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lorfcju’elle doit fa naiflance à quelque difpofition
particulière des efprits & du fang, comme on ne
lauroit fe propofer pour la curation d’autre but,
où que de diminuer l ’aiîlux des efprits fur les
nejrfs, ou que de rompre là réfiftance de la part
du fâng dans les vaiüeaux du coeur , de Jguces
évacuations répondront parfaitement à cette double
vue j mais fur-tout la faignée & la purgation,
puisqu’elles défempliffent & font révulfion. Je crois
qu’il n’y a point de palpitation idiopathique , &
qui vienne d’une mauvaife qualité dans le fang,
où ces deux remèdes ne foient convenables, quoi
qu’en dife Sennert. J’ai fouvent été furpris que
.Willis, notre compatriote , ne faffe mention d’aucune
des deux dans fa méthode de guérir cette
maladie. Pifon, praticien heureux , recommande
ces deux remèdes, ainfi que plufieurs autres médecins.
Mais ils y mettent tant d’exceptions & de
précautions, qu’il eft fort difficile de déterminer
quand il eft convenable d’appliquer ces remèdes
ou non. Il eft certain que Galien a confeillé uni-
verfellement la faignée : il rapporte le cas remarquable
d’un homme qui , étant attaqué chaque
année au printemps d’une violente palpitation
, en fut chaque fois délivré par une faignée
faite dans le paroxyfme ; ce qui arriva trois années
de fuite : cet homme., attentif à ce qui s’étoit
paffé, en prévint le retour la quatrième année ,
en fe faifant faigner plutôt; ce qu’il pratiqua avec
fuccès plufieurs années après.
Tous les médecins conviennent de la nécefïité
de la faignée dans la pléthore j mais Salius fem-
ble avoir raifon de la prefcrire, qu’il y ait pléthore
ou non. Car fi l ’on regarde cette palpitation
comme provenant ou d’un trop grand mouvement
dans les efprits, ou d’une trop grande ra-
' réfaction ou cohéfion du fang,, laquelle produit
une réfiftance trop forte à fa fortie du coeur ; dans
tous ces cas, on peut efpérer du foulagement en
- diminuant la quantité du fang. Ainfi , dans les
palpitations fymplômatiques , qui viennent ou de
la fuppreflion des règles', ou de celle des hémorroïdes
, on voit s’évanouir cette affeétion du
coeur , dès que l ’évacuation reprend fon cours ordinaire.
Le flux hémorroïdal même , qui furvient
tout à coup à ceux qui n’y font pas fujets ,
diffipe la palpitation. Sennert a certainement raifon
d’avertir de ne jamais1' ni faigner ni purger ,
lorfqu’un amas d’eau dans le péricarde caufe
la palpitation; on ne fauroit^n obtenir que bien
peu d’efficacité, la caufe de la maladie ne pou-
. vant être attaquée par ces deux moyens. Mais que
cetté eau du péricàrde puiffe être difcutée ou ab-
forbée par l’application, qu’il propofe de faire, d’un
éleétuaire chaud , ou d’un pain chaud# , ou d’un
fachet rempli d’aromates , c’eft ce- qui eft auffi
difficile à comprendre , que la dérivation de cette
eau par les véficatoires que quelques-uns propo-
fent d’appli.auer fur le fternum , & dont l ’effet
lui paroît a lui - même inconcevable. Comme
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l’affeéiion qu’il décrit me femble incurable , f l
eft inutile d examiner fi' dans ce cas il faut avoir
recours à la faignée , ou non.
Je dois ajouter ici une remarque, favoir, que la
cure dé la palpitation idiopathique a été omife
par la plupart des auteurs de Médecine , lefquels
ont dirigé particulièrement leurs réglés de pratique
pour la curation de' la palpitation fympa-
thique, bien que certainement il y ait des palpitations
qui ne dépendent d’aucune autre maladie
précédente, ni d’aucune affection du coeur ou du
péricarde , & qui cependant peuvent être guéries
par le fecours de l ’art, comme Acîuarius nous
l ’apprend,
Acîuarius eft le premier des médecins grecs
qui ait fait mention ou décrit les purgatifs doux r
comme la caffe, la manne , le féné , les myro-
bolans ; il dit que ces deux dernières fubftances
ont été tranfportées dans fa patrie des pays étrangers
, c’eft-à-dire , de Syrie & d’Egÿpte.^ Iljparle-
du féné comme d’un fruit , par ou il entend
fans doute ce que Sérapion nomme vagina, &
Méfué follicule contenant la graine : car ni ces
deux écrivains, ni Acîuarius ne difent rien ^des
feuilles. Mais quoique celles-ci foient aujourd hui
particulièrement en ufage , on fe fert cependant
quelquefois des filiqûes } feules parties de la
plante que vraifemblablement on employoit alors
en Médecine, autant qu’on peut le recueillir de
ces auteurs.
Il ajoute , que, cette filique purge fres-efficace—
ment & la pituite & la bile ; les arabes-ne parlent
point de la première de ces propriétés. En
difant qu’on l’apporte de Syrie & d Egypte, Ac~
tuarius fe trouve d’accord avec les plus exactes
relations modernes ; car le meilleur fené eft celui
qui nous vient du levant. Quant a ce qu il dit en
particulier dé chacun de ' cés purgatifs , il avoue
que c’eft d’après les arabes , qu’i l traite de barbares
: ce font eux qui les premiers les ont introduits
pour l ’ufage médical. Comme eux il
décrit trois efpèces de myrobolans ; i l nomme
deux fubftances fous leur dénomination arabe, etn-
belliques & belliriques. Quoique ces deux , par
leur propriété , aient une grande affinité avec les
myrobolans , il les en diftingue cependant ainfi
que le font tous les arabes eux-mêmes. Nicolas
Myrephus femble être le premier, qui les ait
confondues avec les myrobolans, qu’il divife en
cinq efpèces; & cette divifion a été fuivie par la
plupart des modernes. Ce que dit Acîuarius
d’une compofition faite de toutes ces efpèces, &
nommée tryphala ou tryphera parva (car le x -
preffion triphylos , comme Gefner voudroit qu’on
lut., eft prife de trop loin) , fe rapporte parfaitement
à ce qu’on trouve d'ans Serap-ion & dans
Méfué , qu’il appelle les fages médecins barbares',
& cette compofition eft recommandée par
eux pour les mêmes affc&ions.
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A&uarius emploie un chapitre entier a parler
des firops & des juleps , dans la confe&ion del-
quels entre ordinairement le fucre; c’eft probablement
des arabes qu’il les a pris. C ’eft pourquoi
quelques-uns ont cru qu’il étoit verfé dans leur
langue. Mais de quelque manière qu’il ait eu la
connoiffance de ces remèdes imaginés par les
arabes, ce qu’i l eft important de ^ remarquer ,
c’eft qu’il ne traite d’aucune maladie dont il ne
foit parlé dans les médecins grecs; & quon ny
trouve pas un mot de ces maladies que les arabes
ont décrites les premiers, & nulle mention
de la petite vérole.
Cette maladie a pris naiffance en meme temps
que'les farrafins ; & dans toutes les contrées qu ils
ont envahies par leurs armes , la petite vérole
s’y eft montrée auffi - tôt avec fureur , & s eft
répandue au loin en Afrique , en Europe , dans
la plus grande partie de l’Afie , mais fur-tout 1 o-
rientale. Ainfi, on a raifon d’être étonne qu avant
cette époque on ne l ’ait point vu paroitre dans
l ’empire grec ; ou n’en fauroit douter , puifqu il
n’en eft point parlé par les médecins , ni par
les hiftoriens de cette nation , eux qui ont eu
l ’attention de faire mention de tous les tremble-
mens dex terre & des peftes. • # >
Voici un autre objet dont aucun médecin grec
ne parle avant Acîuarius ; je veux dire les liqueurs
diftillées : telles font le rhodojlagma &
Yintyboflagma, termes que le tradu&eur latin a
rendus par ceux-ci, Jlillatitius llquor rofarum ,
aqua quam intybus Jlillavit,_ Acîuarius les fait
entrer dans les juleps.Gefner prétend que ces liqueurs
ne font point obtenues par un procédé chimique ;
que ce ne font rien autre chofe que des firops
de ces plantes ; firops abfolument femblables au
rhodojlacîon décrit par Paul. Le Clerc , qui penfe
autrement , & adopte l ’opinion de Langius , a
démontré que le rhodojlugma d Acîuarius eft
abfolument différent du rhodojlacîon de P a u l,
compofition uniquement préparée avec le fuc de
rofes & le miel. Il paroît que le Clerc ne s eft
point trompé ; & pour en convaincre , il eft bon
de produire quelques endroits de Nicolas My-
repfus , qui elt le dernier des grecs, & qui fou-
vent copie les propres ternies a Acîuarius.
Nicolas décrit le rhodojlacîon de Paul, avec
cette feule différence qu’on peut,^ d it- il, le faire
ou avec le fucre , ou avec le miel. Puis il décrit
Yhydrorofatum de la maniéré dont il 1 eff
par Aijtius & par Paul : ce médicament ne différé
du premier que par l’addition de l’eau , aux rofes.
Il expofe enfuite la manière de compofer ce julep,
telle qu Acîuarius la donne ; ce qui indique allez
clairement qu’il a regardé la préparation de ce
dernier comme diftinéfce des deux autres. En eftet,
quiconque réfléchira fur cette compofition, recon-
nojtra aifément que .cette prefeription ou fo.rm&le
feroit très-abfurde ., s’il ne s’agiffuit pas de 1 eàù
diftillée de rofes : car autrement ce feroit prendre
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une double peine , & faire deux fois > (ans au-
cun avantage , un remède avec les mentes wgre-
(liens. ;>, ■ v-■
L e Clerc penfe a\x Acîuarius fut inftruit a 1 e-
cole des arabes, Sé qu’il a puifé chez eux que
ques notions de la Chimie ; mais cette opinion
ne femble être qu’une conjecture denuee de toute
autorité. Car bien que ce médecin ait eu connoiffance
de quelques médicamens mis par eux
en ufage ( ce qui a pu être dû à quelque commerce
exiftant par hafard alors entre les grecs
les arabes)* on n’a cependant aucune preuve qu a
ait lu ce qu’ils ont écrit fur la Médecine. Lar il
eft Doffible qu’un homme fâche quun remede
vient des Indes orientales ou occidentales , que
en eft l’ufage ou la vertu , fans etre ^ pour
cela de la théorie, & de la pratique de Médecine
établie dans ces contrées.
Quant à ce qui regarde la diflillation meme
on l ’introduiftion de la Chimie dans la Médecine,
le -C le rc en fixe l’époque au temps d A-
vicenne ; il croit que c’eft ce médecin qui le premier
fit ferait cette fcience à la préparation des
remèdes. Je ne me fuis pas propofe.de rechercher
ici quelle eft l’origine de la Chimie medict
nale : je remarquerai feulement que fi elle elt due
aux arabes (ce qui eft affez probable ) , il faut plutôt
attribuer à Rbazis l’honneur de 1 invention :
car fans parler de l ’extinSion du mercure & de
fa fublimation dont il fait mention dans ion livre
à Almanzor, il décrit auffi l’huile d oeufs, le feul
remède chimique qu? je découvre dans Avicenne.
Rhazis eft auffi le premier qui nomme loleum
ieneiiaum ou philofophorum, & qui en rapporte
au long le procédé. On fait cette huile, d it - il,
dans une retorte de verre capable de foutemr
un feu ardent; il faut qu’elle foit exaftement
lutée ( luto fapientioe , obferve 1 interprète ) ;
on augmentera infenfiblement le feu , jufqua c»
que la diflillation fourniffe une huile rouge.
T e l eft , je, crois, l ’écrivain qui fait la première
mention des remèdes chimiques : car tout
ce que l’on trouve dans les anciens grecs , appelés
chimiftes , ne regarde que la fufion ou la
tranfmutation des métaux.
Ce qui a porté le Clerc d dite qu’Avicenne
avoit le premier mis en ufage les^ remedes chimiques
, c’eft que chez lui s’en voit la première
mention d’un de ce genre : mais ce neft que duo
(eul. l’eau diftillée de rofes ; il produit deux pat-
fages où il en eft queftion. S’il avoit examina
ces endroits avec plus d’attention, il auroit vu qu il
’ ne s'agit point de diftillation. On prefcrit , d nnes
manière très-claire , de faire cuite des rofes dans
de l ’eau , comme les grecs avoient coutpme de
le pratiquer pour 1» çonfeâjion du rhQtoftac-
tum & de Y hy drorofatum. Je crois trps - exacte
lfobfervation de Gefner, qui dit, en parlant des
anciens arabes : Toutes Us fois qu’on trouve nommes