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4°. Que des lignes ne font nullement propres à garantir
une chaîne de quartiers ; cju il vaut infiniment
mieux qu’ils foient couverts par des têtes bien forr
tifiées ou par quelque riviere difficile à paffer, en
prenant d’ailleurs toutes les précautions néceffaires,
pour pouvoir en cas de befoin les raffembler promptement.
5°,. Que l’ufage des ligner eft tellement dangereux
, qu’un général chargé de défendre une frontière
avec des forces inférieures, ne doit jamais s’y
renfermer ; qu’il faut au contraire qu’il fe tienne toujours
près de l’ennemi, pour le fatiguer, le harceler
par des'alarmes continuelles, lui couper fes communications
, fes vivres 6c les fourrages, 6c faifir l’oc-
caffion de le combattre avec fupériorité ; qu’il choi-
fiffe une pofition avantageufe que l’ennemi ne
puiffe éviter pour pénétrer plus avant, qu’il la for-'
tifie de maniéré à ne pouvoir y être attaqué fans
faire craindre à l’ennemi un malheur inévitable ,
comme fit le marquis de Villars en 1691; que s’il ne
peut conferver fa pofition, il en ait reconnu plu-
fieurs, qu’il puiffe occuper lçs unes après les autres
, afin de gagner du tems , 6c de forcer l’ennemi
après une campagne fatigante d’aller hiverner dans
fon pays; qu’il faut enfin qu’il chercher à imiter le
maréchal de Creqtiy dans fa campagne en Lorraine
6c en Alface en 1677, dont la conduite eft une
fource inépuifable d’inftruûion.
Pour ne rien omettre de ce qui doit faire réprouver
le fyftême des lignes pour toujours, nous dirons
qu’il n’a jamais été connu des anciens, que ni Tu-
renne, ni Condé, ni Crequy , ni Luxembourg n’en
ont jamais eu la penfée, 6c que ce n’a été que dans
la guerre de fucceffion qu’il a été le plus fuivi ( * ).
Or nous remarquerons que dans cette guerre, le
génie de LouisXIV n’étant plus le même, que Lou-
vois n’étant plus fon miniftre, que la nation n’étant
plus guidée par les grands hommes que nous avons
cités , 6c qu’un efprit de timidité s’étant emparé du
monarque, du miniftere 6c des armées, l’ on s’en tint
fur prefque toutes nos frontières à une défenfive
ruineufe par l’entretien & la conftru&ion des lignes,
qui bien loin d’opérer des avantages, occafionnerent
au contraire toutes fortes de malheurs.
Nous ajouterons que ces fortes d’ouvrages ont eu
le même fort en Allemagne qu’en France., 6c que
le prince de Bade qui en avoit conftruit pour couvrir
fon pays, en a reconnu à fes dépens l’inutilité ;
que ni Montécuculli, ni le prince Eugene n’en ont
jamais fait ufage ; 6c que de nos jours le maréchal
de Saxe n’en a parlé que pour les condamner. « Je
» crois toujours entendre parler des murailles de la
» Chine, quand j’entend parler de lignes, dit ce gé-
• » néral; les bonnes font celles que la nature a fai-
» tes, & les bons retranchemens font les bonnes
» difpofitions 6c les braves troupes ». Mes Rêveries ,
t . I I , chap.,9 . ( AL D . L . R. )
L i g n e de fo i , ( Aflron. ) dans les inftrumens d’a-
ftronomie eft la ligne qui va depuis le centre de l’inf-
trument jufqu’au point de l’alidade qui correfpond
aux divifions de la circonférence ; c’eft la ligne dont
le mouvement décrit exactement les angles que l’inf-
trumentmefure ; dans les graphométres, c’eft la ligne
qui paffe par le centre des pinales 6c qui eft marquée
par le zéro du vernier ou nonius, ou par les
bircaux qui indiquent les dégrés, en répondant fuc-
ceffivement aux différens points du limbe ; dans lés
quarts de cercle à lunettes , c’eft une Ligne parallèle
(*) M. de Feuquieres dit que ce fut contre le fentiment du
maréchal de Luxembourg que cet ufage s’eft établi en France;
qu’il a toujours été perfuadé que l’ufage des lignes étoit pernicieux
à un général qui fait la guerre; que pour quelque raifon
de commodité que ce pût être, il n’a jamais youlu que fon
armée campât derrière des lignes.
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à la ligne de collimation ou à l’axe optique de la
lunette , & paffant par le véritable centre de la
divifiôti. ( M. d e l a L a n d e , y
LIGNER1S , ( Gèogr. Hifl.Lièt. ) bourg de la généralité
d’Alençon, où eft né Gilles de Caux, plus
connu par fa piece fur l'Horloge de fable , que par
fa tragédie de Marins; il eft mort en 1753 , âgé de
51 ans. ( C. )
§ LILAS, (Bot. Jard.y en latin lilac, en anglois
lilac, en allemand fyringenbaum. ,
Caractère générique.
Un petit calice permanent &c cylindrique d’une
feule feuille découpée parles bords en quatre parties ,
foutient un long tube coloré, monopétale, divifé
parles bords en quatre fegmens obtus qui s’étendent :
au fond du tube fe trouvent deux étamines courtes,
terminées par de petits fommèts 6c un embryon oblong
qui fupporte un ftyle court 6c délié, couronné
par un ftigmate épais & fourchu ; l’embryon devient
une capfule oblongue, comprimée 6c aiguë, à deux,
cellules: elle s’ouvre en deux valves oppoféesàla
paroi de féparation : chaque cellule contient une
femence oblongue 6c aiguë , à bordure membra-
neufe.
Efpeces.
1. Liias à feuilles ovale -cordiformes ; lilas à fleuri
bleuâtres.
Syringa foliis ovato- cordatis. Linn. Hort. Cliff.
Blue lilac.
Variété à fleurs blanches,
2. Lilas à feuilles profondément échancrées vers
le pétiole ; lilas à fleurs rougeâtres.
Lilac foliis petiolum versus profundê ferratis. Hórt,
Colomb. •
3. Lilas à feuilles lancéolées"; lilas de Perfe à
feuilles de troène.
Syringa foliis lanceolatis. Linn. Sp. pl.
Common Perfianjafmine.
Variété à fleurs blanches.
4. Lilas à feuilles lancéolées, entières & d’autres
découpées 6c laciniées ; lilas de Perfe à feuilles de
perfil. . „ .
Syringa foliis lanceolatis, integris dejjeclifque laci-
niata. Hort. Cliff
Cut leaved Perfianjafmine.
Le lilas n°. 1 , eft de tous le plus commun ; il y a
fort long - tems qu’il a paffé de la Perfe en Europe ;
il y eft tellement acclimaté , 6c multiplié , même
dans fes parties les plus froides, où il commence à.
fe mêler parmi les haies, qu’on leprendroitpour une
de fes produétions naturelles.
Le grand lilas à fleurs blanches feroit une véritable
efpece, ainfi que notre /zP. \ 9 s’il étoit vrai que le
carafrere fpécifique fût de fe régénérer par la femence
fans altération ; mais c’eft encore une queftion de
favoir ce qui diftingue effentiellement l’efpece de
la variété : les efpeces font - elles créées primordiales,
ou s’en forme-t-il de nouvelles comme le feroient
croire Sc le fraifier de Verfailles 6C plufieurs plantes
nées avec des différences effencielles & confiantes
fous les yeux de M. Linné? Cette importante queftion
n’eft point encore décidée; cependant comme
on eft convenu généralement de mettre au tang des
efpeces, les plantes qui portent quelque différence
dans laforme des feuilles, nous n’avons pas héfité de
regarder le lilas n°. 2, comme en formant une; fes
feuilles font plus-petites que celles des autres ; 6c
au lieu que celles-là s’evafent vers le petiole, celles-
ci fe partagent en deux lobes qui féparent une échancrure
profonde de chaque côté du pétiole.
Dans les bonnes terres les lilas s’élèvent fur un
tronc affez droit, couvert d’une écorce grife, à dix-
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huit ou vingt pieds de haut; les boutons font fort gros
dans leur état hivernal ; ils font couverts d’écailles
plus ou moins vertes : dans le n°. 1 , elles font d’un
verd tirant fur le violet, & dans le n°. 2, d’une teinte
encore plùs foncée. Le lilas blanc porte de fort gros
boutons 6c fort pointus, dont le verd tendre le fait
diftinguer des autres au premier coup d’oe il: les
feuilles font auflî d’un verd plus doux 6c plus gracieux
: le feuillage du n° 1 eft d’un ton affez rembruni
, & les.feuilles des bourgeons récens du n°. 2 ,
tirent fur le violet. Les uns 6c les autres portent
leurs boutons à fleur au bout ou à côté du bout des
branches ( & il en naît chaque année de nouveaux
au-deffous ) , dès la fin de mars ; pour peu qu’on foule
ve les écailles environnantes,on voit l’épi formé ;
mais il faut un tems prodigieux à cet épi pour qu’il
acquierre un parfait développement, qui n’a lieu que
dans les premiers jours de mai. Il naît ordinairement
d’un même bouton deux épis : ceux du n°. 1 , font
les plus courts; ceux du lilas blancs font plus longs,
plus rameux 6c moins ferrés : ceux du n°. 2 , font
plus étoffés 6c plus ferrés qu’aucuns ; les fleurs du
n°. 1 , font les plus petites ; leur couleur eft un purpurin
clair qui fe change en bleuâtre purpurin au
bout de quelque tems, 6c cette couleur s’affoiblit
toujours davantage : les fleurs du lilas blanc font
plus grandes, elles font d’un blanc de lait affez pur :
les épis durent environ huit ou dix jours de plus que
les autres: ceux du nr. 2 , durent encore plus lo'ng-
tems, 6c ne perdent leur fraîcheur que peu de jours
avant de fe faner; les fleurs dont ils font compofés
font auflî grandes que celles du lilas blanc ; leur
couleur eft un purpurin très-doux qui, fur les bords
des pétales fe renforce de plufieurs teintes ; en forte
que le dedans de la fleur paroiffant prefque blanc,
ces épis mêlés de deux couleurs ont un éclat fingu-
lier ; ce lilas eft bien préférable au n°. 1 ; le blanc a
auflî beaucoup de mérite : il faut entrelacer ces deux
efpeces dans les bofquets de mai. A l’égard du lilas
bleu , comme fa fleur ne dure pas fi long-tems , il
convient de le mettre en maffe à part. Le lilas n°. 2 ,
eft celui qu’on appelle en Angleterre lilas Hollandois;
il eft très-commun en Flandre; mais il eft encore
rare dans le refte de la France.
Rien n’eft comparable aux douces fenfations que
donne le retour du printems ; lorfque la vie recommence
de circuler par-tout, la nature près de fe régénérer
, fe pare pour l’amour ou par l’amour ; notre
ame partage délicieufement ce fpeftacle ; elle fe répand
, pour ainfi dire, fur tous les objets 6c devient
fenfible dans chacun : comme elle eft doucement
émue, l’admiration eft alors un fentiment : les arbres
fleuris font bien propres à l’exciter, mais il n’eft
point d’arbre dont les fleurs embelliffent autant que
celles des lilas, les décorations riantes du mois de
mai : qu’ils font beaux ces épis d’une couleur fi
tendre, qui dardent de toutes parts du fein d’un feuillage
plein d’aménité 1 quelle douce odeur ils exhalent,
6c combien d’idées agréables elle réveille ! Que
je plains ceux qui font emprifonnés & entaffés dans
les villes; ils y refpirent une odeur infeéle & mal-
faine; tandis qu’à la campagne l’air s’embaume en
balançant les fleurs, & porte dans les veines le plai-
fir avec la fanté.
Les lilas peuvent s’élever en haute tige, il faut
pour les rendre droits les conduire avec un tuteur,
6c les élaguer avec foin pendant quelques années ;
on en fait, dans les bofquets du printems de petites
allées charmantes : il fuffira de leur donner fix ou
huit pieds de largeur, & la même dîftance doit fe
trouver entre^ les arbres dans la ligne ; au bout de
quelques années, ces allées feront couvertes d’un
dôme fleuri des plus agréables. On peutxaufli avec
ces lilas former des tiges de trois ou quatre pieds de
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haut, furmontées d’une tête arrondie, 6c les placer
à quatre ou cinq pieds de diftance les uns des autres
au milieu des maflifs. Pour leur former cette tête, il
faut fe contenter de retrancher les branches les plus
irrégulières avec la ferpette, comm’e les fleurs naif-
fent au bout des branches, le cifeau les empêcheroic
de fleurir.
Qu’on mette auflî dans le fond des maflifs des
buiffonsou cepées de AVarmontés fur plufieurs tiges,
ils y feront un très-bel effet : enfin on en compofe
des berceaux charmans , en entremêlant les trois
efpeces avec le padus pultier qui fleurit dans la même
faifon.
On multiplie ordinairement 6c très - facilement ce
lilas par les furgeons, qu’ils ne pouffent de leur pied
qu’en trop grande abondance: il faut prendre des
furgeons de deux ans 6c en former, en automne, une
petite pépinière ; au bout de trois ou quatre ans on
pourra les planter à demeure. Les arbres obtenus
par cette voie font fort fujets à buiffonner du pied ;
ce qui eft fort incommode. Ceux de marcottes ne
tracent pas tant, 6c ceux de.boutures tracent encore
moins. Les marcottes peuvent fe faire au mois de
juillet, la fécondé automne elles feront fufiifamment
enracinées. Les boutures fe font en o c l o b r e ; fi on
leur donne les foins convenables (Voye^V article Boutu
r e , Suppl. ) , il en reprendra un grand nombre.
Les arbres de graine font les plus vivaces, les
plus droits & les moins fujets à pouffer des drageons..
Il faut femer la graine en feptembre, dès que les Cliques
s’ouvrent d’elles-mêmes, elles germeront le
printems fuivant, 6c les arbres fleuriront la t r o i f i e m e
année.
Le lilass’écuffonneavec unemerveilleufe facilité;
j’ai multiplié par ce moyen le lilas blanc 6c le n°. 2 ;
je les ai greffés fur le lilas commun: on peut même
fe procurer par ce moyen des lilas compofés.de trois
efpeces, dont la bigarrure eft très - agréable. Cet
écuffon fe fait en août, 6c même encore en feptembre.
Ils prennent auflî'fur frêne, mais je ne les y ai pas
vu pouffer: on allure qu’ils réufliffent fur le tilleul ,
ce‘feroit un avantage fingulier ; on fe procureroit,
par ce moyen, des lilas à tiges très - hautes 6c très-
droites; mais je doute que cette greffe dure long-tems.
Le lilas n°. 3 , eft celui qu’on appelle le Ma s* à
feuilles de troène : il s’élève , dans les bonnes terres ,
à dix ou douze pieds de haut 6c prend un tronc affez
vigoureüx ; il trace infiniment, en forte qu’on ne peut
guere l’élever en tige ; les furgeons qu’il pouffe de
Ion pied fervent à le multiplier : les épis font pett
ferrés, mais grands & larges ; ils naiffent au bout
des branches grêles qu’ils inclinent agréablement : les
fleurs font d’un ton plus bleuâtre que celles du lilas
commun; elles s’épanouiffent lorfque celles-là fe
fanent, durent plus long-tems 6c exhalent une odeur
encore plus agréable. On le multiplie àifément de
boutures faites en o c l o b r e . Cet arhriffeau doit être
planté en maffe dans les bofquets de mai, ou entrelacé
dans le fond des maflifs avec des arbriffeaux de
même croiffançe, mais portant des fleurs de couleurs
différentes.
Il y a une variété de ce lilas dont la fleur eft d’un
blanc légèrement lavé de purpurin; on l’écuffonne
furie commun, 6c il eft agréable de les mêler en-
femble. Les marcottes 6c les boutures fervent à
multiplier cette variété, en attendant que les individus
qu’on en poffede pouffent des furgeons de leur
pied.
Le lilas n°. 4 , eft celui que les jardiniers nomment
lilas à feuilles de perfil : fon feuillage découpé eft
fort agréable: il s’élève un peu moins haut que le
précédent ; l’écorce eft d’un brun plus obfcur 6c
marquée de points blanchâtres ; les épis font un peu
p\us tardifs , leur couleur eft plus vive : cette efpece
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