
, 8 6 T E R
Quand on vouloit affirmer quelque chofe, on
faifoit le ferment ou l'imprécation contre foi-
même , de n'èprouver jamais la terre légère.
Properce ( a > zo , 1 $ , ) dit :
Ojfa tihéjttro per matris & ojfa parentés:
Sé fallo , cinés heu ! fit méfié uterque gravis.
TERRASSE. C ’étoit dans les lièges des anciens,
un épaulement environnant le bord du'fbffé,
femblable à nos tranchées , d'où les archers & les
frondeurs tiroient à couvert & fans ceffe contre
les défenfes de la v ille , pendant qu'on infultoit
de toutes parts. Les terrajfes fervoient aufli de
contrevallation pour brider , 8c refferrer de plus
près ceux de la place. On appelloit aufli terraffe,
un cavalier élevé fort-haut pour dominer lés
murs d'une ville. On commençoit la terrafe fur
le bord du foffé , ou du moins fort-près, & elle
formoit un quarré long. On 1 elevoit a la faveur
des mantelets, qu'on conftruifoit fort-hauts , &
derrière lefquels les foldats travailloient à l’abri
des machines des afliégés. Les terrajfes qu’Ale- ;
xandre fit élever aux lièges du roc de Conénez
& d'Aorne , & celle de Malfada , dont Joféphe
donne la defcription, font fâmêufes dans 1 hifîoire.
Terraffe fe prend aufli pour le comblement du
foffé des places afliégées 5 mais on ne doit pas
confondre ces fortes de terrajfes avec les cavaliers
ou terrajfes élevées fur le bord du foffé pour dominer
les murailles , & voir ce qui fe paffôit
fur le parapet. Les traducteurs & les commentateurs
tombent fouvent dans cette erreur. Il eft
aifé- de diftinguer les terrajfes corifidérées comme
comblemens , & les terrajfes confiderees comme
cavaliers ; car lorfqu on s’apperçoit qu’il y a des
béliers fur la terrajfe , il ne faut pas douter que
l ’auteur ne veuille parler du comblement du foffé, >
s’ il paroît que ces béliers font fur un cavalier 3 il
faut décider que l’ hiftorien eft un ignorant qui ne
fait ce que c’eft que la guerre (FolardfurPolybe ) .
T E R R E , Tellus. Il v a eu peu de nations
payennes qui n’aient rendu un culte religieux a la
Terre. Les égyptiens-, les fyriens , les phrygiens,
les fcythes, les grecs & les romains ont adore la
Terre, & Font mife avec le Ciel & les aftres , au
nombre des plus anciennes divinités. Héfiode dit
qu’elle naquit immédiatement après le chaos ;
u’elle époufa le C ie l, & quelle fut mère des
je u x , des géants, des biens & des maux, des
vertus & des vices. On lui fait aufli époufei le
Tartare, & le Pont ou la M er, qui lui firent
produire tous les monft res que renferment ces deux
elémens ; c’eft-à-dire/que les anciens prenoient
Ua Terre pour la Nature, ou la mère univerfelle
des chofes, celle qui produit & nourrit tous les
êtres} c’eft pourquoi on F appelloit communément
la grande mère, magna mater. Elle ayoit pluliears
T E R
autres noms, Tîtéeou Titéia3 Ops, Tellus, Vefta,
& même Cybèle.
Les philofdphes les plus éclairés du pagarirfme,
croyoient que notre ame étoit une portion de la
nature divine, divins particulant aur&3 dit Horace.
•Le plus grand nombre s’imagiwoit que 1 homme
étoit né de la terre imbibée d’ eau & échauffée par
les rayons du foleil. Ovide a compris 1une &
l’autre opinion dans ces beaux vers ( Du liv. I des
métam. ) , où il dit que l’Homme fut forme,
foit.que -l’auteur, de la nature l’eût compofé de
cette femence' divine qui lui eft propre . ou de ce
germe renfermé dans le fein de la terre, lorfqu elle
• fut féparée' du ciel. PaufaniaS parlant d’ un géant
indferi d’une tliïle extraordinaire, ajoute « Si
» dans les premiers temps la terre 3 encore toute
as humide, venant à être échauffée par les rayons
33 du foleil, a produit les premiers hommes*; quelle
39 partie de la terre fut jamais plus propre a pro-.
! 33 duire des hommes d’une^ grandeur extraordi-
33 naire que les Indes , qui encore aujourd’hui
» engendrent des animaux tels que les éléphans ?»
Il eft fouvent parlé dans la 'mythologie des enfans
de la terre j en général, lorfqu’on ne connoiffoit
pas l’origine d'un homme célèbre, c'étoit un fils
de la Terre ; c1èft-à-dirè J qu'il étoit né dans le
pays, mais qu'on ignoroit fes parens; Tel etoit
le premier, des'AchiUès. Voye^ ce mot.
. La Terre eut, des -temples , des autels, des
facrifices & même des oracles ; à Sparte il y avoit
un temple de la terre qu’on nommoit Gafepton }
à Athènes on facrifioit à la terre comme à une
divinité qui préfidoit aux noces. En Achaie , fur le
fleuve Grathis, étoit un temple célèbre de la terre,
qu’on appelloit la déeffe au large fein, evpurepvovj
la fia tue étoit de bois.rOn nommoit pour fa pre-
trelfe une femme q u i, dès ce moment, étoit
obligée de garder toujours la continence, encore
falloit-il qu’ elle n’ eût été mariée qu’une fois > &
pour s’ afuirer de la vérité, on lui faifoit fubir une
terrible épreuve ; lavoir , de boire^du fang -de
taureau : u elle étoit coupable de parjure , ce fang
. devenoit pour elle un poifon mortel.
Les romains avoient fait bâtir un temple a la
déeffe Tellus ou la terre ; mais les hiftoriens ne
nous apprennent point quelle figure on donnent
à la deeffe. Il y avoit plufieurs attributs de Çy-
bèle qui ne lui convenoient que fous fon rapport a la
terre j comme le lion couché & apprivoife, pour
nous apprendre qu’ il n’ eft point de terre il fterde
& ü fauvage qui, ne puiffe être bonifiée par la
culture î le tambour, fymbole du globe de la
les tours fur la tê te , pour repréfenter les villes
femées fur la furface de b terre.
Avant qu’Apollon fût en poffeflion de l’ oracle
de Delphes, c’ étoiüattrr*quirçn4©itfes oracles*
T E R
& qui les prononçoit elle-même, dit Paufanias;
mais elle étoit en tout de moitié avec Neptune.
Daphné, l’une des nymphes de là montagne, fut
choifie par la Déeffe Tellus pour préfider a l'Oracle.
Dans la fuite Tellus céda tous fes droits a
Thémis far Delphes , & celle-ci à Apollon.
La terre étoit .perfonifiée dans Cybèle. Elle
étoit repréfentée à demi-couchée , appuyée quelquefois
fur un boeuf, fon fymbole chez les égyptiens
( bas-relief du palais Albani. Mon. antichi
n°. 28 ) 3 tenant une corne d’abondance, accompagnée
d’enfans, qui repréfententles faifons(^ùL
n0. 43) •
• TERRE CUITE. « Tout jufqu’aux anciennes
langues , dit Vinckelmànn ( hifi. de l’art. ) , indique
l’ argille ou la terre comme la première matière
de l’ art. Au temps de Paufanias, l’on voyoit
encore des divinités d’ argile dans plufieurs temples
dans celui de Cérès & de Proferpme à
Tritia en Achaïe (Paufan: liv. 7. .p.f-8o3'l. 50). Le
temple de Bacchus a Athènes , renfermoit un
ouvrage de terre cuite , repréfentant le roi Am-
phyCtion , qui traitoit à fa table Bacchus , & les
autres dieux ( lib. 1 ,p . 7. /. i j ; ). Un des portiques
de la même ville ,, nommé le Céramique , à'
caufe de la quantité d’ouvrages d’argile qui le dé-
coroit, confervoit deux morceaux de la même
matière yThéfée qui précipitoit le brigand Sciron
dans la mer , & l’Aurore qui enlevoit Céphale. -
Jhid. jp. 8 1 0 . L’ on a aufli trouvé dans les fouilles
dé la’ ville ' de Pompéia, quatre ftatues de terre
cuite , qu’on voit dans le cabinet d’ Herculanum.
Deux de ces ftatues, im peu, au-deffous de la
grandeur naturelle, repréfentcnt'des figures co- |
mîques àp l’ un & de l’autre fexe , avec desmaf-
qûesTur la tête: les 'deux autres , un peu plus .
grandes que nature , nous offrent un Efculapé &
une Hygie. Ôn y a encore découvert le bufte
d ’une Pallas , d’une grandeur naturelle, ayant un
petit bouclier rond du côté gauche. A l’égard
de ces figures de terre , on les peignoir quelquefois
en rouge ( Plînîi l. 25 c. 4. y ) , pomme on le
voit à une tête d’homme, ainii qu’ à une petite
figure , vêtue en fénateur, & trouvée à Vélétri .
au mois de juin 1767. Derrière le focle , on lit
CRUSCUS , qui eft le nom de la figure. Je fuis
poffeffeür de ces deux morceaux, dont le dernier
eft fait d’une feule pièce avec fon focle. La pratique
de peindre le vifage en rouge, étoit fingu-
lièrement ufitée pour les figures de Jupiter, ( Pline
l. 35, c. 45 , ) dont on voyoit une ftatue barbouillée
avec cette couleur à Phigalie, ville d’Ar-
qadie j mais on étoit aufli dans l’ ufage de peindre
en rouge le dieu Pan (Paufan. L B .f.ôB i, lin. ùlt.)
Les indiens pratiquent encore la même chofe à
l’égard de leùrs idoles. Délia Vaile Vuig. t. I 3 p.
28. (11 paroît que c’ eft de-là qu’eft venu à Cérès le
furnom de «fcOlNiKOllEE ( Pind. Olymp. 6. y. 116.)
aux pieds rouges-. »
T E R 587
u Les baS-reliefs de terre cuite, étoient employés
aux frifes des temples 5 ils fervoient aufli de
modèles aux artiftas. Pour multiplier ces modèles,
on avoit foin de les mouler dans des creux préparés.
La quantité de monumens qui nous ref-
tent d’un feul & même fujet, eft une preuve de
ce que j’avance. L’ouvrier avoit foin de retoucher
ces empreintes avec l’ébauchoir, comme
on le voit clairement. A ce qu’il paroît, on
avoit aufli coutume de fufpendre ces modèles
dans les atteliers, car il s’en trouve avec un trou
au milieu pour y paffer une corde. »
cc Les expofitions fe faifoient tantôt en Béotie,
tantôt dans les, villes des environs d’Athènes, &
nommément à Platée, aux fêtes célébrées à la mémoire
du fameux Dédale ( Dicaearch. Gcogr. p.
168.1. 15. conf, meurf. de fefi. grec: ) Ces modèles
avoient le double avantage , & d’exciter l’émulation
des artiftes dans ce genre de travail, & de
rectifier le jugement des connoiffeurs fur ces .fortes
d’ouvrages. L’on fait que la pratique de mo*
déler en terre , eft pour le ftatuiire, ce que la
facilité de deffmer fur le papier, eft pour le
peintre. Nous favoris que Jules Céfar, ayant envoyé
une colonie à Corinthe , pour^ faire, fortir
de ces cendres cette ville_jnfortunée, ordonna
de fouiller dans les décombres de ces édifices ,
&r d’en tirer d’abord tous les ouvrages de bronzé,
enfuite tous ceux en terre cuite : ce qui nous
prouve la haute eftime des anciens dans tous les
temps pour „ces fortes de productions. C e trait
d’hiftoire rapporté par Strabon ( Geogr. I. V I I I .
p. 381 .D .y , ne paroît pas avoir été bien entendu
jufqu’ ici. H eft .certain que fi Cafaubon,
fon interprète , s’étoit fait une jufte idée de la
narration de fon auteur, il n’auroit pas rendu
l’expreflion de Strabon par eejlacea opéra, & il
n’auroit pas induit en erreur/ Avec plus d’attention
, il aurait traduit l’expreflion grecque par
anaglypha figulina : car on nomme toreumàta tous
les ouvrages travaillés de relief. Cette eftime pour
les productions en terre cu ite , fe trouve encore
confirmée aujourd’hui par l’expérience : l ’on peut
établir comme une régie générale , qu’on ne
rencontre rien de mauvais dans ce genre, ce
que l’on ne fauroit dire des bas - reliefs en
marbre. »»
ce Le cardinal Alexandre Albani , a formé une
collection de quelques-uns dès plus beaux morceaux
de cette nature dans fa magnifique maifon
d-s campagne aux portes de Rome. Parmi ces
morceaux, on diltingue celui qui repréfente
Argo, travaillant au vaiffeau des argonautes,
&une autre figure d’homme ’, peut-être Typhis,
pilote du navire argo, avec Minerve, qui lui
enfeigne à attacher des voiles à une perche. Ce
bas-relief avec deux autres tirés du même creux,
avoit été trouvé inçrufté dans le mur d'imç
E ç e e ij