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argonautes. Voye^ Bélier , Jason , Médês
N éphélé , Phrixüs .
La fable varie fut l’origine de ce bélier prodigieux.
Les uns difent que. , dans le moment où 1 on
alloit immoler Phrixus 8c Helîe , Mercure donna
à Néphélé leur mère un bélier d’o r , auquel le
dieu avoir communiqué la faculté de traverfer les
aies ; 8c Néphélé donna cette voiture à fes deux
enfans , pour fuir 'l'horrible facrifice que leur ma -
râtre étoit prête à confommer. Lorfqu Hellé fut
parie , Phrixus , accablé de laffitude & de chagrin,
fit aborder fon bélier à un cap habité par des barbares
, voilïns de Colchos , 8e s’y endormit. Les
hibitans l’ayant v u , fe difpofoient à le faire mourir
, lorfque fon bélier le réveilla en le fecôuant,
& lui repréferrta avec une voix humaine le danger
auquel il étoit expofé. Phrixus remonta fur lui , .
arriva à Colchos , immola fon bélier à Jupiter-
Phrygien y le dépouilla de fa peau qu’ il pendit à ,
un arbre dans un champ confacté à Mars.
D’autres difent que Phrixus logea un jour chez
Dipfaque, fils de Phyliis , fleuve de Bitnynie 3 8c
d’une nymphe du pays 5 que là il offrit fon bélier
en facrifice à Jupiter - Laphyfo'en , furnom Ciré
d’ une colline du pays , où ce dieu avoit un
temple..
Suivant d’autres, dans le temps qu’ Ino. méditoit
la mort de Phrixus & d’Hellé , oh envoya le premier
choifir la plus belle brebis des troupeaux du
r o i , pour l’offrir en facrifice à Jupiter. Pendant
qu’il la cher choit, Jupiter donna la parole à un
mouton qui découvrit à Phrixus tous les deffeins
de fa marâtre , lui confeilla de s’enfuir avec Hellé
fa foeur , & s’offrit pour leur fervir de Voiture.
L’offre fut acceptée ; 8c quand Héilé tomba dans
la mer, le mouton paria encore pour raffurer
Phrixus y 8c lui promettre de le faire arriver à
Colchos fans accident $ ce qui fut effectué. En
reconnoiffance, le mouton fut immolé à Jupiter ,
d’autres difent à Mars, d’autres à Mercure. La
dépoùille fut pendue à un arbre , dans le champ
de Mars , 8c Mercure la convertit en or 5 en forte
q u e , félon les uns, la toi fon étoit d’or dès le principe
; fuivant d’autres elle fut changée dans
ce métal , après que le mouton. eut été dépouillé.
Enfin j une autre tradition portoit que l’animal
étoit couvert d’or au lieu de laine, dès fa naif-
fmee y 8c qu’il étoit le fruit des amours de Neptune
métamorphofé en bélier , & de la belle
Théophane, metamorphofée en brebis.* comme on
l’a dit à l’ article Théophane. Neptune avoit
confié ce bélier miraculeux à Mercure , qui en fit
préfent à £3éphélé , pour procurer la fuite à fes
enfans 5 8c Phrixus 3 après s’en être fervi , l’immola
^ & en confacça la toifon au dieu Mars ou à
Mercure.
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Au rafle , tous les mythologues fe réunifient
pour dire qu’après le facrifice» l’animal fut enleva
au ciel, où il forme la conftellation du bélier , l’un
des douze fignes du zodiaque.
Voici les explications mytho - agronomiques
de la fable de la toifon d‘or y ce font les feules
Yraifemblables.
Selon Dupuis 3 dans la fable de Jafon 3 ce génie
folaire ne venoît à bout de conquérir la toifon
(for ou le bélier célefte , qu après avoir triomphe
d’ un taureau qui vomiffoit des feux | c’eft-a-dire,
qu’ à l’inftant où les étoiles du belîer celefte fe
dégageoient des rayons fblaires y 8c commençoient
à fe lever héliaquement vers le jour de l’équinoxe,
il falloir pour cela que le foleil fût déjà lui-meme
dans le taureau.
« Les argonautes , dit Rabaut dô Saint-
Étienne, font les p$rTonnages du firmament ^qui
courent après le bélier jufqu’au temps où il
remonte fur l’horizon : le pays, où font le bélier,
le ferpent, les taureaux, le fleuve, la
coupe & le navire , eft celui où fe trouvent
le ferpentaire, le bouvier, la vierge, le,centaure
, 8c où faufilent les quatre vents qui font
naviguer le vaifleau > 8c ce pays, c eft le Ciel.
Maintenant, je vais Cuivre fur la terra nos prétendus
voyageurs : ils vont en Colchide, ils
s’embarquent à Pagaze, pafifent à Lempos, tra-
verfent le Bofphore , entrent dans la mer Noire *
8c arrivent fur les bords du Phafe. C ’ eft la que
, la fille d’Æétas, la célèbre Médée, dévient
amoureftfe de Jafon. On fait comment cette magicienne
célèbre lui apprit à foumettre les taureaux
, à tuer les guerriers armés de lances, à
affoupir enfin le dragon vigilant qui gardoit fur
l’arbre la toifon d’or qui y étoit fufpendue » .'' ;
« Dans ce voyage moitié célefte & moitié
terreftre , où les grecs avoient tout mêlé , il fe
pafla quelques aventures aftronomiques : jë Vais
! en détacher une qui eft comme le préambule du
fujet, U qui regarde un héros qui abandonna
bientôt les argonautes 5 c’eft le grand Hercule ,
l’Hercule agenouillé que l ’on voit encore .dans
notre fphère. En côtoyant les bords de lajPKry-
gie , les argonautes virent une belle prineefle
attachée à un rocher pour y être la proie d’ un
monftre marin : ce n’ eft pas Andromède, e’ eft
Héfione, fille de Laoméaon ; Hercule la délivre
& tue le monftre, 8c il fait époufer Héfione
à Télamon , que nous avons vu être le
Bouvier : A ja x , fils imaginaire ; de ce prince
imaginaire., fe trouva , comme on fait, à la
guerre de Troie. Après cet exploit, arrive la
trifte avanture du jeune Hylas ou du yerfeau,
qui fe noya. Hercule le chercha fur les bords
4e la Phrygie ; il fit retentir les forêts 8c les
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monts du trifte nom d’Hylas ; mais l’infortuné }
jeune homme avoit difparu dans les ondes, 8c J
Hercule défefpéré renonça à la conquête de la
toifon ».
«Les argonaute« fe remirent en mer : on leur
fait côtoyer les deux bords d'Afie & de Grèce 5
ils paftent à Cynique, à Byzance 3 où’ ils ont
affaire à Cy^icus 8c à By^as, qui ne font que
■ les noms du pays perfonnifiés , 8c arrivent enfin
en Colchide, où ils trouvent des rois de la
même nature. C ’ eft ici que je vais m’arrêter
avec eux, 8c faire voir que les perfonnages de
cette hiftoire ne font que ’les pays , les fleuves.,
les îles, les villes perfonnifiés. 11 eft néeeifaire,i
pour le prouver, de tracer un tableau dé la géographie
du pays »,
. cc Au fond de la mer Noire, •& dans fa partie
occidentale, eft fituée la Colchide, pays
célèbre dans l’antiquité par les poifons que
-produifoient fes marécages. Ils furent deffé-
•chés dans des temps poftérieurs j mais aujourd’hui
que ce pays eft négligé, les eaux y crou-
'piflent de nouveau, 8c rendent ce climat extrêmement
mal fain. Les anciens peignoiens les
contrées peftilentielles fous les emblèmes de
ferpens & d’auttes animaux, venimeux , qu’en
effet elles produifent en, grand nombre. Le marais
de Lerae, defféché en été étoit repréfenté
fous la figure d’un ferpent tué par Hercule :
mais il fe rempliâoit de nouveau en hiver , la
tête du ferpent renaifiait de nouveau 5 il n’y
eut plus de remède que d’y mettre le feu. Le
ferpent- Python , , tué par Apollon , & le ferpent
Typhon tué par Orus, défîgnent le deffé-
chement des eaux après les pluies de l’hiver,
ou après le déluge. La Colchide étoit maré- i
cageufe, elle produifoit a-uffi des plantes veni- j
meufes, & c’eft de-là que nous eft venu le !
nom de Colchide. On difoit , félon l’ufa^e
qu’elle devoit le fien à Colckus ».
« A l’orient de la Colchide étoient la Médie i
& la Perfe 5 que nous verrons bientôt pêrfonni-
fiees fous les noms de Médée 8c de Perfeis.
Plus près , & vers l’Orient feptentrional j étoit
la Cixcâflie ^011 la campagne de Circé y ( Circ&i
campi. Voyez Dionys. A fer. ) le Phafe l’arro-
foit 8c fe jettoit? dans l’Euxin. Dans les temps '
r?Ci1Cu-V ce canton, qui Difoit partie de la
Colchide, étoit couvert de'marais, & predui-
|oit auflî des poifons: , Hippocrate rapporte que
ies habitans, qui vivoient au milieu des rofeaux
& dans un pays mal fain, & qui fe nourif-
loient de fruits, acerbes étoient pâles & bouffis
( iüppocr. lib. de acre3 aquis éf loris,)cité par
Hoffmann-, Lcxicon , au mot P h a s t s . ). A
embouchure du Phafe , étoit une île nommée
■ 8 dont la yille capitale étoit confidérable :
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Æetas , ou le roi d’Æa régnoit dans cette île. Un
peu plus bas, 8c au Midi du Phafe, fe jettoit dans
l’Euxin le fleuve Ab far us ou Abfyrtus : fon cours
étoit très-rapide, 8c il déchiroit les rivages,
qui, fépares ainfi du continent comme des membres
arrachés, étoient difperfés fur la c.ôte.
Abfyrtus■ veut dire en effet déchiré, découfuÿ
c ’étoit le nom phyfique des îles Al> fort ides ;
8c ce nom fut donné à diverfes îles fituées à
l’embouchure du Rhône 5 à celles d’un autre
fleuve Abfyrtus en îllyrie : c’eft ainfi que dans
la Myfie, une ville portoit le nom de Tomos,
coupure, }?arce que la rivière avoit coupé le
terrein où cette ville ' était bâtie. Enfin au
Nord de la Colchide étoient les feythes * ou
farinâtes , dont quelques-uns portoient les noms
à'Heniochi, les charders, parce qu’ils fe fer-
voient de chars pour tranfporter de lieu en
lieu leurs bagages, comme font encore aujourd’hui
les tartares ». ;
« Ces pays, où l’on fit aborder les argo-
i nautes furent perfonnifiés , : félon l’ufàgfe des
anciens temps. La Circaffie fut C ircé, Æâ fut
Ætas j la Perfe, Perféis & Perféus ; la Médie,
Médée y l’Àbfyrtus, Abfyrte fon frère j la Colchide,
Çolchus 5 le Phafe fut. le roi Phafis j
J’île d’Æa fut Æa fa fille 5 êc Circé époufa le
roi des farmates , qu’elle empoifonna, après
quoi elle s’enfuit dans un char ».
/GC qualités phyfique s des pays devinrent
necelïairement, .dans ce langage, les qualités
morales des princes qui figuroient ces pays.
Ainfi Médée fut une magicienne, 8c Circe fus
une empoifonneufe ».
6C Enfin le voifinage de ces pays fut repfé-
fenté comme, une parenté j . tp us ces fleuves,
8c toutes ces^ contrées font parens les uns des
autres5 tour-à-tour pères, mères, frères, où
fils , a fans aucun ordre de filiation ré e lle , il
paroît évidemment que ces mariages font allégoriques
comme les .perfonnçs. Ces deux allégories
fe fervent Réciproquement de preuve 5 &
ces rois divers Ce fervent auffi de pères tour-à-
tour ou ayant chacun plufiéurs p ères , il eft
évident, comme je l’ai prouvé ailleurs, que
dans^ le ftyle figuré, le voifinage s’a-ppellait pa- '
renté, comme les fleuves & les villes étoient .
des hommes 8e des femmes ».
Quoique ces explications paroiffent les feules
vraifemblables , je ne me crois pas difpenfé
de rapporter les autres 3 afin de laiifer le choix
aux lecteurs.
Di-odore de Sicile çroyoit que c’étoit la peau
d’un mouton que Phryxus avoit immolé, 8c
qu’on gardoit très-foigneufement à caufe -qu’un