
pas quelques-unes des preuves què cet auteur
emploie , ni les témoignages qu'il Fait valoir pour
appuyer fon fentiment ; mais je fuis dans 1 opinion
que ces têtes de femmes adoffees dans les
médaill.s , font antérieures à la fondation de
Rome , & qüe les romains , ainfi que les grecs ,
les ont empruntées des étrufques. i° . Les dou- )
blés" têtes ne fe reflemblent pas fur les médailles
romaines 5 mais cela n’eft pas vrai pour les mo-
numens indiqués par les auteurs § 8c principalement
pour celui que je''rapporte. 2°.. Le boif-
feaii que Baudelot apperçoit dans 'les médailles
de la Sicile , 8c de la grande Grèce , ne fe trouve
que dans celles de Rhége. Celles de Syracufè,
citées par Goltzius , n’en ont point. 30 II avoue
que Mirabelle penfe que ces dernières médailles j
repréfentent Orthygie & Syracufe, fille d’Archias
de Corinthe , fondateur de la ville de Syracufe } .
ce qui fait un préjugé contre fon fentiment ».
» Ajoutons que Goltzius lui-même croit qu'elle
repréfente Alphée 8c Aréthufe, & il parie de déux
autres monnoies de Lemnos 8c de Ténédos 3
chargées de pareilles têtçs. 11 réfulte. de çes.deux
témoignages , que' les” romains les ont empruntées
des étrangers , & les pafîages fuivans, en
expliquant le monument gravé dans ma planche
5 0 , confirmeront' encore mon opinion.- Héro-
dien ne fpecifie rien (lib. IV. ) mais il décrit ces
têtes en général, lorfqu’il dit : In circuitu. unius
capitis duos dimidiatos vultus. Lucien ( In Jôvetra-
g£do.) , éclaircit davantage la matière : Mercuriales
imaguncuU duplices Ù utrinque ftmiles , ad
quamcümque illarum partem te verieres. A la vérité
il ne donne que l’idée d'un jeu de l’art ; mais il
prouve que les anciens emplovoic-nt plufieurs
fortes de têtes à ce badinage. Enfin, Grégoire d
Nazianze s’étend plus fur ce fûjét: Videre eft
quafdam effigies in. quibus. duplex eft exprejfa forma 3
fingaitibüs lias artificibits atqiie uni càpiti geminas
vtiltuum formas infculpentibus 3 ut eas fpectatores
- cum ftupore intueantur. Lucien & Grégoire d=
Nazianze , ne font aucune mention d'Acca ou de
- Flora 3 pour défigner mieux ce qu’ils décrivent.
La raifon eft que ces, images n’avoient pas ces
deux romaines pour objets} ainfi ce ne font point
les villes conquifes de- la Grèce qui ont emprunté
des romains j comme le prétend Baudelot, l’u-
fage des têtes adoffees ; mais ce font les romains
eux-mêmes qui ont pris ces fortes de types des
étruques , ou des grecs. »
« Cependant l'abbé Fraguier dit ^ que quelques
antiquaires croient que les têtes adoffees 3
que l'on voit fur les médailles de Ténédos, repré-
ientent Ténés , qui en étoit le fondateur, avec :
fa-belle-mère ou là fceur , dont il étoit amoureux.
Il eft vrai que Beger & Spanheim en ont.
parlé , de façon à pèrfuader que ç’ étoit leur avis.
Mais quelle preuve pourroient-ils donner fur un
fujet d’une antiquité fi reculée ? L'hiftôire meme
lemble indiquer que ce prince ne mourut pa's
furie trône. D'ailleurs les médailles que ces deux
auteurs ont citées 3 8c qui paroiffent avoir rapport
à un mariage heureux, font d’un très-bon goût
de defiln , 8c conftamment beaucoup plus modernes
que Ténès. »
« Il réfulte de ces différents avis, 8c de la
variété de ces mondmens , que les anciens n’ont
pas toujours’ éu les mêmes motifs pour les con-
làcrer à la poftérité , 8c qu’il eft prefque impof-
fible de déterminer aujourd’hui des raifons qui
les ont fait agir.- Mais il femble que Grégoire dé
Nazianze , dans le paffage cité plus haut,- ait
voulu décrire la belle tête rapportée fur ma planche
yo, de face & de profil > rien n’eft plus reffem-
blant, en effet, que le double vifage de cette
jeune perfonne ; on diroit que l’artifte a eu deffein
de repréfenter la jeunefle & la beauté mâle, 8c
d'étonner par . le rapport parfait de la reflem-
blance. En effet, ce doit "être là l ’objet de cette
figure ; car elle n’a aucun attribut qui ladiffin-
gue , & quelque attention que l’on apporte à l'examen
, on né peut y découvrir ce certain air de
convention , que des hommes de toutes les religions
donnent à leurs divinités. Peut-être a-t-on
•voulu repréfenter une mufe ? La grandeur des
mafles, la belle 8à noble fimplicité répandues fur
les vifa-ges jU’ eft point augmentée par le mouvement
des cheveux , ils font traités i avec une égalé
fimplicité. La coëffure eft fingulière, mais elle
eft fans art, & d’un goût qui s’accorde avec tout
le rêfte.oa'v
ce Avant, dit Caylus(Rec. 2. pl. 16, n°. 2.), que
de faire l’acquifition de ce vafe étrufque, j’avois eu
occafion d’examiner un bronze grec, qui préfente
deux têtes adoffees ,. parfaitement reficmblantesf
tk telles que l’on en voit fur les médailles: de
byraeufe. L’explication fe trouve plus haut, 8c
j’y renvoie le lefteur. Mais ce monument authentique
m’a encore plus perfuadé qu’on doit attribuer
aux étrufques l’invention des doubles têtes,
fous lesquelles on n’a reconnu pendant long-temps
que Janus. En effet, un grand nombre de monu-
mens, & en particulier celui que j’ ai fait graver
fous çe n ° ., ne laiffent aucun doute fur cette
opinion , & prouvent en même-temps la variété
avec laquelle les étrufques ont traité cette allégorie.
On voit ici deux têtes de femmes, dont
l’une eft belle , jeune, grande > 8c l’autre vieille ,
petite & ridée. »
« C e t ufage a été tranfmis dans la fuite aux
grecs 8c aux romains. Les premiers en traitant
ie même fujet fur les médailles de 'Syracufe &
d’autres villes , ont confervé la.coëïfure étrufque,.
connue pour marquer l’originé de cet.emblême,
ils ie font contentés d’ajouter dans la totalité..*
l ’élégance même la reflemblance des d eux-tétés'
entre-elles , ce qui pouvoir être contraire à l’intention
de l’inventeur , qui. aura -voulu exprimer
par cette allégorie "les cara&ères oppofés-,
ou la réunion de différentes vertus qui ne fe rencontrent
pas communément dans la même personne
».
» Janus , par exemple , pacifique & guerrier,
préfente deux idées, 8c peut être confidéré fous
deux faces. Dans le vafe que j’explique -, il eft
poffible que l’artifte ait voulu donner un emblème
moral , en nous peignant la différence de-la même
femme , jeune, belle 8c dans tour fon éclat,
ou chargée de rides & d’ années. Ces explica-
tionsvQj.it: leurs principes dans la nature, &. ne font
peut-être pas plus vraies. II. faut cependant convenir
que l ’efprit a toujours été en égale quantité
dans le monde} & l’on fait que les étrulques
ont communiqué aux autres nations , & en particulier
aux grecs, une partie de ces idées qu’on
voit groflièrement exprimées , dégroffies, corrigées,
développées , tk enfin perfedtionnées fur
les monumenis. des peuples qui leur ont fuccedé.
Montfaucon.yfrow. IL p. 311 );, a cité deux têtes
adoflees , dont l’une eft fur montée d’un difque,
&£ l’autre d’un globe.} je les crois égyptiennes,
& je les regarde comme l’image du foleil & de la
lune. Elles font de ronde-boffe, & portées fur
ifne .gaine. Je conviens qu’ elles ont le caractère
de la nation à laquelle il les attribue }
mais ce monument ne. pourroit détruire aucune
de mes idées : car on peut au moins affurer , qu’il
n’eft pas dans le goût le plus-généralement reconnu
des .’égyptiens. Je perfîfte donc dans mon
opinion , 8c je crois que -c’eft aux étrufques que
les autres peuples doivent l’idée, non-feulement
de Ja repréfentation de la double tête de Janus,
mais de toutes les autres têtes adoffees, qui fe
reffemblent, ou. qui different entre elles.»
- « Quoi de plus étrange, dit Caylus, ( ibidt. IV .
p. 19.) que la fingularité d’une fécondé tête ab-
folument pareille, & placée dans le côté oppofé ;
elle n’a aucun attribut que la plante perfea 5 d’ailleurs
le difque foutenu par deux cornes , ou plutôt
par le crqiffant, eft commun à l’une &c à l’autre
Si les égyptiens ont voulu repréfenter un
mafque , ou fuppofer une réalité dépendane de
quelque allégorie , c ’eft une particularité qui
nous eft abfolument inconnue, mais il réfultera
toujours de la vue de ce monument, que cette
nation a été la première qui ait traité les doubles
têtes que nous trouvons chez les autres peuples.
Je m étois perfuadé , & cette opinion étoit celle
de tous les .antiquaires qui m’ont précédé , que
jes etrufques étoient les inventeurs de cette allégorie.
Ce monument ancien chez les égyptiens,
Comme on le voit par cette figure , prouve que
le Janus & les .têtes adoffées des étrufques & des
grecs y ne font quer les copies-ou les applications
d’une idée'plus anciennement établie } par cemfé-
quent toût.ce que j’ai dit furies monumens de
cetté' efpèce , tombe de foi-même , & prouve
combien un exemple authentique fert à rectifier
des idées de cabinet. »
T ête double (On voit une ) fur les médailles
de Lemnos, de Ténédos. Ce n’eft point telle
de Janus.1
Deux têtes humaines, dont l’ une eft renvèr-
f é e , fervent de type aux médailles d’Iftrio-
polis.
T eTe dé marbre en médaillon. Voy e% la fin de
l’article de Néron.
TETES. ( Réunion de plufieurs. ) ( Extrait de
l'explication des . pierres gravées du palais royal. )
On connoît une,infinité de pierres gravées antiques
, qui offrent l’aifemblage bizarre de têtes
humaines & de têtes d’animaux , ou de têtes humaines
feulement, ou- enfin de têtes d’animaux,
les unès 8c les autres groupées 8c accouplées de
mille manières , portées, quelquefois fur des
pieds d’pifeaux , & tellement difpofées qu’on ne
peut, guère lès diftinguer qu’en cherchant le vrai
point de vue. . .
Ces compobtiens avoient-elles pour objet le
ridicule;? Contenofent-elles les allégories relatives:
aux vices , aux vertus, aux différentes pafi-
fions des hommes ? N’étoit-ce que des caprices'
ou des fantaifies d’artiftes ? Les. temps ou elles
ont été faites , font trop reculées , & les moeurs
des anciens trop .inconnues pour prononcer fur
cela. Tâchons cependant de rapprocher quelques
idées qui pourront fèrvir. à la folution de ce
problème.
L’arme du ridicule fut toujours redoutable :
il eft Confiant que les anciens s’en fervirent
plus d’une fois & ce ne fut jamais envain lorf-
qu’ils employèrent*^ des caricatures , lefquelles
confiftoient à rendre hideux les traits des personnes
qu’ ils vouloient ridiculifer. C ’eft ce que
veut faire entendre Cicéron dans fon traité de
l'Orateur, où il rapporte fon bon mot à un romaine,
qu’iLçomparoit au Gaulois, repréfenté
dans une attitude grotefque fur le bouclier de Marins
: Valde àuteni ridentur imagines qu& fcrè in defor-
mitatem , a ut. in aliquod vitium corporis ducuntur cum
fimilitudine turpioris : ut meum illud in Helmium
Manciam , jam cftendam cujusmodi fis } cum ilia
oftendè qu&fo : de mo eft ravi digito pitlum Gallum
in Mariano feuto Cimbrico fub novis diftortum ,
ejeUa lingica , buccis ftuentibus. (De orator. I I . 66).
Philoftrate nous apprend au (fi ( De vit. fophift.
lib. II. cap. 7. ) , que le fophifte Varus , fut fur-
F f i f ij