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TOILETTE des romaines. Munàus mulielris.
Dans les fièctes de luxe , leur toilette étoit fournie
de tout ce qui peut réparer les défauts de
la beauté , & même ceux de la nature., On y
Toyoirde faux cheveux, de faux fourcils, des
dents poftiches , du fard, & tous les autres
ingrédiens renfermés dans de petits vafes précieux.
Martial ( Lié. IX. epig. 18. ) décrit tout
cela plaifamment, en parlant de la toilette de
Galla :
Fiant abfentes 6’ tibi, Galla , coma, y
Nec dentés aliter ïj<uam ferica noèie reponas ,
Et lateant ccntum condita pixidibus ô
Nec tecum faciès tua dormitat ; innuis illo , '
Quod tibi prolatum eft ma ne fupercilio.
Les dames, romaines paffoient du lit dans le
bain ; quelques-unes fe contenaient de fe laver
les pieds, mais d'autres portoient plus loin l'ufage
des bains; elles fe fervoient de pierre. - ponce
pour s'adoucir la peau , & faifoiènt fuccéder a
cette propreté , les huiles & les parfums d Af-
fyrie. Elles rentroient enfuite dans les cabinets
de toilette , vêtues d'une robe où le luxe & la
galanterie avoient jetté leurs ornemens ; c.e-ft
dans cette robe qu'on fe laiffoit voir à fes amis
particuliers ,. & aux perfonnes les plus^ chères.
Entourée de plulïeurs femmes , on fe prêtoit aux
'mains qui favoient coëffer de la façon la plus
agréable. Lorfque Claudien nous repréftute V é nus
à fa toilette ; il la place dans un fiége brillant,
environnée des Grâces, & Souvent occupée elle-
même à compofer fa coëffure.
Cafariem tum forte Venus fubnixa corufco
Fingebat folio...................... . .
Une femme à fa toilette né perdoit point de
vue fon miroir , foit qu'elle conduisît elle-même
l'ouvrage de Tes charmes , foit qu'elle apprît à
régler fes regards , foit qu'elle étudiât les mines
& les airs de tête : omnes vultus ventabat , le
miroir devoit pofer à demeure.
Elles avoient aufiî des coèffeufes qui vivoient de
ce métier, & que les latins appelloient ornatrïces.
On lit dans Suétone: Matris Claudii -ornatrix , &
elles ont le mêmlPtitre dans les anciennes inf-
coptions, orn&tnx Livia, DomitU. Ces ôrnatrices'
ne prenoient pas foin feulement des cheveux,
mais du vifage & de l'ajuftement entier, d’où
vient qu’Ovide dit : Ornatrix toto corpore fetnper
erat.
La vanité des coquettes faifoit quelquefois un
crime de leur manque de beauté a leurs coëf-
feufes, & Ces fortes de femmes fe portoient'
contre elles à des violences , au lieu de s'en
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prendre â la Mfüfô. La toilette de queîqueS-Une* ï
félon Juvénal, n'étoit pas moins redoutable que
le tribunal des tyrans de Sicile. Quelle eft l’of-
fenfe que Pfécas a commife, dit ce poëte, en
parlant à une de ces femmes ? de quel crime eft
coupable cette malheureufe fille, fi votre nez
vous déplaît ?
. . . Qu&nam eft hic culpa puelU ,
Si tibi difpli'cuit nafus tuus ?
Le defir de fe trouver au temple d'Ifis, cette
déeffe commode qui préfidoit au rendez-vous &
aux myftères des amans, caufoit quelquefois
d'extrêmes impatiences.
. . . . . Apud ifiàcA potius facraria lent.
,Ainfi, par toutes ces vivacités ordinaires, auffî-
hien que par la nature du travail , par le
foin de coëffer , il y avoit des momens à fi ifîr ,
qui faifoiènt une néceflîté de trouver feus fa main
tout ce qui fervoit à l'ornement de la tête & à
la compofition du vifage.
Mais pour y mieux parvenir, le luxe multiplia
le nombre des femmes qui fervoient à U toileite ;
chacune étoit chargée d'un foin particulier ; les
unes étoient attachées à l'ornement des cheveux,
' foit pour les démêler ou pour les féparer en plusieurs
parties , multifidum dijerimen erat foit pour
en former , -avec ordre & par étage, des boucles
& des noeuds diffère ns : Dat varias nexus
6* certo dividit orbes ordine. Les autres repandoient
■ des parfums : Largos k&c neêlaris imbres irritât ;
toutes tiroient leurs noms de leurs differens
emplois.
De-là viennent, dans les poètes , les noms de
cofmeu , de pfecades, d[ôrnatrices. Il y en avoit
d'oifives & de prépofées uniquement pour dire
leur avis > celles-ci formoient une'efpèce de cen-
feil : Eft-in concilio matronà ; & la chofe , dit
Juvénal, étoit traitée aufii férieufement que s'il
eût été queftion de la réputation ou de la vie.
Tanquamfam* diferimen agatur
Aut anima.
On lit dans le livre des amours de Lucien,
que les dames employoient une partie du jour
à leur toilette, environnées de fuivantes, ôrnatrices,
vpiczatrices , dont les unes tenoiënt un. miroir,
d'autres un .réchaud, d'autres des baftinsl, &c.
I On voyoit für cette même toilette, toutes les drogues
d'un parfumeur; celle-ci pour netover.les
dents, celle-là pour noircir les fourcils, d'autres
pour rougir les joués & les lèvres, d'autres pour
teindre les cheveux en noir ou en blanc doré ;
indépendamment de to&tes fortes de parfums.
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Ces femmes, dit Clément d'Alexandrie , ne
ïcffembloient pas à la courtifane Phryné, belle
fans a rt, & fans avoir befoin d'étalage emprunté.
Les aiguilles d'or ou d'argent, les poinçons , !
les fers étoient d'un grand ufage à la toilette.
Les aiguilles différoient félon les divers arrange-
mens qu'on vouloit donner à fa coëffure , &
uelquefois même la dame romaine, à l'exemple
e Vénus, prenoit l'aiguille, & faifoit fa dif-
pofition. Jpfa caput diftinguit acu.
La manière de fe coëffer varioit perpétuellement
: « Vous ne favez ; difoit Tertulien , aux
« dames de fon tems., à quoi vous en tenir fur
É la forme de vos cheveux ; tantôt vous les met-
jj tez en preffe, & une autre fois vous les atta-
» chez avec négligence , & leur rendez la li-
» berté. Vous les élevez & les abaifiez, lelon
s» votre caprice ; les un:s les retiennent avec
99 violence dans leurs boudés , tandis que les
«o autres affrètent de les laiffer flotter au gré
*o des vents. »
Les fers dent elles fe fervoient ne reffom-
bloient pas aux nôtres , ce n'étoit tout au plus
qu'une grande aiguille que l'on chaüffoit, & les
boucles fe formoient en roulant alentour les cheveux
: Volvit in_ orbem. On les arrêtoit par le
moyen d’une aiguille ordinaire. 99 Ne crains point,
99 dit Martial, que les ornemens dont ta tête eft
99 parée dérangent les cheveux parfumés, l'ai-
»9 guille en foutiendra la frifure , & tiendra les
99 boucles en refpeéL >» L'union en était telle
qu’une feule boudç qui nfavoit pas été arrêtée
laiffoit voir du défbrdre dans toutes les autres.
Lalage, qui avoit vu que ce défaut fe trouvoit
..dans fa chevelure traita impitoyablement une de
fes femmes. ( Juvénal, fat. VI. )
* Les femmes prenoient pour l’ornement d'une
feule tê te , les dépouilles d'une infinité d'autres,
Souvent elles en ‘faifoiènt des ronds quelles pla-
çoient derrière la tê te , d'où les cheveux s'éle-
voient de leurs racines, & faifoiènt voir tout le
chignon, N une in cervicem rétro fuggeftum. Elles
donnoient quelquefois à leur coëffure un air militaire
, c'étoit un cafque qui leur enveloppoit
toute la tête, In galeri modum quafi vaginam capitis 5
oubien elles donnoient à leurs cheveux la forme d'un
bouclier : Scutorum umbilicos cervieibus adftruendo.
Elles avoient encore des coëffures toutes montées
faites par des hommés qui, dans ce genre de travail
s'acquéroient de la réputation. Fruftra peritijjimos
quofque firuciores cap ilia tara adhibetis.
Tertuliien veut encore intéreffer ici la délica-
teffe des femmes contre elles-mêmes; il ne comprend
pas que leur vanité puiffe affez prendre
fur elles pour ne pas leur donner de la répu-
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gnance à porter fur leur tête des dépouilles d’autrui,
de fur-tout des cheveux d'éfclavès. ,
Les romaines, à l'exemple des grecques ,
nouoient leurs cheveux tantôt avec de petites
chaînes d 'o r , tantôt avec des, rubans blancs ou
couleur de pourpre, chargés de jpierreries. Elles
fe poudroient d'une poudre éclatante ; elles pla-
çoient dans leurs cheveux des poinçons garnis
de perles, G'étoit de ces ornemens que Sapho
s’étoit dépouillée dans l'abfence de Phaon : « Je
99 n'ai pas eu , lui dit-elle, entre autre chofe , -
»• le, courage de me-coëffer depuis que vous
93 êtes parti, l’or n'a point touché mes cheveux >
” - pour, qui prendrai - je la peine de me parer •? ’3 a qui vvoudrai-je plaire ? du moins cette négli-
99 gence eft confirme à mes malheurs, car le feul
33 homme qui anime mes foins & ma vanité, eft:
93 loin de moi. »
Le vifage ne recevoit guère moins d’apprêts que
la chevelure. Les fards fur-tout fervoient à augmenter
ou à gâter les couleurs naturelles. Voyt^
FARD-, Rouge.
Les dames romaines avoient grand foin de leurs
dents, & neles lavoientd'ordinaire qu'avec de l'eau
pure, leurs cure-dents étoient faits de lentiftiue ,
mais quelquefois Part fe portoit jufqu'à tâcher de
réparer les traits. Celles qui avoient Ils y;ux
enfoncés, tâchoient de déguifer cet enfoncement
; elles fe fervoient pour cela de poudre
. noire , Nigrum pulverem que exordia oculorum
producuritur : on la faifoit brûler, le parfum ou
la vapeur agiffoi.t fur les yeu x, qui s'ouvroient
par - là & paroiffoient plus fendus. Oculos fuligine
porrigunt..
Voilà quelques-uns des myftères de la toilette
des romaines. Les hommes efféminés avoient 'ai.?fit
la leur. « L’on tenoit le miroir d'Othon comme
» une glorieufe dépouille remportée fur fon en-
33 nerai ; le prince s'y miroit tout armé , lorsqu'il
jj commandoit qu’ on levât les drapeaux pour aller
39 au combat. C'eft une chofe digne d’ êcre placée
» dans les annales, que la toilette d'un empereur
si qui fait partie de fon bagage 99. (D . J.)
TOISE fur les médailles. La toife marquée de
les divifions ou pieds défigne une nouvelle color
hie, pareè qu'on avoit toîfé l'enceinte &s les champs
qui lui étoient attribués. Cette toife fe trouve
quelquefois accompagnée d'un boiffeau qui défigne
le bled qu'on avoit diftribué pour commencer
à enfemencer les terres.
TOISON d'or. C'étoit la dépouille du mouton
I qui tranfporta Phsixus & Heilé dans la Colchide
le dont la conquête fut l'objet du voyage des