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îerpent,qui jette quelques-uns de ces reptiles pour
embarrafûr les roues & effrayer les courhers.
C'efl: ainii que Maffei décrie cette figure , qu il
prend mal-à-preoos pour Plutan & pour Ence-
lade , gémiffant , fclon Claudien , du poids de la
divinité, ajouté à celui d'Etna dont il eft déjà
accablé. Mais le favanr \Vincke'man y reconnoît
avec raifon Neptune (Pierres de Stoch , pag. io j ,
n; 452.) , enlevant Amymone, & le triton le précède
naturellement.
Un jafpe de la Chauffe nous offre le même
enlèvement* Pluton y porte pour la première
fois une couronne radiée- M r ure en pécafe
avec des ailes aux pieds & le caducée , conduit
les chevaux. Une corbeille eft renverfée au-def-
fous du char , mais on n'y voit point de ferpens.
(N. 93.) Ces animaux ayant des aîles ^ traînent
% le char du raviffeur fur une calcédoine de Eber-
mayer. (Pag. 27.) Le dieu eft nud, & tierit un
petit feeptre de la droite. Proferpine évanouie ,
eft foutenue par un homme cafqué, oucoëffe avec
un pétafe mal exprimé. Hercule , l'épée à la main 3
femble hâter la fuite du raviffeur- (Montfaucon. I ,
pL 4 1 .) C e héros, armé de famaffue & couvert
de la peau du lion de Némée, précède le char ,
au-deffus duquel voltige l'amour. Sur la ceinture
d’une ftatue décrite par Aléander , Minerve marche
derrière le char , & femble vouloir fuivrë fa
compagne Proferpine. Un panier de fleurs eft ren-
verfé au > bas. On obfêrvera foigneufement que
Pluton parcourt dans ce deffin les lignes du
zodiaque 3 comme Sérapis dans les Abraxas.
M . Dupuis remarque aufli que Proferpine & le
char répondent à la vierge & à la balance, lignes
auxquels la couronne boréale 3 dont Perféphone
ou Proferpine eft l'emblème , répond dans le ciel.
Cùpidon fe trouve aufli fur un marbre publié
par Bonami, mais il tient les rênes des chevaux.
-Les étrufques ( Muf. Guarnacci. Gori tab-, 5 ,
n ..i.y ont confervé fidellement la mémoire de ce
rapt, qui eft fouvent repréfenté fur leurs monu-
mens. Une furie conduit les chevaux fur un vafe
étrufque du cabinet de Guarnaccio > & ceux-ci
foulent un monftre tenant une épée & reffemblant
aux tytans. Un tombeau de marbre des plus pté-
cieux qu'âyent fculpté les étrufques ( Infcript.
Etruf.Gori , tom. I I I , tab. 2f.)> place les parques
auprès du char de Pluton. L'unë d'elles
pleure , & élève les mains ; une autre s'efforce
d'ariêcer Minerve , qui fuit le raviffeur. Sous les
chevaux eft renverfée une femme drapée , qui
tient une corne d’abondance, & élève le bras
droit comme pour demander du fecours. Gori
croit y reconnoître la terre ou Cérès. Le côté
droit de ce beau monument offre la porte de l’enfer,
Orcï janua 3 & Mercure avec le caducée condui-
fant i’ame d'un mort qui eft enveloppée d’une draperie.
On voit fur le côté gauche Hercule qui en
tire une du t a r t a r e & qui abaiffe le iinceuil dont
fa tête étoit couverte. La même figure de Cércs
eft r.enverl’ée à terre fur lin autre ma bre ét:ufque.
( Muf. Etrufc.Gori, tab. 78.) On voit au, rè$
d’elle le cafque de Pluton, dont les courfiers font
conduits par une furie ailée, tandis qu'un autre
volant au-d»flus du char porte le flambe :u de
1 hyménée. Mercure fuit L dieu de& enfeis , 8c
fou tient fon époufe évan<;iiie. On voit e •fi” un
griffon fculpté fur le char. Cet emblème du
nous apprend que les étrufques avoient .de Pluton
la même idée que les égyptiens , quoiqu’ils le pei-
gniftent fouvent jeune & fans barbe.
C ’c ft ainfi (Dem’ftori Etruria R<galis3 tab. 91. )
qu’il eft représenté dans un bronze étrufque, fous
l’ embiême de Jupiter. Il tient un foudre qui eft
formé comme un dard à trois pointes. C e foudre
èft perpendiculaire, tandis qu'il eft oblique dans
la rsain des autres Jupiter. (Muf. Etrufc: , tom. I ,
pag. 76 ) Gori reconnoît à cette marque Jupiter
Summar.us , auquel Pline attribue les tonnerres
nocturnes & fôuterreins. Ceux-ci vont ordinaire-
menten ligne droite, félon l'opinion vulgaire (Erco-
lano. Bron-fi, tom. I I , pag. 298.) j mais la foudre
qui éclate pendant le jour, ferpente & lillonne les
cieux.
Il eft rare de trouver Pluton fans barbe j car il
eft ordinairement repréfenté en Sérapis, dont la
tête eft la. même que celle du Jupiter des grecs»
Cette tête eft coëffée avec le boiffeau , un feeptre
eft placé dans les mains du Sérapis-P/aro/i, &
Cerbere l’accompagne. On le voit aufli .defliné
auprès du lit d’un malade fur un marbre de Spon $
& fur un autre monument dont parle Montfaucon
(Suppl. 2 , pag. i y i . ) , avec l ’infcription iis Zi»9
'zûftvxts , il n’y a qu'un Jupiter Sérapis. Mais
aucun des monumens .publiés jufqu’à ce jour n’a
offert Pluton tenant des clefs, quoiqu'on lui donne
conftamment cet attribut. (Paufan. in Éliacis.')
Nous croyons cependant le vojr dans la main gauche
d’un homme qui eft gravé fur un lapis de la
DaByliotkea de Gorloeus.(Tom. i 3 n. ^43.) Cette
figure eft prefque nue ; elle porte un cafque , tient
un feeptre de la droite , & de la gauche un inftru-
ment reffemblant à une clef antique. Gronovius ,
dans l ’explication de cette pierre , reconnoît ici
Mars } mais il ignore , de fon propre aveu , quel
eft cet attribut extraordinaire. Pour nous , après
l’avoir comparé ave.cdes clefs antiques confervées
dans les cabinets, nous avons trouvé une grande
reffemblance entre l’un & les autres. Le cafque ,
d'ailleurs , appartient autant à Pluton qu’à Mars j
& l’on n’a prefque jamais vu Mars fans épée ou
fans parazonium.
Nous terminerons ces recherches fur ie foiïve-
rain des ombres , par j ’hiftoire de fon culte. Plutarque
dit qu'il y a voit un oracle ( De Ifide & Ofi-
ride.') à Canope , fous le nom de Sérapis. Mais la
diftinétion qui a été établie plus haut entre Sérapis
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•Pluton & Sérapis d u N il, fait attribue? eet ôracle
au dernier, qui avoit à Canope un temple célébré.
Il ne paroît pas que les grecs ayent eu aucun oracle
de ce dieu , à moins qu'il ne partageât celui
des mânes , qu'Orphée alla consulter dans la
f lu fpretie. C ’eft peut-être de celui là que parle
lfaac Tzetzès. ( Comment, in Cajfandr. ) On ne le
confultoît, félon ce commentateur, que ia nuit
à la lueur des lampes. L'oracle répondoit par des ;
tonnerres , que les prêtres expliquoient à leur
Ils ne craignoient pas d’ être démentis furUe^
champ ; car on ne confultoît ordinairement leur
divinité que fur le temps où l’on devoit mourir.
( Theolog. Gentil. Daniel Ckafenu. ) On regardoit
en effet le roi du Tartare comme poffeffeur des
régiftres du deftîn.
C e dieu avoit un temple à Pylos chez les Ma-
cyftiens. (Strabon, lib. V I I I , 1 $7*) O n |_u* en
avoit élevé un autre dans l’ancienqe ville d Her-
mione , fous le nom de Kxvpïvv. Les hermioniens
avaient aufli revêtu de murailles , auprès d’Etho-
nium ( Paufan. Corinth. 2 f l . ) , une caverne par
laquelle on croyoit qu’Hercule avoit arraché Cerbere
du Tartare. Non loin de là, près du fleuve
Chimarrus , fe voyoit une pareille enc'flnte qui
avoit fervi d’entrée aux enfers pour le raviffeur de
Proferpine. Les éléens lui rendirent un culte particulier.
Ils n’ouvroient qu’une fois dans l’année
le temple & l’enceinte qu'ils lui avoient confa-
crés. C'étoit le feul jour où l’on pouyoit y entrer,
& fon pontife feul en avoit le droit. Paufanîas
(Eliac. 2 , pag. 392.) en apporte une raifon myf-
tique. Les éléens donnoient par-là à entendre ,
félon lu i, que les enfers ne s'ouvroient qu’une
fois pour chaque mortel Un fait hiftorique -avoit
donné' lieu à cette vénération des éléens pour
Pluton. Etant allés au fecours de Pylos dans l’Elide,
qu'âfîiegeoit une armée conduite par Hercule ,
Je dieu des morts fe joignit aux éléens en haine
du fils d'Alcmene, qui l'avoit bleffé au fiège de
Troy.e. Mais ce héros lui fit encore éprouver la vigueur
de fon bras devant Pylos. Les romains imitèrent
la coutume des éléens dene laiffer le temple de
Pluton ouvert que dans le temps de fes folemnités.
Myeenes étoit célèbre par les honneurs quelle
rendoit au même diéu. Paufanîas parle feulement
dô quelques ui.es de fes ftatues placées dans les
environs de Myeenes (Corinth. , pag. 1 16.) ; mais
un des auteurs des Priapées dit expreffément:
Dodona eft tibi , Jupiter , facrata ,
Junoni Samôs , & Myceha Diti.
A Coronée , auprès d'Hélieon, on avoit élevé
Aine ftatue de Pluton auprès dé celle de Minerve 3
& cela, dit Strabon , à caufe d'une raifon myfti-
-que qu’il ne rapporte pas» Nous avons déjà vu
Plutus à côté de Minerve- Etgané ou laborieufe.
Ne feroic-ce pas ici la même allégorie, puifqu’çn
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cotifondoit Plutus avec Pluton ? Le travail, fource
des richefles, feroic alors le mot de l'énigme.......
La ftatue qu'Epiménide lui éleva dans l’Aréopage,
ainfi qu’à Mercure & à la Terre , n'avoit rien de
repouflant. Paufanîas l’aflure dans la defeription
du temple des furies qui les renfermoiei f. On
obligeoic de facrifier en aftion de grâces devant
. ces ftatues , tous ceux qui ayant été acculés de
crimes capitaux , fortoient abfous de l’Aréopage.
(Attica , pag. J2.)
Il eft impoflible de prendre ailleurs une idée
plus exa&e du culte exigé parle roi des enfers ,
que dans le paffage fuivant de la vie de Pythagore
(Cap. 17 .) , par Jamblique. »La mode s’étant
» introduite à Crotone de faire de foniptueufes
» funérailles & de riches tombeaux , un des dif-
» ciples du philofophe parla ainfi au peuple :
» Crotoniates , j’ai appris du maître, lorfqu’il
» nous inftruifoit fur le culte des dieux , que les
» divinités céleftes tenoient compte de la pitié des
» hommes fans examiner le nombre des vidîmes
» & des facrifices. Les divinités inférieures, au
» contraire, étant d’une nature moins relevée ,
» aiment, les feftins, les danfes, les .friandifes &
» les libations continuelles. Le nom même de
» Pluton n'a pas d’autre origine que cette avidité
»? pour les faftes & les richefles. »?.
Cette opinion dirigeoit les facrificateurs. Médée
(Orphei 958.) , dans les argonautes, voulant rendre
les dieux infernaux favorables à Jafon , élève
un fuperbe bûcher, & immole trois agneaux
noirs que Jes flammes conlument enfuite. Orphée
dit de lui même dans cet ancien pr.ême (Ib.i 309.),
dont on l'a cru l'auteur, qu’au retour de l’expédition
, il fe fépara des autres argonautes. Couronné
de branches d'arbriffeaux, il fe rendit au promontoire
de Ténare, pour y offrir un facrifice d’actions
de grâces aux dieux puîffans , qui tiennent
fous leur empire les vaftes régions du Tartare. La
couleur noire étoit affeéfcée aux victimes qu'on leur
offroir. Lyccphron- ( Alexandra 1 ! 88- ) & Stace
( Thêbaïd, lib. VIII. ) en font témoins. Pluton
aimoit à voir brûler fur fes autels des taureaux &
des chèvres. ( Æneid 6 . )
Tum Jlygio régi nollumas inchoat. aras ,
Et folida imponit tautorum vifeera flammis.
Horace dit de lui (Od. 14, lib. I L ) : •
Non f i trecenis , quotquot eunt dies ,
Amice , places , iilacryniabilem
Plütona tauris.
Un commentateur affure que les anciens imma-
Ioient la chèvre à Pluton , parce que cet animal a
toujours la fièvre avec redoublement, efpèce de
maladie qui, félon lu i, conduit au royaume fom