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Sarrafins qui défoloient les frontierès , & par-tout il
n’effuya que des revers. Il fut réduit à acheter.l’alliance
des T u r c s , qui'dès ce moment découvrirent
la route qui pouvoit les conduire à l’empire. L’églife
de Conftantinople étoit déchirée par un fchifme. Léon
dégrada P hotius, auteur de toutes les nouveautés ;
mais il n’ en fut pas mieux traité par un de fes fuccef-
feurs qui l’excommunia pour s’être marié quatre
fo is , ce qui étoit défendu par la difcipline de l’églife
Grecque. Le patriarche téméraire fut chaffé de fon
fie g e , 8c l’excommunication fut éteinte. C e prince
fans moeurs étoit embrâfé de zele , 8c ne manquoit
pas de lumières : tandis qu’il s’o cçupoit de querelles
théologiques, les Barbares inondoient fes plus belles
provinces. Il compofoit des homélies, où l’on trouve
plus de déclamation que de véritable éloquence : il
s’exerça auffi fur la Jurifprudence, 8c réforma plufieurs
loix de Juftinien qui avoient befoin d’explication.
Son ouvrage le plus eftimé eft un traité de tafti-
q u e , d’ autant plus curieux qu’il inftruit de l’ordre
des batailles de fon tems & de la maniéré de combattre
des Sarrafins & des Hongrois. Léon mourut de la
dyffenterie l ’an 9 1 1 de notre ere. ( T — N.)
LÉO N C E , (Hijl. Rom.) patrice d’O r ien t, après
avo ir rendu les plus grands fervices à Juftinien I I,
lui devint fufpeft. Dans le tems qu’il attendoit la
récompenfe de fa valeur , il fe v it accufé par les env
ieux de fa gloire , & condamné aux ennuis d’une
éternelle captivité. Il obtint enfin fon élargiffement,
mais plus fenfible à l’offenfe qu’aux bienfaits dont'
on vouloit le combler, il s’arma contre fon maître '
qu’il força d’abdiquer l’empire. Léonce porta la guerre
en Afrique où il n’éprouva que des revers. T ibe re
Abfimare profitant du mécontentement des foldats,
alluma le feu de lafédition. Léonce précipité du trône,
y v it remonter Juftinien qui le condamna à avoir le
nez coupé 8c la tête tranchée. Il n’avoit régné que trois
ans, & d ans ce fiecle de barbarie, il ne commit aucun
aéte de cruauté : il a voit épargné la v ie de Juftinien,
qui le condamna à la mort. ( T — jv.)
LÉO N B ER G , ( Géogr. ) châ teau, v ille & bailliage
d’Allemagne, dans lé cercle de Suabe , 8c dans
le duché de "Wirtemberg. Le château eft un palais.
La ville fut donnée par l’empereur Ferdinand I I , au
général Ga lla s , l’an 16 3 5 , après la bataille de Nord-
lin g en , mais elle fut reftituee à fon prince à la paix
de ‘W’eftphalie. Et le bailliage comprend dix-fept
paroiffes » du nombre defquelles eft la petite mais
ancienne ville de Heimsheim. (JD. G.)
§ L É O P A R D , f. m. leopardus, i , ( terme de Blafon.)
C e t animal quadrupède eft plus rare que le lion dans
les armoiries. Voye{ PI. V . fig. 2.58 de B lafon, D i cl.
raif. des Sciences, & c .
L e léopard eft paffant 8c a toujours la tête de
fr o n t , c’eft-à-dire qu’il montre les deux y e u x 8c
les deux oreilles ; fa queue doit être retournée fur
le dos , le bout en-dehors.
O n nomme léopard lionné celui qui eft rampant.
D e Brehan de Plelo en Bretagne ; de gueules au
léopard d'argent.
D e Jaucourt de V a u x , de V illarnoue en Bourgogne
; de fable à deux léopards d ’or.
§ L ÉO P AR D É , adj. m. ( terme de Blafon.) fe dit
du lion qui femble marcher ; en ce c a s , il a fa queue
tournée en dehors , comme celle du léopard.
L e lion pofé de la fo r t e , eft dit léopardé, parce
que fa fituation ordinaire eft d’être rampant.
D e la Villette de la Motte-Chemilly en Bourgogne;
de gueules au lion léopardé £ argent. ( G .D .L .D .)
L É O P O L , (Géogr.) v ille de Pologne, au palati-
nat de Ruffie : elle a été bâtie par Léon , duc de
Ruflie. Cafimir I I I , furnommé le Grand , s’en rendit
maître en 13 4 0 , 8c fon évêché fut érigé en métropole
en 136 1 . Il fe tient tous les ans en cette v ille
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une belle foire le jour de fainte Agnès. Les Turcs la
rançonnèrent en 16 7 1 , & les Suédois l’efcalkderent en
1 7 0 4 , & y firent couronner Staniflas Leczinski par
l’archevêque. C ’eft la patrie de ce grand prince ,à q u i
fes v e r tu s ,- fâ douceur & fon amour génëreux: pour
fes peuples ont fait donner lè nom de Bienfaifant. Un
Athénien fe félicitoit d’être né du tems dé Socrate :
tous les Lorrains fe regardoient heureux d’être nés
fôus le régné de Staniflas : un avocat'de Nancy nous
a donné fa v ie en deux vo lum e s, 176 9 ; bn y peut
v o ir les établiffemens u tile s , les édifices fupèrbés,
les embelliffemens de toutes efpecës créés de fes propres
deniers, pour la gloire 8c l’utilité de la Lorraine.
C e t ami des hommes & des lettres , après nous
avoir édifiés pendant fa v ie par l’ exëmple de. toutes
les vertus , nous inftruit encore après fa mort dans
lès écrits qu’il à la iffé s , 8c qui ont été raffemblés en
qtiatre volumesi/z-12. fous le titre à'(Euv rés du philo-
Jophe bienfaifant. Il eft mort fort âgé & fort regretté
en Lorraine en 1766. (C .)
LE O PO LD d’Autriche , fuCceffeur de Ferdinand
III, (Hifoire <TAllemagne, de Hongrie & de Bohême.)
XXXVIe empereur d’Allemagne depuis Conrad
premier ; X X X e roi d’Hongrie , XXXVIIe roi de
Boh êm e , naquit l’an 1640 , le 9 juin, de Ferdinand
III, 8c de Marie-Anne d’Efpagne, impératrice.
La jeuneffe de Léopold qui n’avoit point encore
dix-fept ans à la mort de Ferdinand I I I , fit croire à
l ’Europè que le fceptre impérial alloit fortir de la
maifon d’Autriche. La France le defiroit, 8c ce fut
en partie par les in trigues de cette cou r,q ue le$ électeurs
confumerent plus de quinze mois avant que de
fe décider en faveur de Léopold. Louis X IV s’étoit
même mis au nombre des prétenda'ns ; liïàisceùxqui
balancèrent le plus long-tems les fuffrageV, fureritle
duc Palatin de Neub ourg, l’éle&eur de B av iè re, &
l ’archiduc Léopold-Guillaume, évêqu e de Paffau,
8c oncle paternel de Léopold. Louis X IV exclu du
trône de l’Em pire, s’en côn lo la , en faifant inférer
dans la capitulation, plufieurs conditions affez dures.
Le nouvel empereur fut obligé de ligner que 'jamais
il ne donneroit de fecours à l’Efpagne, contre la
France, ni comme empereur, ni comme archiduc.
C e fut encore, pour contenir Léopold, que le roi
très-chrétien entra dans l’alliance du Rhin , conclue
e n tre laS u ed e& leséle&eurs eccléfiaftiques, & plufieurs
princes de l’empire, de la faftion contfâire à
- l’empereur , contre la Pologne 8c le Danemarck.
Cette alliance donna une très - grande influence à
Louis X IV dans les affaires de l’Empire , & fon autorité
l’emporta fouvent fur celle d ë Léopold. Les
deux premières années de ce régné furent confa-
crées à la po litique , 8c à examiner les mouvemens
8c les prétentions des princes, ennemis'ou jaloux de
la maifon d’Autriche ; mais la troifieme fut troublée
par la guerre des T urcs qui portaient la défolation
dans toute la Hongrie. L’empereur rempli d’inquiétudes
, demanda du fecours aux éle&eurs qui lui accordèrent
vingt mille hommes, que le fameux Mon-
técuculli de v oit commander. Léopold par cette démarche
, c ro y o it fe rendre agréable aux Hongrois :
| il v it av e c étonnement que cette armée fut traitée
en ennemie par ceux même qu’elle alloit fecourir.
Les Hongrois avo ien t obtenu des prédéceffeurs de
Léopold, de ne point entretenir d’Allemands dans leur
pa ys ; ils crurent cette loi v io lé e , & levèrent l’ éten-
dart de la révolte. C es défordres facilitèrent lés progrès
des armées ottomanes qui prirent la fortereffe
de Neuhaufen, & remportèrent une vi&oire près de
Barcan. Les Hongrois étoient les reftes d’une nation
nombreufe,échappés au fer des Turcs, llslabouroient
l ’épée à la ma in, dès campagnes ârrofées du fang de
leurs peres. Le roi devoit ufer des plus grands ména-
gemens pour les fecourir : ils étoient les viflinîes de
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l ’inquiétude des grands v a ffau x , qui croyoient voir
dans les mains du fouverain-, des' chaînes toujours
prêtes à s’appefantir fur eux. Lés Turcs après la prife
de Neuhaufen , continuèrent leurs dévaftations, 8c
leurs fuccès furent affez confidérables, pour que tous
les princes chrétiens fe cruffent intéreffés à fournir
des fecours à Léopold. Louis X IV même ,qu i n’avo it
ceffé de traverfer fon r è gn e , lui envoya fix mille
hommes d’élite , commandés par le comte de C o li-
gn y 8c le marquis de la Feuillade. Montécuculli déjà
célébré par plufieurs v i& o ir e s , fut chargé du commandement
général. Il battit les Turcs à S. G o da r t,
près du Raab. Cette journée eft très-fameufe dans
les annales de l ’Empire; mais il eft à croire que les
hiftoriens en ont beaucoup grofli les avantages. Le
miniftere de Vienne fit la paix â des conditions qui
décelent la conviffion où il étoit de fon infériorité.
Il confentit à unetrevehonteufe qui donnoit au ful-
tan la Tranfilvanie avec le territoire de Neuhaufen.
L ’empereur confentit encore à rafer toutes les for-
tereffes voifines. Le T u rc difpofa de la Tranfilvanie,
qui depuis long-tems étoit une pomme de difcorde
entre le roi d’Hongrie & les Ottomans. Amalfi qui
en étoit prince, fut obligé de continuer le tribut dont
il avoit cru que la prote&ion de Léopold l’auroit
affranchi. L ’Allemagne 8c la Hongrie défapprou-
verent ce traité déshonorant ; mais l’empereur étoit
déterminé par des vues particulières. Son autorité
é toit prefque entièrement méconnue en Hongrie ,&
il étoit de la derniere importance de réprimer l’audace
effrénée des feigneurs. Ils avoient formé le proje
t de fecouer le joug de la maifon d’Autriche, 8c de
fe donner un ro i de leur nation : ils dévoient enfuite
fe mettre fous la proteftion de la Porte. Ils drefferent
le plan d’une double cônfpiration, l’un pour fecouer
le jo u g , l’autre pour affafliner Léôpold. C e t affreux
complot ayant été d é co u v e rt, coûta la v ie à fes principaux
auteurs. Nadafti, Serin , Tattembak & Fran-
gipani, reçurent fur l ’échafaud le jufte châtiment de
leur crime. Plufieurs écrivains ont cependant prétendu
que cette confpiration étoit imaginaire, & que
Léopold s’en étoit fe rvi comme d’un pré tex te , pour
opprimer lès proteftans, & introduire le gouvernement
arbitraire , pour confifquer en faveur des mi-
nirtres impériaux,les biens des principaux feigneurs.
S ’il en eft ainfi , il faut placer Léopold dans la claffe
des Néron 8c des autres monftres couronnés. Les
biens des conjurés furent confifqués, & l’on s’affura
de tous ceux qui avoient eu quelque liaifon avec
eux. Le palatin d’Hongrie, trop puiflant, fut fuppri-
m é , 8c l’on établit un v icero i. Cette barbarie ou
cette févérité fit paffer le défefpoir dans le coeur des
feigneurs Hongrois: ilsfe donnent àEm e r ickT ek e li,
qui s’offre d’être leur chef. T ek e li pour affurer fes
vengeances & fa révo lte , fe met fous la proteftion
des Ottomans, 8c tout eft bientôt en combuftion dans
la haute Hongrie. La cour de Vienne crut alors dev
o ir ufer de quelque ménagement ; elle rétablit la
charge de palatin, confirma tous les privilèges de la
nation , & promit la reftitution des biens confifqués.
Cette.condefcendance qui venoit après des aéles de
févérité qui fetùbloient préfager l’efcla va ge , ne fé-
duifit aucun des rebelles. T ek e li s’étoit déjà montré
trop redoutable pour fe flatter de pouvoir v iv r e en
fû re té , tant qu’il feroit fujet de Léopold. L a Porte
qui le prend fous fa p ro teftio n , le déclare prince
fouverain d’H ongrie, moyennant un tribut de quarante
mille féquins. Alors Mahomet IV prépare le
plus formidable armement que jamais l’ empire T urc
ait deftiné contre les chrétiens ; fon bacha de B u de ,
commence les hoftilités par la prife de T o k a i &
d’Eperies. L’empereur étoit dans des circonftances
embaraffantes ; il v eno it de foutenir une guerre rui-
neufe contre la France ; & les feux de cette guerre
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u éto ient pas encore entièrement éteints. L e grand
vifir Kara-Muftapha , traverfe la Hongrie , avec une
armée de deux cens cinquante mille hommes d’infanterie
, & d e trentemille iaphis.Sona rtillerie&fon ba-
g a g e , répôndoient à cette multitude. 11 chaffe devant
lui le duc de Lorraine qui veut lui d ifp uter lete r rein ,&
vient mettre le fiege devant Vienne. Dans les longs
démêlés des empereurs Ottomans & des empereurs
d’Allemagne, jamais les Turcs n’avoient eu des fuccès
fi rapides. Ils avoient bien marqué le deffein de
venir à Vienne ; mais jamais cette ville ne les av o it
vus au pied de fes murailles. L’empereur abandonne
cette capitale, & fe retire d’abord à L in tz , enfuitè à
Paffau av e c toute fa cour. La moitié des habitans le
fuit dans le plus grand défordre ( 16 juillet 1683 ).
On commença à brûler les fauxbôurgs , dans l’im-
poflibilité de les conferver. La v ille fembloit ne pouvoir
foutenir un affaut fans un miracle. L e comte de
Staremberg, qui en étoit gouverneur , n’avo it que
huit mille hommes de bonnes troupes. Le duc de
Lorraine avoit inutilement tenté de conferver une
communication de fon armée qui étoit d’environ
vingt mille hommes, avec la ville ; mais c’étoit beaucoup
d’avoir affuré la retraite de l ’empereur. Forcé
d’abandonner la partie contre Ka ra-Muftapha, il
alla défendre la Moravie contre T ek e li qui mena-
çoit cêtte province, Léopold prefloit de tout fon
pouvoir les fecours de Bavière, de Saxé & des autres
cercles : mais fa principale elpërance étoit dans Jean
S o biesk i, roi de Pologne , prince qui devoit la couronne
à fes v iô o ir e s , 8c qu i s’é toit diftingué contre
l'es Turcs par plus d’un exploit mémorable. Ces fe-
cours arrivèrent au moment que la v ille étoit à la
derniere extrémité. Les troupes de Saxe 8c de Bav
iè re , toutes les auxiliaires'& lès nationales', partirent
au haut de la montagne de Calember, d’où elles
donnent des fignaux aux affiégés. T o u t leur manq
u o it , excepté leur courage. Elles defcendirent &
fe rangèrent en bataille au. bas de la montagne , en
formant une efpece d’amphithéâtre : le tout montoit
à foixante-quatre mille hommes. L e ro i de Pologne,
à la tête d’un corps d’environ feize mille , occupoit
la droite. Le prince Alexandre, fon fils, étoit auprès
de lui. Quelle magnanimité dans ce Jean Sobieski
qu i, pour une caufe étrangère ,.s’expofoit à un péril
que Léopold , lorfqu’il s’agiffoit de fa couronne ,
n’avoit ofé contempler J Jamais on ne v it tant 8c de
plus grands princes que dans, cerre journée. Jean-
Georges , électeur de Saxe , commandoit lui-même
les troupes de Ion cercle. Le prince de Saxe-Lawem-
bo û rg, de l’ancienne & malheureufe maifon d’A f-
canie', co'nduifoit la cavalerie impériale ; l ë prince
Herman de Bade l’infanterie. Le prince Waldeck étoit
à la tête des troupes de Franconie. On comptoir jufi
qu’à dix-huit princes parmi les volontaires. Marië-
Ëmmanuel, éleéleur de B av iè re, qui fut depuis mis
au ban de l’empire, étoit de ce nombre. Il pouvoit
commander en c h e f , mais il aima mieux exécuter
les ordres du duc de Lorraine. Ce fut le 12 feptem-
bre que fe donna cette fameufe ba taille, fi cependant,
comme le remarque M. de V o lta ir e , c ’en fut une.
Kara-Muftapha laiffa vingt mille hommes dans les
tranchées, & fit livrer un affau t, dans le même tems
qu’il marchoit contre l’armée chrétienne. La fupé-
riorité du nombre lui permettoit de faire cette manoeuvre.
La prife de la ville étoit certaine, fi l’attaque
eût été conduite par d'habiles généraux. Les
affiégés manquoient de poudre , leurs canons étoient
démontés, 8c le corps de la place avoit une brèche
large de plus de fix toifes. S o biesk i, après avoir harangué
fes troupes, commence l’attaque, fécondé du
duc de Lorraine. Le premier choc fut fi impétueux ,
que les Ottomans prirent là fu ite , fans même effayer
de réfifter. Jamais on ne v ér fa moins de fang entre