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•de la pourpre, fuivit fon exemple ; & dégoûté des
•embarras des affaires,il voulut jouir de lui-même
dans le loifir de la vie privée; mais fatigué du poids
•de fon inutilité, il reprit la pourpre à la follici-tation
de fon fils. Soit par dégoût des grandeurs, ou par
mauvaife volonté contre fon fils, il l’obligea de
s’exhéréder & de fe réduire à la condition de Ample
particulier. Le peuple & l’armée fe fouléverent
contre cette injuftice. Maximien n’eut d’autre ref-
•fource que de fe réfugier dans les Gaules oii com-
mandoit Conftantin qui avoit époufé Fauftine fa
fille. Son caraftere inquiet & remuant ne put fe
ployer fous les volontés d’un gendre, & ce fut
pour s’en débarraffer qu’il engagea fa fille à fe rendre
complice du meurtre de fon époux. Fauftine
laifie d’horreur parut difpofée à commettre ce crime
pour le prévenir. Conftantin averti par elle fit coucher
dans fon lit un de fes eunuques, que les meurtriers
maffacrerent au milieu des ténèbres. Conftantin
furvint accompagné de fes gardes. Il reprocha
à fon beau-pere l’énormité de fon crime, & ne
croyant pas devoir le laiffer impuni, il ne?lui laiffa
que le choix de fon fupplice. Maximien défefpéré
d’avoir manqué fon coup, s’étrangla à l ’âgé de 60 ans
dont il en avoit régné vingt-un. Quoiqu’il eût toutes
les qualités d’un grand capitaine, il en ternit l’éclat
par les vices qui font les grands ïcélérats. Son élévation
ne put corriger la rufticité de fes moeurs féroces.
Toutes fes aâions rappellerent qu’il étoit
né barbare & fans éducation. Il eut l’avarice & la
-cupidité d’un publicain. Sa figure étoit aufli rebutante
que fon caraéiere.
M a x im i e n II, fut furnommé Varmentaire, parce
qu’étant né de parens pauvres, il avoit pafle fa jeu-
•neffe à garder les-troupeaux. Ce fut par fa valeur
que de fun pie.ibldat, il parvint aux premiers grades
de la guerre. La faveur des foldats le rendit nécef-
faire à Dioclétien qui le créa Céfar, en lui faifant
époufer fa fille Valéria. Tant qu’il n’avoit eu qu’un
•commandement fubordonné, il s’étoit acquis la réputation
d’un grand capitaine : il démentit cette idée
dans la guerre contre les Goths & les Perfes qui le
vainquirent dans plufieurs combats. Ses défaites furent
imputées à fon incapacité. Dioclétien l ’obligea
de marcher à pied à la fuite de fon char avec tous
les attributs de la dignité impériale. Senfible à cette
humiliation, il demanda le commandement d’une
nouvelle armée pour réparer la honte de fes anciennes
défaites. Plus heureux ou plus fage , il remporta
une yiûoire complettefurNarsès qui lui abandonna
fon camp , fes femmes & fes enfans. Le vainqueur
ufa avec humanité de fa vi&oire ; la famille
de Narsès n’effuya aucunes des humiliations de la
captivité : mais il ne lui rendit la liberté qu’à condi-
iion qu’on reftitueroit toutes les provinces fituéés
en deçà du T igre, que les Perfes avôient envahies.
Il fuccomba fous le poids de fes profpérités. Sailï
d’un fol orgueil, il prit le titre de fils de Mars. Dioclétien
qui l’avoit méprifé commença à le craindré
& quélque tems après il fe détermina à fe démettre
de l’empire. Maximien après cette abdication monta
furie trône & prit le titre d’Augufte , qu’il déshonora
par fes cruautés. Les peuples furent accablés
d’impôts, & ceux qui furent dans l ’impuiffance de
les payer, furent expofés à la voracité des bêtes
féroces : ce fut contre les chrétiens qu’il exerça le
plus de cruautés. Toutes les calamités qui affligèrent
l’empire’ leur furent imputées. L’âge qui'tem-
pere les paffions ne fit qu’aigrir fa cruauté. Tous
les fujets de l’empire furent obligés à 'donner une
déclaration de leurs biens, & ceux qui furent convaincus
d’inexaâitude, furent punis par le fupplice
de la croix. Les indigens furent accufcs de cacher
leurs tréfors, & fur cette fauffe idée, ils furent
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jetrës dans le Tibre. Ces exécutions barbares le
rendirent odieux aux peuples. Maxence, appelle
par les voeux des Romains , le força de quitter
l’Italie. Les chagrins épuiferent fes forces; il tomba
malade, & fon corps couvert d’ulceres, ne fut plus
qu’une plaie. Ce tyran qui dans la fanté avoit bravé
les dieux & leurs miniftres, devint fuperftitieux en
Tentant fa fin approcher. Il invoqua toutes les divinités
du paganifme qui n’apporterent aucun'foulage-
ment à fes maux. Il adreffa enfuite fes voetfx au
dieu des chrétiens qui rejetta fes prières. Il mourut
au milieu des douleurs les plus aiguës qui furent
le châtiment anticipé de fes excès monftrueux. Son
extérieur décéloit les vices cachés de fon ame. 11
étoit d’une taille gigantefque &c chargé d’enbonpoint.
Sa voix forte & difcordante ne fe faifoit entendre
que pour faire des menaces ou di&er des arrêts
de mort. Les lettres qu’il dédaigna ne lui prêtèrent
point leur fecours pour adoucir fa férocité. Il mourut
l’an 311. (T— jv. .)
MAXIMILIEN. I , archiduc d’Autriche, ( Hiß.
<TAllemagne. ) XXVIII* empereur depuis Conrad ,
naquit le 22 mars l’an 1459, de Frédéric le Pacifique,
& d’Eléonore de Portugal, & fut*élu roi des Romains
en i486 le 16 février: il fuccéda à fon pere
l’an 1493, & mourut le 12 janvier 1519.
Le commencement du regne de ce prince offre un
mélange de profpérités & de revers. Son jnàriage
avec la princeffe Marie, fille & héritière de Charles
le Téméraire, le mit en état de figurer avec les plus
puiffans potentats de l’Europe , même avant qu’il
parvînt au trône de l’empire. Ce mariage fut une
fotirce de guerres entre les maifons de France &
d’Autriche. Au nombre des provinces qui formoient
l’opulente fucçelîron de Charles , on comptoir le
Cambrefis, l’Artois ,<|e Hainaut, la Franche - Comté
& la Bourgogne. La France prétendoit avoir un droit
de fuzeraineté fur ces provinces. Louis X I, que l’on
dételle comme homme, mais que l’on admire comme
ro i, devoit commencer par fe faifir des deux Bourgognes,
& de plufieurs places dans-PAftois & le
Hainaut. La France foible & malheuréufè fous le
regne des prédéceffeurs de Louis, parce qu’elle étoit
toujours divifée & ennemie de fes rois, fe rendoit
redoutable fous un prince qui avoit Part de fe faire
obéir, & qui au rifque d’éprouver des remords, com-
mettoit indifféremment tous les crimes ,,vpourvU
qu’ils fuffent avoués par la politique. Maximilien
favoit,ce qu’il avoit à craindre d’un femblable ennemi
; perfuadé que les troupes de la princeffe. fon
époufe, étoient infuffifantes, il implora les princes
allemands qui, mécontens de l’empereur fon pere-,
lui refuferent des fecours. Les Liégeois feuls etn-
brafferent fon parti. Aidé de ces nouveaux alliés
dont la fidélité lui étoit d’autant moins fufpe&e ,
qu’il connoiffoit leur averfion pour la domination
françoife, Maximilien prit plufieurs places importantes
, battit les François à Güinegafte ; cette vic-
■ toire ne fut pas décifive. Louis XI eut l’adreffe de
lui en dérober tout le fruit en le forçant de lever le
fiege de Térouane. La mort de Marie arrivée fur
ces entrefaites fournit de nouveaux alimens à cette
guerre. Maximilien fut regardé comme un étranger,
& les états, fur-tout ceux de Flandres, lui contestèrent
la tutelle & la garde noble du prince Philippe,
fon fils, & de la princeffe Marguerite, fa fille. Cette
nouvelle conteftation étoit en partie l’effet des intrigues
de la cour de France. Elle fe termina à l’avantage
de Maximilien : ce prince fut déclaré tuteur de
Philippe , fon fils, on lui fit cependant quelques coh-
dilions. Il fe déchargea alors des foins de la guerre
de France fur fes généraux, & alla à Francfort où
les princes de l’empire lui donnèrent le titre de roi
des Romains, La mort de Louis X I , arrivée peu de
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tems avant qu’il eût obtenu cette nouvelle dignité,
fembloit lui promettre des fuccès heureux du côté
de la Flandre où étoit le théâtre de la guerre ; mais
le peu de difcipline qu’il èntretenoit parmi fes troupes
, excita une rumeur univerfelle. Les parens de la
princeffe défunte, qui fe voyoient éloignés des affaires,
& de la perfonne de Philippe, favorifoient l’ef-
prit de révolte. Ils perfuaderent aux Flamands, naturellement
ennemie du gouvernement arbitraire ,
qu’il tendoit à introduire le defpotifme, & à le perpétuer
dans fa perfonne. Sur ce bruit qu’autorifoient
des aéles d’une févérité néceffaire, il fe vit tout-à-
coup arrêté dans Bruges ; on le traita avec beaucoup
de déférence & de refpeft, mais on fit le procès à
fes partifans. Il y en eut dix-feptde décapités par
l’ordre des états généraux. Il y avoit bien trois mois
qu’il étoit dans les fers, Iorfque l’empereur Frédéric
s’approcha avec une armée, & menaça les rébelles.
Les états ne fe laifferent dépendant pas abattre,
ils fe préparèrent à le recevoir. L’empereur & le roi
des Romains, qui connoiffoient les fuites d’une guerre
civile, lignèrent un traité qui les obligeoit à faire
fortir de la Flandre toutes les troupes allemandes,
& à faire la paix avec Charles VII-, roi de France.
On a demandé pourquoi le miniftere du jeune Charles
VIII ne profita pas d’une li heureufe conjoncture?
Mais outre que ce miniftere étoit foible, il
étoit occupé d’une négociation importante. Maximilien
avoit formé le projet d’époufer la ducheffe
de Bretagne, afin de pouvoir preffer la France de
tous les côtés; il l’avoit même époufée par procureur ;
il s’agiffoit donc de rompre, ou plutôt d’empêcher
la confommation de ce mariage, & de faire époufer
la ducheffe au roi de France, au lieu de la princeffe
Marguerite qu’on lui avoit deftinée. Cette négociation
réuflit au grand bonheur de la France qui auroit
eu les Bretons pour ennemis, & pour ennemis incommodes
, au lieu qu’elle put fe flatter de les avoir bientôt
pour fujets. Le roi des Romains pour fe difpen-
fer d’exécuter les conditions du traité que les Flamands
fes fujets lui avoient impofées, alla faire la
guerre à Ladiflas Jagellon qui confervoit la baffe-
Autriche engagée à la couronne d’Hongrie pour les
frais d’une guerre ruineufe. Il reprit cette province,
& força Ladiflas à renouveller le traité que Frédéric
le Pacifique avoit fait avec Mathias. Ce.traité qui
forçoit Ladiflas à reconnoître Maximilien pour fon
fucceffeur aux royaumes d’Hongrie & de Bohême ,
pourvu qu’il ne biffât point d’héritier, préparoit de
loin ces deux états à obéir à la maifon d’Autriche. Il
àvoità peine conclu cet important traité, qu’on lui
apprit que fa prétendue femme, Anne de Bretagne,
venoit de confommer un mariage plus réel avec
Charles VIII ; il en conçut un fecret dépit, mais
ayant furpris Arras , il profita de cette conquête
pour Conclure une paix avantageufe. Le roi de France
lui céda la Franche-Comté en pleine Souveraineté
, l’Artois, le Charolois & Nogent, à condition
d’hommage. On doit obferver que Maximilien
n’agiffoit que comme régent & tuteur de Philippe
fon fils, titulaire de ces provinces, comme représentant
Marie de Bourgogne. Il faut avouer, dit un
moderne, que nul roi des Romains ne commença
plus glorieufement fa carrière que Maximilien. La
viftoire de Guenegafte fur les François, l’Autriche
reconquise, la prife d’Arras & l’Artois gagné d’un
trait de plume, le couvroient de gloire. Frédéric le
Pacifique mourut (1493 ) , peu de tems après la con-
clufion de ce traité li avantageux à fa maifon. L’empire
fut peu fenfible à cette mort, il y avoit long-
tems que le roi des Romains l’avoit éclipfé. Maximilien
lui fuccéda fans contradiction, & s’approcha de
la Croatie & de la Carniole, que menaçoien,t les
Turcs, gouvernés alors par Bajazet II, fucceffeur
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du redoutable Mahomet, conquérant de Conftanti-
nople & deftruâeUr de l’empire d'Orient. Il époufa
à Infpruk, à la honte de l’Allemagne & de fa maifon,
la niece de Louis Sforce furnommé le Maure, auquel
il donna l’inveftiture de Milan. Louis le Maure avoit
ufurpe ce duché für Jean G aléas Sforce, fon neveu,
après 1 avoir fait empoifonner. Ni l’amour, ni l’honneur
ne prefiderent à ce mariage; l’empereur ne fut
ébloui que parles fommes que lui apporta fa nouvelle
époufe ; cinq cens mille florins d’or firent difparoître
l’intervalle injmenfe qui étoit entre ces deux maifons.
Charles VIII pafla dans le même tems en Italie, il
y alloit réclamer le royaume de Naples, en vertu
du teftament de Charles d’Anjou, comte de Provence,
qui prenoit toujours le titre de roi des deux
Siciles, depuis long-tems enlevées à fa maifon. Il
fut reçu à Rome dans un appareil qui approchoit
de la pompe d’un triomphe. Louis Sforce, le même
qui venoit de s’allier à Maximilien, lui avoit fourni
des fecours d’hommes & d’argent. Les fuccès de
Charles furent rapides ; il entra dans Naples précédé
par la terreur du nom François ; mais fa vanité qui
lui fit prendre le double titre d’empereur & d’Augufte
dont les princes d’Allemagne étoient feuls en
poffeflion, lui préparà un retour f iinefie.*Maximilien
le vit avec un oeil jaloux, il fe ligua avec la plupart
des princes de l’Europe pour lui faire perdre
les noms pompeux qu’il avoit eu l’indifcrétion de
prendre. Le pape qui lui avoit fait une réception
magnifique, Louis Sforce qui avoit facilité fes fuccès,
& les Vénitiens , ceu x -c i, fur -tou t, trem-
bloient de voir s’élever en Italie une puiffance rivale
delà leur ;ilsconfpirerent pourchaffer le conquérant.
Ferdinand d’Aragon & Ifabelle de Caftille entrèrent
dans cette ligue , qui força Charles de repaffer en
France, Sc d’abandonner Naples & fes autres conquêtes
en moins de cinq mois. L’empereur après
avoir obligé Charles de fortir de l’Italie, y entra
à fon tour ; mais il fut li mal accompagné qu’il n’y
fit rien de mémorable: il n’avoit que mille chevaux
& cinq à fix mille lanskenets; ce qui ne fuffifoit pas
pour faire perdre à l’Italie l’idée de fon indépendance.
Il repaffa les Alpes au bruit de la mort de
Charles VIII, &c fit une irruption fut les terres de
France du cqté de la Bourgogne. Maximilien perfif-
toit à réclamër, pour fon fils, toute la fucceifion
de Marie. Louis XII rendit plufieurs places au
jeune prince qui fit .hommage-lige entre les mains
du chancelier de France dans Arras pour le Charolois,
l’Artois & la Flandre, &c l’on convint de part
& d’autre de s’en rapporter au parlement de Paris
fur le duché de Bourgogne. Cette anecdote eft bien
honorable pour Louis X II, rien ne peut donner
une plus haute idée de fa.juftice; c’étoit le reconnoître
incapable de corrompre un tribunal fur lequel
il avoit tout pouvoir. Louis XI n’eût point infpiré
cette confiance, plus flattéufe pour la nation que
vingtvidoires.L’empereur, aprèsavoir ainfi réglé ce
différend, jetta un coup d’oeil fur les Suiffes qui fe
donnoient de grands mouvemens pour enlever à la
maifon d’Autriche le refte des domaines qu’elle pof-
fédoit dans leur pays. Il tâchoit de ramener par les
voies de la douceur l’efprit d’une nation que la hauteur
de fes orgueilleux ancêtres avoit aliéné. Toutes
fes tentatives furent infrudueufès : les états affemblés
dans Zurik s’écrièrent tout d’une voix, qu’il ne falloit
point avoir de confiance dans Maximilien. La guerre
devint inévitable, & les Autrichiens ayant été vaincus,
dans trois batailles, l’empereur fut obligé de rechercher
la paix, & de reconnoître l’indépendance
des cantons qui furent depuis au nombre de treize
par la réunion des villes de Balle, deSchaffhoufe &
d’Appenzel, qui fe fit l’année fuivante ( 1500 ) .
Cette guerre contre la Suiffe l’empêcha de s’oppofer