Le pied fe trouve quelquefois ferré par les fers
trop voûtés ; mais il n’y a qu’un mauvais ouvrier
qui puiffe donner aux fers cette conformation vi-
cieufe. S i , en ferrant, on éloigne la fourchette de
terre, tout le poids du corps eft appuyé fur les éponges
& écrafe les talons ; ce qui n’arriveroit pas, li la
fourchette portoit à terre , puifqu’elle eft la baie du
cheval. Si le mal eft de peu de conféquence, il ne
s’agit que de changer la ferrure. On appelle quartier
renverfé , lorfque le fer porte fur un quartier foible ;
ce qui le fait renverfer.
La .foulure de la foie n’auroit pas lieu, fi l’on
n’avoit pas trop paré le pied ; ce qui laiffe une ef-
pece de creux pour loger le caillou & le fable ; &
fi l’on avoit moins aminci la foie de corne , laquelle
alors ne garantit prefque plus la foie charnue de la
compreflîon , il faut ôter le fer pour enlever les
corps qui compriment la foie charnue, nourrir le
pied en le tenant humetté, 6c ne le point parer.
La belle conformation du pied eft quelquefois
nuifible dans certains chevaux ; la foie des talons fe
prolonge quelquefois en pince , 6c a dans fon corps
une épaiffeur confidérable. Cette conformation fe
trouve dans les chevaux qui ont une petite fourchette
; pour lors cette foie fert de fourchette, porte
à terre 6c comprime la chair cannelée, d’où refulte
inflammation.
Lorfqu’un cheval a le pied bien paré, & qu’il
vient à fe déferrer, la muraille n’ayant plus de fou-
tien de la part de la foie de corne , s’éclate ; la foie
porte à terre , comprime la foie charnue , l’inflammation
furvient 6c le cheval boîte ; c’eft ce qu’on
appelle foie battue on-pied dérobé.
L’étonnement du fabot eft un ébranlement dans ;
le pied du cheval, occafionné par quelque coup.
On s’en apperçoit en frappant fur la muraille; l’endroit
oh le coup a été porté, eft beaucoup plus fen-
fible. Il faut bien parer le pied, faigner en pince 6c
mettre une emmiellure autour du fabot.
La compreflîon de la foie arrive quand la fourchette
ne porte pas à terre, 6c quand le cheval, dans
certaines furprifes, dans certains faux-pas , ou dans
certains efforts , pouffe l’os coronaire en arriéré fur
l’os de la noix, celle-ci fur le tendon qui prefle la
foie charnue entre lui 6c la foie de corne. On recon-
noît cette compreflîon, lorfqu’après avoir bien paré
uniment le pied & rendu la corne de foie fort
mince, le cheval marque de la fenfibilité. On fonde
avec les triquoifes, en commençant en pince 6c
allant fucceflivement vers les talons, mais avec l’attention
de ne pas ferrer les triquoifes plus dans un
endroit que dans l’autre. Pour remédier à la compreflîon,
on pare le pied à la rofée , 6c on met dans
le pied quelque chofe d’on&ueux pour humefler 6c
relâcher les parties qui font diftendues. Il faut laiffer
le cheval en repos pendant douze ou quinze jours ,
6c ne point lui permettre de marcher. Quand la
guérifon paffe vingt jours, on doit le faire promener
jufqu’à ce qu’il foit guéri ; on peut même le mettre
à la charrue , à une voiture. Si le cheval boîte tout
b as, s’il eft fenfible à 1 a couronne & au paturon I
lorfqu’on appuie fur ces parties, il ne faut pas tarder
à le defloler ; il n’y a pas de tems à perdre : on laif-
fera long-tems faigner le pied, afin de dégorger les
vaiffeaux. Cette opération met la foie charnue hors
de prefle 6c remédie à l’inflammation du fabot. Si le
cheval n’eft pas guéri au bout de quarante jours, ce
qui eft rare, il faut le mettre à la pâture pendant fix
femaines ou deux mois. Lorfque le mal eft ancien,
ce qu’on connoît par une petite groffeur qui vient
ordinairement autour de la couronne , 6c parce que
le pied eft malade 6c plus petit que l’autre, il n’eft
pas facile à guérir. Dans ce cas on peut cependant
tenter, après les autres remedes, de porter le feu
autour de la couronne , afin d’empêcher l’oflîfîca-
tion qui commence toujours par un endurciffement
des tuniques.
Dans l’ébullition , toute l’habitude du corps fe
trouve en un moment couverte de petits boutons
plus ou moins nombreux 6c plus ou moins élevés ,
mais pourtant fuperficiels ; ils furviennent ordinairement
après les grandes fatigues 6c les grandes
fueurs ; c’eft l’humeur de la tranfpiration qui s’accumule
dans les vaiffeaux de la peau. Ces boutons
font fans danger 6c difparoiffent par le moyen de la
faignée & de quelque fudorifique.
La morve eft un écoulement de mucofité par le
nez, avec inflammation & ulcération de la membrane
pituitaire. Mon pere & moi avons démon-
tre de la maniéré la plus vi&orieufe & la plus fa-
tisfaifante, que le fiege de cette maladie étoit dans
la membrane pituitaire, 6c non pas dans les reins,
le fo ie , le poumon , &c. comme on l’avoit cru
avant que nous euflions fait voir le contraire. Cet
écoulement eft tantôt d’une couleur tranfparente,
comme le blanc d’oe uf, tantôt jaunâtre, tantôt verdâtre
, purulent, fanieux; mais toujours accompagné
du gonflement des glandes lymphatiques, qui font
fous la ganache.
Il n’y a de véritable morve que l’écoulement qui
vient de la membrane pituitaire : tout écoulement
qui vient d’une autre partie n’eft pas morve ; c’efi:
à tort qu’on lui a. donné ce nom. La morve eft de
deux efpeces, l’une dans laquelle le cheval jette du
fang par les narines, 6c où l’on découvre le long de
la cloifon beaucoup de chanvres , fourniffant très-
peu de pus qui eft noirâtre 6c fanieux.Dans l’autre
efpece on ne découvre point de chanvres ; mais
elle fournit une grande quantité de pus, 6c les cornets
& les finus font plus ou moins remplis de matière;
au lieu que dans la première ils font vuides:
celle-ci vient prefque toujours d’un vice farcineux,
& le communique plus aifément. La fécondé vient
du paflage du chaud au froid 6c ne fe communique
que lorfqu’elle eft invétérée, & encore bien rarement.
Il y a plufieurs autres divifions de la m orve,
dans le détail defquelles nous n’entrerons pas, ce
ne font que des foudivifions des deux efpeces que
nous venons d’indiquer.
Les caufes premières de la morve ne nous font pas
connues ; nous nous contenterons de rapporter les
caufes fécondés qui font évidentes & inconteftables.
La caufe évidente de la morve eft l’inflammation de
la membrane pituitaire, 6c les caufes de cette inflammation
font générales 6c particulières; les générales
font la trop grande quantité, la raréfaâion
6c l’épaifliffement du fang. Les particulières font
quelque coup porté fur le n ez, quelque corps pouffé
avec force dans cette partie , des injections âcres &
corrofives qu’on y aura faites ; le froid, lorfque le
cheval eft échauffé, le farcin qui affeCte fucceflivement
les différentes parties du corps : lorfqu’il parvient
à la membrane pituitaire, il y forme des ulcérés.
L’inflammation, l’ulcération 6c l’écoulement du
conduit lacrymal font encore des caufes de la morve ;
ce canal étant enflammé produit un pus âcre qui
corrode les parois des cornets. La fonction des larmes
qui fortent par cette ouverture, eft d’efripê-
cher que l’air n’entre avec trop d’impétuofité dans
les nazeaux : l’écoulement des Jarmes étant une fois
fupprimé, l’air ne trouvant plus d’obftacle qui s’op-
pofe à fon paflage, entre avec force dans les nazeaux
, 6c va heurter la cloifon 6c les cô'rnets ; c’eft
)ourquoi la plupart des chevaux attaqués de la fiftule
acrymale, ou ceux chez Iefquels il y a fuppreflîon
de cette humeur, deviennent morveux; ce qui
arrive le plus fouvent dans les chevaux glandés de
longue main.
Les principaux fymptômes font I’écoulemertt qui
fe fait par les nafeaux 6c l’engorgement des glandes
lymphatiques de deffous la ganache. i° . L’écoulement
eft plus abondant que dans l’état de fante,
parce que l’inflammation irrite les fibres , & fait
léparer une grande quantité de mucofité. z°. L’écoulement
eft de couleur naturelle , tranfparent comme
le blanc d’oe uf dans la morve commençante. ^ .L ’écoulement
eft purulent dans la morve confirmée ,
parce que l’ulcere eft forme, 40. L écoulement eft
noirâtre 6c fanieux dans la morve invétérée , parce
que le pus ayant corrompu quelques vaiffeaux fan-
guins , le fang fe mêle avec le pus. 50. Quelquefois
l’écoulement diminuecef f e même quelquefois,
ce qui arrive parce que le pus a pénétré dans quelque
grande cavité, comme le finus maxillaire , d’où
il ne peut fortir que lorfque la cavité eft pleine.
La morve attaque tantôt les finus frontaux -, tantôt
les finus maxillaires, les cornets du nez, &c.
quelquefois toutes ces parties à la fois , félon
que la membrane pituitaire eft enflammée dans
un endroit plutôt que dans un autre. Pour l’ordinaire
cette inflammation commence par la fuper-
îficie des cornets & le long de la cloifon du nez.
Les glandes lymphatiques de deffous la ganache ont
déux tuyaux, ou ce qui eft la même chofe, deux
veines lymphatiques ; l’une qui apporte la lymphe
de la membrane pituitaire dans ces glandes, l’autre
qui reçoit la lymphe de ces glandes pour la port.er
dans la veine fous-claviere. Il n’eft pas difficile d’expliquer
par cette théorie, l’engorgement des glandes
de deffous la ganache , parce que dans l’inflammation
la lymphe s’épaiflit, 6c comme ces glandes fontcom-
pofees de vaiffeaux qui font mille contours, la lymphe
épaifîie doit y circuler plias difficilement, s’y
arrêter enfin 6c les engorger. Lorfque la membrane
pituitaire eft ulcérée, le pus fe mêle avec la lymphe,
lui donne une qualité âcre : cette âcreté irrite les
vaiffeaux des glandes, les fait refferrer , 6c c’eft une
fécondé caufe de leur engorgement.
Il n’eft pas difficile d’expliquer parla même théorie
pourquoi dans la gourme, dans la môrfondure 6c
dans la pulmonie , les glandes lymphatiques de deffous
la ganache font quelquefois engorgées 6c quelquefois
ne le font pas, ou ce qui eft la même chofe,
pourquoi le cheval eft quelquefois glandé 6c quelquefois
ne l’eft pas. Dans la morfondure, les glandes
de deffous la ganache ne font pas engorgées,
lorfqu’il y a un fimple reflux de l’humeur de la tranfpiration
dans le nez, fans inflammation de la membrane
pituitaire ; elles font engorgées lorfque l’inflammation
gagne les glandes de cette membrane.
Dans la pulmonie, le cheval n’eft pas glandé, parce
que le pus qui vient du poumon n’eft pas affez âcre
pour ulcérer la membrane pituitaire ; mais à la longue
, il acquiert de l’âcreté, enflamme la membrane,
6c engorge les glandes de deflous la ganache.
Rien n’eft plus important 6c rien en même tems
n’eft plus difficile que de bien diftinguer chaque écoulement
qui fe fait par le nez; il faut pour cela un
grand ufage & une longue étude de ces maladies.
Pour décider avec fureté, il faut être familier avec
ces écoulemens , autrement on eft expofé à porter
des jugemens faux. L’oeil 6c le ta£t font d’un grand
fecours pour prononcer avec jufteffe fur ces maladies.
La morve étant un écoulement qui fe fait par le
nez, eft aifément confondu avec tous les autres écoulemens
qui fe font par le même endroit. La couleur
de l’écoulement n’eft pas un figne diftinétif fuffifant,
lin figne feul ne fuffit pas non plus. Lorfque le cheval
jette par le nez fans touffer, qu’il eft glandé 6c
gai comme à l’ordinaire, qu’il boit 6c mange comme
de coutume 6c a bon poil ; lorfqu’il n’eft glandé que
d’un côté & qu’il jette peu. il y a lieu de croire que
c eft la véritable morve, c’eft-à-dire, l’inflammation
de la membrane pituitaire. Lorfqu’au contraire l’écoulement
fe fait également par les deux nazeaux, qu’il
eft Amplement purulent, que le cheval touffe, qu’il
eft trifte, abattu , dégoûté, maigre , qu’il a le poil
hérifle 6c qu’il n’eft pas glandé, c’eft une preuve que
1 inflammation n’eft pas dans la membrane pituitaire,
mais dans toute autre partie. Lorfque l’écoulement
fuccede à une inflammation de poitrine, il vient du
poumon, 6c c’eft la morve de pulmonie, dont nous
parlerons en traitant des maladies de poitrine. Lorfque
l’écoulement fuccede à la gourme & qu’il vient
d’un dépôt formé au larynx , c’eft la morve de gourme.
Lorfque le cheval jette une mucofité tranfpa-
rente 6c que la trifteffe 6c le dégoût ont précédé cet
écoulement, on a lieu de croire que c’eft la morfondure
; on en eft certain, lorfque l’écoulement ne dure
pas plus de douze à quinze jours. Lorfque le cheval
commence à jetter également par les deux nazeaux
une morve mêlée de pus, ou le pus tout pur fans
être glandé, c’eft la pulmonie feule ; mais fi le cheval
devient glandé par la fuite, c’eft la pulmonie 6c
la morve tout-à-la-fois.
On connoît la morve commençante, lorfqu’il y a
un écoulement d’une fimplemucofité, avec engorgement
des glandes lymphatiques de deffous la ganache:
on reconnoît encore d’une maniéré fûre les glandes
de morve, non pas à leur volume 6c à leurs adhérences
, mais à leur dureté. Les glandes de gourme
qui ne paroiffent point différentes des glandes de
morve à ceux qui en ont peu vu, font dures extérieurement
, molles intérieurement ; en les preffant,
on fent comme une cavité qui eft dans leur centre,
au lieu que les glandes de morve réfiftent dans leur
centre, 6c paroiffent repouffer les-doigts. Les premières
font fenfibles, les fécondés ne le font pas ;
6c fi le cheval marque de la fenfibilité, ce n’eft que
de la peau 6c des tuniques de la glande. Cette remarque
6c cette diftinétion eft des plus effentielles.
On connoît que la morve eft confirmée , lorfque
l’écoulement eft purulent, qu’il y a ulcéré dans la
membrane pituitaire 6c que le cheval eft glandé. On
connoît au contraire qu’elle eft invétérée , lorfque
l’écoulement eft fanieux, 6c que le cheval eft glandé :
on le reconnoît encore pajr la fuppreflîon de l’écoulement
des larmes, par la féchereffe des nazeaux t 6c
fur-tout quand le cheval eft en exercice. En général,
quand on acheté un cheval, & fur-tout quand on
l’exerce , il faut avoir foin d’examiner fi les nazeaux
font mouillés, c’eft un grand défaut quand ils ne le
font pas.
La morve de gourme bénigne 6c celle de la morfondure
ne font pas dangereufes, elles ne durent
ordinairement que douze jours , pourvu qu’on faffe
les remedes convenables. La morve de pulmonie
invétérée eft incurable. La morve commençante
peut fe guérir ; lorfqu’elle eft confirmée , elle ne fe
guérit que difficilement ; lorfqu’elle eft invétérée ,
elle eft incurable. Il n’y a que la véritable morve qui
fe communique.
La caufe de la morve commençante étant l’inflammation
des glandes de la membrane pituitaire, il
faut mettre en ufage les remedes de l’inflammation,
puis relâcher 6c détendre les vaiffeaux par des injections
émollientes dans le nez. Dans la morve confirmée
où- il y a des ulcérés , il faut employer des
injections déterfives. Pour deffécher 6c terminer la
guérifon, il faut injeCter l’eau fécondé de chaux.
Le moyen le plus lür de porter ces injections fur
toutes les parties eft le trépan , c’eft la voie la plus
fûre de guérir la morve confirmée. La maniéré dont
on doit faire l’opération du trépan , eft de fe fervir
d’une groffe vrille qui puiffe faire une ouverture
fuffifante pour pouvoir introduire une canule. Le