
intervalles plus petits ; & ces intervalles pre- ;
miers, qui font les élémens du fyflèmc , s'appel- i
loient chez les Grecs diaftêmis.
Les anciens divifoient les fyffiêmes en fyfîmes
particuliers & en fyfiimes generaux. Ils appel-
loient fyficme particulier tout compote d'au moins
deux intervalles tels que loue ' 1 odtave, la
quinte , la fixte, & même la tierce.
Les fyjiimes généraux qu'ils appelaient plus
communément diagrammes , étoient * formes par
U Comme de tous les fyftêmes particuliers * 8c
comprenoient par confequent tous les fons em ployés
dans la mélopée. C ’eft de ceux-là quil
me refte à parler dans cet article.
On doit juger dss progrès de l’ancien fyfiême
par ceux des inftrumens de mufîque deftinés a
1 exécution j car cesN inftrumens accompagnant
la voix , 8c jouant tout ce qu elle chantoit ,
dévoient néceïlairement rendre, autant de fons
différens q uil en entre dans le fyfiême. Or les
cordes de ces premiers inftrumens fe touchoient
à vuide ; il y falloit donc autant de^ cordes
que le fyfiême renfermoit de fons j & c eft ainfi
que dès l’origine de la mufîque s on a pu , fur
le nombre des cordes d e T infirmaient 3 déterminer
le nombre des fons du fyfiême.
Tout le fyfiême des Grecs në fut donc d’ abord
comoofé que de quatre cordes qui formoient
l’accord de leur lyre ou cythare. Ces quatre
fons formoient 3 félon quelques-uns 3 des degres
conjoints j félon d’autres , ils n’étoient pas diatoniques
j mais les deux extrêmes fonnoient
l’octave , &- les deux fons moyens la partageoiènt
en une quarte de chaque côté , & eh un ton
. dans le milieu, de cette manière ;
Ut-trite diezeugmenon ,
5 o/-lichanos mefon ,
Fa parhypate mefon 3
Ut parhypate hypaton.
C e ft ce que Boëce appelle le tétracorde de
Mercure.
Ce fyfiême ne demeura pas long-temps borné
à fi peu de fons. Chorébe| fils d’Athis , fo r
de Lydie 3 y ajouta une cinquième cordé s
Hyagnis une fixième 5 Terpandre une feptième ,
à l’imitation du nombre des planètes 5 8c enfin
Lychaon de Samos, la huitième.
Voilà ce que dit Boëce 5 mais Pline témoigne
que Terpandre ayant ajouté trois cordes aux
quatre anciennes , joua le premier de la cithare
à fept cordes 3 que Simonide y en joignit une
huitième 3 8c Timothée une neuvième. NiCo-
maque le Gérafénién attribue cette huitième
corde à Pythagore , la neuvième à Théophrafte
de Pierie , puis une dixième à Hiftyée de Colophon
y 8c une onzième à Timothée de Mi-
let , 8c c. Phérécrate , dans Plutarque fait faire
au fyfiême un progrès plus rapide > il donne douze
cordes à la cithare de Mélanippide , 8c autant
à celle de Timothée î Sc comme Phérécrate
étoit contemporain de ce muficien , fon témoignage
eft d’un grand poids fur un fait qu il
avoit 3 pour ainfi dire , fous les yeux.
Mais comment pourroit-on à jm certain point
s’ affurer de la vérité parmi tant de contradictions
, foit entre les auteurs, foit dans la nature
meme des faits qu’ils rapportent ? Par exemple ,
le tétracorde de Mercure donne évidemment
l’ oCtave ou le diapafon. Comment donc s’ eft-il
pu faire qu’après l’addition de trois^ çordes ,
tout le diagramme fe foit trouvé diminue d un
dégré 8c réduit à un intervalle de feptième ?
C ’eft-pourtant ce que font entendre la plupart
des auteurs anciens , 8c entr’ autres , Nicomaque
, qui dit que Pythagore trouvant tout le.
fyfiême compofe feulement de deux tétracordes
conjoints 3 qui formoient entre leurs extrêmes
un interv aile diffonnant, il le rendit confirmant
en divifant ces deux tetracordes par l’intervalle
d’ un ton 3 ce qui produifit l’ oCtave.
Quoi qu’ il en fo it , c’ eft du moins une chofe
certaine que -le fyfiême des Grecs s augmenta
infenfiblement tant en haut qu’en bas 8c qu il
atteignit, 8c paffa même l’étendue du difdia-
pafon , ou de la double oCtave ( le difdiapafon.
eft à-peu-près la plus grande étendue que puifie
parcourir la voix humaine fans fe forcer j il y
en a même afifez neu ‘qui 1 entonnent bien pleinement.
Voye^ Uia s p a so n ) > etendue qu ils
appellent fyfiema perfeftum 3 maximum 3 immuta-
tum 3 le grand fyfiême , le fyfiême parfait 3 immuable
par excellence 3 à caufe qu’entre ces
extrémités , dont l’intervalle formoit une con-
fonnance parfaite, étoient contenue« toutes les
confonnances {impies, doubles, directes 8c reo-
verfées , tous les fyfiêmes particuliers , 8c félon
eux-les plus grands intervalles qui puffent avoir
lieu dans la mélodie.
Ce fyfiême étoit compofé de quatre tétracor-
des , trois conjoints & un disjoint, 8c d un ton
de plus qui fut ajouté au-deflous du tout pour
achever la double délave , d’où la corde^ qui la
formoit prit la- nom de' proflambanomène| ou
ajoutée. Cela n’auroit dû produire que quinze
fons dans le genre diatonique î il y en a voit
pourtant feifce. C’ eft que la disjonction fe fai-
fant fentir tantôt entre le fécond 8c le tromeme,
tantôt entre le troifième tétracorde 8c le qua^-
trième : il arrivoit dans le premier cas , qua-
près le fon la 3 le plus aigu du fécond tétracorde
, fuivoit en montant je fon f i , qui com-
mençoit le troifième > ou bien 3 dans le Tecond
cas » que ce même fon la commençais lm-meme
9 * le
le troifième tétracorde étoit immédiatement fuivi
du fi bémol j car le premier degré de chaque
tétracorde étoit toujours d’un femi-ton. Cette
différence produifoit donc un'feizième^tqn, à
caufe du f i naturel qu’on avoit d’ un c o t e 8 c
de l’ autre, le f i bémol. Ces feize tons etoient
repréfentés par dix-huit noms , c’eft-à-dire, que
Y ut 8c le r e étant, ou les deux derniers fons,
ou les fons moyens du troisième . tétracorde , ■
félon ces deux différens cas de disjonction, on
donnoit à chacun de ces deux fous, des noms
qui marquoient ces dîverfes circonftances.
Mais comme le fon fondamental varioit félon
le mode , , il s’enfui voit -pour chaque mode
dans 1 e fyfiême to ta l, une différence du grave
à l’aigu, qui multiplioit beaucoup les fons. Car
fi les divers modes, avoient plufîeurs fons communs
, ils en avoient aufli ùe particulier« à chacun
, ou quelques - uns feulement. Ainfi dans lè
feul^genre diatonique-, l’étendue de tous les
fons admis dans les quinze modes dénombrés
par Alypius , eft de trois oétaves 8c un ton 5
& comme la différence, de chaque mode à fon
voifin étoit ' feulement d’un femi-ton ,, il eft évident
que tout cet efpace gradué de femi-ton en
femi-ton , produirait dans le diagramme général
la quantité de trente--neuf fons pratiqués dans
la mufîque ancienne. Que fi déduifant toutes les
répliques des mêmes fons, on fe renferme dans
les bornes d'une feule odtave , on la trouvera
divifee chromatiquement par douze fons différens
, comme dans la mufîque moderne j ce
qui eft de la dernière évidence par l’infpedion
des tables mifes par Méibomius a la tête de
l’ouvrage d’Alypius. Ces remarques font nécef-
faires pour relever l’erreur de ceux qui s’imaginent
, fur la foi de -quelques modernes , que
toute la mufîque ancienne n’étoit compofée que
de feize fons.
A l’égard des genres enharmonique 8c chromatique
, les tétracordes s’.y trouvoient bien d i-,
vifés , félon d’autres proportions > mais comme
ils contenoient. toujours également quatre fons
8c trois intervalles confécutifs , de même que
dans le genre diatonique , ces fons portoient
chacun dans leur genre le même nom que chaque
fon qui leur correfpondoit, portoit dans
le diatonique. Les curieux pourront confulter
les tables de chacun de ces genres , que Méibomius
a mifes à la tête de l’ouvrage d’Arifto-
x£ne } on y en trouvera fîx , une pour le genre
enharmonique, trois pour le chromatique, 8c
deux pour le diatonique , félon les dîverfes modifications
de chacun^de ces genres.
Ce fyfiême demeura à-peu-près dans cet état
jufqu’à l’onzième fîècle, ou Gui d’Arezzo y fit
des changemens confîdérables. Il ajouta dans le
bas une nouvelle corde , qu’il appella hypoproflam-
banomene, 8c dans le haut un cinquième tétracorde
qu’ il appella le tétracorde dès furaiguès. Outre
cela, il inventa , dit-on , le bémol, néceffaire
pour diftinguer le f i3 deuxième note d’un tétracorde
conjoint avec le f i du même tétracorde
difjointj c’eft-à-dire, qu’il fixa cette lignification
de la note b. que S. Grégoire, avant lu i, avoit
déjà affignée à la note fi. Car puifqu’il eft certain
que les grecs avoient, depuis long-temps,. ces
mêmes conjonctions 8c disjonctions de tétracordes
8c par conféquent des lignes pour en exprimer
chaque degré dans ces deux différens cas, il s’enfuit
que ce n’étoit pas un nouveau fon introduit
dans ce fyfiême par Gui, mais feulement un nouveau
nom qu’il donnoit à ce fon, réduifant ainfî
à un même degré ce qui en faifoit deux chez les
grecs, •