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Q u i, chargeant fur ton dos ton père furanné ,
L'arrachas de la flamme & du Grec acharné.
Le deftin s'obftinant à laffer ta confiance ,
Epura tes vertus , a ffermît ta prudence ;
Ta piété t'a fait U favori des dieux ,
Soutiens, fage héros, ce titre glorieux i
De ton fier ennemi ménage la jeunêffe J
Dans un âge plus mûr fais voir plus de fagtffe*
Pat une heureufe paix mets fin à tes travaux ;
Qu'un doux riteud d'amitié ferre ici deux rivaux.
Loin du trifie appareil d'un fatal hymenée»
Je pajférai ma vie aux larmes defiinée ,
Occupée à pleurer des amis, des parens ,
Que le fort par tes mains terraffa dans nos champs:
Après la mort du roi, ton me verra moi-même ,
Sur ton augufie front poferfon diadème.
Rends-toi, je t'en conjure, au nom de cette ardeur,
Que Créufe autrefois alluma dans ton cotur.
£ N É El
L'ombre de cette èpoufe, à mes bras échappée, ■
Sut calmer La douleur dans mon ame frappee ,
Quand elle me prédit qu'au pays du Latin,
De lafille, <£un roi je recevrais la main.
A cet heureux hymen ü.arrêt des Dieux mappelle i
Je foutiendrai mes droits» à leurs ordres fidetie ;
M a piété l'ordonne » & ta rare beauté
Fait encor fur mon coeur plus que leur volonté,
T U R N U S.
Adieu , princeffe, adieu ; je tombe fous fes armes 9
Ou je reviens à toi, poffeffeur de tes charmes«
L A V I N I E.
P rinces. . . . Ilsfont partis, impitoyables dieux ƒ
Latinus apprend bientôt 1’iffue du combat, & la
mort de Turnus. Ce prince même ne demande pas
la vie ici comme d'ans Virgile; les fpeôateurs là demandent
pour ce héros tout prêt à recevoir la mort
avec intrépidité. Le poète a fort bien fait de changer
cette circonftance ; on lui auroit pardonné vo lontiers
une liberté plus grande, & il auroit bien
fait d’épargner à Enée l’infigne lâcheté de tuer fon
rival de faog-froid.
Lavinie approche de fon pere ; dès que, voulant
lui raconter le fuccès du combat, il a prononcé le
nom d’Enée, la princeffe l’interrompt brufquement:
faifie de douleur, elle lui demande fi Enée étoit tombé
fouslescoups de Turnus, & par là elle lui découvre
fa palfion pour cet étranger. Cet endroit eft bien
ménagé ; mais il auroit fait encore plusd’impreflion,
fi jufques-là on n’avoit eu la moindre connoiffance
du penchant de Lavinie.
Le récit de la mort d’Amate pourroit trouver encore
des critiques ; elle fe pend, défefpérée de la
mort de Turnus, & par tendreffe pour liii, auffi-
bien que.par haine contre Enée. L’a&ion de fe pendre
fait une impreffion dégoûtante dans Tefprit de la
plupart des peuples. On meurt d’une mort plus théâtrale
par lé poifon ou par le poignard.
Le fujet de la fécondé tragédie eft pris des métamorphoses
: c’eft Scylla qui, charmée de la bonne
mine de Minos, trahit la ville de fon pere Nifus, en
livrant à l’objet de fa tendreffe, un cheveu de pourpre,
dont dépendoit la confèrvation de l’état.
Pour ménager à cette hiftoire la bienféance du
théâtre, le poète y fait plufieurs changemens nécef-
faires.
Il fubftitue au cheveu de pourpre, un bouclier,
de la confèrvation duquel dépendoit la couronne de
Nifus. Scylla le prend en cachette, & le porte à
Minos , dans fa tente devant les murs d’Alcathée ,
ou toute l’aûion fe paffe. Les prêtres ne voyant plus
ce gage facré, excitent une fédition dans la ville ,
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& la font tomber entre les mains du roi de Crete.’
Scylla ne fe découvre pas d’abord à Minos, mais elle
confeffe hardiment fon crime à Dorife fa confidente ,
qui étôit parmi les prifonniers, où étoit encore Nifus,
limene, foeur de Scylla, & Phocus, amant d’Ifinene,
fils d’Eacus, roi d’Ethiopie, le plus vaillant défenfeur
des murs où fa maîtreffe avoit vu le jour. Scylla eft
reconnue, & fon crime eft découvert par fes parens ;
ce qui donne lieu à des difcours très-pathétiques.
Minos n’a que de l’horreur pour le fervicé odieux
que la perfide Scylla lui a rendu ; fon mépris la rend
défefpérée , & dans fes difcours on voit ce flux' &
reflux de tendreffe & de rage qu’un amour méprifé
fait naître dans des coeurs corrompus & des efprits
violens.
Toute la tendreffe du vainqueur penche vers If-
mene, auffi vertueufe que fa foeur eft criminelle ; il
tâche en vain de chaffer du coeur de cette princeffe
l’image de fon cher Phocus : fa confiance la rend plus
eftimable aux yeux de Minos; mais, maîtrifé de fa
paflion, il s’obftine à la vouloir fatisfairç. Ifmene
doit l’époufer, ou voir immoler à fes yeux fon pere
ou fon amant, & choifir la vidime elle-même: ces
malheureux font bientôt inftruits d’une fi cruelle ré-
folution, ils favent qu’il faut qu’Ifmene foit incon-
ftante, ou bien que l’un d’eux meure & que l’autre
foit mené en triomphe.
Rien n’eft plus touchant que cette partie de (a
piece; Ifmene ne veut pas renoncer à fon époux,
elle ne veut pas le voir mourir; elle ne fauroit fe réfoudre
à prononcer la fentence de mort contre l’auteur
de fa vie. Les grands fentimens n’éclatent pas
moins dans les difcours de l’amant & du pere, ob-
ftiné? tous deux à mourir pour fe fauver la vie l’un à
l’autre, & pour ne point fuivre hontëufement le.
char du vainqueur. Il feroit à fouhàiter qu’un traducteur
habile rendît ces morceaux dans notre langue
, le leCteur feroit ravi de les comparer avec ce
qu’on voit de plus touchant dans Corneille & dans
Racine.
Minos enfin, deftinéà adminiftrer après fa more
la juftice aux ombres, fait fur fa propre injufticë des
réflexions férieufes. Il reprend un noble empire fur
lui-même, & il couronne la confiante tendreffe dés
deux amans vertueux, par un heureux mariage ; en
même tems, il rend à Nifus fes états , content de fe
réferver un léger tribut.
La joie que caufe la magnanimité imprévue du roi
de Crete, eft troublée par le récit de la mort de
Scylla ; chaffée honteufement de la préfence de
Minos, & le voyant prêt à s’embarquer fans elle,
elle s’étoit poignardée elle-même : fon pere & fa
foeur qu’elle avoit fi indignement trahis, ne laiffent
pas d’être touchés de fon fort, & d’honorer fon trépas
par quelques larmes.
La derniere piece de ce Recueil, eft une deferip-
tion des plaifirs d’une foire de village ; c’eft un ouvrage
rempli d’efprit. Nous ne faurions en donner
un extrait qui fît fiiffifamment connoître le mérite
de cette piece.
R. Anfloo, poète Hollandois, qui fleuriffoit dans
le dernier fiecle. Nous avons un recueil de fes Poëfies
publié par Jean de Haes en un volume in-S°: de 468
pages , à Rotterdam en 1713. L’éditeur exaire beaucoup
la mufe d’Anfloo. Mais fes éloges font exagérés
, & les pièces du recueil ne répondent pas
entièrement à l’idée qu’en donne PintroduCïion ou
préface de J. de Haes. Anfloo n’eft pas fans mérite ;
mais if affeÛe trop de grands mots, fefqàipedalia
verba, qui font fuivis fouvent de termes bas & peu
convenables à fes fu jets. Cette affeCiation de grands
mots eft affez ordinaire aux poètes Hollandais, &
l’on peut leur appliquer, à eux & à leurs admirateurs
, cette ftrophe de M, de la Mothe :
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Jufqu'à quand, bruyantes paroles ;
Agencement de fotis frivoles ,
Séduirez-vous tous les efprits ?
Pourquoi prodiguant fon efiime,. 1
S e hâter de trouverfublime
Ce qu'on n' a fouvent pas compris ?
D ’ailleurs Anfloo eft encore plein de jeüX de
mots qu’il emploie dans les matières les plus graves,
quoiqu’un bon efprit les évite même dans le ftyle
enjoué : fes figures font trop fréquentes, & fouvent
fi peu naturelles qu’elles approchent du galimatias.
Il faut lui rendre juftice d’un autre cote , il a
l’efprit poétique » & la fiÔion , qui eft l’ame de la
Poefie, régné par-tout dans fes vers. Il penfe fouvent
noblement & d’une maniéré fententieufe, & a
quelquefois l’art d’exprimer'fes penfées d’une maniéré
fi cohcife, qu’il feroit difficile de les rendre
dans une autre langue en aufli peu de mots.
La première piece du recueil de fes Poëfies eft un
poème épique facré à l’honneur de faint Etienne ,
premier martyr. Cet ouvrage eft fuivi de deux cens
vingt-quatre quatrains fur les principaux événemens
racontés dans l’Ecriture fainte ; il y en a cent cin-
quantedix fur le vieux Teftament, & foixante-huit
fur le nouveau. L’auteur affefte de finir tous ces quatrains
par une fentence ; les unes n’ont rien de fort
extraordinaire, les autres font un peu tirées, & quelques
autres aufli méritent des applaudiffemens.
Après ces petites pièces vient un poème fur la
pefte, qui ravageoit Naples du tems de notre auteur.
Non-feulement cet ouvrage nous paroît le meilleur
de tout ce recueil, il nous paroît même très-bon.
L’exprefîion en eft aifée & naturelle, les vers harmonieux
& coulans , & les deferiptions bien touchées.
On y voit par-tout un mélange effroyable de
crimes & de malheurs. D’un coté , on y remarque
un dieu irrité qui, par les fupplices les plus féveres,
punit les offenfes les plus criantes. On y remarque
de l’autre côté des criminels qui , au milieu des punitions
» bravent infolemment la main qui les châtie,
& qui femblent s’efforcer à mériter par des crimes
nouveaux des châtimens redoublés.
L’a&ion la plus horrible, dont notre auteur parle,
eft celle d’un charretier,qui abufa d’une très-belle fille,
dans le tems qu’elle luttoit avec la mort. C ’eft ainfi
à-peu-près que M. Anfloo parle d’une infamie fi
incroyable , fi toutefois la traduôion n’eft pas au-
deffous de l’original.
I l goûte fans horreur » ce fcélérat affreux ,
Sur fa bouche mourante, un plaifir monflrueux«
A ce feu fous la cendre il allume fa flamme ;
Un tranfport infernal s'empare dé fon ame ;
Et dévoilant ce corps dont la mort eft vainqueur »
Le monftre fatisfait fon exécrable ardeur,
Argos , Thibes féconde en illufires coupables ,
Vous ne vîtes jamais des faits f i détefiables,...i.i.n
J'eXcufe l'artifan de fon travail charmé,
QuiJatisfitfes feux, fur le marbre anirnéé
Epoufe de Minos ,j'excufe tafoibleffe ,
Toi dont un fier taureau pofféda la tendreffe.
Tout Ce poème en général eft varié par le récit
d’un grand nombre d’hiftoires intéreflàntes y dont
l’auteur fe fert quelquefois habilement pour détour^
ner l’efprit des leéleurs de tant d’objets affreux qui
• l’environnent. Il parle, par exemple, d’un feftin où
l’on ofa bien affifter , malgré la pefte qui favageoit
la ville; & où Anfloo introduit un Efpagnol qui parle
de la guerre en vrai Efpagnol , & un François qui
parle de l’amour en vrai François : ces deux portraits
font bien touchés.
On voit après cela plufieurs piecés fur différentes
matières, & entr’autrës quelques-unes à l’honneur
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de là reine Chriftlne , qui récompenfa fauteur , ert
l’honorant d’une chaîne d’or;
Enfin la derniere pièce de ce recueil eft urt ÔuVràgé
intitulé : Paryjche Bruyloft, les noces de Paris, Tragédie.
Il me femble qu’on peut appliquer à ce poëmé
dramatique non-feülement, brevis ejfe Laboro, objeu-
fusfio» mais auffi qu’on en pourroit bien'dire. .i .-
conantem grandia nervi deficiunt.
HOLOPHERNE ■ »capitaine fort, (Hifloiré factée J)
général des armées de Nabuchodonofor, roi d’Affy-
rie , fut envoyé à la tête d’une puiffante armée poui*
foumettre toutes les nations à Fempire de fon maî>*
tre. Ce général ayant paffé l’Euphrate, entra dan9
la Cilicie & dans la Syrie , mit tout à feu & à làng,
exerça mille cruautés , & répandit par-tout la ter-1
reur. Après avoir fait reconnoître l’autorité de fon
roi dans tous cès pays , il s’avança vers la Judée, Ô£
fut très-furpris d’apprendre que les Juifs fe difpô-
foient à lui réfifter. Il fit. marcher fon,armée vers
Béthulie , place dont la fituatiod avantageufe ne lui
permit pas d’en rifqiter l’attâqüe. Il fe contenta dé
lui ôter les eaux, dans l’efpérance que les habitans
preffés par la foif fe rendroient d’eux-mêmes. Ert
effet, ceux de Béthulie fe voyant réduits à l’extrémité
, réfolurent d’ouvrir les portes de leur ville , fi,
dans cinq jours, Dieu ne leur envoyoit dü fecôiirsi
Judith, informée de cette réfolution, reprocha à fes
concitoyens leur défiance & lêur témérité de pref-
crire un terme à Dieu , & après les avoir exhortés
à sliufflifier & à prier, elle fortit pour exécuter lé
projet qu’elle avoit formé, ne doutant point qu’elle
ne fut l’inftrument dont Dieu Vouloit fe fervir pôur
délivrer fon peuple. Elle vint donc fe rendre ait
général qui, épris de fa beàuté , la reçut favorable^
ment , & la fit conduire dans une tente , d’où elle
avoit la liberté de fortir quand elle vouloit. Le quatrième
jour, après un grand louper, Holoplierne ayant
bu avec excès, s’endormit1 ; Judith profitant de ce
fommeil, lui coupa la tête de fa propre épée , & là
porta à Béthulie , où elle fut fufperidue au haut des
murs. Dès qu’il fut jour $ les affiégés firent une (ortie
fur les ennemis ; & Ceux-ci effrayés de la mort
tragique de leür général, abandonnèrent leur camp
plein de richeffes , & prirent la fuite avec précipi«
tation: Les Ifraélites les pourfuivirent , en tuèrent
un grand nombre, & revinrent chargés de butin. (4-)
HOLOSTOBRCË, HOLDSTEBROA, (Gèôgr.)
Ville de Dàriemàrck, dans lé nord Jutlarid, & dans
la préfe&ure de Rypen, au diftrift d’Ulfbourg. Elle
eft baignée d’une riviere poiffonneufé , qui le jette
à un mille & demi de fes murs, dans le golfe fablon*
neux de Torskminde , formé par la mer du nord*
L’enceintè de cette ville eft médiocre ; mais fon tra*
fie eft confidérable. Les campagnes qui l’envirorinent
font fertiles ert grains & en fourrages ) & en dépit
des feedurs que fa riviere refufe à fort Commerce,
elle s’enrichit de l’exportation qui fe fait par terre $
de fes bleds, de fes boeufs, & fur-nout de fes beau»!
, chevaux. ( D .G .)
HOLOTHURIE , ou V e r g e Ma r in é , èplpe*
trum» (Hifloiré naturelle.j Cet animal de forme conique
, flotte fur la furface de l’eau, cherchant fa riotif-«
riture. Il a une bouche , a , fig. 4 , planche I I , d'Hifh
nat. dans ce Supplément, par laquelle on le trouve
quelquefois collé à des-plantés marines,- COfïîrrie
pour les fucer : elle eft auffi aflèz large pour englou-»
tir les infeftes qu’il rencontre. Lorfqù’on touche cë
zoophyte, il donne des marques de fentiment pâi'
un frémiffement très-fenfible au doigt qui le preffe*
Sa peau douce ail toucher eft bizarrement ridée $
excepté autour de la bouche où elle eft liffe , unie 86
tendue. Uhoîothurie reffemble affez par cette éxrfê-«
mité Su bout du gland de la verge humaine. Alb.Sebd
The/.