y jette de la teinture de tournefol, qui lui fait changer
de couleur, fi du moins l’eau eft fraîchement
puifée , ou de l’infufion de noix de galle , qui ne la
fait point changer ; mais fi l’eau eft éventée avec la
teinture de tournefol, elle ne change plus ; 6c avec
celle de galle elle devient noire ou pourprée.
Pour découvrir l’alkaliéans l’eau, on y-jette des
acides qui font effervefcence , ou-du fyrop de violette
qui devient verd. Si l’alkali eft volatil , 1e vitriol
cuivreux diffous dansd’eau , eft précipité d’une couleur
bleue : fi l’alkali eft fixe, ce vitriol eft précipité
de couleur verte.
Pour découvrir le vitriol martial ; volatil, on Iaiffe
éventer l’eau, & elle eft alors moins altérée par l’infufion
de noix de galle. Si le vitriol martial eft fixe,
cette infufion rend l’eau pourpre , fi elle eft peu
chargée; noire, fi elle eft très-chargée. Si l’eau n’eft
pas colorée fur le cnamp, c’eft qu’il y a des vapeurs
vitrioliques. Si on verfe un peu d’acide ou d’efprit
de vitriol dans cette eau déjà noircie , on verra dif-
paroître la couleur noire. On pourra la rappeller
en y verfant de 1‘huile de tartre par défaillance.
L’efprit de fel ammoniac noircit les eaux acidulés
vitrioliques.
Pour découvrir l’alun dans l’eau, on emploie les
alkalis fixes, les alkalis volatils & l’efprit de fel ammoniac
, qui la rendent laiteufeôc en çoagulent une
partie. L’infufion de tournefol y prend une couleur
pourpre.
Pour reconnoître le fel neutre dans Peau , on emploie
1 es alkalis 6c les acides, qui n’y font aucune
effervefcence. Le fyrop de violette y conferve fa
couleur: mais l’efprit-de-vin reilifié, la folution d’alun
6c la diffolution d’argent la rendent blanchâtre.
Les eaux qui contiennent ce fel font purgatives,
comme celles d’Ebfom , d’Aiton, de Northall, de
Scarboroug, de Scheltenham en Angleterre , celles
de Sedlitz en Allemagne, &c.
Pour,découvrir les eaux crétacées, qui contiennent
des parties crayeufes, tofeufes ou calcaires ,
on emploie l’huile de tartre par défaillance , l’alkali
volatil, qui les rendent blanchâtres ou laiteufes.
La folution du mercure fublimé y eft au (fi précipitée
d’une couleur jaune. La folution de l’argent rend
ces eaux épaiffes & grifâtres.
Si après ces épreuves On a découvert quels font
les principes minéraux qui font dans l’eau, & que
l’on ve.uille en connoître la quantité ou les proportions
, on emploie deux autres méthodes , l’évaporation
par un feu très - doux 6c toujours diminué
prudemment fur la fin, 6c la diftillafion avec toutes
les précautions de l’art. On examinera le fédiment
dont on comparera le poids avec celui de l’eau
pefée; on verfera enfuite deffus de l’eau diftillée,
on la décantera dans un autre vafe ; on évaporera de
nouveau; on examinera les fels, s’il y en a , & on les
reconnoîtra par leurs figures. Lescryftaux enlozange
indiqueront le vitriol; enoûogone, l’alun; en prif-
mes, le nitre ; en cubes , le fel marin ; en pyramides,
ou en prifmes, ou en cubes, le fel.neutre. En plaçant
encore de ce fédiment fur une plaque de fer unie fur
le feu,fila matière s’enflamme , on conclura qu’elle
eft fulfureufe. Si dans ce fédiment il y a du fer, une
pierre d’aimant bien armée l’attirera. S’il y a du cuivre
, on calcinera ce fédiment ; on verfera deffus de
l’eau-forte, on la décantera, 6c on féparera le cuivre
dont elle eft chargée avec une lame de fer.
Toutes ces épreuves doivent être faites avec ordre,
fans confufion, 6c avec une méthode fuivie,
qui dépend de la nature de l’eau & du but que l?on
fe propofe ; enfin elles doivent être répétées en dif-
férens tems, pour peu que les vues foient importantes.
Si vous voulez d’ailleurs précipiter les parties ferrugîneufes,
ochreufes ou pyriteufeS qui nagent dans
certaines eaux, jettez dans une bouteille une dragme
de coquilles d’huîtres calcinées & réduites en poudre :
battez bien la bouteille, 6c laiffez-la repofer quelques
jours dans un lieu frais, en l’agitant plufieurs fois chaque
jour. Vous aurez après fept ou huit jours un ochre
au fond de la b o u teille , ou un fédiment, que vous
pourrez examiner.
Souvent on a vu des particuliers être trompés par
la découverte prétendue de fources falines. J’ai vu
une perfonne qui a v o it'fa it en vain des frais affez
confidérables. Si donc vou s vou lez vou s affurer
qu’une eau contient du fel marin ou du-fel commun ,
je ttez -y quelques gouttes d’huile de vitrio l : aufli-tôt
il doit s’élever une vapeur fpiritueufe qui prend au
nez. Si l’on y verfe quelques gouttes de la diffolu-
tion d’argent, l ’eau doit devenir blanchâtre ou lai-
teufe, & au bout de quelque tems il fie précipitera
une poudre blanchâtre. A v e c ce fel commun eft fou-
vent joint un fel calcaire ou une terre féléniteufe, 6c
ces eaux deviennent quelquefois purgatives : tellës
font les eaux de Ratzburg.
Il eft des fources qui contiennent des fels neutres
en affez grande quantité, pour qu’on puiffe auflî
l’en extraire : on les reconnoît d’abord par leur goût
amer. On fait cryftalifer par des folutions réitérées
le fel qu’on en extrait par l’évaporation. Si l’on jette
ce fel ainfi lav é & cryftallifé fur un feu v i f , il fe
fond d’abord ; enfuite il s’é lè ve en bulles fans s’enflammer;
enfin il fe durcit dans une matierë fembla-,
ble à la pierre-ponce.
On v o it par l ’expofé fuccinél 6c rapide que
nous venons de fa ir e , des expériences à .tenter fur
les eaux , pour connoître leur compofition ou leurs
qu a lités , qu’on peut employer plufieurs m o y en s ,
outre les fens 6c les -inftrumens propres à comparer
leurs poids. V o ic i les principaux m oyens qui ont
été imaginés: i ° . les plantes aftringentes, comme
l’infufion ou la décodion des feuilles de thé , de
balaufte, de chêne, de la noix de galle , d’écorce de
grenades, &c. i ° . les liqueurs colo rée s, comme le
fy rop de v io le tte s , la teinture de galle , celle de
to urn e fo l, &c. 30. les acides fo r ts , comme l ’efprit
6c l’huile de v i t r io l , l’efprit de nitre ou l’eau fort
e , &c. 4 0. Les acides foibles, comme le vinaigre t
les vins acides ou v e rd s , le jus de citro n , le fucre
candi en poudre, la folution du v itriol v e r d , &c.
50. les alkalis fix e s , comme l ’huile de tartre par défaillance
, &c. 6°. les alkalis v o la tils , comme l’efprit
fort ou délayé de fel ammoniac, &c. 7 ° . les diffolu-
tions métalliques par leurs menftrues propres ,
comme la diffolution d’argent dans l’eau-forte , la
diffolution du mercure fiiblimé, la diffolution du
fel de plomb, &c.
X I I . Obfervations générales fu r les propriétés, des
eaux communes. C ’eft un grand témoignage de la
fageffe de l’auteur de la n a ture , que les matières minérales
, dangereufes aux animaux, fe trouvent très-
rarement décompofées, ou combinées avec l’eau,
6c que lorfqu’elles s’y rencontrent, on peut les ap-
percevoir par des circonfiances fenfibles. Le poids
de l’eau ou fa lég é re té , ni le goût ne fuffiroient pa s,
il eft v r a i, pour faire reconnoître toujours les eaux
nuifibles.
Suppofons une pinte d’eau de deux liv re s , poids
de marc de 16 onces, divifée par gros de 7 1 grains
chacun; cette pinte d’ eau pure doit pefer .à-peu-près
18432 grains. Si l’on fuppofe fondus dans cette .eau
18 grains, par exemple, d’arfenic, cette eau devien-
droit pernicieufe aux animaux qui en uferoient habituellement.
En évaluant la confommation d’un homme
à une pinte par jour pour fa boiffon , & dans fes
alimens ,i l prendroit environ une once d’arfenic pendant
un mois fans s’en appercevoir au goût. La pinte
H Y D
d’eau chargée de l’arfenic ne peferoit que 18450
grains, c’eft-à-dire, un millième de plus que l’eau
pure. Si l’on compare hydroftatiquement cette eau
fi dangereufe avec une autre faine, mais où il fe
trouveroit combiné 24 grains par pinte d’un autre
fel ou fubftance quelconque mifcible avec e lle ,
mais d’une qualité non nuifibie ou falutaire , cette
fécondé eau, au même volume d’une pinte, pefera
•18458 grains ; fon poids fera donc à celui de la première
eau à-peu-près comme 2000 eft à 1 : cette
première eau funefte fera plus légère de ce deux
millième. Ainfi c’eft une conféquence erronée que
de deux eaux la plus légère èft toujours la plus faine.
Mém. delàfociété cecon. de Berne, 1764, troifieme
partie, Mémoire de M. Permet de Faugnes.
En général,il faut obferver qu’il n'eft aucune eau
parfaitement pure, fimple 6c homogène, comme
nous l’avpns déjà dit : par-là même que l’eau eft un
menftrue propre à diffoudre ou à décompofer une
infinité de corps du régné minéral & végétal, elle
doit fe charger d’une multitude de parties étrangères.
Mais par-là même que l’eau eft un délayant
doux, ces parties étrangères n’alterent point fi aifé-
ment les vaiffeaux des animaux, lors même que ces
matières auroient en elles - mêmes quelque chofe
d’un peu nuifible. Auflî l’eau a été regardée par quelques
uns comme une médecine univerfelle, 6c s’il
y a quelque chofe d’outré dans ces prétentions, il
eft certain au moins que l’ufage de l ’eau eft d’une,
utilité infinié dans l’état de fanté , comme dans celui
de maladie. Les plus falutaires, fans contredit font
celles qui courent depuis long-tems fur un fond pierreux
, fablonnéux-, & qui ont été agitées dans leur
courfe. Telle eau qui étoit mauvaife 6c pefante, devient
bonne après avoir été battue & agitée par les
roues d’un moulin, par une chute ou quelqu’autre
moyen. Le tems encore dans lefquels les eaux courantes
font les plus pures, font celui de la gelée &
celui des longues féchereffes. Les eaux d’un lac fou-
vent battu .par le v ent, ou d’une riviere qui roule
très - rapidement fes eaux fur un fond pierreux ,
pourvu qu’elles ne foient pas fouillées ou altérées
par les immondices que l’on y jette, devroient donc
être choifies de préférence pour l ’ufage des hommes
6c des animaux.
En confidérant en général les rochers d’un pays,
on peut déjà conjecturer fi les eaux qui fortent des
lieux élevés font bonnes ou mauvaifes. Si ces rochers
font quartzeux , graniteux ou fablonnéux,
d’ordinaire les eaux qui en viennent ont les propriétés
des bonnes eaux : fi ces rochers font crayeux,
fcléniteux, gypfeux, fchifteux, ces eaux ont ordinairement
des propriétés différentes.
En général aufli les eaux vives qui fortent des
rochers fablonnéux ou quartzeux, font moins propres
pour les arts, les teintures, pour cuire promptement
les légumes, que les eaux des rivières qui
coulent lentement.
Les propriétés des eaux de pluie varient aufli
félon l’état de l’atmofphere, lorfqu’elle eft tombée ;
6c M. Margraff a prouvé par des expériences, que
ramaffée avec le plus de précaution, elle contenoit
encore beaucoup de matières étrangères. Differtat.
Examen chymique des eaux. En générai, les eaux de
pluie font les plus propres à favorifer la fermentation
; c’eft pour cela qu’elles font préférées pour les
braderies : elles diffolvent aufli une plus grande
quantité de fels. Ces propriétés viennent de ce
qu’elles contiennent plus d’air ; c’eft ainfi qu’une
eau quelconque où l’on fait diffoudre un peu de fel
tilkali de tartre , 6c une eau naturellement acidu-
laire, ont de même la propriété de diffoudre beaucoup
plus de fel marin. Ces eaux de pluie s’évaporent
aufli bien plus v ite, fans doute à caufe de l’air
Tome 111%
H Y D 47?
qu’elle renferment : toutes auflî font plus propres à
cuire 6c à amollir les légumes. L e ferein & la rofée
different peu de l’eau de pluie tombée lorfque l’air eft
déjà pur ; mais le miellat qui fort principalement de J
plantes eft une eau déjà altérée par les végétaux*
X III. Obfervations générales fu r les eaux de la mer%
Notre globe s’ufe fan9 c effe , & le s eaux des v a llon s ,
des montagnes 6c des pla ine s, entraînent continuel»
lement dans les rivières & des rivières dans les
vaftes m e r s , une quantité immenfe de matières minérales
, végétales 6c animales, décompofées ou détruites.
La deftruirion perpétuelle des plantes 6c des
animaux qui habitent dans les mers , doit encore
altérer la fubftance de fes eaux. Soit que le fel fe
forme dans la m e r , foit qu’il ne vienne que de la
diffolution des fels placés dans la te rr e , 6c qui font
portés dans les mers, les eaux doivent aufli être changées
par-là. Si ce fel fe forme dans la mer, il faut
aufli qu’il s’y- décompofe. C ’eft au fe l que l’eau dé
la mer doit la propriété de fe geler fi difficilement,
6c la fraîcheur affez uniforme qu’on lui trouve. D ’ailleurs
fa denfité, la rendant plus propre à foutenir
de plus grands poids, favorife la navigation. Moins
aufli les mers font falées, plus les vaiffeaux y prennent
d’eau.
L’eau de la mer n’ eft point du tout potable , à
caufe du fel marin à-bafe terreufe 6c du félénite
qu’elle contient .éa filtration feule ne fauroit même
la rendre potable, il faut avoir recours à la diftilla-*
tio n , opération très-embarraffante : c’eft-là le fujet
d’un problème très-intéreffant, dont on devroit trouv
e r la folution dans l'hydrologie, ou le détail de tous
les effais & leur fitçcès.
Il eft démontré par des expériences réitérées,'
qu’il n’y a point de bitumes dans les eaux de la m er
en général. M. Monnet, qui a fait des expériences
en divers endroits des côtes de France, n’y a jamais •
trouvé par des analyfes exaûes que du fel marin, du
fel à bafe terreufe & du fé lénite , quelquefois un
fel d’Epfom 6c une terre abforbante, jamais ni bitume
ni foufre. La dofe de ces matières a varié félon
. les lieux , peut-être fuivant les faifons, jamais dans
leur nature. On peut vo ir le compte qu’a rendu de
ces effais M. Monnet dans fon Hydrologie, page 181
& fuiv . P a ris , 1772.
L ’agitation v io le n te , l’ébullition & la filtration
peuvent fuffire fouvent à rehdre potables les eaux
terreftres mal-faines ;'m a is ces moyens , nous le
répétons, font infuffifans pour l’eau de la mer. Les
eaux bouillies font plus fades, parce qu’elles font
privées d’air. On leur redonne cet air en les filtrant
à fro id , au t r a v e r s é e s fontaines de fable ou des
pierres à filtrer. Il n ’y a que les eaux féléniteufes que
l’ébullition, fouvent même la filtration, ne dégagent
point des particules féléniteufes. Il en eft de même
des eaux fàumâtres ou fa lé e s , il faut avo ir recours
à la diftiliation. Pour cela il faut employer de fort
grands alembics ; il ne faut pas diftiller à ficçité juf-
qu’a u fo n d ; enfin l’eau diftilée doit^ être expofée à
l ’air libre dans des vafes propres , qui aient un
grand diamètre & peu de profondeur.
X IV . D e la quantité d'eau. Ce feroit un objet bien
intéreffant de Y hydrologie, de déterminer à-peu-près
la quantité d’eau qu’il y a fur ou dans notre globe 6c
dans l’atmofphere qui nous environne, & la proportion
qu ’il y a entre les matières folides 6c liquides.
Il eft certain d’abord que par un effet de la-fageffe
de Créa teu r, il y en a une quantité fuffifante aux be-;
/oins de toutes les créatures, animaux & plantes, 6c
pour toutes les opérations, les changemens 6c les
productions , qui doivent s’exécuter nir la terre &
dans fes entrailles. Koye£ J. G . Feurlini, Differt. do
fujfic. copia aquarum, & ç . Jence i y n , i/2-40. 6c Der-
ham , Théologie phyfque, liy, / / , chap. 5.
, O o 0 i j