le teint bafané ; elle
eut beaucoup de part aux troubles qui agitèrent le
Danemarck pendant le regne de fon époux. Mais
elle ne put lui infpirer le courage dont elle étoit
animée. Ce prince vécut efclave du clergé, 8c mourut
fa viâime. La reine fut nommée régente du
royaume de Danemarck après la mort de Chriftophe
ï , pendant la minorité d’Eric-Glipping, fon fils.
Elle effuya d’abord quelques démêlés avec l’Eglife,
& (ce que les plus grands rois avoient en vain tenté
jufqu’alors) elle fut faire refpeCter l’autorité fuprême
par les prélats. Elle refufa Pinveftiture du duché de
Slefwick à Eric, prince Suédois ; elle fentôit combien
il étoit dangereux de recevoir cetiétranger dans
le royaume fon refus alluma la guerre. Marguerite
parut à la tête de fon armée ; mais trahie par fes
généraux , elle fut vaincue l’an. 12 6 z , 8c tomba
entre les mains de fes ennemis. Eric , fon fils, eut
le même fort ; l’un & l’autre obtinrent leur liberté :
le premier ufage qu’en fit Marguerite , fut d’envoyer,
à l’échafaud les chefs qui avoient donné à l’armée
l’exemple d’une fuite honteufe. Ses anciens différends
avec le clergé fe réveillèrent. Une foumiffion politique
mit le pape Urbain IV dans fes intérêts ; mais
la mort de ce pontife rendit à l’archevêque de Lau-
den fa première audace ; cependant ces querelles
MA R
fe terminèrent dans la fuite. Mais Eric ayant commencé
à gouverner par lui-même; il ne refta plus
à Marguerite que le fouvenir de fes belles aCtions -,
&C la vénération publique qui en étoit le prix : elle
mourut vers l’an 1300. Une conduite foutenue &
adaptée aux événemens , une humeur égale &
fans caprice , une févérité guidée par l’équité &
non par la vengeance, fon courage dans fes malheurs
, fa modeftie dans le cours de fes profpérités
lui affurent une place parmi les femmes célébrés 8c
même parmi les grands hommes.
M a r g u e r i t e , reine de Danemarck, de Suede
& de Norvège. Tout eftfingulier dans cette prin-
•ceffè jùfques à fe naiffance. Valdemar I I I l e plus
foupçonneux des hommes, avoit fait enfermer Hed-
w ig e , fon époufe, dans le château de Sobourg ;
s étant égaré à la chaffe, cette prifon même lui fervit
d’afyle ; on lui préfenta fon époufe , déguifée avec
art 8c fous un autre nom , fon erreur lui rendit tout
fon amour, 8c Marguerite en fut le fruit ; elle naquit
l’an 1353 9 talens, efprit, courage, tout fut
précoce en elle ; fon pere prévit de bonne heure fa
haute deftinée. « La nature s’eft trompée, difoit-il,
» elle vouloit en faire un héros, 8c non pas une
» femme ». Olaiis V étant mort en 1385 , la couronne
fut briguée par Henri de Mecklenbourg ,
fils d Albert, roi de Suede ; mais Marguerite , dont
les grâces 8c le génie naiffant avoient charmé tous
les Scaniens, fut proclamée par eux : leur exemple
entraîna les fuffrages des autres provinces : la prin-
«éffe fut couronnée. Elle étoit déjà régente de Norvège
ƒ le trône éfoit encore vacant : elle avoit gouverné
avec tant de fageffe fous le nom de régente ,
qu elle meritoit de gouverner fous celui de reine :
cependant plufieurs partis s’oppofoient à fon élection
: elle s’empara des places fortifiées , remplit la
Norvège de troupes, fournit une partie de fes ennemis
par la terreur de fes armes, 8c le refte par fes
bienfaits. Enfin elle fut couronnée ; elle étoit reine
& femme, 8c ne fe vengea point. Les Danois plus
fiers rougiffoient de fléchir fous le joug d’une femme.
Margueritefe vit forcée de faire couronner le jeune 8c
foible Eric Wratifias, duc de Poméranie, le dernier
de fes enfans. C etoit un fantôme qu’elle préfentoit
au peuple pour le tromper ; Hacquin , prince Suédois,
fut contraint de renoncer à toutes fes prétentions
fur la couronne. Il étoit plus difficile d’écarter
Albert de Mecklenbourg ; roi de Suede, qui avoit
déjà arboré les trois couronnes dans fon écuffon ;
déjà , pour affurer le fuccès de fes de (feins, il avoit
levé des armées & fait équiper des flottes. Mais il
avoit oublié que l’amour du peuple eft le plus ferme
appui du trône. Le defpotifme étoit l’objet de toutes
fes démarchés politiques. Les Suédois gémiffoient
fous le fardeau des fubfides ; la bienfaifance inté-
reffee de Marguerite les foulageoit dans leur indigence
; les gouverneurs des fortereffes ouvrirent
les portes à les troupes, le fénat dépofe le roi Albert
, le peuple appella Marguerite, 8c la nobleffe
la couronna. Cette révolution fut l’ouvrage de
quelques mois. La vi&oire de Falkoping en affura
la durée, Albert tomba entre les mains dès mécon-
tens ; fon fils«eut le même fort ; mais la captivité dès
deux princes ne fit point rentrer fous le jpug de
Marguerite quelques troupes de faâieux qui avoient
pris les armes, moins pour la défenfe d’Albert que
pour troubler l’état ; les difcordes étoient fur-tout
fomentees par les comtes de Holftein 8c le duc dé
SJefwigh qui craignoient que la nouvelle reine ne
s emparat de leurs états, 8cqui efpéroient qu’Albert
pour payer leurs fervices, leur laifferoit cette’indé-
Pendance a laquelle ils afpiroient. La reine crut
qu il falloit faire quelques facrifices à la gloire de
porter trois couronnes : elle renonça à toute jurif-
Tome III, 1
A&ôn fur les domaines de ces princes, &ils Dr0.
mirent d’abandonner le parti du malheureux Albert,
c-e prince ne trouva plus d’amis que dans la Wan-
dalte. Ces peuples demandèrent la liberté ; mais on
H B | bie" cher M A LB ER T , 1 ; il fut cou-
M d “bJ,ur" droits fur la couronne de
Suede, & s obligea de payer une fomme de foixante
mille marcs pour prix de fa rançon. Ce fut l’an ï » ,
que ce traite fut conclu, fous la garantie de Baratin ,
duc de Pomerame, & de Jean, duc de Mecklenm
m m m m <p» n n q B ^ - «
la pofteme d Albert ne s emparât du trône , voulut
regler elle-même le ffiôix de fon fuCceffeur : cette
dëaion fe fit fans obftacles;Marguerite pré(enta au peu-
: B E” cT’/°n, & ce îeune prince fut cou*.
îonne.L ambition de Marguerite n’étoït point encore
I lat-istaite; tant que les trois boutonnes étoient WHI
tes & leparees, elle eraignoit que l’une vînt à fe
détacher des deux autres ; elle voulut donc former
un feul royaume de la Suede , du Danemarck & de
la Norvège. Son deffein n’étoit pas fans, doute de
donner à ce plan politique une confiftance invariab
le pour 1 avenir, mais feulement d’en affurer la
duree pendant fa vie ,• ou tout-au-plus pendant celle
d trie Cette pnneefle connoiffoit trop le coeur humain
, lecaraSere,:les1 intérêts, la rivalitédeS trois
nations fur leiquelles elle régnoit, pour fe perfua-
der qu un projet fi difficile dansj l’exécution pût fe
ioutemr par phifîeürs fiecles. Ce fut à Calmar
qu’elle affembla les fénàféufs & la'nobleffe de Danemarck,
de Suede & dé Nbrvege-; la réunion
des trois royaumes y fut propofé«, elle excita des
débats trèsrvifs, la reine Margumu leva tous des •
obftacles, elle régla que le ® feroit alternativement
élu par un ces trois royaumes ; que ce monarque
pour ainfi dire errant, fixetoit fon féfour eh
Suede, en Danemarck, en Norvège, pendant quatre
mois ou pendant une année ; qu’il conlbmtneroit dans
chaque royaume les revenus qu'il en tireroit ; que
chaque nation ne payeroit des inipcw que pour fe’s
propres befoins ; enfin qu'eles ldik , les chntumes'.
les privilèges de chaque royaume ne fouffriroient aucune
altération ; qu’enfin dans chaque royaume les
gouvernemens & fes charges feraient le partage des
naturels du pays, & ne feroient jamaisdonnésà des
etrangers. Telle fut cette union de Calmar, fi célèbre
& fi funefte, qui devoir, au jugement des politiques
de ce tems, affurer le repos du Nord, 8c qui y
alluma tous les feux de la guerre. Albert n’ofa plus
dffputer à Marguerite un trône où trois nations s’em-
prefloient a la maintenir. Mais cette reine, qui avoit
fait une etude profonde des intérêts du commerce
des penchans des peuples fur lefquels elle régnoit *
preferoxt les Danois aux deux autres nations ; « la
» Suede, difoit-elle à Eric , fon fueceffeur, vous
» donnera de quoi vivre, la Norvège de quoi vous
» vêtir, le Danemarck de quoi vous défendre » Elle
n’obferva pas elle-même avec Un refliea bien feru-
pnleux les conditiqrts qu’elle sletoit impofées. Les
chevaliers Teutoniques s’etoient emparés, de l’île
de Gothland. Marguerite .voulut y rentrer à main
armée ; mais les troupes Suédoises qu’elle y, env
o y a , furent repouffées ; elle-prit le’ parti d’acheter
ce'qu’elle n’avbit pu conquérir. Ce traité fut conclu
l’an 13 98. Les Suédois payèrent la fomme qui avoir
ete fixeq.J le Gotlj^and devoit dès-lors appartenir à
la Suède : cependant il fut annexé au Danemarck.
Marguerite auroit dufentir quel préjudice cette conduite
devoit faire un jour au jeune Eric. L’union de
•Calmar aurait été rompue dès-lors, fi la politique de
■ cette grande reine n’eût enchaîné les trois nations
qui fe promettoienf bien de fe féparer, lorfqu’E ric’
dont elles méprifoient la foibleffe , rempliroit là
place de cette femme étonnante. Elle mourut l’an
P P p p p
S