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avec elle. Le ferpent d’Ophiucus fuit de près fon
lever & fon coucher.
On nous peint enfuite la jeune Perfephone qui
file & brode dans fa retraite , lorfque Jupiter fe
métamorphofant en ferpent , affoupit (es gardiens
3 8c pénétrant dans ce fombre afyle 3 la
rend mère de Jupiter - Zagreus , aux cornes de
taureau.
> Ce dieu ne vécut pas Ibng-temps, & fut mis en
pièces par les titans 3 mais 3 dans ce court efpace
de vie , il fubit diverfes métamorphofes 3 tantôt
portant 1’ égide de Jupiter 3 tantôt prenant la
Forme de ƒ enfant , tantôt celle du vieillard 3
tantôt rugflfant ..fous la figure du lion * tantôt
henniffant fous celle du cheval- * tantôt fifflant
fous la forme tortueufe du ferpent 3 tantôt tigre
furieux * fouvenç taureau indomptable* c’eft-à-
dire , en un mot fubîffant toutes les métamorphofes
qu’éprouvoit famé du monde dans fa circulation
périodique à travers, les fixes , dont les
ftatues fymboliques empruntoient les formes variées
qu’on.lui aonnoit dans les diverfes faifons.
Tels étoient Tes dogmes théoiogiques qu’ on
enfeignoit dans les myftères de Bacchus , de Cérès
& de Proferpine 3 dont toutes les fab'es fa crées
n’étoient que des allégories relatives à l’aCtion de
famé du monde, & à. fon influence fur la nature &
la. végétation*.
U en étoit de même des fymboles myftérieux
qu’ on y employoit j tels que le ferpent d’or qu’on
raifoit couler dans le fein des inities , & qu’ on
retiroit par en-bas 3 cérémonie dont fl eft aifé
actuellement d’appercevoir le but allégorique.
Tel eft Te mot d’Heva ou Evan, qu’on rêpé-
toit dans ces myftères 3 8c qui lignifie ferpent ,
comme le remarque très-bien faint Clément d’A -
îexandrie ( In Protreptico-3 pag. 4..Ed. gr&c. Comme- 1
linu y. Ce nom- d’Heva eft refté au feipent cé-
lefte î c’eft le même ferpent qu’on* voit à- côté
d’une femme qu’ on a prife pour Minerve. L’homme
qui eft de l’autre coté , 8c qui a la chèvre à les
pieds * eft le Jupiter-Ægiochus des grecs 3 c’eft-
a-dire 3 le génie équinoxial du printemps* ou le
cocher >la. femme & fon ferpent ©u- fe ferpent
femelle , le génie d’automne. Le boeuf & fe fron ,
l’un figne équinoxial , l’autre figne folftitial 3 s’y
trouvent: auffi, ainfi que le cheval * qui. eft le génie
du folftice d’été. Ce monuinent. eft. abfblument
aftronomique & vient des myftères anciens de
Bacchus. Sâint Clément dit que les pommes fai-
fcient partie des attributs fymboliques expofés
dans les myftères 3 8c il cite pour preuve un vers
d’Orphée qui le prouve en effet- C e monument
que nous venons d’expliquer 3 eft dans Mont-
fiaucon CSupplém. tom. I. pl, io. fig.
■ Parmi ces différens emblèmes , il en étoit niî
qui défignoit affez clairement la belle conftellation-
de Perfephore 3 c’eft la couronne que portoit et*
pompe l’Hyérophante ou le prêtre Stéphanophore.
Le nom d’Antépkores étoit donné a ces fêtes.
Cette couronne & ces guirlandes étoient des fymboles
évidens de la eonftellation que l’ on hono-
roit. On voit dans tous les monumens qui repré-
fentent l’enlèvement de Proferpine , la* corbeille de
fleurs qui. eft renverfee. Dans les poèmes allégoriques
lur l’enlèvement de cette deeffe 3 on faifoit
également allufion à la.nature de l’emblème .aftronomique
3 en fuppofant que Proferpine s’ occupoit
à rafiembler des fleurs oc à compofer des guirlandes
3 lorfque fon ravifieur la furprit ( Ovîd.
Faß. iiy. IV . v. 42.5. Métam. liv. V. fa i. I I .) . Ces-
allufions étoient familières aux prêtres aftrono-
raes , 8c elles n’ont point échappe à Manilius. Le
’ poète aftrologue y tire l’horofcope de ceux qui
naiffent fous ce figne * 8c il nous dit qu.’ ils aimeront
les fleurs (Liv. V. v.- 254. )-
On voit que les poètes ont confervé précieufe-
. ment cette circénftance des guirlandes 8c des;
; fleurs 3. qui étoit comme le mot de l’énigme * 8c
contenoit une allufion délicate à. la couronne cé-
lefte 3 appellée Jertum 8c corolla. Claudien fuppofe
même que ce fut un ftratagême de Vénus j pour
faire tomber Perfephone dans les filets de Pluton *
; 8c il y ajoute la circénftance de la couronne :
. ► ► Se ienara coronat.
Bnfin, Ovide dit en termes formels que la couronne
d’Arîadne-eft la fameufe Proferpine des anciens
j de manière que ce que nous prouvons par
notre fÿftême , fè trouve confirmé par le témoin
■: gnage de l’antiquité. Voici ce qu’il dit :
Protinùs adfpicies 3 venienti noite , . coronam 3
Gnojfida j Thcfécr crimine facta dea efi.
Jam bene perîuro muiârat conjuge Bacchum ,
Qu a dédit ingrat o fila legendaviro,.
(Taft. lib .lIL v .4 j9 .)
Il fuppofe qu’Ariadne* fe plaint des infidélités dfe
; fon amant * & que Bacchus * qui l’écoutoir ,,
l’ëmbraffe pour la confoler , & la* place dans*
les aftres fous le nom de Libéra ou: de Proferpine.
.T
Dixerat 3 audibat jamdudum verba querentis
Liber 3 ut à tergo.forte fecutus erau
Occupât amplexu 3 lâcrymafque per ofcula ficcat 3.
Et- pariter coeli ßimma petamus 3. ait.
Pu mihi juncla toro 3 mihi juncla vocabula fume £
Jam tibi mutât a Libera-nomen eriu~
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'Sinique tUA tecum faciam monumenta coron&
Vulcanus Veneri quam dédit 3 ilia tibi.
Ditta facit 3 gemmafque novem transformat iriignés ;
Aurca per Jlellas nunc micat ilia novem.
( Fàft. lib. III. v. J07. )
¥ Dans le beau monument qui repréfente le mariage
de Bacchus 8c d’Ariadne, un faune 3 ou dieu
® CG5nes de bouc j met la couronne fur la tête
d’Ariadne 3 8c Bacchus tient dans fa main un
ferpent * fymbole vifîble du ferpent célefte, dont
J ame du monde ou Bacchus prenoit alors la for-
îne 3 8c auquel il s’uniffoit dans fa conjonction
avec la couronne boréale î il étoit alors Bacchus-
Sarap ( Ant. expi. tom. I. part. i.pL i fo .J .
Ainfi Libéra ou Perfephone eft certainement
une conftellation 5 8c les aventures de cette déeffe
ne peuvent être que des apparences aftronomi-
que6 3 de la nature de celles qui fuivant Chéré-
mon a avoient pour objet le foleil 3 la lune 3 les
planètes 3 le zodiaque 3 & les aftres en afpeCt avec
-eux, fondement unique de toutes les fables fà-
ccees. Il n’ eft donc point étonnant de trouver
Proferpine avec les douze lignes 3 dans le monument
qui repréfente l’enlèvement de cette déeffe 3
d’y trouver à fes côtés Hercule ou Théfée 3
comme il eft dans la fphère des étoiles. Les planètes
durent également lui être unies 3 comme
elles le font aux autres aftres-génies 3 fort à Bac- ;
chus , foit à Apollon, &c. Aufli les anciens di- ;
foient que les planètes formoient fon cortège , 8c
fis les appelloient les chiens ..de Proferpine ( Porphyre
, dans la vie de Pythagore. ). La plupart des
auteurs l’ont confondue avec la lune , reine de la
nuit & de la végétation , à laquelle elle étoit în-
timément unie , comme Paftre qui préfidoit aux
figues inférieurs & à l’empire des ténèbres , &
coifime l’intelligence motrice de la fphère lunaire.
Il fera donc aife de la reconnoître encore, <
lorfque j quittant les habits de la déeffe de la
Pr®n^ Parure de Vénus au .printemps. ,
C eft ainfi qu’on pourra concilier tout ce que dî-
ïeient d’elle les anciens , & expliquer la belle 1
lymne d’Orphée à Proferpine 3 qui, fans cette
« e f , renferme des idées prefque contradictoires, '
telles que celles de lucifera 3 & c . ?
* * ’ • »................................... ...... datrix 3
•Qua tenes infer ni portas fub profunditatibus terre 3
Euriarum gznitrix 3 fubterraneorum regina ,
Temporum contextrix 3 lucifera... FruQibus florens3
Bene lucens 3 verna 3 paluftribus gaudens auris 3
Sacrum manifefians corpus , germini^ps fruc-
Jiferis.
- TT7. . TT .TT........... Autumnalis defponfata 3
Vita & mors fola 3 Perfephone 3 que fers omnia *
Et omnia occidis.
Audi 3 beata dea 3 & frufàus reduc a terra.
On voit qu’il fuffit de la confidérer dans la
double époque qu’elle fixoit par fon lever & fon
coucher, pour expliquer toutes les dénominations
, 8c concilier deux idées auffi contraires que
celles de reine de la vie 8c de la mort.
Ainfi, fous quelque point de vue qu’on envi-
fage l’hiftoire de Proferpine 3 foit qu’on cherche
l’étymologie de fes différens n om s fo it qu’on explique
la théologie monftrueufe de fa naiffance & 1
de fon hymen , 8c fes autres aventures 5 foit
qu’on examine l’horofcope de fon enlèvement ou
de fes amours avec le dieu Serpent, tout s’accorde
à prouver que Proferpine eft la conftellation de la
couronne boréale ou d’Ariadne 5 enfin , Ovide l’a
dit formellement :
Jam tibi mutât a Libéra nomen eritf
On voit fà tête fur les médaillons & les médailles
de Syracufe. Quelques auteurs l’ont prife
pour celle a’Àréthufe, croyant voir des feuilles .
de rofeaux dans les épis qui couronnent cette
tête. Mais le mot KOPAS, fille 3 qui y eft joint fur
plufieurs médailles , prouve que c’eft une Proferpine
3 qui, étant fille de Cérès, peut fort bien
être couronnée avec des épis, comme fa mère.
Les étrufques lui donnoient des ailes.
! On trouvera à l’article Pluton l’énumération
des monumens fur lefquels eft gravé l’enlèvement
, de Proferpine.
Dans la collection des pierres gravées de Stofch,
; on voit fur une cornaline fciée d’un fearabée de
gravure étrufque, Mercure le caducée dans la
main droite , portant fur la gauche i’ame de Proferpine
3 8c ayant fur l’épaule droite une tortue.
La fable rapporte que Proferpine ayant mangé
quelques grains de grenade dans les enfers, elle
ne pouvoit plus fortir de la cour de Pluton, mais
que Cérès avoit epfin obtenu de Jupiter quelle
n’y refteroit que fix mois chaque année, & qu’elle
paflferoit le refte du temps auprès d’elle. O r ,
Mercqre qui avoit le foin de ramener les âmes des
enfers’, eft repréfenté dans cette gravure portant -
Proferpine à la mère. On croit trouver auffi le
même fait dans un petit ( Gori Muf etrufq. t. I.
tab. 38. ) Mercure de bronze , qui porte une
déeffe drapée , avec le diadème. Proferpine fur
notre pierre eft nue, & paroîttenir un flambeau
renverfé à la main, peut-être pour fïgnifier les
côurfes que Cérès avoit faites avec lé flambeau pou£
la chercher.