mariée à Begon, comte de Paris: les Généalogiftès en
font defcendre Conrad I , roi ou empereur d'Allemagne
: la fécondé époufa un comte nommé Thicrri :
la cadette le comte Everard : celle-ci donna le jour
à Bérenger , l’un des tyrans d’Italie., Louis le Débonnaire,
dit Muratori, «fut un prince’ illuftre parla
» grandeur de fon amour 6c de fon zele pour la
» foin te religion , 6c pour la difcipline eccléfiafti-.
» que , par Ion attention à faire rendre la juftice ;
» par fa confiance dans l ’adverfité , par la gçnéro-
» fité à l’égard des pauvres & du clergé féeulier 6c
» régulier; prince qui n’eut point d’égal pour la cle-
„ mence , pour la douceur & pour d’autres vertus
„ qui le rendirent très-digne du nom de Pieux, mais)
» étrangement malheureux dans les fils du premier
» lit qui furent tous ingrats envers ce pere fi bon , (
» auquel il? firent effuyer tant de traverfes ; & trop
» plein de tendreffe pour fa fécondé femme 6c pour
» le dernier.de fes fils, ce qui fut l’origine de tous-
» les troubles.».
L’auteur des obfervations furl’hiftoire de France,
met au nombre des fautes de Louis Le Débonnaire les
tentatives que fit ce prince pour réunir les royaumes
en un feul empire. D’abord j’oblerverai que
cet écrivain, dont je në prétends point rabaiffer
le mérite éminent, ne s’eft: point exprimé avec
affez d’exaftitude : car encore bien que la domination
françoife fut partagée en plufieurs royaumes ,
elle ne formoit cependant qu’une feule monarchie.
Cet auteur a voulu reprocher à Louis d’avoir tenté
de réunir la monarchie dans les mains d’un feul. Et
c’eft, fans contredit, la choie qui doit lui foire le plus
d’honneur ; c’étoit le feul moyen d’affurer la durée
de cet empire : ce que je dis n’a pas befoin.de preuves
, l’hiftoire démontre que ce fut la loi du partage,
que Louis vouloit abolit , qui le fit tomber
dans un état de langueur dont il ne fe releva jamais.
L’auteur des obfervations prétend s’appuyer du fuf-
frage de Charlemagne , qui, fuivant lui, partagea la
monarchie en trois royaumes , qu’il rendit abfolu-
ment indépendans les. uns des autres : il eft vrai que
ce grand prince fe conforma à l’ufage que les François
avoient apporté de Germanie, & qu’il donna
à chacun de fes fils.une part dans fes . états j mais
rien ne prouve que fon intention fût d’établir en-
tr’eux une indépendance abfolue, 6c s’il étoit quef-
tion de recourir à des induftions , on en trouve
plufieurs qui ne font pas favorables au fentiment de
cet écrivain. D ’abord les partages ne furent point
égaux : il s’en falloit beaucoup. Louis le Pieux
n’eut que l’Aquitaine, & Pépin l’Italie : Charles
leur aîné devoit avoir tout le refte de la monarchie
qui comprenoit la plus grande partie de
l’Allemagne , l’ancien royaume d’Auftrafie & la
Neuftrie : lui feul avoit autant d’états que fes deux
freres enfemble. Cette inégalité de partage ne me
paroît avoir été ménagée que pour lui affurer la
fouveraineté fur fes freres qu’il auroit exercée fous
le titre d’empereur. Car une obfervation importante
, c’eft que la dignité impériale ne fut point conférée
à plufieurs : Charlemagne la regarda comme
indivifible ; & lorfqu’il couronna fes fils, il eut foin
de les avertir qu’ils dévoient lui obéir comme à
leur empereur. Enfin, fi l’on fonge que le titre d’empereur
que porta Charlemagne, n’ajoutoit rien à fa
puiflance , on ne pourra fe refufer de croire qu’il
ne le prit que comme un moyen de réunir la monarchie
, dont le partage avoit déjà coûté le trône
& la vie à fes premiers maîtres : fi les vues de Charlemagne
furent celles que lui fuppofe l’auteur des
obfervations , on fera forcé de convenir que fa politique
fut inférieure en ce point à celle de Louis le
Pieux. ( M—y . )
Louis 11, furnommé le Begue 9 X XVIe roi de
France, étoit fils de1 Charles-le-Chauve & d’Her-
mentrude : quoique le trône fut héréditaire, il ne
crut pas pouvoir le difpenfer de demander les-fuf*
frages des évêques .6c des feigneurs pour y monter.
Cette particularité prouve la foibleflè du gouverne-
ment-: leur fuffrageJui coûta de précieux privilèges
; ceux qui ne s’étoient point trouvés à fon avènement
accoururent,en foule pour participer à des
largefîes dont le monarque n’eût pu fe difpenfer
fans péril, & ce ne fut qu’en les comblant de biens
qU’il crut pouvoir s’alltirer de leur fidélité. Mais lui
ÔC' les: lucceffeurs éprouvèrent que Cê n’éfi pas en
flattant des féditieux que l’on peut efpérer d’être -
jamais bien obéi : les fujets alors affez puilfans pour -
faire la loi au fouverain, étendoieni ou-iimitoient à'
' leur gré la puiflance. Bofon , frere de [’impératrice
Rïehiide', fans avoir le titre de ro i , affeéloit toute la
pompe , 6c jouiffbit de toutes les prérogatives de 1-a
fouveraineté ; les dignités accumulées fur fa tête,
fes alliances avec les premières familles du royaume
le rapprochèrent du trône , qu’il fembloit dédaigner-
par la grande facilité qu’il avoit d’y monter.
Louis afpiroit à l’empire ; on prétend même qu’il
en reçut la couronne des mains du pape dans un
. conciie : mais cétte opinion n’eft pas générale, nous
la révoquons en doute avec d’autant plus de raifon ,
que dans tous les aâes qui nous relient de ce prince,
on n’en voit aucun oit il prenne la qualité d’empereur.
Carloman forti de la branche aînée, nous fém-
blé a voir eu plus de droit de le porter ; mais c’étoit
un préjugé allez généralement reçu, qu’aucun prince
ne pouvoir le prendre fans avoir été couronné par
le pape. Les rois de France 6c de Bavière fe difpu-
toient fon fulfrage : comme il ne pOuvoit le donner
à tous les deux , il les amufa l’un 6c l’autre par d’at-
tifieieufes promeffes ; le but de ce manege étoit de
les engager à lui fournir du fecours contre lesSarrà-
lins. Cet artifice ne lui réuflit pss, les deux rois refufe-
: rent de l’affilier , 6c le trône impérial refia vaeaût.
Louis le Begue defiroit faire reconrtôîtf e Adélaïde,
qu’ il avoit époufée après avoir répudié Anfgarde ,
dont il avoit eu Louis 6c Carloman, mâià il ne put
l’obtenir. Tout le peuple applaudit au refus qu’eil
fit le pape, Anfgarde étoit encore vivante : c ’eût clé
exclure fes enfans 6c confirmer le fécond mariage,-
qui, fuivant les loix de l’Eglife, n’étoit qu’un concubinage.
Après la réparation du concile, la France
fut embrâlée du feu des guerres civiles. Lotaire, roi
de Lorraine , le marquis de Septimanie, 6c le comte
du Mans, s’étoient érigés en tyrans de leurs vaf-
faux : ils exercèrent les plus cruels ravages dans le
royaume. Louis employa contre eux les armes dé
l’Eglife. Le comte du Mans , effrayé des foudres de
Rome,reftitua au roi tous les châteaux qu’il lui avoit
ravis: les démêlés avec le roi de Lorraine furent terminés
par la négociation. Le marquis de Septimanie
refufoit encore de fe foumettre,: quoique dépouille
de fes états par Tinterdidion eccléfiaflique 6c par
une fentence de Louis, il n’en continuoit pas moins
la guerre ; fon armée non moins intrépide que lui ,
6c non moins impie , bravoit les excommunications
& les menaces d’un roi trop foible pour les punir.
Louis, pour arrêter le feu. de la révolte & l’empêcher
de s’étendre dans toute l’étendue du royaume,
s’avança contre Ces rébelles, réfolu de terminer la
guerre par un coup déeifif : mais il eft attaqué à Troye
par une maladie qui l’arrête dans fa marche : on le
tranfporte à Gompiiegnë, où il meurt avec le foup-
çon d’avoir été empoifonné : il fut enterré à l’abbaye
de Saint-Corneille ; il étoit âgé de trente-cinq ans,
il en avoit régné vingt-deux. L’hiftoire Ta placé
parmi les rois fainéans , ce n’eft pas qu’elle Taccufe
de molleffe ou d’indolence , elle lui reproche feulement
de n’avoir rien fait de grand. Ce fut fous fon
régné que Ton vit ecforre cet effaim de comtes , de
ducs & de marquis: c’étoient autant de petits tyrans
qui fecouoient le joug de l’autorité ro y ale , 6c qui
chargeoient le peuple des chaînes dont ils fe déga-
geoient. IJ laiffa Adélaïde enceinte d’un fils , qui fut
appelle Charles, 6c qui, pour avoir donné fa confiance
à des traîtres, fut furnommé le Simple. Le courage
de ce prince 6c l’excellence de fon coeur lui
avoient mérité une dénomination plus honorable.
Louis III & C a r l o m a n , rois de France. Louis,
fils aîné de Louis-le-Begue, étoit appellé au trône
par la naiffance 6c par le teftament de fon pere qui,
en mourant, chargea Odon, évêque de Beauvais 6c
le comte Albain, de lui porter la couronne, lefeeptre
& l’épée, ainfi que les autres attributs du pouvoir
fouverain. Les fadions qui dé^hiroient le royaume,
ne daignèrent pas confulterjes loix ; & comme la
révolte eft ingénieufe en prétextes, les inécontens
propoferent d’élire un ro i, les deux fils de Louis le
Begue, étant trop foible , difoient-ils, pour tenir le
timon de l’état dans ces tems orageux ; & pour donner
l’appareil de la juftice à la dégradation des princes
, ils prétendirent que la répudiation d’Anfgarde,
leur mere, devoit les ranger dans la claffe des enfans
naturels. Goffelin, abbé de Saint-Denis, 6c Conrad,
comte de Paris, étoientà la tête de cette fadion : ils
mettaient tout ëncombuftion dans le royaume, tandis
que Bofon, qui tenoit le parti des princes, prenoit
des mefures à Meaux, pour mettre une armée en j
campagne. Le roi de Germanie , fufeité par Goffelin
& par les complices, entra fur les terres de France :
tout préfogeoit fes fuccès, lorfque des troubles excités
dans la Bavière le forcèrent de repaffer le Rhin ;
cette expédition ne lui fut cependant pas infrudueufe
les partifans des princes lui cédèrent, par un traité *
une partie de l’ancien royaume de Lorraine : royaume
autrefois puiffant, 6c dont la province qui retient fon
nom, n’eft {ju’un foible refte.
Les rebelles privés de fon appui, ne tardèrent
point à réveiller fon ambition , ils rengagèrent à
rompre le traité, il fe préparoit à foire une nouvelle
invafion, mais il fut retenu par Hugues, fils de Lotaire
, qui menaçoit cette partie de la Lorraine qu’on
lui avoit cédée. Le fuffrage des François étoit partagé
entre Carloman 6c Louis, les Neuftriens fixoïent
leurs voeux fur Louis, mais Carloman avoit pour lui
Bofon ; il étoit à craindre que la rivalité de ces princes
n’excitât une guerre civile : ce fut pour en prévenir
les ravages, qu’on les facra tous deux en même
tems. Louis eut la France proprement dite, Carlo-
inan la Bourgogne 6c l ’Aquitaine.
Bofon, qui venoit de faire deux rois, ne put réfifter
à la tentation de l’être. Les princes , jeunes & fans
expérience, laiffoient un libre cours à fon ambition:
il féduifit par des préfens ceux que les menaces ne
purent ébranler: il s’étaya encore delà protedion
du pape & des évêques. Alors il prit la couronne, &
fe fit couronner roi d’Arles. Ce nouveau royaume
comprenoit le Dauphiné, le Lyonnois, la Provence
la Savoie & une partie de la Bourgogne.
Tous les princes de la maifon Carlienne tinrent
une aflèmblée d’états à Gondreville ; on y délibéra
fur le.moyen de rétablir le bon ordre dans le royaume
, & d’en purger les ennemis domeftiques & étram
gers : il fut décidé que Louis 6c Carloman marche-
roient contre Hugues , fils de Lotaire, qui dévaffoit
la Lorraine : le rebelle n’eut point affez de confiance
pour tenter le fort des armes en bataille rangée , il
le retira dans les forêts. Les. deux rois penferent alors
qu’il leur feroit facile de punir Bofon du titre de roi
qu’il avoit ofe prendre ; ils le tinrent affiégé pendant
deux ans fans pouvoir le réduire ; une irruption de
Normands répandus dans l’Artois. & la Flandre força
Louis d’oublier le rebelle. Il alla combattre ces nouveaux
ennemis, qu’il vainquît dans les plaines d8
Saucour. Cette vjaoire fut le dernier événement
mémorable du régné de louis. Ce prince , qui
menton une vie plus longue & un plus heureux
régné mourut vers l’an 883, deux ans & trois mois
apres ion couronnement.
Lo u is ne laiffa point d’enfans, fon frere lui fuc-
ceda fans aucune contradiflion. Carloman fit ferment
de garder les tabulaires de Charles-le-Chauve, &
m Ê Ê Ê l i H H H : {on nouveau
régné fut mele de profperites & de revers. La conquête
du Viennois le rendit maître de la femme de
noion qui, dans cette guerre, avoit montré un courage
& utie conduite qui auroient illuftré un générait
les Normands, témoins de fes fuccès , recherchèrent
ion amme , & lui demandèrent la paix ; Carloman
y coqientu , mais à des conditions trop humiliantes
pour une nation auflî fiere r il eut à fe repentir de ne
leur en avoir point propofé de plus modére'és; les
Normands lui.taillerent en pièces troisarmées piaffantes
, & le forcèrent,d’acheter la paix, il la paya
douze mille livres d’or : la mon qui l’enleva (884)
peu de tems après, ne lui permit pas d’effacer la
honte de ce traité ; il mourut d’une blefliire que lui
fit un fangher à la chaffe. Il ne laiffoit point d’héfi-
tiers, .es.états pafferent à Charles-le-Gros, dont la
nn r ut li déplorable.
Lowts IV, é t iO um m ir , X X X 1P roi de France,1
fils de Charles-le-Simple & de la reine OgiveSfilIe
d’Edouard, roi d’Angleterre. Ce prince fut’ainfi
nomme d Outremer, parce qu’au moment de la captivité
de Charles-le-Simple , il alla chercher un afyle
en Angleterre contre la violence des grands qui
avoient fecoùéle joug de l ’obéiffance : il relia treize
ans à la cour du roi de la Grande-Bretagne, fon aïeül
maternel. Hugues-le-Grand parut dédaigner un trône
qui etoif 'enKircumé-d’écueils ; & ne pouvant s’v
placer fans péril, il y fit monterXoeij, & fut le premier
à le reconnoîrre pour fon fouverain. L’exemple
de fa foumiffion politique entraîna les feigneurs des
deux ordres qui l ’accompagnerent jufqu’à Boulogne'
m i, d’un commun accord, ils faluerentXùKts à la-defcentc
du vaiiièau, & le proclamèrent roi de France.
Ce fervice intéreffé yaftt à Hugues le nom de Grand,
avec une partie de la Bourgogne , dont le frere de
Raoul fut dépouillé. Le timon de l ’état fut confié à
fes foins , Sc quoiqu’il n’eût qu’une autorité em-
pruntéq, il eut tout l’extérieur de la royauté. Ses
procèdes trop fiers pour ceux d’un fujet, affeâoient
fenfiblement le jeune monarque déjà trop humilié
de languir fous la tutelle d’un vaffalqui, fous prétexte
dele'ioulager du poids des affaires, le tenoit
captif dans Penceinté.d’un palais. Ce fut pour forfir
de cet efclavage que Louis fe ligua avec le duc de
Normandie, les comtes de Vermandois & de Poi-
tiers ,.qu’il croyoit ennemis de Hugues : mais ces
alliés infidèles le facrifierent bientôt aux intérêts dé
leur .fortune. Hugues qui favoit que les hommes font
toujours vaincus par leurs pafiîons, augmenta le
territoire des uns, & accorda des privilèges aux
autres : Hugues verfa fur eux une infinité de bienfaits
, dont il étoit d’autant plus prodigue qu’ils ne
lui coûtoient rien ; c’eft ainfi qu’il en fit les inftru-
me'ns defes profpérités. Le monarque chancella plus
que jamais fur le trône qu’il prétendoit raffermir : la révolte
l’afiiégea de toute part ; les foudres de l’églife
lancées contre les rébelles les arrêtèrent quelques
inftans dans la route du crime, & quoiqu’ils bravaf-
fent les excommunications, ils craignoient tout de la
terreur qu’elles infpiroient au peuple. Hugues en
prévit les fuites, & pour les prévenir il confêntit k
une treve dont Louis crut devoir profiter pour reprendre
la Lorraine : il en fit la conquête ; mais cette
démarche n’étoit pas d’un politique : il indifpofoit