Pluton 8c à Proferpine , 8c la contagion ceflfa.
Soixante ans après., c'eft-à-dire en $oy , on
réitéra les mêmes facrifices , par ordre des prêtres
des Sybilles, en y-ajoutant les cérémonies pref-
crites par les livres Sibyllins ; & alors il fut réglé
que ces fêtes fe feroient toujours dans la
fuite à la fin de chaque liède : te qui leur fit
donner le nom de jeux Séculaires. Ce ne fut que
long-temps après, c'eft-à-dire , pendant la fécondé
guerre de Carthagé, qu'on inftitua les jeux
âpollinaires, à l’honneür d'Apôllbn St de Latone.
On Us célébroit tous les ans ; mais ils n'étoient
point diftingués des jeux Séculaires , l'année qu’on
repréfentoit ceux-ci.
L'appareil de ces jeux étôit fort impofant ;
on envoyoit dans les provinces des hérauts , pour
inviter tous les citoyens à la célébration d'une
fête qu'ils n'avoient jamais vue , & qu'ils ne re-
verroient jamais.
On diitribuoit au peuplé certaines graines &
certaines chofes luftrâles ou expiatoires. Ôn fa-
crifioit la nuit à Pluton, .à Proferpine, aux-
Parques, aux Pithies , à la Terre., & le jour à .
Jupiter, à Apollon, à Latone, à Diane & aux
Genies. On faifoit des veilles & des fupplications ; j
on plaçoit les ftatues des dieux fur des couffins, j
où on leur feuvoit les mets les plus exquis. Enfin '
pendant lés trois jours que duroit la fê te , on <i
chantoit trois cantiques différens , comme l'aflfurè !
Zolîme, & l’on donnoit au peuple divers fpec- >
tacles. La fcène de la fête changeoit chaque jour; ;
le premier jour on s'aiTmbloit dans le champ de
Mars ; le fécond au eapitole , & le troifième fur .
le mont Palatin.
Peu de jours avant qu'on les commençât, les ;
uinze prêtres Sybillins , afiis fur leurs fiéges , '
evant le temple d'Apollon Palatin, 3c de Jupiter 1
Capitolin, diftribaoicnt à tout le peuple des jj
flambeaux,du bitu;n. .,du fonfre & d’autres chofes j
luftrâles ; & ils paûoient l à , 8e dans le temple j
de Diane ; fur le mont Aventin, 'les nuits eh- ;
tières en l’honneur des Parques avec beaucoup de
dévotion. , j
Quand le temps de la fête étôit arrivé , le peuple
s’ affembloit dans le champ de Mars ; on in>
moloit des viâimes à Jupiter , à Junon; à Apollon.,
à Latone , à Diane , aux Parques , à Cérès , à !
Pluton 3c à Proferpine.
La première nuit de la fête ', l'emperçur, à la j
tête de quinze pontifes, faifoit. dre fier fur le j
bord du Tibre , trois autels qu'on arrofoit du
fang de trois agneaux ; 3c fur ces autels > oh -
‘brûloit les offrandes & les viétimes, Il paroît
que c'eft à cette circonftance qu'il faut rapporter |
b rnéchilie où l ‘on voit la tête d’Augufte aveç *
ces móts : Auguftus tr. pot. V I I , Sc de l'autre coté
fur une colonhe XV. S. F. c'eft-à-dire, quindecim
virifac ris fait èndis 0 8c autour ,. L. Mefcinhis Rufus
I I I vir. , qui eft le nom du T ré v ir , qui avoit fait
frapper la médaillé pour cônfacrer la mémoire
d'un événement auffi remarquable que celui de
la célébration dés Jeux.
Après cela on marquoit un certain efpace ,
dont on faifoit une efpèce de fcêne illuminée.
On chantoit plufieurs hymnes faits exprès pour
cette oecafibn ; on célébroit plufieurs fortes de
jeux : on jouoit plufieurs pièces de, théâtre.
La fraîcheur de la nuit donnoit un nouvel agrément
à cés fpeétàcies, -fans parler des illuminations
, qui non-feulement eclairoient la fcène ,
mais qui fe Eifoient auffi dans les temples, dans
les places publiques & dans les jardins : lumina
cum rogis accenduntur, dit Zofime. On peut même
croire que la defeription des feux d'artifices,
dont parle Claudien , dans le panégyrique du
fixième confulat d'Honorius, ne convenoit pas
moins aux fêtes féculaires qu'aux jeux du cirque'.
' Le lendemain, après'qu'on étôit môh'té au Capitole
'pour y offrir des victimes , on retourhoit
dans le champ'de Mars , 8e l'on célébroit des
jeux particuliers en l'honneur d'Apollon 3c de
Diane. Ces cérémonies duroient j.ufqu'au matin,
où toutes les dames alloient au eapitole à l ’heure
marquée par l'oracle , pour chanter des hymnes
à Jupiter..
0
Le troifième jour, quifiniffoit la fête, vingt fept
jeunes garçons-, autant de jeunes filles de‘qualité
chantoient dansüe temple d'Apollon Palatin des
cantiques en grec & en latin , pour attirer fur
Rome la protection de tous ces dieux , que l'on
venoitd'honorer par des facrifices. Enfin les prêtres
fibyllins qui avôient ouvert la fête par des prié-*
res aux dieux, la terminoient de la même manière.
-
Augufte voulant donner un exemple de fort
attention aux îéglemens des moeurs , ordonna que
les trois veillées fe Effent avec retenue , que le
mélange de la licence ne. fouillât point la dévo-r
t-ion , 3c il défendit que les jeunes gens del'un &
de l’autre fexe , paruffent aux cérémôni'es nbcr
ttirnes , fans être accompagnés de quelqu'un de
leurs parens qui fut r;d'un âge à Yeillèr fur eux 3c
à répondre de leur conduite.
Les premie rs jeux féculaires, furent repréfentés
Fan de Rome 24c , les féconds en 305 , les trok
fièmes en yoy , les quatrièmes en 605 , Augufte
fit célébrer les fizièmes en 737.
Ce prince , perfùadé qu'il éteit important pour
l'éçat de ne pas omettre la célébratrop de cettè
S E C
fête , à laquelle on ne penioit plus, donna ordre
aux prêtres fibyllins, de confulter en quel temps
du fiècle courant on devoit Les repréfenter. Ceux-
ci s'étant apperçus qu'on les avoit oubliés en 705 ,
fous Jules Céfar , longèrent aux moyens de couvrir
leur faute, de peur qu'on ne les rendît ref-
ponfab’les de toutes les calamités-qui avoient affligé
l’Empire pendant les guerres civiles.
Trois chofes leur applanirent la route de l’im-
pofture. Ils étoient feùls dépofitaires des livres
fibyllins ; l’on né convenoit pas généralement
de l’année qui devoit fervir de point fixe pour
régler celle des jeux féculaires ; Sc l’on étôit partagé
fur la daté de ceux que l’on avoit1 repréfentés
depuis la fondation de Rome. î 1. leur,fut
donc aife de flater la vanité d.' Augufte,. en déclarant
que l'année féculàire tomboit à-l'année 737.
Pour en perfuad'erle public , ils mirent au jour
des commentaires fur les livres fibyllins , ' afin
de prouver par les paroles même des fibylles , que
le fiècle devoit être de cent, dix ans , 3c non' de
cent ans. Dans ce projet, ils altérèrent lè texte
du vers libyllin .qui port oit cent., hecaiontada
■ eueIon, 8e fuDftituèrent a hecatôntaàd , le mot hcca-
tondeca, qui lignifie cent dix ans. '
L’autorité de ces prêtres , infiniment refpe&éi,
mit tout-à-coup lé nienfonge à la’ placé de la vérité
, fans que perfonne put. les démentir; puif-
qu’il étoit défendu, fous péîne 4e la !§É de com-1
muniquer les livres des fîbyllés à quiconque ne !
feroit. pas du collège des quinze pontifes.
Augufte , charmé dé voir , que fuivant fes dé- .
firs , cette fourbe pieufe lui réfervoit la gloire de-
célébrer une fi grande' fê té , appuya la découverte
des pontifes du poids de les édits , 8c chargea
Horace de compofer l’hymne féculàire, .qui
devoir fe chanter, en prèlence de l’empereur, du\
peuple , du fénat 3c des 'prêtres , au nom de tout
l'empire..
Le poète, en homme de cour , n’ oublia pas
le fiècle de cent dix ans. <* Qu'aptes dix fois on^e
années , dit-il y, le fiècle ram.èhè ces chants &>ces
jeux folemnels pendant trois jours .& trois nuits,
comme nous faifons aujourd'hui ^.'
v Certus undenos' decie's pe'r annos
Orbis ut cafitus refera tqùe ludos ,
Ter die claro , totiefque gratâ .
Noble frequentes.
.Cependant les fïicceïfeurs d’Augufte n’obfèr-
vèrent point Fefpace de temps qu’il avoit fixé
pour la célébration decçs'jeux. Claude les folém-
nifa 64 ans après, l'an de Rome 800. Domitien
S E C 37î
40 ans après CJaude, en fit repréfenter de nou- .
veaux , auxquels Tacite eut part en qualité
de quindccimvir, ou de prêtre libyllin , ainlî
qu'il le témoigne lui-même dans fes annales, liv.
IX. o. 11. L'empereur Sévère accorda le fpec- -
ta d e de ces jeux pour la huitième fois , 110 ans
après Domitien, 8c par conféquent l ’an 5?yo de
Rome. L'an ioco de la fondation de cette ville ;
Philippe' lè père donna au peuple les plus magnifiques
jeux féculaires qu'on eut encore vus. Conf-
taatin ne les fit point‘célébrer l'année qu'il futconful
avec Licinius pour la troifième fois , l'an de
l'ère vulgaire 313. Mais, l’empereur Honorius
ayant reçu la nouvelle de la victoire de Stilicon
fur Alaric , permit à tous les payens, de célébrer
encore lés jeux féculaires , qui furent les derniers
dont parte l’hiftoire: Zcftme , qui nous a
donné ,la plusimpie defeription qu'on ait des jeux
i fé c u la ir e s ri Attribue la décadence de l'Empire ,
' qu'à la négligence' des romains à les célébrer
exa élément.
SECULUM 3 fiècle. Ce mot comprend un efpace
de temps de çé;n.t ans, félon Feftus , quelque-
foi s d é ’ q uà tte - vin gt - dix ans , félon Se rvius ,
fouyent de cent dix , 8c quelquefois de mille.
Pour aypir une idée -fixe ,du fiècle , chez les romains,
il faut lé divifêr avec Cenforin ( Die
'mtak 2/(17^ )'>u. fi-x/e natnr'el & en fiècle civil .:
le premier eft lè temps que la nature a prefcrit
pour fervir de borne, à la vie des hommes : fecu-
lumefi J'pùtium vite hum ans longijfimumpartu & morte,
definitum, & dans ,ce .Cens .le fiècle.dl plus ou moins
étendu, félon le plus ou lé moins de durée delà
vie. humaine." Le fi/cie civil de Rôme, eft un
temps ’fixé au gré des romains, que quelques
auteurs font monter à ccnt dix ans, parce que
les quindécemvivs recommençojent à cette époque
les jeux féculaires ; mais cette opinion n'eft fondée,
que .fur une fourberie des quindécemvirs
q u i, pour cachèr , leur négligence à Augufte,
firent croire à ce prince, que ,Ies livres fibyllins,
dont ils étoient les dépofitaires, fixoient a cent
dix ans la repréfentaùon des jeux féculaires , Sc
corrompirent même le texte de ces livres pour
appuyer leur menfonge. .Or , i l paroît certain , par
témoignage des auteurs antérieurs à Augufte,
que ce mot de fiècle , ne comprenoit qu'une révolution
de cent ans , après laquelle, les livres
fibyllins avoient ordonne qu'en célébreroit les
jeux fépulaires : c'eft ce que Cenforin prouve
par le témoignage de -"Valerius Antias , de i'hiftor
rien Pifoïi,' de Varron 8c de T ite -L iv e , dont
voici les propres paroles : Eodem anno, ludos
ftculares Csfar ingenti apparatu fecit , quos cen-
tefimo quoique anno , is enim terminus fs.cu.li , fers
màs eft.
SECUNDARIÏIS , adjutor , monhor. Ces trois
mots font empruntés du théâtre des romains , 8c